Abruf und Rang:
RTF-Version (SeitenLinien), Druckversion (Seiten)
Rang: 

Zitiert durch:


Zitiert selbst:


Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
3. Sous l'angle de la violation du principe de primauté du ...
Erwägung 3.4
Erwägung 3.4.3
Erwägung 3.6.2
Erwägung 3.6.4
Erwägung 3.6.5
Bearbeitung, zuletzt am 08.03.2023, durch: DFR-Server (automatisch)
 
17. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A. et B. contre Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte (APEA) (recours en matière civile)
 
 
5A_524/2021 du 8 mars 2022
 
 
Regeste
 
Art. 49 BV; Art. 310 Abs. 1, Art. 440 Abs. 2 und 3 und Art. 445 Abs. 1 und 2 ZGB; Entscheid über vorsorgliche Massnahmen, mit dem der Entzug des Aufenthaltsbestimmungsrechts über das Kind und dessen Fremdplatzierung angeordnet wird.
 
 
Sachverhalt
 
BGE 148 I 251 (252)A. C., née en 2017, est la fille de A. et de B., qui font ménage commun depuis la naissance de l'enfant.
B.
B.a Par décision du 6 avril 2020, l'Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte du canton du Jura (ci-après: APEA) a institué en faveur de l'enfant une curatelle au sens de l'art. 308 al. 1 CC et a nommé, en qualité de curatrice, une assistante sociale auprès du Service social régional à U.
Statuant sur recours de la mère contre la décision précitée, la Cour administrative du Tribunal cantonal de la République et Canton du Jura (ci-après: Cour administrative) a annulé la décision de l'APEA par arrêt du 4 septembre 2020 et a retourné le dossier à cette autorité pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants.
B.b Consécutivement à l'arrêt du 4 septembre 2020, l'APEA a complété son instruction.
B.c Par décision de mesures superprovisionnelles du 16 mars 2021, l'APEA a prononcé le retrait provisoire du droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant et ordonné le placement provisoire de celle-ci à I., pour une durée indéterminée et avec effet immédiat. Elle a en outre prononcé la limitation provisoire des relations personnelles entre les parents et leur enfant, le droit de visite s'exerçant sous surveillance au lieu de placement de l'enfant. Une curatelle provisoire au sens de l'art. 308 al. 1 et 2 CC a en outre été instituée, une assistante sociale étant désignée en qualité de curatrice.
B.d A la suite de la décision de mesures superprovisionnelles du 16 mars 2021, l'APEA a repris l'instruction du dossier et, le 29 mars 2021, elle a procédé à l'audition des parents.
B.e Par décision de mesures provisionnelles du 1er avril 2021, l'APEA a intégralement confirmé sa décision de mesures superprovisionnelles du 16 mars 2021.
B.f Par jugement du 25 mai 2021, la Présidente de la Cour administrative, saisie d'un recours des parents contre la décision du 1 er avril 2021, a notamment rejeté le recours dans la mesure de sa recevabilité.
C. Le Tribunal fédéral a admis, dans la mesure de sa recevabilité, le recours en matière civile formé par les parents contre le jugement du 25 mai 2021, annulé ce dernier ainsi que la décision de premièreBGE 148 I 251 (252) BGE 148 I 251 (253)instance du 1er avril 2021 et renvoyé la cause à l'APEA pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
(résumé)
 
3.3 Dans le jugement querellé, l'autorité précédente s'est elle aussi référée au Message précité en relevant que si, dans le domaine principal de la protection de l'enfant, à savoir la prescription des mesures, les décisions devaient être prises par l'ensemble des membres deBGE 148 I 251 (253) BGE 148 I 251 (254)l'autorité, il existait néanmoins une série de procédures où le pouvoir d'appréciation était moins important et dans lesquelles il était possible, pour des raisons de flexibilité et de célérité, de renoncer à l'exigence de la collégialité (Message, 6706).
 
Erwägung 3.4
 
Le principe de la force dérogatoire du droit fédéral au sens de l'art. 49 al. 1 Cst. peut être invoqué en tant que droit individuel constitutionnel (ATF 144 IV 240 consid. 2.3.2; ATF 144 I 113 consid. 6.2). Le Tribunal fédéral examine ainsi librement la conformité d'une règle de droit cantonal au droit fédéral lorsqu'il est appelé à examiner cette question au regard du grief de violation de l'art. 49 al. 1 Cst. (ATF 147 III 351 consid. 6.1.1; ATF 143 I 352 consid. 2.2; ATF 131 I 394 consid. 3.2).
Aux termes de l'art. 122 al. 2 Cst., l'organisation judiciaire et l'administration de la justice en matière de droit civil sont du ressort des cantons, sauf disposition contraire de la loi. Selon la jurisprudence, le droit fédéral doit être interprété restrictivement et se limiter à ce qui est nécessaire lorsqu'il comporte des règles qui portent atteinte à la compétence cantonale en matière d'organisation judiciaire au sens de l'art. 122 al. 2 Cst. (ATF 147 III 351 consid. 6.1.2; ATF 141 II 280 consid. 7.2).
BGE 148 I 251 (254)
 
