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Regeste
Sachverhalt
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Erwägung 6
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49. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. contre Y. SA (recours en matière civile)
 
 
4A_741/2011 du 11 avril 2012
 
 
Regeste
 
Art. 49 OR; Genugtuungsanspruch einer juristischen Person bei widerrechtlicher Verletzung ihrer Persönlichkeit.
 
Kriterien, die bei der gerichtlichen Festsetzung der einer juristischen Person zuzusprechenden Genugtuungssumme zu beachten sind (E. 6.3).
 
 
Sachverhalt
 
BGE 138 III 337 (338)A.
A.a Y. SA (ci-après: Y.), à Genève, inscrite au registre du commerce depuis le 24 mars 2009, est active dans le commerce maritime, notamment le transport de marchandises et l'affrètement de bateaux et cargaisons. Cette société, dont le capital-actions s'élève à 4'000'000 fr., a pour administrateur-président A. et compte au nombre de ses administrateurs en particulier B.
Par contrat de travail signé le 27 mars 2009, Y. a engagé dès le 1er avril 2009 X., alors domicilié à Genève, en qualité de directeur général, doté d'un pouvoir de signature individuelle, pour un salaire annuel brut d'au moins 378'000 fr.; le contrat, d'une durée d'une année, était reconductible tacitement d'année en année, sauf dénonciation donnée par écrit six mois avant l'échéance de l'accord.
Pendant que X. travaillait à son service, Y. a créé son site internet sous l'adresse "Y.ch".
Par pli recommandé du 30 octobre 2009, Y. a résilié avec effet immédiat le contrat de X. en invoquant la commission par celui-ci d'actes répréhensibles.
A la suite de ce congé abrupt, X. a ouvert action le 6 avril 2010 contre Y. devant le Tribunal des prud'hommes de Genève, requérant notamment le versement de son salaire pendant quatorze mois ainsi que le paiement d'une indemnité pour licenciement immédiat injustifié.
La procédure prud'homale est actuellement pendante devant les autorités genevoises.
A.b Au début 2010, Y. a découvert l'existence et le contenu du site internet "Y.com". Les pages de ce site, dont le nom de domaine avait été acquis par X. le 20 mars 2009, avaient été partiellement modifiées par ce dernier le 7 décembre 2009, soit après la notification du congé sans délai précité.
Il a été retenu que le site "Y.com" présentait en anglais en date du 2 février 2010 le contenu suivant:BGE 138 III 337 (338)
    BGE 138 III 337 (339)"En page 1: le titre du site est "Welcome [trad.: "bienvenue"] Y.". Au milieu
    de la page se trouve le texte suivant : "Shipmanagement & technical expertise in order to prevent accident we maintain experts of the highest standard", soit traduit en français "Management maritime et expertise technique afin de prévenir des accidents - nous gardons des experts du plus haut niveau". Au-dessus de ce texte figure une photographie - la 2e de la page - prise depuis la capitainerie d'un bateau de transport maritime et montrant le point avant affrontant de hautes vagues; au-dessous dudit texte figure une autre photographie - la 3 e de la page - montrant un navire de transport maritime droit et à flot, à l'arrêt sur une eau bleue turquoise peu profonde, et attenant à une bande de terre escarpée et rocailleuse.
    En page 3: sur deux photographies figure un bateau de transport maritime - à moins qu'il s'agisse d'un navire différent sur chaque photographie - dont le bas de la coque est rouge et le haut bleu; sur la partie avant du bateau, sur la face horizontale de couleur rouge, ressort une couleur jaunâtre différente du rouge, tandis que sur la surface horizontale bleue sont visibles des marques étendues et compactes de couleur foncée difficile à déterminer, plutôt brunâtre. Ce navire présente un aspect usé, ancien. Sur la 3e photographie de la page (la même photographie - mais en plus grand - que la 1e photographie de la page 1) est présentée une cheminée de bateau avec le logo de Y.
    En page 6: une photographie montre A. et B. à l'arrière d'un véhicule; tous deux habillés en jeans et en polo et paraissent attendre quelque chose; A. croise les bras, tandis que B., qui regarde en direction de l'objectif de l'appareil-photo, tient un fruit dans la main. L'autre photographie montre B. dans la même tenue, avec un appareil-photo, devant un paysage semi-urbain. Il est écrit qu'il est directeur exécutif, de nationalité russe.
