15. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause A. contre Banque B. SA (recours en matière civile) | |
4A_504/2018 du 10 décembre 2019 | |
Regeste | |
Art. 32, 33, 38, 97 Abs. 1, 107 Abs. 1, 402 OR, Art. 3 ZGB; Banküberweisungen; allgemeine und unlimitierte Bankvollmacht des Vertreters; Selbstkontrahieren; fehlende Legitimation des Vertreters; Schaden.
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Kein Auftrag des Kunden (erster Schritt): Unterscheidung zwischen der Vollmachtsüberschreitung und dem Vollmachtsmissbrauch des Vertreters (E. 3). Frage der Nichtigkeit der allgemeinen und unlimitierten Vollmacht (Selbstkontrahieren) offengelassen (E. 3.3).
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Gesetzliches System im Falle fehlender Legitimation des Vertreters (von der Bank zu tragender Schaden) oder vertragliche Abweichung durch Risikotransferklausel (vom Kunden zu tragender Schaden) (zweiter Schritt) (E. 4).
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Im gesetzlichen System besteht ein Anspruch der Bank auf Schadenersatz gegen ihren Kunden, der verschuldet dazu beigetragen hat, den Schaden, den sie erleidet, zu verursachen oder zu verschlimmern (dritter Schritt) (E. 5).
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Sachverhalt | |
A.a A., de nationalité française, était la compagne de D., homme d'affaires milliardaire franco-britannique, dont elle a eu deux enfants.
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C., né en 1952, de nationalité française, a rapidement tissé des liens de confiance avec celui-ci, l'assistant dans différents aspects de ses affaires.
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A. a rencontré C. en 1991 alors qu'il travaillait comme maître de chantier sur l'une des propriétés de son compagnon. De 1993 à 1994, C. a été directeur du magazine "x", dont D. était propriétaire et dont A. était la rédactrice en chef.
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A.c A. s'est installée en Suisse en 2004 et C. en a fait de même en 2005 avec sa femme, dans une propriété qu'il a acquise pour le prix de 5'100'000 fr. Tant A. que C. ont été assistés pour leur installation en Suisse par un avocat de U.
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Au printemps 2005, l'avocat en question a présenté C. à la banque B. SA (ci-après: la banque), soit à E., responsable pour les clients francophones auprès du département y de la banque à U. Entre 2005 et 2007, C. a ouvert deux comptes bancaires à son nom, un compte joint à son nom et à celui de son épouse et trois comptes au nom de sa société F. SA, dont il était seul administrateur.
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A.d Dès 2005, C. a effectué les démarches nécessaires auprès de la banque, représentée par E., pour l'ouverture de deux comptes en faveur de A. (ci-après: la titulaire du compte ou la cliente). Il a été présenté à la banque comme un ami de longue date de la cliente et comme une personne de confiance, informations confirmées à la banque par l'avocat susmentionné.
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A.d.a Le premier compte a été ouvert le 6 décembre 2005. La titulaire a donné à C. (ci-après: le représentant) une procuration générale et illimitée dont la teneur est la suivante:
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"Le mandant donne pouvoir au mandataire de le représenter dans tous ses rapports avec B. Le mandataire peut en particulier disposer de tous les avoirs en compte ou sur carnet d'épargne, etc., titres et autres valeurs déposés au nom du mandant. Il peut également contracter emprunt, vendre, grever ou retirer des titres ou autres valeurs. Le mandataire pourra également conclure les actes prévus dans cette procuration en sa faveur ou en faveur de tiers. La signature ainsi que toutes déclarations faites et mesures prises par le mandataire engagent le mandant. Le mandant atteste l'authenticité de la signature du mandataire."
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Sous la rubrique "relation entre le mandant et le mandataire", le mandataire est désigné comme étant "un ami". La correspondance relative au compte doit être envoyée à l'adresse du représentant. La titulaire du compte a en outre signé un formulaire d'utilisation du service en ligne y de la banque.
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A.d.b Le second compte a été ouvert le 15 janvier 2007. La titulaire a donné au représentant une procuration générale et illimitée, semblable à la précédente. Celui-ci est désigné comme "homme d'affaires". L'adresse de la titulaire mentionnée dans la procuration est celle du représentant. Le contrat prévoit que la correspondance et les documents seront conservés en banque restante, seuls le déposant lui-même ainsi que tout titulaire d'une procuration illimitée étant autorisés à les retirer.