BGE 148 I 251 (255)Erwägung 3.4.3
 
3.4.3.1 Selon l'art. 440 CC, l'autorité de protection de l'adulte est une autorité interdisciplinaire (al. 1, 1re phrase), désignée par les cantons (al. 1, 2e phrase). Elle prend ses décisions en siégeant à trois membres au moins (al. 2, 1re phrase), les cantons pouvant toutefois prévoir des exceptions pour des affaires déterminées (al. 2, 2e phrase). En vertu de l'art. 440 al. 3 CC, l'autorité de protection de l'adulte fait également office d'autorité de protection de l'enfant.
3.4.3.2 Dans le canton du Jura, l'art. 11 al. 1 LOPEA reprend le principe de l'art. 440 al. 2, 1re phrase, CC, en prévoyant que l'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte prend ses décisions de manière collégiale, dans une composition de trois membres comprenant son président ou un vice-président.
L'art. 12 al. 1 LOPEA concrétise quant à lui l'art. 440 al. 2, 2e phrase, CC en réservant, à ses ch. 1 à 34, des exceptions au principe de l'autorité collégiale, dans des cas concernant tant la protection de l'adulte que celle de l'enfant. En particulier, l'art. 12 al. 1 ch. 1 LOPEA prévoit que, sous réserve de dispositions contraires du droit fédéral, le président de l'autorité de protection ou, en cas d'empêchement de ce dernier, un vice-président, peut statuer ou agir seul dans les cas de mesures provisionnelles et superprovisionnelles (art. 445 al. 1 et 2 CC) et toutes autres mesures urgentes lorsqu'il n'est pas possible de réunir à temps l'autorité collégiale.
3.4.5 L'art. 310 al. 1 CC dispose que, lorsqu'elle ne peut éviter autrement que le développement de l'enfant ne soit compromis, l'autoritéBGE 148 I 251 (255) BGE 148 I 251 (256)de protection de l'enfant retire l'enfant aux père et mère ou aux tiers chez qui il se trouve et le place de façon appropriée.
Selon la jurisprudence, l'autorité qui ordonne une mesure relevant de l'art. 310 CC doit procéder à une pesée d'intérêts et, pour ce faire, elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation (art. 4 CC; ATF 142 III 545 consid. 2.3; arrêt 5A_131/2021 du 10 septembre 2021 consid. 4.2.1). Le retrait et le placement prononcés en vertu de l'art. 310 CC constituent des atteintes graves au droit au respect de la vie familiale, garanti par les art. 13 Cst. et 8 par. 1 CEDH (arrêt 5A_915/ 2019 du 18 mars 2020 consid. 6.2.1).
 
