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Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
6. La première question à examiner est celle de sav ...
8. La recourante affirme que l'engagement qu'elle a pris envers A ...
9. La recourante soutient que la présomption de suppressio ...
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24. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Les Editions Flammarion SA contre Commission de la concurrence COMCO (recours en matière de droit public)
 
 
2C_44/2020 du 3 mars 2022
 
 
Regeste
 
Art. 2 Abs. 1, Art. 4 Abs. 1 und Art. 5 Abs. 4 KG; Wettbewerbsabrede; Konzernprivileg; Handelsvertretervertrag und Handelsvertreterprivileg; Aleinvertriebsvertrag; Zurechnung von Verhaltensweisen im Konzern; doppelter Vertrieb.
 
Zurechnung wettbewerbswidriger Verhaltensweisen im Rahmen eines Konzerns und Möglichkeit, solche der Muttergesellschaft der Tochtergesellschaft zuzurechnen (E. 8).
 
Notwendigkeit, im Lichte von Art. 5 Abs. 4 KG den Vertriebsvertrag, mit welchem eine blosse Herstellerin auf den Direktverkauf ihrer Produkte in der Schweiz verzichtet, vom Vertriebsvertrag, mit welchem eine ausländische Vertriebsgruppe ein anderes Unternehmen mit der exklusiven Kommerzialisierung ihrer Produkte auf diesem Markt beauftragt, zu unterscheiden (E. 9).
 
 
Sachverhalt
 
BGE 148 II 321 (322)A. Les Editions Flammarion SA est une société anonyme de droit suisse. Durant la période 2005 à 2011, elle appartenait au groupe éponyme Flammarion. Ce groupe rassemblait alors plusieurs sociétés actives dans le milieu de l'édition, de la diffusion et de la distribution de livres en français, notamment la société Flammarion SA sise en France, qui détenait 100 % du capital-actions de la société Les Editions Flammarion SA. En 2012, le groupe Flammarion a été racheté par le groupe Madrigall.
Le groupe Flammarion se charge de diffuser et de distribuer lui-même les ouvrages édités par ses propres filiales. Il se voit égalementBGE 148 II 321 (322) BGE 148 II 321 (323)confier de telles tâches par des éditeurs externes ayant choisi de se faire diffuser et distribuer par lui. En tant que diffuseur, il définit le plan commercial et promotionnel des livres concernés, les fait connaître aux divers points de vente et en prend les commandes. En tant que distributeur, il organise les flux physiques, logistiques et financiers entre les points de ventes de livres et l'éditeur et assure notamment la gestion des ouvrages retournés.
La société suisse Editions Flammarion SA a pour sa part comme mission spécifique de diffuser sur le territoire suisse les livres en français édités, d'une part, par son groupe et, d'autre part, par d'autres éditeurs indépendants ayant confié une telle tâche à celui-ci. Cela étant, se limitant dans les faits à une activité de diffusion, elle sous-traite la distribution de l'ensemble de ces ouvrages à une autre société suisse, à savoir A. Les deux sociétés ont conclu à cette fin trois contrats entre 2000 et 2010, contenant tous la clause suivante:
    " [Les Editions Flammarion SA confie à A., dans le respect des lois en vigueur, la distribution exclusive des produits définis à l'article 2 auprès de l'intégralité des revendeurs de livres.
    Ce contrat ne concerne pas, sauf en cas de demande faite et notifiée par [Les Editions Flammarion SA] à A. qui ne pourra pas refuser:
    - la vente par courtage et/ou par correspondance,
    - les ventes par clubs, couponing,
    - les clients suisses achetant des éditions qui leur sont spécialement destinées.
    [Les Editions Flammarion SA] s'engage à ne pas ouvrir de comptes directs à Paris pour des clients suisses, sans accord préalable [d']A., sauf pour des titres soldés. (...) "
B. Du 12 juillet 2007 au 13 mars 2008, le secrétariat de la Commission de la concurrence (ci-après: la COMCO) a mené une enquête préalable sur le marché du livre écrit en français. Les informations obtenues auprès des diffuseurs-distributeurs et des revendeurs actifs en Suisse ont fait apparaître que les premiers occupaient une position forte sur le marché en cause et que le niveau des prix y était élevé.