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A.d.c Les formulaires et procurations sur ces comptes ont été remplis par E. et le représentant, celui-ci les ayant transmis pour signature à la titulaire des comptes.
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Puis, E. a rencontré la titulaire afin de valider les pouvoirs du représentant. Il lui a expliqué le sens de la procuration et des autres documents d'ouverture de compte qu'elle avait signés, ce que celle-ci conteste. Le représentant était présent lors de cette rencontre.
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Le représentant bénéficiait d'une procuration sur un compte ouvert auprès de la banque au nom du fils de la cliente; le gestionnaire responsable de ce compte, G., a rencontré celui-ci accompagné du représentant, désigné comme son parrain.
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Les montants qui étaient dus à la cliente par les trustees ont été crédités sur ses deux comptes. Le bénéfice du prix de vente du magazine (env. 26'000'000 euros) a aussi été versé sur ces comptes, étant précisé que le représentant a perçu un bonus de 500'000 euros.
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A.e Dès leur ouverture, les comptes de la cliente ont été gérés par le seul représentant, qui rédigeait régulièrement pour elle des récapitulatifs des prélèvements et paiements faits sur ses comptes.
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B.
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B.a Du 31 juillet 2006 au 22 janvier 2009, le représentant a détourné des comptes de la cliente un montant total d'environ 13 millions, en passant 14 ordres de virement, soit en faveur de son propre compte auprès de la banque ou d'une banque tierce, soit en faveur du compte détenu avec son épouse auprès de la banque. Les montants détournés, qui ont ensuite été en grande partie reversés sur le compte de sa société, ont servi à financer l'achat, par lui, d'un bien immobilier à V. de 12'000'000 fr., conjointement avec des crédits hypothécaires que lui a octroyés la banque, et à financer des travaux de construction réalisés sur ce bien.
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Durant cette période, les deux comptes de la cliente étaient gérés à la banque par E. et, dès le mois d'août 2007, par G. Celui-ci a pris contact avec le représentant, mais pas avec la cliente.
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B.b Au cours de cette période, le représentant a aussi donné deux ordres de transferts de 356'000 USD et 353'000 USD du compte du fils en faveur de celui de sa mère auprès d'une autre banque. H., gestionnaire du compte, a contacté le fils pour s'assurer que les transferts étaient conformes à sa volonté, ce qui lui a été confirmé.
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B.c La cliente a découvert les détournements après avoir chargé, en août 2009, une société de créer, pour ses enfants, un family office afin de gérer leurs avoirs, et après avoir requis qu'une copie de toutes les pièces bancaires soit adressée à cette société. Le 6 janvier 2010, elle a annulé avec effet immédiat tout pouvoir conféré au représentant sur ses comptes. Elle s'est rendue à la banque et y a rencontré G., H. et I.
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Elle et ses enfants ont déposé une plainte pénale contre le représentant. Au cours de l'enquête pénale, celui-ci a reconnu avoir gravement trompé la confiance de la famille D. et avoir commis des détournements à son préjudice pour financer l'acquisition de ses immeubles en Suisse et les travaux sur ceux-ci.
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B.d Les deux propriétés du représentant à W. et V. ont été mises en vente. La vente pour 10'300'000 fr. de la première propriété n'a pas pu aboutir, la banque ayant refusé de transmettre au notaire les cédules hypothécaires remises en garantie des prêts.
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C.
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C.a Le 23 mars 2013, la cliente a ouvert action en paiement contre la banque, puis, après l'échec de la conciliation, a déposé sa demande devant le Tribunal de première instance de Genève. Elle conclut à la condamnation de la banque à lui payer les montants de 6'450'000 euros et 6'050'010 fr., ces deux montants avec intérêts à 5 % l'an dès le 31 octobre 2007, ainsi que le montant de 150'000 USD avec intérêts à 5 % l'an dès le 24 octobre 2008. Ces montants correspondent aux 14 transferts effectués dans ces trois monnaies par le représentant, lequel a abusé de ses pouvoirs entre le 31 juillet 2006 et le 22 janvier 2009.