BGE 148 I 251 (257)Erwägung 3.6.2
 
3.6.2.1 Il ressort des travaux préparatoires relatifs notamment à l'art. 440 CC qu'en 1993, l'Office fédéral de la justice a désigné un groupe d'experts en vue de la préparation de la révision du droit suisse de la tutelle. Dans leur rapport, rendu en 1995, les experts prévoyaient notamment que, dans la mesure nécessaire à la mise en oeuvre du droit matériel, la législation fédérale devait contenir des dispositions relatives à l'organisation ainsi qu'à la procédure (Rapport du groupe d'experts mandaté par l'Office fédéral de la justice en vue de la révision du droit de la tutelle, juillet 1995, version abrégée en langue française du rapport principal rédigé en langue allemande, p. 1 et 32). S'agissant de l'organisation de l'autorité, les experts insistaient sur la nécessité d'une interdisciplinarité de l'autorité de protection, qui devrait, selon eux, être une autorité judiciaire. Sur la question de la compétence, ils préconisaient que les affaires urgentes et les décisions de portée juridique mineure puissent être du ressort du seul président siégeant en qualité de juge unique (ibid., p. 41 ss).
Un avant-projet relatif à la révision du droit de la tutelle, élaboré en 1998, prévoyait notamment que l'"autorité de curatelle" était une autorité judiciaire spécialisée constituée au niveau communal ou régional, comprenant au moins une personne disposant d'une formation juridique, ainsi que des professionnels du secteur social et de la santé (Rapport explicatif du groupe d'experts avec avant-projet relatif à une révision du code civil [protection des adultes], juin 1998, p. 9).
L'art. 443 de l'avant-projet de juin 2003 de code civil suisse concernant la protection de l'adulte, le droit des personnes et le droit de la filiation (ci-après: AP-CC) - article qui correspond, du point de vue systématique, à l'actuel art. 440 CC - disposait que l'autorité de protection de l'adulte, qui était également l'autorité de protection de l'enfant, était un tribunal interdisciplinaire (al. 1 et 2). Il prévoyait en outre que le for et la procédure devant l'autorité de protection seraient régis par une loi fédérale réglant la procédure devant les autorités de protection de l'enfant et de l'adulte (al. 3), édictée sur la base de la compétence attribuée à la Confédération dans le domaine du droit de la procédure civile (Rapport de la commission d'experts relatif à la révision du code civil [Protection de l'adulte, droit des personneset droit de la filiation], juin 2003, p. 4). L'art. 1 al. 1 de l'avant-projet de loi en question (avant-projet de loi fédérale réglant la procédure devant les autorités de protection de l'enfant et de l'adulte, ci-après: AP-LPPEA), qui se référait à l'art. 443 AP-CC, disposait que la loiBGE 148 I 251 (257) BGE 148 I 251 (258)concernée réglait la procédure dans les affaires qui, en vertu du droit fédéral, relevaient de la compétence de l'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte. Selon l'art. 11 AP-LPPEA, la participation de trois membres au minimum était requise pour que l'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte puisse statuer valablement comme autorité collégiale. L'art. 12 ch. 1 à 18AP-LPPEA prévoyait quant à lui une liste d'actes relevant de la compétence d'un membre unique de l'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte, sous réserve que le canton ne prévoie pas dans ces cas la compétence de l'autorité collégiale. Le rapport relatif à l'avant-projet précisait à cet égard que, dans les domaines centraux de la protection de l'enfance et de l'adulte, il était indispensable que l'autorité prenne ses décisions dans le respect du principe de collégialité, car elle était appelée à ordonner des mesures lourdes de conséquences, telles que des mises sous tutelle et des placements à des fins d'assistance. Dans le domaine de la protection de l'enfant, elle devait également juger, entre autres, du retrait de l'autorité parentale ou de la garde de l'enfant. Toujours selon le rapport, ces procédures impliquaient en règle générale une atteinte à la liberté personnelle des personnes concernées ou avaient d'autres conséquences graves sur leur situation personnelle ou matérielle et, souvent, créaient un précédent, ayant de ce fait une influence considérable sur les décisions ultérieures. Outre ces procédures importantes, il existait en revanche toute une série de procédures plus simples qui, pour des raisons de souplesse et de rapidité de la procédure, ne devaient pas forcément être traitées par un tribunal interdisciplinaire constitué en autorité collégiale. Le rapport précisait par ailleurs que la liste exhaustive d'exceptions admises par l'art. 12 AP-LPPEA au principe de la compétence de l'autorité collégiale concernait principalement des procédures de nature non contentieuse ou ayant de nombreux points communs avec les causes qui, dans le domaine du droit civil, relevaient de la procédure sommaire, par exemple parce qu'elles étaient urgentes (Rapport et avant-projet de loi fédérale réglant la procédure devant les autorités de protection de l'enfant et de l'adulte rédigés par Daniel Steck, juin 2003, p. 13). Finalement, l'art. 26 AP-LPPEA prévoyait que, en cas d'urgence, les mesures provisoires pouvaient être ordonnées par le président de l'autorité ou par le membre qui avait été chargé de conduire la procédure (al. 2) et que, en cas d'extrême urgence, des mesures provisoires pouvaient être ordonnées sans que les parties soient entendues (al. 3, 1re phrase). Selon le rapport, l'urgence était réalisée dans tousBGE 148 I 251 (258) BGE 148 I 251 (259)les cas où l'autorité collégiale ne serait pas en mesure de prendre une décision à temps (p. 20).
