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Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
Erwägung 2
Erwägung 3
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12. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause A. SA contre B. SA (recours en réforme)
 
 
4C.171/2002 du 25 septembre 2002
 
 
Regeste
 
Anleihensobligationen; Haftung für den Emissionsprospekt; Verantwortlichkeit des Vertreters der Anleihensgläubiger gegenüber diesen (Art. 1156, 1157 ff. und 398 OR).
 
Haftung des Vertreters der Anleihensgläubiger: vertragliche Natur der Beziehung zwischen dem Vertreter und den Anleihensgläubigern (E. 3.2); Nichtanwendbarkeit von Art. 1157 ff. OR, wenn der Anleihensschuldner weder seinen Sitz noch eine geschäftliche Niederlassung in der Schweiz hat (E. 3.3); rechtliche Natur der Beziehung zwischen dem Gläubigervertreter und den Gläubigern (E. 3.4); Umfang der dem Vertreter obliegenden Sorgfaltspflicht (E. 3.5).
 
 
Sachverhalt
 
BGE 129 III 71 (72)A.- La société d'aviation civile C. Inc. (ci-après: C.), incorporée dans l'Etat du Delaware (USA), a émis en Suisse, à la fin de l'année 1985, un emprunt d'un montant total de 150'000'000 fr. sous la forme d'obligations convertibles d'une durée de dix ans portant intérêts au taux de 5,5% l'an. La libération des obligations a été fixée au 7 janvier 1986.
La banque X. SA, devenue B. SA (ci-après: la banque), était chef de file du consortium de banques qui a souscrit l'ensemble des obligations pour les offrir sur le marché; elle apparaissait également comme représentante des obligataires.
Un prospectus daté du 10 décembre 1985 a été émis conjointement par C. et la banque. Il présentait la compagnie et ses deux sociétés filiales, D. Inc. (ci-après: D.) et E. Il ne contenait aucune information alarmante sur l'évolution récente des affaires. Il a été retenu que la banque avait procédé aux vérifications usuelles, se fondant notamment sur une attestation des avocats de C. et sur une lettre du réviseur Z. & Co. Le taux d'intérêt offert était cependant particulièrement élevé à l'époque et la presse spécialisée avait décrit l'emprunt de C. comme étant destiné à des investisseurs très spéculatifs. Le prospectus soumettait l'emprunt au droit suisse et prévoyait la compétence des tribunaux genevois.
La société panaméenne A. SA, ainsi que deux autres entités appartenant à la même famille, ont acheté des obligations émises par C., en neuf tranches successives, du 17 décembre 1985 au 16 juillet 1986. Les obligations acquises par les deux autres entités ont été transmises à A. SA. Dans leur ensemble, ces obligations représentent une valeur nominale de 2'070'000 fr. et ont été acquises pour le prix de 1'670'825 fr.
B.- C. a publié le 13 mars 1986 un rapport sur sa situation financière au 31 décembre 1985, qui révélait une nette inversion deBGE 129 III 71 (72) BGE 129 III 71 (73)tendance au 4e trimestre de l'année 1985, la détérioration de la situation étant due à une concurrence accrue. Il a été retenu qu'il n'était pas établi que la banque ait eu connaissance de cette évolution au moment de l'émission du prospectus.
Le cours des obligations C. a alors baissé de manière significative, ce qui n'a pas empêché A. SA - comme on l'a vu - d'en acheter encore en juillet 1986.
Cette évolution négative a constitué une surprise pour la banque, qui a réuni une sorte de cellule de crise au printemps 1986, consulté les autres banques membres du consortium et engagé certaines négociations avec C.
Au second semestre 1986, la société américaine d'aviation F. a lancé une offre publique d'achat portant sur les obligations en francs suisses de C., pour un prix correspondant au 65% de leur valeur nominale. Par circulaire du 20 décembre 1986, X. SA a recommandé l'acceptation de cette offre. Ce conseil a été en définitive suivi par 96% des obligataires, au rang desquels A. SA ne figure toutefois pas.
Le capital-actions de C. a été acheté par une société créée par F., puis cédé à G. Inc. Diverses fusions sont intervenues en juillet 1989, qui ont entraîné la disparition de C. La société G. Inc. s'est engagée à reprendre tous les engagements de C. découlant de l'emprunt obligataire. La banque en a informé les porteurs d'obligations. Estimant que G. Inc. était aussi solvable que C. - ce que la procédure n'a pas infirmé -, la banque n'a pas demandé le remboursement de l'emprunt.
En décembre 1990, G. Inc. est entrée en procédure de sursis concordataire. La banque, par ses avocats américains, s'est préoccupée de préserver les intérêts des créanciers obligataires qu'elle représentait. La production des obligataires a été admise dans son intégralité.
A. SA a échangé, en 1994, ses obligations contre des actions G. Inc., obtenant ainsi, selon ses explications, la contre-valeur de 82'800 fr., ainsi qu'une soulte.
C.- Le 20 juillet 1993, A. SA a agi en responsabilité contre la banque en sa qualité d'auteur du prospectus et de représentante des obligataires. Ses dernières conclusions tendaient au paiement de 2'070'000 fr. avec intérêts à 5,5% l'an dès le 7 juillet 1990, sous imputation de 82'800 fr., 27,13 US$ et 1'174 fr. 70. Le Tribunal de première instance et, sur appel, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève ont rejeté la demande.
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral a confirmé l'arrêt cantonal.BGE 129 III 71 (73)
 