En date du 27 mai 2013, la COMCO a rendu une décision à l'encontre de la société Les Editions Flammarion SA et de neuf autres diffuseurs-distributeurs de livres. Elle a condamné en particulier la société précitée au paiement d'une sanction de 1'225'794 fr. en application de l'art. 49a al. 1 LCart (RS 251) en raison de saBGE 148 II 321 (323) BGE 148 II 321 (324)participation à des accords illicites au sens de l'art. 5 al. 4 et 1 LCart. Elle lui a par ailleurs interdit - comme aux neuf autres diffuseurs/distributeurs concernés par sa décision - d'entraver par des contrats de distribution et/ou de diffusion les importations parallèles de livres écrits en français par tout détaillant actif en Suisse.
Le 11 juillet 2013, Les Editions Flammarion SA a interjeté recours auprès du Tribunal administratif fédéral contre la décision précitée de la COMCO. Par arrêt du 30 octobre 2019, le Tribunal administratif fédéral a admis partiellement le recours, en ce sens qu'il a réduit à 919'346 fr. la sanction prononcée à l'encontre de la société Les Editions Flammarion SA. Il a confirmé la décision attaquée pour le surplus.
C. Le 4 janvier 2020, Les Editions Flammarion SA (ci-après: la recourante) a déposé un recours en matière de droit public contre l'arrêt précité auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci l'a rejeté.
(résumé)
 
III. Existence d'accords en matière de concurrence au sens des art. 2 al. 1 et 4 al. 1 LCart
6.2 Aux termes de l'art. 4 al. 1 LCart, par accords en matière de concurence, on entend "les conventions avec ou sans force obligatoire ainsi que les pratiques concertées d'entreprises occupant des échelons du marché identiques ou différents, dans la mesure où elles visent ou entraînent une restriction à la concurrence". Cela signifie que, pour être en présence d'un accord en matière de concurrence relevant de la LCart, deux conditions doivent être réunies: il faut (1) se trouver face à une convention ou une pratique concertée entre (au moins) deux entreprises et (2) que cette convention ou cette pratique vise ou entraîne une restriction à la concurrence (ATF 144 II 246 consid. 6.4), laquelle consiste en une limitation de la liberté dans le jeu de l'offre et de la demande en lien avec des paramètres déterminants du point de vue de la concurrence efficace (ATF 148 II 25 consid. 7.2; arrêt 4C.353/2002 du 3 mars 2003 consid. 3.1). Des accords en matière de concurrence au sens de l'art. 4 al. 1 LCart peuvent ainsi exister non seulement entre entreprises de même rang (accords horizontaux), mais aussi entre entreprises de différents échelons du marché (accords verticaux; ATF 144 II 246 consid. 6.4.1; ATF 129 II 18 consid. 4), dans la mesure où ils concernent les conditions auxquelles les entreprises parties peuvent acheter, vendre ou revendre certains biens ou services (cf. Décision de la Commission de la concurrence du 28 juin 2010 [ci-après: CommVert], FF 2010 4625 ch. 1). En revanche, les conventions passées entre des sociétés appartenant à un même groupe et sur lesquelles une société mère exerce un contrôle effectif ne sont pas soumises à la LCart, dès lors que toutes ces entités, en l'absence d'indépendance, constituent une seule et même entreprise et bénéficient de ce que l'on appelle un "privilège de groupe" (ATF 148 II 25 consid. 7.2 et 7.3; ATF 145 III 303 consid. 7.2.2). Il en va de même en droit européen (cf. notamment arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes [CJCE; aujourd'hui: Cour de justice de l'Union européenne; CJUE] C-73/95 du 24 octobre 1996, Viho Europe BV, RJ 1996 I-05457, § 16 ss; décision de la Commision européenne 70/332 du 30 juin 1970, Kodak, JO L 147 p. 24-27).