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A titre principal, la demanderesse exerce une action en exécution du contrat, soit en remboursement des montants indûment débités de ses comptes et versés sur ceux du représentant, respectivement de sa femme, risque qui, selon elle, est en règle générale à la charge de la banque. Subsidiairement, elle soutient que son action pourrait aussi être fondée sur l'art. 398 CO puisque la banque a agi au détriment des intérêts de sa cliente. Elle y réfute par avance les objections que la banque pourrait tirer des art. 32 al. 1 et 33 al. 3 CO.
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La banque a conclu au rejet de la demande; elle a formé un appel en cause du représentant, qui a été déclaré recevable. Le représentant ne conteste pas sur le principe devoir rembourser à la banque les sommes que cette dernière pourrait être appelée à devoir payer à la cliente, mais il fait valoir en compensation une créance résultant du dommage que lui a causé la banque en refusant de remettre les cédules hypothécaires au notaire, ce qui en a empêché la vente.
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C.b Par jugement du 27 septembre 2017, le Tribunal de première instance de Genève a rejeté la demande de la cliente, ainsi que les conclusions d'appel en cause de la banque.
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C.c Statuant par arrêt du 5 juillet 2018, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté l'appel de la cliente et confirmé le jugement de première instance.
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Analysant en droit les obligations de la banque lorsqu'un gérant indépendant a été mandaté par le client, elle retient que, tant que les actes de celui-ci sont couverts par la procuration (générale et illimitée), la banque n'a pas à se demander s'ils sont dans l'intérêt du client et elle n'a pas à analyser les transactions pour voir si elle devrait intervenir. Se fondant sur l'art. 33 al. 3 CO et l'arrêt 4A_122/2013 du 31 octobre 2013, elle estime que la banque ne doit le faire que si le représentant agit clairement et volontairement au détriment du représenté et qu'elle perçoit la situation sans aucun doute; elle doit disposer d'éléments très clairs, ce qui ne se produira que dans des circonstances exceptionnelles.
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La cour cantonale a admis que les actes du représentant en sa propre faveur étaient couverts par la procuration communiquée à la banque par la cliente, de sorte que celle-là n'était pas tenue d'analyser les transactions et de se demander si elles étaient conformes aux accords passés entre la cliente et son représentant. Elle a retenu que G. "avait eu des doutes" et s'était trouvé "emprunté" vis-à-vis du comportement [du gérant], mais, se basant sur l'arrêt 4A_122/2013, elle a conclu que "rien ne permet de retenir que ces doutes devaient se transformer en certitude pour [la banque]" (en ce sens que les malversations commises ne faisaient, pour elle, aucun doute).
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D. Contre cet arrêt cantonal, la cliente forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral, concluant principalement à sa réforme en ce sens que la banque soit condamnée à lui payer les montants de 6'450'000 euros, 6'050'010 fr. et 150'000 USD, les deux premiers montants avec intérêts à 5 % l'an dès le 31 octobre 2007 et le troisième avec intérêts à 5 % l'an dès le 24 octobre 2008. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision.
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La Cour de céans a délibéré sur le recours en audience publique le 10 décembre 2019.
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(résumé)
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Extrait des considérants:
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2. Lorsque le demandeur allègue que des versements ou virements ont été exécutés par la banque en dépit du défaut de légitimation du donneur d'ordre ou à la suite de faux non décelés, le juge doit examiner qui, du client ou de la banque, doit supporter le dommage qui en résulte en procédant en trois étapes. | |
Tout d'abord (première étape), sur l'action principale du client en restitution de son avoir non amputé des prélèvements indus (cf. art. 107 al. 1 CO), il doit examiner si les virements ont été exécutés sur mandat ou sans mandat du client, ce qui présuppose, en cas de représentation du titulaire du compte par un tiers, de se poser la question des pouvoirs du représentant, respectivement de la ratification des virements par le titulaire (cf. infra consid. 3).
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Ce n'est que si les ordres ont été exécutés sans mandat que le juge doit examiner (deuxième étape) si le dommage est un dommage de la banque ou si, en raison de la conclusion d'une clause de transfert de risque, le dommage est à la charge du client (cf. infra consid. 4).
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Ce n'est enfin que lorsque le dommage est subi par la banque que le juge peut encore devoir examiner (troisième étape) si la banque peut opposer, en compensation, à l'action en restitution de son client, une prétention en dommages-intérêts (art. 97 al. 1 CO) parce que celui-ci aurait fautivement contribué à causer ou à aggraver le dommage en violant ses propres obligations (par exemple, en ne contestant pas dans le délai convenu les opérations irrégulières ou infondées, respectivement en ne consultant pas son dossier de banque restante) (cf. infra consid. 5).