3.6.2.2 Dans le cadre de la procédure de consultation, l'organisation de la protection de l'adulte et de l'enfant a été très controversée. Beaucoup de participants ont contesté que seule une autorité judiciaire ("tribunal") puisse garantir la professionnalisation et estimaient qu'une autorité administrative était également à même de le faire. A cet égard, certains participants étaient par ailleurs d'avis que la réglementation empiétait trop sur la compétence des cantons. En revanche, la professionnalisation et l'interdisciplinarité des autorités de protection ont été largement saluées, en particulier au vu de la complexité des questions à résoudre et dans l'optique de la mise en oeuvre de nouvelles mesures de protection (Message, 6705 s.; Résumé du résultat de la procédure de consultation concernant l'AP-CC, octobre 2004, p. 11 ad art. 443). Le principe de la participation de trois membres, prévu à l'art. 12 AP-LPPEA, a quant à lui été approuvé. La pertinence des exceptions prévues a toutefois été en partie mise en doute, au motif qu'il existait encore d'autres décisions - telles les décisions de routine ne touchant pas la personnalité de leurs destinataires - pouvant relever de la compétence d'un seul membre de l'autorité (Résumé de la procédure de consultation relative à l'AP-LPPEA, octobre 2004, p. 4 ad art. 12). En ce qui concernait l'art. 26 al. 2 AP-LPPEA, deux cantons estimaient que cette disposition était trop restrictive en ce qu'elle soumettait la compétence d'un membre unique pour le prononcé de mesures provisoires à un cas d'urgence uniquement (Classement des réponses à la procédure de consultation, AP-LPPEA, octobre 2004, p. 70).
3.6.2.3 A l'issue de la procédure de consultation, et contrairement à l'AP-CC - qui voulait que l'autorité de protection de l'adulte soit un tribunal interdisciplinaire -, le projet de code civil suisse concernant la protection de l'adulte, le droit des personnes et le droit de la filiation (FF 2006 6767; ci-après: P-CC) prévoyait que l'autorité soit un organe administratif ou une autorité judiciaire, solution qui garantissait autant que possible la liberté des cantons de s'organiser eux-mêmes (Message, 6638 et 6705 s.). Vu le changement intervenu, il était proposé de renoncer à la LPPEA - telle qu'elle avait été envoyée en procédure de consultation - et d'inscrire les principes fondamentaux de la procédure dans le code civil (art. 443 ss P-CC; Message, 6638). Dans le P-CC, une partie "Procédure" (art. 443-450g P-CC) a ainsi été ajoutée, les art. 443 à 450e posant des principesBGE 148 I 251 (259) BGE 148 I 251 (260)procéduraux et l'art. 450f prévoyant que, en outre, les dispositions de la procédure civile s'appliqueraient par analogie si les cantons n'en disposaient pas autrement. Comme auparavant, les cantons seraient ainsi libres de régler la procédure dans leur code de procédure administrative ou civile ou dans d'autres lois (Message, 6720).
3.6.2.4 L'art. 440 P-CC - qui correspond à l'actuel art. 440 CC - disposait que l'autorité de protection de l'adulte, qui faisait également office d'autorité de protection de l'enfant (al. 3), était une autorité disciplinaire désignée par les cantons (al. 1) et prenant ses décisions en siégeant à trois membres au moins (al. 2, 1re phrase). Des exceptions pouvaient toutefois être prévues par les cantons pour des affaires déterminées (al. 2, 2e phrase).
S'agissant de la liberté des cantons en matière d'organisation de l'autorité, le Message rappelait que, outre le choix d'une autorité administrative ou judiciaire, il appartenait aux cantons de décider si l'autorité devait être organisée au niveau de la commune, du district,de l'arrondissement ou de la région, de choisir si les membres de l'autorité devaient être des professionnels ou des non-professionnels, ou encore de fixer le nombre des membres composant l'autorité. Il relevait que, afin de garantir une certaine interdisciplinarité et en considération notamment de la portée importante des mesures prises, le droit fédéral prévoyait uniquement que l'autorité devait, en règle générale, siéger à trois membres au moins et que les cantons pouvaient fixer un plus grand nombre de membres et prévoir la composition en fonction du cas à juger. L'autorité devait faire preuve de compétence en particulier dans le domaine principal de la protection de l'enfant et de l'adulte, à savoir la prescription des mesures, et, dans cette matière, les décisions devaient être prises par l'ensemble des membres de l'autorité. Il existait néanmoins une série de procédures où le pouvoir d'appréciation était moins important; dans ces cas, il était possible, pour des raisons de flexibilité et de célérité, de renoncer à l'exigence de la collégialité, raison pour laquelle les cantons pouvaient prévoir des exceptions pour des affaires déterminées et les soumettre à la compétence d'un seul membre de l'autorité. Contrairement à l'art. 12 AP-LPPEA, le P-CC laissait ainsi aux cantons la compétence en matière d'organisation de l'autorité et renonçait à déterminer les cas relevant de la compétence d'un seul membre de l'autorité (Message, 6706 ad art. 440). Le Message soulignait néanmoins qu'il était interdit de faire échouer, par le biais de BGE 148 I 251 (260) BGE 148 I 251 (261)l'art. 440 al. 2, 2e phrase, P-CC, le but de la révision exprimé par l'art. 440 al. 1 P-CC, à savoir le caractère interdisciplinaire de l'autorité de protection. Aussi, les décisions limitant l'exercice des droits civils de la personne concernée ou, d'une autre manière, portant gravement atteinte à sa liberté personnelle relevaient en principe de la compétence de l'autorité collégiale, à moins qu'il ne s'agisse de mesures provisionnelles urgentes (art. 445 al. 2 P-CC). Par ailleurs, il était permis de conférer la compétence décisionnelle à un seul membre de l'autorité pour des raisons de flexibilité et de gain de temps, par exemple pour des affaires ne nécessitant pas un grand pouvoir d'appréciation et présentant beaucoup de similitude avec les décisions rendues selon la procédure sommaire en matière de droit civil (Message, 6710 s. ad art. 446).
3.6.2.5 L'art. 26 AP-LPPEA a été partiellement repris à l'art. 445 P-CC relatif aux mesures provisionnelles. Cela étant, alors que la première disposition réglait expressément la compétence du ou des membres de l'autorité de protection s'agissant des mesures provisoires, la seconde se limitait à mentionner la compétence de "l'autorité de protection de l'adulte" pour le prononcé de mesures tant provisionnelles (al. 1) que superprovisionnelles (al. 2). Selon le Message, il appartenait au droit cantonal de décider si le président ou un membre de l'autorité aurait la compétence d'ordonner seul des mesures superprovisionnelles (Message, 6709 ad art. 445).