6.3 Suivant une logique similaire à celle qui est à la base du "privilège de groupe", les autorités européennes considèrent que certains accords de distribution spécifiques, qu'elles qualifient de "contrats d'agence", échappent également au droit de la concurrence, à tout le moins en partie (cf. Communications de la Commission européenneBGE 148 II 321 (325) BGE 148 II 321 (326)du 10 mai 2010, Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 130/1 du 19 mai 2010 [ci-après: Lignes directrices UE], nos 18 ss; arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes [ci-après: TPICE] T-325/01 du 15 septembre 2005, Daimler- Chrysler, Rec. 2005 II-3319, § 81 ss). Elles se réfèrent à des conventions par lesquelles une entreprise investit une autre du pouvoir de négocier et/ou de conclure des contrats d'achat et de vente de biens ou de services pour son compte. L'entreprise mandatée, qui n'assume aucun risque en lien avec les contrats négociés ou conclus pour le compte de l'autre et qui ne détermine pas de manière autonome son comportement sur le marché, doit être considérée comme un simple auxiliaire de l'entreprise représentée. Les deux entités, bien qu'ayant une personnalité juridique distincte, peuvent être vues comme une seule unité économique si, sur la base d'une analyse in concreto, il faut considérer que l'agent ne supporte aucun risque commercial ou financier en relation avec les activités pour lesquelles le commettant l'a désigné, ou n'en supporte qu'une partie négligeable (cf. arrêt du TPICE Daimler-Chrysler précité, § 86). Cette question s'examine le cas échéant non seulement en lien avec la nature et le contenu des contrats conclus et/ou négociés, mais aussi au regard des investissements nécessaires à l'exercice de l'activité d'intermédiaire, ainsi qu'en tenant compte des éventuelles activités supplémentaires confiées par le commettant à l'agent sur le même marché de produits (cf. Lignes directrices UE, nos 13-17; arrêt de la CJCE du 14 décembre 2006 C-217/05, Confederación Española de Empresarios de Estaciones de Servicio contre Compañia de Petróleos, Rec. 2006 I-11987, § 43 ss).
6.4 D'après la pratique européenne, en cas de relation de "contrats d'agence" au sens qui précède, les obligations imposées par le commettant à l'intermédiaire en lien avec la vente à des tiers (p. ex. des limitations quant au territoire, à la clientèle ou au prix ou conditions auxquels l'agent peut vendre les biens ou services concernés) échappent aux règles en matière de concurrence (cf. Lignes directrices UE, n° 18). En revanche, comme l'agent demeure une entreprise distincte du commettant, les éventuelles autres dispositions contractuelles aménageant la relation entre les deux entreprises n'échappent pas au droit de la concurrence. Cela signifie concrètement que le fait de qualifier une relation commerciale de "contrat d'agence" ne constitue jamais un blanc-seing complet du point de vue du droit européen de la concurrence. Les clauses d'un contrat d'agence qui,BGE 148 II 321 (326) BGE 148 II 321 (327)par exemple, interdisent au commettant de désigner d'autres agents pour un type donné d'opérations, de clientèle ou de territoire (clauses d'exclusivité), de même que celles qui prohibent à l'agent d'agir pour le compte d'autres entreprises (clauses dites de "monomarquisme"), doivent respecter les règles en matière de concurrence, dans la mesure où elles peuvent entraîner un verrouillage du marché concerné (cf. Lignes directrices UE, n° 19; arrêts de la CJCE C-279/06 du 11 septembre 2008, CEPSA Estaciones de Servicio SA contre LV Tobar e Hijos SL, Rec. 2008 I-6681, § 41; aussi C-217/05 précité, § 62).
6.5 La COMCO, comme une partie de la doctrine, considère que le "privilège de l'agent" (Handelsvertreterprivileg), tel qu'il vient d'être présenté, s'applique également en droit suisse - à tout le moins dans une certaine mesure - par analogie avec le droit européen (cf. notamment Droit et politique de la concurrence [DPC] 2013/4 p. 481 ssn. 34; MANI REINERT, in Basler Kommentar, Kartellgesetz, 2e éd. 2021, nos 364 ad art. 4 al. 1 LCart; BANGERTER/ZIRLICK, in KG, Bundesgesetz über Kartelle und andere Wettbewerbsbeschränkungen, Kommentar, 2018, n° 34 ad art. 4 LCart). Le Tribunal administratif fédéral a pour sa part indiqué dans l'arrêt attaqué que le droit et la pratique européens sur le "contrat d'agence" pouvaient effectivement fournir une piste d'interprétation utile s'agissant de la question de savoir si des relations d'agence ou des activités d'intermédiaire relevaient ou non de la LCart et, plus précisément, si l'on se trouvait dans de tels cas de figure face à une convention entre au moins deux entreprises indépendantes l'une de l'autre au sens de l'art. 2 al. 1 LCart. Dans le cas d'espèce, il a néanmoins exclu l'existence d'un rapport d'agence entre la recourante et A., dès lors que celle-ci aurait supporté des risques économiques et financiers non négligeables en distribuant en Suisse les livres diffusés par le groupe Flammarion durant la période sous enquête. A. n'aurait dans ce cadre pas agi en tant qu'agent du groupe, mais bien comme un distributeur indépendant, ce que la recourante conteste.