BGE 129 III 71 (74)Extrait des considérants:
 
 
Erwägung 2
 
Les tribunaux suisses du lieu de l'émission publique sont compétents, même si un autre tribunal est également compétent en vertu d'une prorogation de for (art. 151 al. 3 LDIP; cf. LOMBARDINI, op. cit., p. 415 n. 81).
Comme le montre son emplacement dans la loi, l'art. 752 CO concerne l'émission d'obligations par une société anonyme au sens de l'art. 620 CO, étant précisé que ce sont les anciennes dispositions qui sont applicables vu la date des faits (RO 1992 p. 785). Or, il ressort des constatations cantonales - qui lient le Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme (art. 63 al. 2 OJ) - que la société qui a émis les obligations n'est pas une société anonyme suisse au sens de l'art. 620 aCO. En conséquence, la responsabilité de l'auteur du prospectus est régie exclusivement par l'art. 1156 al. 3 CO (dans ce sens: WATTER, Commentaire bâlois, n. 23 ad art. 1156 CO; arrêt 4C.245/1995 du 2 août 1996, publié in SJ 1997 p. 108, consid. 5b).
Le prospectus est inexact au sens de cette disposition lorsqu'il omet des informations importantes pour les souscripteurs ou acquéreurs des obligations (WATTER, Prospekt(haft)pflicht heute und morgen, PJA 1992 p. 48 ss, p. 58; ZIEGLER, Commentaire bernois, n. 27 ad art. 1156 CO; LOMBARDINI, op. cit., p. 415 n. 78). Le prospectusBGE 129 III 71 (74) BGE 129 III 71 (75)doit fournir des renseignements véridiques sur la situation de l'émetteur au moment de l'émission (cf. LOMBARDINI, op. cit., p. 414 n. 74).
Il ressort du texte de l'art. 1156 al. 3 CO que la responsabilité de l'auteur du prospectus n'est engagée que si son comportement procède de l'intention ou de la négligence. Certes, l'intention n'est pas exigée et la négligence suffit (WATTER, op. cit., PJA 1992 p. 60; ZIEGLER, op. cit., n. 27 ad art. 1156 CO). Il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'une responsabilité fondée sur la faute (LOMBARDINI, op. cit., p. 416 n. 83; ZIEGLER, ibidem). La notion de négligence suppose que l'auteur ait objectivement violé le devoir de diligence qui lui incombe (cf. WATTER, op. cit., PJA 1992 p. 60; ROBERTO/WEGMANN, Prospekthaftung in der Schweiz, RSDA 2001 p. 161 ss, p. 164 et 170). Qu'un prospectus soit objectivement inexact ne suffit pas encore pour constater l'existence d'une violation du devoir de diligence incombant à son auteur.
Lorsqu'il y a plusieurs auteurs - comme c'est le cas en l'espèce -, il faut établir une violation fautive du devoir incombant à la personne recherchée (ZIEGLER, ibidem). Dès lors qu'il ne s'agit pas d'une responsabilité causale, on ne saurait imputer purement et simplement à l'un des signataires le comportement de l'autre.
La question pertinente est donc de savoir si la banque défenderesse, cosignataire du prospectus, a manqué à son devoir de diligence.
Il incombait donc bien à la recourante de prouver les faits permettant de constater que la banque avait manqué à son devoir de diligence. La cour cantonale n'a pas violé sur ce point l'art. 8 CC.
Il faut d'ailleurs rappeler qu'il s'agit d'une responsabilité délictuelle pour le risque que les auteurs du prospectus font courir au public (cf. ZIEGLER, op. cit., n. 24 ad art. 1156 CO; WATTER, op. cit., PJA 1992 p. 55; ROBERTO/WEGMANN, op. cit., p. 164; LOMBARDINI, op. cit., p. 417 n. 91), de sorte que l'art. 97 al. 1 CO n'entre pas en considération ici. Dans la mesure où un auteur semble soutenir le contraire quant à la répartition du fardeau de la preuve (WATTER, op. cit., PJA 1992 p. 60), son opinion ne peut pas être suivie.
BGE 129 III 71 (76)S'il est vrai qu'elle ne saurait se fier aveuglément aux affirmations du débiteur, on ne saurait exiger d'elle, au moins en l'absence d'indices alarmants, des investigations disproportionnées. La doctrine admet que la banque peut en principe se fier aux indications fournies par les avocats du débiteur et par son organe de révision (WATTER, op. cit., PJA 1992 p. 60; cf. également: LOMBARDINI, op. cit., p. 418 n. 92).
Elle les a examinées avec l'attention requise, puisqu'il a été constaté en fait (d'une manière qui lie le Tribunal fédéral) que les renseignements fournis ne contenaient rien d'alarmant qui justifie une mention au prospectus.
Il n'a pas été établi que la banque aurait disposé du moindre indice donnant à penser que les informations étaient inexactes. La recourante se réfère à des articles de presse concernant la filiale D. et parus peu avant la sortie du prospectus; il s'agit toutefois de moyens de preuve nouveaux, puisqu'ils n'ont pas été soumis aux juridictions cantonales, qui ne sont pas admissibles en instance de réforme (art. 55 al. 1 let. c troisième phrase OJ).
La recourante suggère certes que la débitrice aurait retenu des informations. Il ressort cependant des explications fournies par l'organe de révision qu'il n'y avait rien d'alarmant dans les procès-verbaux de l'époque et qu'il lui a été dit qu'aucuns chiffres n'étaient disponibles; on peut penser que si la banque avait procédé elle-même à ces recherches, elle n'aurait pas obtenu plus d'informations. Il n'est donc pas démontré - sur la base de l'état de fait qui lie le Tribunal fédéral - que la banque aurait pu, en déployant la diligence commandée par les circonstances, avoir connaissance du renversement de tendance intervenu au 4e trimestre de 1985.
Dans de telles circonstances, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en rejetant la demande formée par la recourante.
 