3.6.2.6 Au cours des débats devant les Chambres fédérales, le Conseil des Etats a adopté sans réserve les art. 440 et 445 P-CC, de même que l'art. 450f P-CC (BO 2007 E 839-841, séance du 27 septembre 2007). Devant le Conseil national, une minorité, craignant une perte d'autonomie organisationnelle cantonale et communale, avait proposé de modifier le projet d'art. 440 al. 1 et 2 P-CC en ce sens qu'il se contenterait de prévoir, à son al. 1, que l'organisation de l'autorité de protection de l'adulte était réglée par le droit cantonal. La proposition a toutefois été rejetée par 120 voix contre 54 (BO 2008 N 1535-1538, séance du 3 octobre 2008). Les art. 445 et 450f P-CC ont été adoptés sans modifications (ibid., 1539-1541).
3.6.2.7 Les art. 440, 445 et 450f CC - correspondant aux art. 440, 445 et 450f P-CC - sont entrés en vigueur le 1er janvier 2013 (RO 2011 725, 765) et n'ont pas été modifiés depuis lors.
3.6.2.8 Il ressort de l'interprétation historique qu'une certaine liberté a été laissée aux cantons pour définir des exceptions à uneBGE 148 I 251 (261) BGE 148 I 251 (262)composition collégiale de l'autorité décisionnelle au sens de l'art. 440 al. 2 CC. Cela étant, le Message n'a pas pour autant renoncé à définir les contours des cas concernés et on ne saurait tirer de l'absence de liste exhaustive d'exceptions la volonté de donner un blanc-seing aux cantons. Interdiction leur est ainsi faite de contourner, par le biais de l'art. 440 al. 2 CC, le principe de collégialité - intrinsèquement lié à celui d'interdisciplinarité - dans certains types d'affaires où il devrait prévaloir au regard notamment de l'importance du cas concerné.
S'agissant en particulier du prononcé de mesures provisionnelles, il apparaît que même si, aux prémices de la révision, la compétence d'un membre unique de l'autorité de protection semblait acquise (cf. supra consid. 3.6.2.1), certaines limitations ont par la suite été apportées, en excluant notamment une compétence individuelle pour des mesures impliquant un pouvoir d'appréciation important et pour des décisions limitant l'exercice des droits civils de la personne concernée ou, d'une autre manière, portant gravement atteinte à sa liberté personnelle. Pour de telles décisions, la compétence d'un membre unique de l'autorité peut ainsi tout au plus être admise s'agissant de mesures superprovisionnelles au sens de l'art. 445 al. 2 CC (cf. supra consid. 3.6.2.4 et 3.6.2.5).
3.6.3.1 De manière générale, la doctrine se réfère abondamment au Message en tant qu'il prévoit une retenue dans l'admission de la compétence d'un membre unique de l'autorité (cf. notamment CHRISTOPH HÄFELI, Kindes- und Erwachsenenschutzrecht, 3e éd. 2021, p. 304 n. 776; MATHIAS MAUCHLE, Das Rechtsverhältnis zwischen dem Beistand und der Erwachsenenschutzbehörde, Recht in privaten und öffentlichen Unternehmen [RiU] Band/Nr. 27, 2019, p. 31 ss, 36 n.63 et nbp 156; DIANA WIDER, in ZGB, Kurzkommentar, 2e éd. 2018, n° 10a ad art. 440 CC; PHILIPPE MEIER, Droit de la protection de l'adulte, Articles 360-456 CC, 2016, p. 59 n. 124; FRANÇOIS BOHNET, Autorités et procédures en matière de protection de l'adulte - Droit fédéral et droit cantonal, in Le nouveau droit de la protection de l'adulte, 2012, p. 33 ss, p. 41 n. 10). De nombreux auteurs se réfèrent par ailleurs au Message pour soutenir que les décisions prises dans le cadre de la sphère fondamentale de la protection de l'adulte et de l'enfant et portant une atteinte grave à la liberté personnelle ou à laBGE 148 I 251 (262) BGE 148 I 251 (263)personnalité devraient toujours être prises par l'autorité collégiale, à moins qu'il ne s'agisse de mesures superprovisionnelles au sens de l'art. 445 al. 2 CC (PATRICK FASSBIND, in ZGB, Kommentar, Schweizerisches Zivilgesetzbuch, 4e éd. 2021, n° 4 ad art. 440 CC et n° 1 ad art. 445 CC; MAUCHLE, op. cit., p. 36 n. 63; URS VOGEL, in Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch, vol. I, 6e éd. 2018, n° 16 ad art. 440/441 CC; le même, in Handkommentar zum Schweizer Privatrecht, 3e éd. 2016, n° 9 art. 440 CC; MEIER, op. cit., p. 99 n. 198 et nbp 256; MURPHY/STECK, in Fachhandbuch Kindes- und Erwachsenenschutzrecht, 2016, p. 699 n. 18.7; DIANA WIDER, in Erwachsenenschutzrecht, Einführung und Kommentar zu Art. 360 ff. ZGB und VBVV [ci-après: Erwachsenenschutzrecht], 2e éd. 2015, n° 10 ad art. 440 CC et n° 9 ad art. 445 CC; STEINAUER/FOUNTOULAKIS, Droit des personnes physiques et de la protection de l'adulte, 2014, p. 471 n. 1064 et nbp 29).
3.6.3.2 Dans ses recommandations, la Conférence des cantons en matière de protection des mineurs et des adultes (COPMA) relève que l'on attend d'une autorité interdisciplinaire qu'elle dispose surtout de compétences professionnelles dans le domaine central de la protection de l'enfant et de l'adulte, pour lequel la compétence collégiale est indispensable à la prise de décision. Elle précise en outre que, dans le domaine de la protection de l'enfant, ces procédures concernent notamment le retrait de l'autorité parentale ou de la garde parentale. La COPMA souligne encore que ces procédures, qui impliquent régulièrement une intrusion dans la liberté personnelle des personnes concernées ou, d'une autre manière, une atteinte d'ordre personnel ou économique de grande portée, peuvent aussi constituer un précédent considérable affectant les décisions subséquentes. Toujours selon les recommandations précitées, la procédure concernant l'institution, la modification et la suppression de mesures, notamment celles qui affectent la capacité et la liberté d'agir ou qui restreignent l'autorité parentale, doivent généralement être conduites par le collège décisionnel au complet (Recommandations de la Conférence des autorités cantonales de tutelle [CAT, actuellement COPMA], L'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte, une autorité interdisciplinaire [analyse et propositions de modèles], RDT 2/2008 p. 129 ss, p. 150 s., ci-après: Recommandations COPMA). Dans une annexe aux recommandations précitées, la COPMA se prononce sur les tâches que l'autorité doit assumer et sur les compétences dont elle doit nécessairement disposer pour s'en acquitter adéquatement.BGE 148 I 251 (263) BGE 148 I 251 (264)Elle qualifie de "compétences centrales" les compétences dont le collège décisionnel doit disposer "en propre", à savoir qu'un membre au moins du collège doit disposer de la formation et de l'expérience correspondantes. Pour l'institution de mesures provisionnelles et superprovisionnelles (art. 445 CC), la COPMA prévoit des compétences centrales en matière de droit et de travail social (Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte: tâches et compétences requises, Annexe 2 aux Recommandations COPMA, p. 185 et 191).
 