6.6 La Cour de céans relève que la relation commerciale entretenue par la recourante et A. présente certaines caractéristiques propres à un rapport de "contrat d'agence", du moins au sens du droit européen de la concurrence. Il ressort notamment de l'arrêt attaqué qu'A. ne devient jamais propriétaire des livres diffusés par Flammarion avant de les revendre aux librairies et autres détaillants helvétiques et qu'elle est rémunérée pour chaque flux "aller" et "retour" desditsBGE 148 II 321 (327) BGE 148 II 321 (328)ouvrages, de sorte qu'elle ne supporte pas le risque de leur éventuel échec commercial. Il n'est toutefois pas nécessaire de se demander si la notion de "contrat d'agence" de droit européen doit être reprise en droit suisse des cartels par un biais jurisprudentiel, comme l'a admis le Tribunal administratif fédéral, ni de déterminer si les accords de distribution conclus entre la recourante et A. s'assimilent à de tels contrats, comme l'affirme la recourante. En effet, les réponses que le Tribunal fédéral pourrait apporter sur ces différents points n'auraient de toute manière aucune influence sur l'issue du litige.
6.7 Il convient de garder à l'esprit que le présent litige concerne la légalité de clauses d'exclusivité territoriale contenues dans différents contrats de distribution conclus entre la recourante et A. Par ces contrats, la première a confié à la seconde la "distribution exclusive" des livres édités et/ou diffusés par le groupe Flammarion auprès des revendeurs de livres helvétiques, tout en s'engageant "à ne pas ouvrir de comptes directs à Paris pour des clients suisses". Il est reproché à la recourante d'avoir cloisonné de cette manière le marché suisse - en violation des art. 5 al. 1 et 4 LCart - en conférant une protection territoriale absolue à A. en ce qui concerne la distribution wholesale d'ouvrages en français, c'est-à-dire en garantissant à cette société l'absence de toute concurrence provenant non seulement de Suisse, mais aussi de l'étranger en lien avec la distribution en gros de livres éditées et/ou diffusés par le groupe Flammarion. Or, ce régime d'exclusivité - indépendamment de la question de savoir s'il vise véritablement à assurer une protection territoriale absolue en faveur d'A. - ne peut en aucun cas bénéficier du "privilège de l'agent". Comme on l'a vu, la reconnaissance d'un tel privilège inspiré du droit européen ne représenterait pas un blanc-seing dupoint de vue de la LCart. Il ne s'appliquerait qu'aux obligations que la recourante aurait pu imposer à A. en lien avec les contrats conclus pour son compte. Les engagements que les parties ont pris l'une envers l'autre, afin de régler leurs rapports réciproques, resteraient en tout état de cause soumis à la LCart (cf. supra consid. 6.4; aussi REINERT, op. cit., nos 391 ss ad art. 4 al. 1 LCart). Tel serait précisément le cas des clauses d'exclusivité territoriale contenues dans les différents contrats de distribution successifs conclus entre la recourante et A. Elles n'imposent aucune obligation à A. concernant ses rapports avec les revendeurs de livres helvétiques, mais organisent la relation commerciale des deux sociétés, en restreignant les conditions auxquelles le groupe Flammarion peut vendre les ouvrages qu'ilBGE 148 II 321 (328) BGE 148 II 321 (329)édite et/ou diffuse en Suisse. De telles clauses, qui affectent les canaux d'approvisionnement de certains livres écrits en français, constituent sans conteste des accords en matière de concurrence au sens des art. 2 al. 1 et 4 al. 1 LCart, même si l'on considérait qu'elles s'insèrent dans des "contrats d'agence".
(...)