Erwägung 3
 
3.1 La recourante soutient que la banque, en tant que représentante des obligataires, aurait dû dénoncer l'emprunt au remboursement,BGE 129 III 71 (76) BGE 129 III 71 (77)qu'elle a violé les devoirs découlant pour elle des art. 1158 al. 1, 398 al. 1 et 2 et 321e CO, si bien qu'elle doit réparer le dommage qui en résulte.
Il a déjà été jugé que les rapports entre le représentant et les obligataires étaient de nature contractuelle (ATF 62 II 140 consid. 3a).
Il ressort des constatations cantonales que les parties ont fait élection de droit en faveur du droit suisse, de sorte que celui-ci est applicable (cf. art. 116 al. 1 LDIP).
Elles ont également fait élection de for en faveur des tribunaux genevois (art. 5 al. 1 LDIP).
Il résulte de l'art. 1157 al. 1 CO que les art. 1157 à 1186 CO (chapitre II) ne s'appliquent que lorsque le débiteur de l'obligation a son domicile ou un établissement industriel ou commercial en Suisse (STEINMANN, Commentaire bâlois, n. 3 ad remarques préalables ad art. 1157-1186 CO; DANIEL DAENIKER, Anlegerschutz bei Obligationenanleihen, thèse Zurich 1992, p. 83).
Comme cette condition n'est pas remplie en l'espèce (le débiteur est une société américaine), les art. 1157 à 1186 CO ne sont pas applicables; que les parties aient opté, de façon générale, pour l'application du droit suisse n'a pas pour effet de rendre applicables des dispositions que le droit interne suisse lui-même déclare non applicables; il n'en irait différemment que si ces dispositions avaient été clairement incorporées au contrat en qualité de clauses contractuelles, ce qui n'est pas le cas sur la base des constatations cantonales (dans ce sens: DAENIKER, op. cit., p. 87; cf. également: LOMBARDINI, op. cit., p. 420 n. 97).
Il faut donc en déduire - contrairement à l'opinion de la cour cantonale - que l'art. 1158 CO n'est pas applicable en l'espèce. Le point reste néanmoins sans conséquence pratique, puisque la disposition ne contient pas d'éléments décisifs pour l'issue du litige.
3.4 Considérant que le représentant des obligataires désigné dans les conditions de l'emprunt ne pouvait pas être révoqué en tout temps, la jurisprudence a estimé que le rapport entre le représentant et chaque obligataire ne relevait pas du mandat, mais constituait un rapport juridique sui generis analogue au mandat (ATF 62 II 140BGE 129 III 71 (77) BGE 129 III 71 (78)consid. 3a). Plusieurs auteurs ont cependant soutenu qu'il s'agissait d'un mandat pur et simple (DAENIKER, op. cit., p. 131 s. et les références citées; LOMBARDINI, op. cit., p. 423 n. 105). Il n'est pas nécessaire d'approfondir cette question en l'espèce.