Erwägung 3.6.4
 
3.6.4.1 Lorsqu'il s'agit d'interpréter de nouvelles dispositions, les travaux préparatoires constituent un élément de compréhension important. Ils prennent dans tous les cas une place particulière lorsque les circonstances ne se sont pas modifiées et que les conceptions juridiques n'ont pas évolué (ATF 146 II 201 consid. 4.1; ATF 145 III 56 consid. 5.3.1; ATF 141 III 481 consid. 3.2.3; ATF 140 III 206 consid. 3.5.4 et les références). Dans une telle situation, l'interprétation historique se confond avec l'interprétation téléologique (ATF 144 III 29 consid. 4.4.3.8 et la référence).
Compte tenu du caractère récent de la révision du droit de la protection de l'adulte et de l'enfant et dès lors que l'art. 440 al. 2 CC est une concrétisation du principe de l'interdisciplinarité, dont la réalisation a été l'un des buts principaux de la révision, les interprétations historique et téléologique se recoupent en l'espèce dans une large mesure. On peut en outre se référer à cet égard aux recommandations de la COPMA, qui relèvent qu'une grande retenue est de mise quant à l'attribution d'une compétence individuelle, dès lors que le caractère structurel de l'interdisciplinarité signifie justement que l'autorité prend ses décisions en intégrant des connaissances issues de plusieurs disciplines, ce qui n'est précisément pas possible si la compétence est individuelle (Recommandations COPMA, p. 151).
3.6.4.2 Au 1er janvier 2022, treize cantons avaient prévu une compétence individuelle pour ordonner des mesures provisionnelles au sens de l'art. 445 al. 1 CC (AG; AI; BL; BS; BE; FR; GE; JU; LU; NE; SG; VD; ZG), alors que onze cantons avaient pour ce faire prévu une compétence collégiale à trois membres (AR; GL; GR; NW; OW; SH; SO; SZ; TI; VS; ZH; cf. ég. DIANA WIDER, Erwachsenenschutzrecht, op. cit., annexe ad art. 440 CC p. 423). Les cantons de Thurgovie et Uri retiennent quant à eux des solutions hybrides en permettant à un membre unique de l'autorité de prononcer desBGE 148 I 251 (264) BGE 148 I 251 (265)mesures provisionnelles (TG: § 25 Abs. 2 der Verordnung des Obergerichts vom 22. Oktober 2012 zum Kindes- und Erwachsenenschutz[KESV; RB 211.24];UR: Art. 5 Abs. 1 Ziff. 15 des Reglements vom 29. Mai 2018 über die Einführung des Kindes- und Erwachsenenschutzrechts [RB 9.2117]), pour autant toutefois qu'une décision collégiale soit rendue dans les cinq jours suivant la première décision (UR: Art. 5 Abs. 3 des Gesetzes vom 23. Oktober 2011 über die Einführung des Kindes- und Erwachsenenschutzrechts [RB 9.2113]) si celle-ci a pour effet de restreindre considérablement la situation juridique de la personne concernée par la mesure (TG: § 25 Abs. 3 KESV).
3.6.4.3 Dans le canton du Jura, l'art. 12 al. 1 ch. 1 LOPEA prévoyait, selon sa lettre initiale au 1er janvier 2013 et jusqu'à l'entrée en vigueur de sa modification le 1er janvier 2017, que, sous réserve de dispositions contraires du droit fédéral, le président de l'autorité de protection ou, en cas d'empêchement de ce dernier, un vice-président, pouvait statuer seul dans les cas de mesures urgentes lorsqu'il n'était pas possible de réunir à temps l'autorité collégiale. Le Gouvernement jurassien a expliqué qu'une telle compétence pour les mesures urgentes était motivée par un souci de célérité, d'efficacité et d'économie de procédure (Message du Gouvernement jurassien sur la LOPEA, in Journal des débats du Parlement de la République et Canton du Jura [ci-après: Journal des débats], N° 5 - 2012, séancedu 25 avril 2012, p. 192 ss, 194 et 199). La modification de l'art. 12 al. 1 ch. 1 LOPEA, au 1er janvier 2017, est intervenue uniquement afin de préciser que les mesures provisionnelles et superprovisionnelles sont du ressort du président de l'autorité seul (Message du Gouvernement jurassien sur le projet de révision partielle de la LOPEA, in Journal des débats, N° 13 - 2016, séance du 28 septembre 2016, p. 475 ss, 478). Les autres cantons ayant prévu la compétence d'un membre unique de l'autorité de protection pour rendre des mesures provisionnelles l'ont souvent fait pour des motifs identiques à ceux exposés par le Gouvernement jurassien (cf. notamment: FR: Message n° 12 du 23 avril 2012 du Conseil d'Etat au Grand Conseil accompagnant le projet de loi concernant la protection de l'enfant et de l'adulte [LPEA], p. 6 ad art. 4 et 5; NE: Rapportdu 15 août 2012 du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'appui d'un projet de loi concernant les autorités de protection de l'enfant et de l'adulte [LAPEA], p. 17 ad art. 10-14; SG:Botschaft und Entwurf der Regierung vom 18. Oktober 2011 über die EinführungsgesetzBGE 148 I 251 (265) BGE 148 I 251 (266)zur Bundesgesetzgebung über das Kindes- und Erwachsenenschutzrecht [EG-KES],p. 36 et 55 ad art. 23 [actuellement art. 20 EG-KES; compétence individuelle confirmée dans un arrêt du Kantonsgericht St. Gallen du 11 novembre 2013, KES.2013.15, GVP 2013 Nr. 32, p. 158-162, 160-162]; VD: Exposé des motifs relatif à la révision du code civil suisse [Protection de l'adulte, droit des personnes et droit de la filiation] et projet de loi vaudoise d'application du droit fédéral de la protection de l'adulte et de l'enfant [LVPAE],n° 441, novembre 2011, p. 98 ad art. 5). Les cantons prévoyant une compétence collégiale pour le prononcé de mesures provisionnelles au sens de l'art. 445 al. 1 CC ne motivent souvent pas cette compétence, dès lors qu'elle correspond à la règle générale de l'art. 440 al. 2, 1re phrase, CC. Le canton d'Appenzell Rhodes-Extérieures, qui prévoyait jusqu'au 31 décembre 2018 la compétence d'un membre unique pour le prononcé de mesures au sens de l'art. 445 al. 1 et 2 CC (art. 46 aEG zum ZGB [Gesetz vom 27. April 1969 über dieEinführung des Schweizerischen Zivilgesetzbuches; bGS 211.1]), adepuis lors restreint cette compétence aux seules mesures superprovisionnelles de l'art. 445 al. 2 CC, au motif que les mesures provisionnelles de l'art. 445 al. 1 CC entraînent souvent des conséquences importantes et qu'elles nécessitent par conséquent un échange interdisciplinaire au sein de l'autorité (EG zum ZGB, Teilrevision [Kindes-und Erwachsenenschutzrecht], Erläuternder Bericht zum Vernehmlassungsentwurf vom 15. August 2017, p. 5 ad art. 45-46).
3.6.4.4 S'agissant des motifs généralement invoqués par les cantons qui consacrent une compétence individuelle, il faut retenir que, s'ils ne sont certes pas dénués de pertinence, ils ne sauraient toutefois occulter le fait que, même lorsqu'elle est prononcée à titre provisionnel, une mesure prise dans le domaine central de la protection de l'enfant a généralement de lourdes répercussions pour les personnes concernées. Par ailleurs, une mesure provisionnelle peut subsister sur une longue durée avant qu'une décision sur le fond soit rendue et qu'un examen interdisciplinaire de la cause puisse intervenir. A cela s'ajoute qu'une décision prise à titre provisionnel crée souvent un précédent et peut de ce fait avoir une influence considérable sur les décisions rendues ultérieurement. Au demeurant, en cas d'urgence impérieuse, des mesures superprovisionnelles peuvent être rendues par un membre unique de l'autorité (art. 445 al. 2 CC), étant relevé que, selon la jurisprudence, lorsqu'une décision de mesures superprovisionnelles causant une atteinte grave aux droits de laBGE 148 I 251 (266) BGE 148 I 251 (267)personnalité est rendue en matière de protection de l'adulte, une décision de mesures provisionnelles doit être rendue sans délai (ATF 140 III 289 consid. 2.6.1).
 