V. Imputabilité des comportements au sein d'un groupe commercia l et présomption de suppression de la concurrence efficace au sens de l'art. 5 al. 4 LCart
8.1 Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de préciser qu'il n'y avait pas lieu de poser des exigences trop élevées à l'imputation de comportements réprouvés par le droit de la concurrence entre personnes morales formant une unité d'organisation, c'est-à-dire composant un groupe commercial. Procéder à une approche segmentée des comportements d'entreprise appartenant à un même groupe comporte le risque que les règles de droit de la concurrence voulues par le législateur soient vidées de leur substance, sachant que la LCart est censée s'appliquer aux comportements anticoncurrentiels d'entreprises prises dans leur ensemble, et non de personnes morales appréciées individuellement (cf. art. 2 al. 1 et 1bis et 49a al. 1 LCart; arrêt 2C_484/ 2010 du 29 juin 2012 consid. 3, non publié in ATF 139 I 72; aussi ATF 148 II 25 consid. 7.2 et 7.3 sur le "privilège de groupe"). Il est ainsi possible de rendre une société mère responsable des actions anticoncurrentielles de ses filiales et de les lui imputer dans le cadre d'une procédure de droit des cartels (cf. arrêt 2C_484/2010 précité, consid. 3.4). La pratique a par ailleurs soutenu l'idée qu'il devait aussi être possible de mener une procédure contre la filiale suisse d'un groupe étranger et de la sanctionner si nécessaire, après lui avoir imputé le comportement de sa société mère. Un tel procédé peut s'avérer particulièrement approprié dans les affaires ayant un lien avec l'étranger, notamment si cela est trop coûteux de poursuivre cette dernière à l'étranger ou si cela implique des difficultés disproportionnées dans la procédure ou dans l'exécution des décisions éventuelles (ANDREAS HEINEMANN, Konzerne als Adressaten des Kartellrechts, in Wettbewerbsrecht, Jüngste Entwicklungen in der Rechtsprechung, Konzernsachverhalte und Konzernbegriff aus kartellrechtlicher Sicht, Hochreutener/Stoffel/Amstutz [éd.], 2015, p. 49 ss, spéc. 61).
8.2 En droit européen, il est également acquis qu'une entité juridique peut être tenue responsable du comportement anticoncurrentiel d'une autre entité juridique, lorsque toutes deux font partie de la même unité économique et forment ainsi une seule et même entreprise (voir notamment arrêt de la CJUE C-882/2019 du 21 octobre 2021, Sumal S.L. contre Mercedes Benz Trucks España S.L., § 41 ss, et les références citées). Dans un tel cas, les autorités européennes de laBGE 148 II 321 (330) BGE 148 II 321 (331)concurrence peuvent choisir la société contre laquelle elles entendent agir (cf. notamment VOLKER EMMERICH, in Wettbewerbsrecht, vol. I EU, Immenga/Mestmäcker [éd.], 5e éd. 2015, n° 48 ad art. 101 Abs. 1 AEUV). Dans un arrêt récent, la CJUE a ainsi précisé qu'une infraction au droit de la concurrence commise par une société mère pouvait engager la responsabilité d'une de ses filiales, s'il existait non seulement des liens économiques, organisationnels et juridiques entre les deux entités, mais aussi entre l'activité économique de la filiale et le comportement anticoncurrentiel de la société mère (arrêt de la CJUE C-882/2019 précité, ch. 51 ss).
