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Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
Erwägung 2
Erwägung 3
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67. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause A.A. contre Justice de paix de l'arrondissement de la Gruyère (recours en matière civile)
 
 
5A_220/2016 du 15 juillet 2016
 
 
Regeste
 
Art. 308 Abs. 2 ZGB; Vaterschaftsbeistandschaft.
 
 
Sachverhalt
 
BGE 142 III 545 (545)A. A.A. est la mère de B.A., née le 3 juin 2015. Le 8 juin suivant, le Service de l'Etat civil de Fribourg a avisé la Justice de paix de l'arrondissement de la Gruyère (Justice de paix) que la filiation entre l'enfant et son père biologique n'avait pas été établie; le 10 juin 2015, la Justice de paix a dès lors requis la mère de la révéler ou d'inviter le père à reconnaître sa fille, faute de quoi une procédure en protection de l'enfant serait ouverte et l'instauration d'une curatelle aux fins d'établir la filiation et faire valoir la créance alimentaire serait envisagée.BGE 142 III 545 (545)
BGE 142 III 545 (546)Le 24 juin 2015, la mère a informé la Justice de paix que, "pour des motifs strictement personnels", elle ne désirait pas divulguer l'identité du père; elle a ajouté qu'elle était capable d'assumer l'entretien de sa fille et de veiller à ses intérêts, si bien qu'il n'y avait pas lieu de nommer un curateur. Elle a maintenu cette position lors de l'audience qui s'est tenue le 10 septembre 2015 devant la Justice de paix.
B. Statuant le 10 septembre 2015, la Justice de paix a institué en faveur de l'enfant une "curatelle de représentation en paternité et aliments" au sens de l'art. 308 al. 2 CC (ch. I), désigné la curatrice (ch. II) et défini son mandat (ch. III-V). La Cour de protection de l'enfant et de l'adulte du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg a rejeté le recours de la mère et confirmé cette décision par arrêt du 16 février 2016. (...)
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours en matière civile formé par la mère.
(extrait)
 
 
Erwägung 2
 
2.2 Le Conseil fédéral prévoyait d'abroger la disposition précitée lors de la révision du droit de l'autorité parentale (FF 2011 8315). Estimant que la curatelle instituée aux fins de recherche de paternité équivalait à une "mise sous tutelle des mères non mariées", il aBGE 142 III 545 (546) BGE 142 III 545 (547)considéré que le simple fait "que la mère qui met au monde l'enfant n'est pas mariée ne justifie pas un tel besoin de protection", car "rien ne permet de croire qu'une mère non mariée est moins à même de protéger ses intérêts et ceux de ses enfants qu'une mère mariée" (FF 2011, ibid., 8333 ch. 1.5.4). Par ailleurs, l'abrogation envisagée "n'affecte en rien le droit de l'enfant de connaître son ascendance, [garanti par la Constitution (art. 119 al. 2 let. g Cst.) et le droit international public (art. 8 CEDH)]"; cependant, à lui seul, "ce droit ne suffit pas (...) à justifier la nomination d'un curateur à l'enfant dont la mère n'est pas mariée", d'autant que "les tests ADN permettent aujourd'hui de déterminer à tout moment de manière fiable la filiation paternelle" (FF 2011, ibid., 8346). Partant, un "curateur ne doit être nommé à l'enfant que si la protection de ce dernier l'exige" (loc. cit.).
Cette suppression ayant été critiquée (cf. sur la question: HÄFELI, Das Recht des Kindes auf Feststellung der Vaterschaft und die Regelung des Unterhaltsanspruchs nach der ZGB-Änderung von 21. Juni 2013, RMA 2014 p. 189 ss, avec les références), la Commission des affaires juridiques du Conseil national a proposé de préciser à l'art. 308 al. 2 CC que le curateur peut se voir conférer le pouvoir de "représenter l'enfant pour la constatation de la paternité". Cette proposition a été approuvée par le Conseil national (BO 2012 CN 1656), puis le Conseil des Etats (BO 2013 CE 15); à cette occasion, il a été rappelé que "le seul fait qu'une femme non mariée mette au monde un enfant n'implique pas en soi qu'il existe un besoin de protection de l'enfant" (Seydoux-Christe, rapporteuse de la Commission des affaires juridiques du CE, loc. cit., qui affirme que les "droits de l'enfant et ses intérêts sont ainsi protégés").
L'autorité qui ordonne une mesure de protection de l'enfant dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation (art. 4 CC), dont le Tribunal fédéral ne revoit l'exercice qu'avec retenue; il n'intervient que si cette autorité a pris en considération des éléments qui ne jouentBGE 142 III 545 (547) BGE 142 III 545 (548)aucun rôle au sens de la loi ou a omis de tenir compte de facteurs essentiels (arrêt 5A_7/2016 du 15 juin 2016 consid. 3.3.3 et la jurisprudence citée). Quoi qu'en pense - non sans témérité - la recourante, la mesure contestée n'est pas inadéquate parce qu'elle a "clairement démontré (...) qu'elle ne cédera pas à la pression et qu'elle ne révélera pas le nom du père", sauf à affirmer que les autorités devraient systématiquement renoncer à intervenir face à la rénitence caractérisée du justiciable.
 