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3.1.1 Lorsque la banque vire de l'argent depuis ce compte à un tiers sur ordre (avec mandat) du client, elle acquiert une créance en remboursement contre celui-ci (art. 402 CO). A l'action en restitution du client, la banque peut donc opposer en compensation une créance en remboursement (arrêts 4A_119/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.2; 4A_379/2016 du 15 juin 2017 consid. 3.2.1). La prétention en remboursement présuppose que la banque ait correctement exécuté l'ordre qui lui a été donné par le client ( ATF 110 II 283 consid. 3a p. 285), notamment qu'elle ne se soit pas trompée, lors de son exécution, dans la personne du destinataire ou le numéro de compte indiqués par le client ( ATF 126 III 20 consid. 3b/aa p. 22).
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En effet, dans le système légal, le défaut de légitimation ou l'existence de faux non décelés font partie des risques inhérents à l'activité bancaire, au même titre que l'insolvabilité du client (GUGGENHEIM/ GUGGENHEIM, Les contrats de la pratique bancaire suisse, 5 e éd. 2014, p. 129 n. 354). Le client dispose donc, en cas de virements exécutés par la banque sans mandat de sa part, à la suite de défauts de légitimation ou de faux non décelés, d'une action en restitution de ses avoirs (sauf clause de transfert de risque), qui est une action en exécution du contrat ( Erfüllungsklage ; art. 107 al. 1 CO; TERCIER/ PICHONNAZ, Le droit des obligations, 6 e éd. 2019, n. 1230 ss). Cette action, qui n'est pas subordonnée à l'existence d'une faute de la banque, ne doit pas être confondue avec l'action en responsabilité pour inexécution contractuelle intentée par le client, laquelle est subordonnée à l'existence d'une faute de la banque (art. 398 al. 2 et 97 al. 1 CO qui pose une présomption de faute; pour des exemples, cf. ATF 131 III 97 consid. 7.1 p. 102; arrêt 4A_54/2017 du 29 janvier 2018 consid. 5.1.1). Il en découle que la banque ne peut pas opposer à l'action en restitution du client une prétention en réduction pour faute concomitante de celui-ci au sens de l'art. 44 al. 1 CO ( ATF 132 III 449 consid. 2 p. 452; ATF 112 II 450 consid. 3a p. 454; ATF 111 II 263 consid. 1a; arrêts 4A_379/2016 déjà cité consid. 3.2.2; 4A_258/2012 du 8 avril 2013 consid. 7.1, résumé in SZIER 2013 p. 454; 4A_536/2008 du 10 février 2009 consid. 5.2; 4A_438/2007 déjà cité consid. 5.1; 4C.315/2005 du 2 mai 2006 consid. 3.2).
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(1) Le représentant doit agir au nom du représenté ( "fait au nom d'une autre personne" ). Il doit manifester - expressément ou tacitement ( ATF 126 III 59 consid. 1b p. 64) - qu'il n'agit pas en son nom, mais en celui du représenté. L'existence d'un rapport de représentation est normalement établie lorsque telle était l'intention réelle du représenté (qui a voulu que le représentant agisse en son nom), du représentant (qui a voulu agir au nom du représenté) et du tiers (qui a voulu/accepté que le représentant signe l'acte juridique au nom du représenté). Si cette volonté (réelle et commune) ne peut être établie, l'existence du rapport de représentation doit être retenue si le tiers pouvait l'inférer du comportement du représentant, interprété selon le principe de la confiance (art. 32 al. 2 CO; ATF 120 II 197 consid. 2b/aa p. 200; arrêt 4A_638/2015 du 9 mars 2016 consid. 3.2.2).
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(2) Le représentant doit avoir le pouvoir de représenter ( "autorisé" ). Il doit agir en vertu de l'autorisation qui lui a été donnée par le représenté, c'est-à-dire en vertu d'une procuration (interne). L'étendue des pouvoirs de représentation internes octroyés (art. 32 al. 1 CO) dépend au premier chef de l'acte d'octroi lui-même (art. 33 al. 2 CO), dont le contenu est apprécié, si nécessaire (si la volonté réelle et commune du représenté et du représentant n'a pas pu être établie), sur la base du principe de la confiance.