VI. Obligation imposée au "fournisseur" et présomption de suppress ion de la concurrence efficace au sens de l'art. 5 al. 4 LCart
9.1 Selon l'art. 5 al. 4 LCart, les accords verticaux attribuant des territoires sont présumés entraîner la suppression de toute concurrence efficace lorsque les ventes aussi bien actives que passives (cf. consid. 7.3 non publié) par d'"autres fournisseurs agréés" sur ce territoire sont exclues. La version française de la disposition diverge quelque peu de celles allemande et italienne qui évoquent, pour leur part, une interdiction de vente par des "gebietsfremde Vertriebspartner" ou des "distributori esterni" (distributeurs externes). Il en ressort que la présomption de suppression de la concurrence de l'art. 5 al. 4 LCart implique que des entreprises actives dans la distribution d'un produit donné se voient interdire de procéder à tout type de ventes de ce produit à destination d'un territoire de distribution attribué à une autre entreprise (cf. ATF 143 II 297 consid. 6.3.3). Ainsi, l'accord par lequel une entreprise uniquement productrice se contenterait de renoncer à la vente directe de ses produits en Suisse, après en avoir externalisé la distribution à une autre entreprise, ne tombe pas en tant que tel sous le coup de l'art. 5 al. 4 LCart et n'est pas sanctionnable au sens de l'art. 49a al. 1 LCart. Il en va de même de l'accordBGE 148 II 321 (332) BGE 148 II 321 (333)par lequel un producteur étranger s'obligerait à transmettre à son importateur suisse toutes les demandes d'achat qui lui parviendraient dans la mesure où elles émaneraient de Suisse. En effet, de telles restrictions de vente ne concernent en règle générale que le producteur du bien concerné, sans forcément s'étendre à d'éventuels distributeurs de celui-ci (cf. BO 2003 CE 329 ss; Note explicative de la Commission de la concurrence du 12 juin 2017 relative à la CommVert [ci-après: Note explicative CommVert], ch. 9, 1er point; AMSTUTZ/ CARRON/REINERT, in Commentaire romand, Droit de la concurrence, 2e éd. 2013, nos 557 ss ad art. 5 LCart). Il est possible que ces accords soient malgré tout illicites à l'aune de l'art. 5 al. 1 LCart, dans la mesure ils sont susceptibles de restreindre d'une manière notable la concurrence sur le marché considéré, ou qu'ils résultent d'un abus de position dominante au sens de l'art. 7 LCart de la part du distributeur protégé. Ne limitant pas en tant que tels la liberté d'action d'une entreprise "distributrice", ils ne constitueront en revanche pas des contrats présumés conduire à la suppression de toute concurrence efficace au sens de l'art. 5 al. 4 LCart (ATF 148 II 25 consid. 9.3.1).
9.2 Dans l'arrêt attaqué, partant du principe exposé ci-devant selon lequel l'engagement d'un producteur de ne pas concurrencer ses distributeurs n'est pas concerné par l'art. 5 al. 4 LCart, le Tribunal administratif fédéral s'est attaché à définir le rôle joué par la recourante sur le marché suisse du livre en Suisse et, plus spécifiquement, vis-à-vis d'A. Il a en l'occurrence retenu que l'édition de livres correspondait de manière générale à une activité de production, tandis que l'activité de diffusion et de distribution de livres s'assimilait à un travail de commercialisation, respectivement de distribution des produits concernés. Il a ensuite constaté que le groupe Flammarion, dont faisait partie la recourante, se chargeait en principe lui-même de la diffusion et de la distribution des livres qu'il éditait - c'est-à-dire qu'il produisait lui-même - sans passer encore en aval par des sociétés de distribution ou des grossistes indépendants, sauf en Suisse par l'intermédiaire d'A. Cela étant, le groupe acceptait de mettre son système de distribution à disposition d'autres éditeurs et, partant, de diffuser et de distribuer des ouvrages édités par des entreprises indépendantes. Le Tribunal administratif fédéral en a déduit que le groupe Flammarion agissait à deux titres distincts sur le marché du livre et vis-à-vis d'A.: tantôt comme "producteur" en ce qui concernait la distribution des ouvrages édités par le groupe, tantôt comme "fournisseur" ou distributeur s'agissant des ouvrages édités par desBGE 148 II 321 (333) BGE 148 II 321 (334)éditeurs indépendants. D'après les juges précédents, il s'ensuivrait que l'engagement de la recourante à ce que le groupe Flammarion ne procède à aucune vente (active ou passive) de ses propres livres vers la Suisse ne tomberait pas sous le coup de l'art. 5 al. 4 LCart, car il équivaudrait à une interdiction de vente directe du "producteur"; il n'y a pas lieu de revenir sur ce point (cf. consid. 7.4 non publié). Il en irait en revanche autrement de l'engagement pris de ne pas livrer directement aux revendeurs suisses les autres ouvrages qui, sans être édités par le groupe Flammarion, sont néanmoins diffusés par lui. Cet engagement serait susceptible d'être couvert par l'art. 5 al. 4 LCart, car il constituerait une obligation imposée au distributeur, respectivement au fournisseur.