Erwägung 3.6.5
 
3.6.5.1 Sous l'angle systématique, la protection de l'enfant (art. 307-317 CC) dispose notamment d'une partie "Procédure" (art. 314 à 314e CC), dans laquelle, comme on l'a vu, l'art. 314 al. 1 CC prévoit que les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie. Elle contient également une partie "For et compétence" (art. 315 à 315b CC), qui reprend en substance les art. 315 à 315b aCC. Quant au droit de protection de l'adulte, il comprend notamment un chapitre "Des autorités et de la compétence à raison du lieu" (art. 440 à 442 CC), dont fait partie l'art. 440 CC ("Autorité de protection de l'adulte"), qui s'applique également à la protection de l'enfant compte tenu de l'art. 440 al. 3 CC. L'art. 442 CC règle la "Compétence à raison du lieu" et les art. 443 ss CC la "Procédure".
Il ressort de l'art. 315 al. 1 CC que, de manière générale, les mesures de protection de l'enfant sont ordonnées par l'autorité de protection du domicile de l'enfant. Dans une procédure matrimoniale, l'art. 315a CC prévoit toutefois la compétence du juge chargé de régler les relations des père et mère avec l'enfant selon les dispositions régissant le divorce ou la protection de l'union conjugale pour prendre les mesures nécessaires à la protection de l'enfant (al. 1 et 2) et la compétence de l'autorité de protection pour poursuivre une procédure de protection de l'enfant introduite avant la procédure judiciaire (al. 3 ch. 1), ainsi que pour prendre les mesures immédiatement nécessaires à la protection de l'enfant lorsqu'il est probable que le juge ne pourra pas les prendre à temps (al. 3 ch. 2). En présence d'enfants de parents mariés, le droit de la protection de l'enfant présente ainsi la particularité d'une répartition de compétences entre, d'une part, le juge chargé de régler les relations des père et mère avec l'enfant selon les dispositions régissant le divorce ou la protection de l'union conjugale et, d'autre part, l'autorité de protection de l'enfant. Cette dernière est ainsi, en principe, l'autorité compétente pour régler les questions relatives aux enfants ou les mesures de protection de l'enfant (cf. art. 315 CC), pour autant qu'un tribunal ne soit pas déjà saisi des questions correspondantes, notamment dans le cadre d'une procédure de protection de l'union conjugale ou de divorce (cf. art. 133, 176 al. 3, 298 et 315a s. CC;BGE 148 I 251 (267) BGE 148 I 251 (268)ATF 145 III 436 consid. 4; Message du 16 novembre 2011 concernant une modification du CC [autorité parentale], FF 2011 8315, 8332; arrêt 5A_ 393/2018 du 21 août 2018 consid. 2.2.2). A noter encore que, dans le cadre de la révision du droit de la protection de l'adulte et de la filiation, l'art. 315a CC n'a pas fait l'objet de discussions spécifiques. Seule une modification rédactionnelle est ainsi intervenue, l'art. 315a CC ne mentionnant plus les "autorités de tutelle" mais l'"autorité de protection de l'enfant" (Message, 6733 ad art. 315a P-CC).
La compétence matérielle du juge matrimonial en matière de protection de l'enfant de parents mariés se justifie du point de vue de l'unification matérielle et de l'économie de procédure (ATF 125 III 401 consid. 2b/bb; Message du 15 novembre 1995 concernant la révision du code civil suisse [état civil, conclusion du mariage, divorce, droit de la filiation, dette alimentaire, asiles de famille, tutelle et courtage matrimonial], FF 1996 I 1, 127; Message du 5 juin 1974 concernant la modification du code civil suisse [Filiation], FF 1974 II 1, 88). Compte tenu de l'art. 122 al. 2 Cst. (cf. ég. art. 3 et 4 CPC; Message CPC, FF 2006 6841, 6875 s.), et au vu de l'absence de disposition contraire du droit fédéral, les cantons peuvent prévoir la compétence d'un juge unique pour rendre des mesures protectrices de l'union conjugale ou des mesures provisionnelles dans le cadre d'une procédure de divorce. Il s'ensuit que, sur la base de l'art. 315a CC, un juge unique peut disposer seul de la compétence de rendre toute mesure de protection de l'enfant à titre superprovisionnel et provisionnel, y compris de prononcer le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant et le placement de celui-ci auprès de tiers. L'exigence d'interdisciplinarité n'est dès lors pas prévue pour la procédure de protection de l'enfant dans le cadre de la protection de l'union conjugale et de la procédure de mesures provisionnelles de divorce (PETER DÖRFLINGER, Interdisziplinäre Zusammenarbeit - Wegmarken in einer weiten Landschaft, FamPra.ch 1/2015 p. 98, 114), sous réserve de l'éventuelle mise en oeuvre d'expertises ou d'enquêtes sociales conduites par des tiers, lesquelles ne relèvent toutefois pas du principe de collégialité s'agissant des mesures prononcées à leur issue.