    En page 7 (avant-dernière page): sous "Contact", "Y. SA"et son logo, sont indiquées les références suivantes:
    "..."
    L'adresse pour courriels était celle de X.".
Quant au site web "Y.ch", s'il mentionne les noms des trois navires composant la flotte de Y., il ne contient pas de photographies de ceux-ci; les numéros de téléphone et téléfax qui y sont indiqués correspondent à des appareils fixes, à Genève, l'adresse pour courriels étant celle de Y.
Par lettre et télécopie du 3 février 2010, Y., estimant que le site "Y.com" la dénigrait, a imparti à X. un délai au 8 février 2010 pour mettre ce site hors service et entamer les démarches en vue de céder à la société la titularité dudit nom de domaine. Le 5 février 2010, X. s'est déclaré prêt à vendre l'adresse du site à Y., non sans nier toute intention d'avoir provoqué une confusion avec le site officiel deBGE 138 III 337 (339) BGE 138 III 337 (340)ladite société (i.e. "Y.ch") et tout caractère dénigrant des informations contenues dans le site "Y.com". Y. ayant réitéré sa requête par courrier du 5 février 2010, X. lui a fait savoir le 8 février 2010 que le site "Y.com" avait été désactivé.
B.
B.a Par demande déposée le 14 septembre 2010 devant la Cour de justice du canton de Genève, Y. a actionné X. La société a conclu à ce que la cour cantonale constate que le site "Y.com" dont le défendeur est titulaire constitue, dans sa version au 2 février 2010, un acte de concurrence déloyale commis à son détriment, à ce qu'elle interdise au défendeur d'utiliser ledit nom de domaine, à ce qu'elle le condamne à réparer le dommage pécuniaire subi par la demanderesse au moyen du paiement d'un montant équitable, avec intérêts, et, enfin, à ce qu'elle le condamne également à verser à la demanderesse la somme de 50'000 fr. plus intérêts à titre de tort moral.
Le défendeur a conclu, à la forme, à l'irrecevabilité de l'action (...) et, au fond, au rejet entier des conclusions de la demanderesse.
Au cours de l'audience de comparution personnelle du 7 avril 2011, le défendeur (...) s'est engagé à ne pas réactiver le site "Y.com" et à transférer ce nom de domaine à la demanderesse, sans réclamer de montant en contrepartie (...).
B.b La Cour de justice, statuant en instance unique (...) par arrêt du 4 novembre 2011, rectifié par arrêt du 2 février 2012, a déclaré irrecevable la conclusion en constatation d'acte de concurrence déloyale formée par la demanderesse, a donné acte au défendeur de son engagement de ne pas réactiver le site internet "Y.com" et de transférer gratuitement le nom de domaine dudit site à la demanderesse et a condamné le défendeur à verser à cette dernière la somme de 25'000 fr. plus intérêts à 5 % l'an dès le 8 janvier 2010 à titre d'indemnité pour tort moral.
C. X. a exercé un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cet arrêt. Principalement, il concluait au déboutement de la demanderesse de toutes ses conclusions. Subsidiairement, il requérait que le montant de l'indemnité pour tort moral fût fixé équitablement, la demanderesse étant déboutée de toutes autres ou contraires conclusions. Encore plus subsidiairement, il sollicitait le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. (...)BGE 138 III 337 (340)
BGE 138 III 337 (341)Le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours. Il a réformé l'arrêt attaqué en ce sens que le recourant a été condamné à verser à l'intimée à titre de tort moral la somme de 10'000 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 8 janvier 2010.
(extrait)
 
 
Erwägung 6
 
Les actions basées sur la loi contre la concurrence déloyale s'inscrivent dans la protection générale de la personnalité instituée par l'art. 28 CC; les actions reposant sur cette dernière disposition sont toutefois subsidiaires à celles qui sont fondées sur des lois spéciales, telles singulièrement la LCD (ATF 121 III 168 consid. 3b/aa p. 173).