Une personne désignée en qualité de représentante des obligataires se voit investie d'une mission impliquant naturellement un certain devoir de sauvegarder les intérêts des représentés. C'est d'ailleurs bien dans ce sens que la jurisprudence a parlé d'un contrat analogue au mandat. Le représentant doit donc veiller aux intérêts des obligataires et exercer dans cet esprit les pouvoirs qui lui sont conférés (dans ce sens: DAENIKER, op. cit., p. 125 et 132 s.; LOMBARDINI, op. cit., p. 423 n. 105 et p. 424 n. 109). La clause contractuelle citée par la recourante, que la cour cantonale a omise par inadvertance (art. 63 al. 2 troisième phrase OJ), exprime d'ailleurs ce principe.
Que les choix du représentant ne se soient pas révélés judicieux a posteriori ne suffit pas pour entraîner sa responsabilité; il faudrait que l'on puisse lui reprocher, en fonction des informations disponibles à l'époque, de ne pas avoir fait une saine appréciation de la situation.
Sur ce point également, il incombait à la recourante, en tant que demanderesse, de prouver les faits permettant de constater une violation du devoir de diligence et de fidélité (art. 8 CC). Le Tribunal fédéral doit analyser la situation sur la base des constatations cantonales définitives (art. 63 al. 2 OJ).
Si la banque avait dénoncé l'emprunt dès les premières difficultés financières (à supposer que les clauses contractuelles le lui permettent), il aurait existé un risque évident que les autres créanciers ne soient incités à procéder de la même façon, que la société ne puisse plus rembourser personne et que l'opération ne se termine par une faillite catastrophique. Or, il ne ressort pas des constatations cantonales que la situation était irrémédiablement compromise. Il ne paraissait pas exclu que la conjoncture s'améliore et que la concurrence s'apaise (en raison de fusions ou de la disparition de certaines compagnies). On ne peut donc pas retenir, sur la base des constatationsBGE 129 III 71 (78) BGE 129 III 71 (79)cantonales, qu'il était imprudent de choisir d'attendre et de miser sur un rétablissement de la société.
Lors de la fusion qui a entraîné la disparition de la débitrice, les obligations ont été reprises par une société qui, selon les constatations cantonales, n'était pas moins solvable que la précédente et semblait en mesure de rembourser l'ensemble des obligations. Les fusions successives avaient précisément pour but, par la concentration, de se renforcer face à la concurrence, et non pas d'entraîner la chute de toutes les compagnies fusionnantes. Sur la base des constatations cantonales, on ne peut pas dire que la décision d'attendre puisse être qualifiée de violation du devoir de diligence.
La banque a ensuite conseillé aux obligataires d'accepter l'offre publique d'achat; la recourante n'a pas suivi ce conseil et elle a ainsi pris une décision dont elle supporte seule les conséquences et qu'elle ne peut pas imputer à sa partie adverse.
En définitive, les faits constatés par la cour cantonale ne permettent pas d'observer une violation du devoir de diligence incombant au représentant, de sorte que le rejet de la demande ne viole pas le droit fédéral, et notamment les art. 398 al. 1 et 2 et 321e CO applicables au moins par analogie.BGE 129 III 71 (79)