3.6.5.2 En l'espèce, si la compétence collégiale de l'autorité de protection de l'enfant devait être exigée pour prononcer le retrait provisionnel du droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant et le placement de celui-ci auprès de tiers lorsque le juge matrimonial n'est pas compétent - avant tout dans le cas d'un enfant de parentsBGE 148 I 251 (268) BGE 148 I 251 (269)non mariés -, une telle mesure pourrait, dans le même temps, être rendue par un juge unique dans le cadre d'une procédure matrimoniale, ce qui engendrerait une différence de traitement, principalement liée à la situation maritale des parents. Cela étant, si une compétence individuelle devait prévaloir pour l'autorité de protection de l'enfant, elle n'empêcherait pas non plus qu'une compétence collégiale soit prévue par certains cantons en matière matrimoniale. Ainsi, la répartition de compétences opérée par la loi entre le juge matrimonial (art. 315a al. 1 et 2 CC) et l'autorité de protection de l'enfant (art. 315, 315a al. 3 et 440 CC) ne permet de toute manière pas d'éviter une différence de traitement s'agissant des compétences prévues pour le prononcé provisionnel du retrait de déterminer le lieu de résidence de l'enfant et le placement de celui-ci (cf. notamment à cet égard HÄFELI, op. cit., p. 302 n. 774, qui salue la création, dans le canton d'Argovie, d'un tribunal de la famille permettant une compétence unique pour toutes les questions de droit de la famille, y compris la protection de l'enfant et de l'adulte; cf. ég. le même qui, dans la perspective de l'entrée en vigueur du nouveau droit de la protection de l'enfant et de l'adulte, plaidait déjà en 2010 en faveur de la mise en place de tels tribunaux, composés de manière interdisciplinaire[Familiengerichte in der Schweiz - eine ungeliebte Institution mit Zukunft, FamPra.ch 1/2010 p. 34]).
Il s'ensuit que, sous l'angle de l'interprétation systématique, la relation avec l'art. 315a al. 1 et 2 CC ne saurait être déterminante pour répondre à la question en l'espèce litigieuse.
En effet, le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant et le placement de celui-ci s'inscrivent dans le domaine central du droit de la protection de l'enfant. Ainsi, même prononcées àBGE 148 I 251 (269) BGE 148 I 251 (270)titre provisionnel, de telles mesures portent généralement une atteinte grave à des droits fondamentaux de l'enfant, singulièrement au respect de sa vie familiale, avec effet également pour les parents voire pour des tiers, en sorte que l'examen de ces questions par une autorité collégiale s'impose. Dans ces circonstances, et dans la mesure également où le prononcé de telles mesures nécessite une pesée attentive des intérêts, effectuée dans le cadre du large pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité de protection (cf. supra consid. 3.4.5 et 3.6.2.4), il sied de conférer une importance particulière aux principes d'interdisciplinarité et de collégialité, afin que la décision prise intervienne dans le cadre d'une réflexion interdisciplinaire et qu'elle soit à même de sauvegarder au mieux les intérêts de toutes les personnes concernées. Au demeurant, l'exigence d'une compétence décisionnelle collégiale n'apparaît pas occasionner des difficultés d'organisation importantes pour les autorités de protection, de nombreux cantons ayant en effet déjà opté pour une telle compétence pour le prononcé de mesures provisionnelles au sens de l'art. 445 al. 1 CC, indépendamment même du domaine de protection concerné. En cas d'urgence impérieuse, la sauvegarde d'intérêts menacés peut par ailleurs être assurée par le prononcé de mesures superprovisionnelles au sens de l'art. 445 al. 2 CC, lesquelles ne commandent pas nécessairement l'intervention d'un collège décisionnel.
La décision de première instance du 1er avril 2021 concernant le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de l'enfant C. et le placement de celle-ci ainsi que le jugement attaqué seront par conséquent annulés et la cause sera renvoyée à l'APEA pour nouvelle décision dans le sens des considérants.BGE 148 I 251 (270)