Selon la jurisprudence constante, la protection de la personnalité peut être invoquée tant par une personne physique que par une personne morale, dans la mesure où elle ne touche pas à des caractéristiques qui, en raison de leur nature, appartiennent seulement aux personnes physiques (ATF 121 III 168 consid. 3a p. 171; ATF 108 II 241 consid. 6 p. 244 et l'arrêt cité). Au nombre des droits de la personnalité dont peuvent se prévaloir les personnes juridiques figurent notamment le sentiment de l'honneur (cf. ATF 96 IV 148 /149), la protection de la sphère privée ou secrète (ATF 97 II 97 consid. 2 p. 100), le droit à la considération sociale (ATF 121 III 168 consid. 3a p. 171) et le droit au libre développement économique, qui est assuré actuellement dans une large mesure par la LCD (ATF 121 III 168 ibidem).
Le Tribunal fédéral, à l'occasion d'un obiter dictum de l'ATF 60 II 326 consid. 2 p. 331, a jugé qu'une société anonyme, dont une publicité avait été taxée de bobards ("Schwindel"), était en principe enBGE 138 III 337 (341) BGE 138 III 337 (342)droit de réclamer à l'auteur de l'atteinte une indemnité pour tort moral selon les réquisits de l'ancien art. 49 CO (disposition qui, dans sa teneur avant le 1er juillet 1985, outre la gravité particulière de l'atteinte au sens de l'art. 49 CO, faisait de celle de la faute une condition du versement de l'indemnité). Dans l'ATF 64 II 14 consid. 4 p. 21/22, il a admis, en se référant au précédent précité, que les personnes juridiques ont droit à une satisfaction morale, pourvu que l'atteinte frappe des intérêts qui ne sont pas uniquement l'apanage d'une personne physique. A l' ATF 95 II 481 consid. 12b p. 502, où une société anonyme faisait valoir une atteinte à ses intérêts personnels par la voie de la presse, le Tribunal fédéral a reconnu implicitement que cette société pouvait se prévaloir de l'ancien art. 49 CO, mais que les conditions exigées par cette norme pour obtenir une réparation morale n'étaient pas réunies. Enfin, dans un arrêt publié aux ATF 108 II 422 ss où il était question de l'indemnisation du tort moral en cas de lésions corporelles, instaurée spécialement par l'art. 47 CO, le Tribunal fédéral a fait une brève allusion, au considérant 4c p. 431, au principe jurisprudentiel de l'allocation d'indemnités satisfactoires aux personnes juridiques.
Cette jurisprudence a suscité les critiques de plusieurs auteurs. PIERRE TERCIER (Le nouveau droit de la personnalité, 1984, ch. 2041 p. 269) est d'avis que si le tort moral est défini strictement, on ne voit pas comment les personnes morales pourraient ressentir des souffrances, ni surtout comment il serait possible d'apaiser celles-ci par le versement d'une somme d'argent. Pour FRANZ WERRO (La responsabilité civile, 2e éd. 2011, ch. 172 p. 55), les personnes morales n'ayant pas de perception de la souffrance, il est contestable d'admettre qu'elles puissent subir un tort moral. Le même auteur (in Commentaire romand, Code des obligations, vol. I, 2003, n° 4 ad Intro. art. 47-49 CO et n° 8 ad art. 49 CO) n'avait fait auparavant que citer la jurisprudence et relever l'existence de divergences doctrinales, mais sans prendre position. HANS MERZ (TDPS, vol. VI/1, 1993, Traduction française de Pierre Giovannoni, § 18, Le tort moral et sa réparation, p. 215) professe que l'on devrait refuser une indemnité pour tort moral à une personne morale, qui, par nature, n'a pas de conscience propre, et donc conscience d'une atteinte à ses intérêts personnels. ROBERTO/HRUBESCH-MILLAUER (Offene und neue Fragestellungen im Bereich des Persönlichkeitsschutzes, in Festschrift Jean Nicolas Druey, 2002, p. 241) affirment que, s'agissant des personnes morales, les atteintes au droit de la personnalité ne peuvent provoquer queBGE 138 III 337 (342) BGE 138 III 337 (343)des dommages patrimoniaux. KELLER/GABI (Haftpflichtrecht, 2e éd. 1988, p. 123), avec une référence à l'art. 53 CC, déclarent qu'il est discutable d'admettre que les personnes morales ont la capacité de souffrir de tort moral.