Erwägung 3
 
Au reste, outre le fait que la situation financière de la recourante - en particulier son salaire - n'apparaît nullement aussi "confortable" qu'elle le prétend (cf. consid. 4.2 non publié), son opposition à la désignation d'un curateur de paternité porte préjudice au droit de sa fille de bénéficier d'une contribution d'entretien qui soit également fixée en considération des ressources du père (art. 285 al. 1 CC), puisqu'un rapport juridique de filiation est une condition nécessaire de l'obligation d'entretien que la loi met à la charge des deux parents (art. 276 CC; ATF 129 III 646 consid. 4.1); si cette obligation peut être assumée contractuellement par le père biologique, elle ne découle alors pas du droit de la famille (ATF 136 IV 122 consid. 2.1 et la jurisprudence citée). En outre, faute de reposer sur un jugement (art. 80 al. 1 LP) ou une convention ratifiée par l'autorité de protection de l'enfant (art. 80 al. 2 ch. 2 LP, en relation avec l'art. 287 al. 1 CC; arrêt 5A_950/2014 du 16 avril 2015 consid. 3.7 et les citations), un tel engagement ne constitue pas un titre apte à la mainlevée définitive (cf. sur la pertinence d'un pareil titre: ATF 111 II 2 consid. 2a). Enfin, comme la qualité de "descendant" (art. 457 et 471 ch. 1 CC) est rattachée à la notion juridique de la famille (ATF 134 III 467 consid. 2 et les citations), la vocation d'héritière légale de l'enfant serait compromise en l'absence d'un lien de filiation BGE 142 III 545 (548) BGE 142 III 545 (549)paternelle (MEIER, in Commentaire romand, Code civil, vol. I, 2010, n° 13 ad art. 309 CC).
Il faut concéder à la recourante - qui parle de "désavantages sociaux et psychologiques destructeurs" - que la révélation de l'identité du père peut s'avérer contraire à l'intérêt de l'enfant. En l'occurrence, il ressort de l'arrêt attaqué (art. 105 al. 1 LTF; ATF 140 III 16 consid. 1.3.1) que l'intéressée refuse de la divulguer pour des "raisons personnelles", qui ne sont pas explicitées. Cela étant, il n'est pas possible de déterminer si celles-ci permettraient exceptionnellement au curateur de renoncer à l'action en paternité, sous réserve du consentement de l'autorité de protection de l'enfant (art. 416 ch. 9 CC; cf. MEIER, ibid., n° 15). En tout état de cause, une telle renonciation doit être motivée par l'intérêt de l'enfant, et non par celui des parents à ne pas voir dévoilée une relation susceptible de compromettre leur propre réputation (MEIER, ibid., n° 13 et les citations); au demeurant, elle ne priverait pas l'enfant (capable de discernement) d'intenter lui-même action (art. 19c al. 1 CC, en relation avec l'art. 261 CC; parmi d'autres: MEIER/DE LUZE, Droit des personnes, 2014, n. 179; SCHWENZER/COTTIER, in Basler Kommentar, op. cit., n° 5 ad art. 261 CC).BGE 142 III 545 (549)
BGE 142 III 545 (550)Pour autant qu'un tel moyen soit pertinent, le grief de la recourante tiré d'une violation de sa "sphère privée" (art. 13 Cst.) est infondé. D'une part - comme on l'a vu -, l'intéressée n'a jamais expliqué les "raisons personnelles" qui feraient obstacle à la révélation de l'identité du père biologique ni, partant, démontré qu'elles l'emporteraient sur l'intérêt de son enfant à faire constater la filiation paternelle. D'autre part, elle ne saurait arguer de ce que sa fille peut "faire établir la paternité juridique jusqu'à ses 19 ans" (cf. art. 263 al. 1 ch. 2 CC); la juridiction cantonale objecte à juste titre qu'une paternité établie à l'âge adulte "n'aura pas le bénéfice de l'établissement d'un tel lien durant son enfance et son adolescence, phases importantes [de son] développement" (cf. pour le droit aux relations personnelles [art. 273 CC]: arrêt 5A_459/2015 du 13 août 2015 consid. 6.2.2 et les références, in SJ 2016 I p. 133). De surcroît, l'écoulement du temps pourrait mettre en péril l'administration de certaines preuves.