D'autres auteurs approuvent la jurisprudence susmentionnée du Tribunal fédéral. Ainsi, ROLAND BREHM (Berner Kommentar, 3e éd. 2006, nos 42/43 ad art. 49 CO) souligne que dès l'instant où une personne juridique agit et donne expression à sa volonté par ses organes, peu importe qu'elle ne soit pas à même de ressentir une souffrance, puisque ses organes peuvent éprouver pour elle une atteinte à la personnalité; il faut toutefois tenir compte, ajoute-t-il, qu'un organe social ressent normalement moins fortement une atteinte aux droits de la personnalité si elle est dirigée contre la personne morale que si elle est dirigée contre sa propre personne, de sorte que l'octroi d'une indemnité satisfactoire à une personne juridique doit être soumise à des critères plus stricts que si la victime est une personne physique. HEIERLI/SCHNYDER (in Basler Kommentar, Obligationenrecht, vol. I, 5e éd. 2011, n° 7 ad art. 49 CO) et HARDY LANDOLT (Zürcher Kommentar, 3e éd. 2007, nos 15/16 ad art. 49 CO), reconnaissant que les personnes morales peuvent être atteintes dans leurs intérêts personnels, tels le droit au nom, la protection de l'honneur et celle de la sphère privée et secrète, adhérent à la jurisprudence qui permet d'accorder à celles-ci une indemnité pour tort moral sur la base de l'art. 49 CO. HEINZ REY (Ausservertragliches Haftpflichtrecht, 4e éd. 2008, ch. 484 p. 111), rappelant qu'il existe à ce sujet une controverse doctrinale, expose que s'il va de soi qu'une personne morale ne peut pas obtenir une indemnité pour tort moral d'après l'art. 47 CO, celle-ci peut parfaitement y avoir droit en vertu de l'art. 49 CO.
Les critiques émises par une partie de la doctrine contre la jurisprudence publiée du Tribunal fédéral telle qu'elle a été évoquée n'emportent pas la conviction.
En effet, comme le relève pertinemment CLAIRE HUGUENIN (in Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch, vol. I, 4e éd. 2010, n° 5 ad Vor Art. 52- 59 CC), l'étendue de la capacité juridique des personnes morales n'a cessé de se développer en droit suisse depuis la promulgation du Code civil, et cela dans le sens d'une attribution toujours plus grande à ces dernières de droits de la personnalité étendus. Permettre à une personne juridique de requérir paiement d'une indemnité satisfactoire pour réparer une atteinte à ses intérêts personnels nonBGE 138 III 337 (343) BGE 138 III 337 (344)patrimoniaux ne constitue dès lors qu'une étape qui s'inscrit dans ce processus.
A cela s'ajoute que la personne morale, comme création de l'ordre juridique, agit exclusivement par l'entremise de personnes physiques, qui sont ses organes; ces derniers sont des parties de la personne morale elle-même (ATF 121 III 176 consid. 4d p. 182; ATF 112 II 172 consid. II/2c p. 190). Autrement dit, l'acte de l'organe est en règle générale assimilé à celui de la personne juridique, de sorte qu'il existe en principe une unité d'action en ce sens que l'organe et la personne morale sont considérés comme une personne identique (cf. arrêt 4C.44/1998 du 28 septembre 1999 consid. 2d, in sic! 5/2000 p. 407). De par cet emprunt à la théorie de la réalité de la personne morale, il faut admettre, en suivant un raisonnement analogique, qu'un organe d'une personne morale, lorsque celle-ci est victime d'une atteinte à sa personnalité, ressent pour elle une souffrance, qui habilite la personne juridique à réclamer en son nom propre une réparation pour tort moral.
En résumé, il convient de confirmer la jurisprudence, selon laquelle une personne juridique peut faire valoir en justice une demande en réparation du tort moral en application de l'art. 49 CO.
(...)
A propos du montant alloué en réparation du tort moral, une comparaison avec d'autres affaires ne doit intervenir qu'avec circonspection, puisque le tort moral ressenti dépend de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce. Cela étant, une comparaison n'est néanmoins pas dépourvue d'intérêt et peut se révéler, suivant les occurrences, un élément utile d'orientation (ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 705). A défaut d'études comparatives fouillées sur l'octroi d'indemnités satisfactoires en cas d'atteintes aux droits de la personnalité, il sied de se pencher sur des décisions (rendues après 2000) se rapportant au tort moral lors de décès ou de lésions corporelles au sens de l'art. 47 CO, norme qui n'est qu'un cas particulier d'application de la règle générale de l'art. 49 CO (ATF 123 III 204 consid. 2e p. 210 et l'arrêt cité).
BGE 138 III 337 (346)Il résulte d'un arrêt 6S.295/2003 du 10 octobre 2003, consid. 2.2, que le Tribunal fédéral a accordé 25'000 fr. pour tort moral à chacun des enfants à la suite du meurtre de leur père. Le Tribunal fédéral a précisé qu'un des enfants, âgé alors de quatre ans, a durement ressenti la perte de son père et doit suivre une thérapie, ajoutant encore que pour chacun d'entre eux le fait de grandir sans leur père pèsera sur leur vie future.
Dans le cas d'un automobiliste blessé dans un accident de la circulation lui ayant causé un traumatisme crânio-cérébral et une contusion cervicale avec troubles sensitifs, troubles ayant généré une incapacité de travail (totale, puis partielle) de huit mois, le Tribunal fédéral a arrêté l'indemnité pour tort moral à 15'000 fr., précisant que cette somme s'inscrit dans la pratique judiciaire actuelle relative à des événements dont la victime peut se remettre en dépit de certaines séquelles (arrêt 4C.433/2004 du 2 mars 2005 consid. 4.3).
Plus récemment, le Tribunal fédéral, dans un arrêt 4A_77/2011 du 20 décembre 2011 consid. 4.7, a jugé conforme au droit l'allocation d'une indemnité de base de 20'000 fr. à un automobiliste de 63 ans ayant subi une fracture ouverte du genou droit, qui a entraîné des douleurs chroniques justifiant l'allocation ultérieure d'une demi-rente d'invalidité du premier pilier.
Mais sur quelles bases doit-elle être évaluée dans le cas présent?BGE 138 III 337 (346)
BGE 138 III 337 (347)6.3.6 BREHM (op. cit., n° 86 ad art. 49 CO) indique deux critères qui devraient être suivis lorsqu'une autorité judiciaire est amenée à fixer le montant d'une indemnité satisfactoire. Premièrement, cet auteur est d'avis qu'il faut distinguer entre les atteintes qui créent un état durable (à l'instar d'une invalidité qui affecte le lésé sa vie durant) et celles qui s'effacent avec le temps, comme c'est le cas la plupart du temps pour les atteintes à la personnalité; les premières doivent être indemnisées par le versement de sommes plus importantes que celles accordées pour réparer les secondes. Secondement, lorsqu'il existe une atteinte à l'honneur ou au crédit, une différence doit se faire selon que l'atteinte procède d'un acte unique ou selon qu'elle a été propagée dans les médias; dans cette dernière hypothèse, l'atteinte aux droits de la personnalité pèse d'un poids plus important que dans la première, ce qui doit se répercuter sur la quotité de l'indemnité satisfactoire attribuée.
Ces deux critères sont pertinents et peuvent être suivis, à tout le moins lorsqu'une personne juridique est en droit d'obtenir, comme dans le cas présent, réparation pour le tort moral engendré par des atteintes à la personnalité.
D'un côté, il faut prendre en compte que le site internet modifié par le recourant a été accessible au public seulement pendant deux mois, de sorte qu'aucun effet durable n'a été généré. De l'autre, il y a lieu de ne pas perdre de vue que l'atteinte à la personnalité de l'intimée a été diffusée par internet, qui est un système d'interconnexion de réseaux informatiques accessible à toute heure dans le monde entier, par le moyen de communications électroniques toujours plus développées. Ce paramètre est particulièrement important pour une entreprise active dans le transport international de marchandises, dont le marché n'est en principe pas circonscrit à un espace géographique limité.
Tout bien pesé, à considérer encore la volonté délibérée du recourant de nuire à son ancien employeur, il convient d'accorder à l'intimée une indemnité pour tort moral se montant à 10'000 fr., somme qui portera intérêts à 5 % l'an dès le 8 janvier 2010.BGE 138 III 337 (347)