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a) si le représenté ratifie l'acte (art. 38 CO; cf. ATF 146 III 37 consid. 7.1 p. 45 et les arrêts cités), ou
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b) si le représenté a porté (expressément ou tacitement) à la connaissance du tiers une procuration qui va au-delà des pouvoirs (internes) qu'il a effectivement conférés au représentant et que, se fiant à cette communication (cf. ATF 99 II 39 consid. 1 p. 41), le tiers a cru de bonne foi à l'existence des pouvoirs (procuration externe - expresse ou tacite -; art. 33 al. 3 CO; ATF 146 III 37 consid. 7.1.2.1 p. 46; ATF 131 III 511 consid. 3.2; ATF 124 III 418 consid. 1c p. 421 s.). La communication au tiers n'a ainsi pas pour conséquence de faire naître les pouvoirs, mais seulement de suppléer à leur absence en cas de bonne foi du tiers (CHRISTINE CHAPPUIS, in Commentaire romand, Code des obligations, vol. I, 2 e éd. 2012, n° 28 ad art. 33 CO et les auteurs cités).
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La communication des pouvoirs par le représenté au tiers au sens de l'art. 33 al. 3 CO peut s'exprimer par une procuration écrite fournie par le représentant au tiers. La portée de la communication doit être examinée avant tout selon le principe de la confiance ( ATF 131 III 511 consid. 3.2.1 p. 518).
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En cas d'abus de pouvoirs, le représentant n'a, en réalité, jamais eu l'intention d'agir pour le compte du représenté; il utilise seulement l'apparence découlant des pouvoirs communiqués au tiers pour agir exclusivement dans son propre intérêt et de façon délictueuse ( ATF 119 II 23 consid. 3b p. 25 s.; arrêt 4A_313/2010 du 3 septembre 2010 consid. 3.4.2.3). Le tiers, même de bonne foi, peut être déchu du droit d'invoquer la protection légale attachée à sa bonne foi parce qu'il n'a pas fait preuve de l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui (art. 3 al. 2 CC). Le débat ne se place pas sur le terrain de la preuve et du fait, mais sur celui du droit à la protection de la bonne foi. La mesure de l'attention exigée par les circonstances, au sens de l'art. 3 al. 2 CC, est une notion soumise à l'appréciation (juridique) du juge (art. 4 CC; ATF 143 III 653 consid. 4.3.3 p. 662; ATF 122 III 1 consid. 2a/aa p. 3). Celui-ci doit prendre en compte l'ensemble de la situation concrète et appliquer des critères objectifs ( ATF 119 II 23 consid. 3c/aa p. 27). Le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec retenue le résultat de l'appréciation du juge (art. 4 CC; ATF 143 III 653 consid. 4.3.3 p. 662).
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Lorsque la banque intimée soutient que, confrontée à une procuration bancaire, elle ne devrait intervenir que lorsqu'elle a la certitude que le représentant agit au détriment de la représentée, elle ne peut être suivie: elle se borne à substituer sa propre règle (contenant un critère unique et absolu), qui lui est plus favorable, à celle de l'art. 3 al. 2 CC, qui prescrit que l'attention attendue du représentant est déterminée en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes.
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Contrairement à ce qu'affirme la cour cantonale, on ne saurait tirer aucun enseignement de l'arrêt 4A_122/2013 (consid. 3.2.2) pour le cas d'espèce. La question alors posée n'était pas comparable à celle de la présente affaire: il s'agissait d'examiner la diligence que devait adopter la banque - qui n'était alors pas confrontée au même conflit d'intérêts - vis-à-vis du bénéficiaire de la procuration qui était l'actionnaire unique et ayant droit économique de la société anonyme (déjà remis en cause dans l'arrêt 4A_474/2014 déjà cité consid. 6.2.2).
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Deux virements ont été justifiés différemment par le représentant: pour le premier (1'250'000 euros le 11 août 2008), il a affirmé qu'il s'agissait de l'octroi d'un prêt accordé à un membre de la famille de la cliente et, pour le second (150'000 USD le 25 octobre 2008), il n'a apporté aucune justification. Les deux montants ont été versés sur le compte du représentant (sans que la banque ne démontre qu'ils auraient ensuite été transférés sur un autre compte); ces circonstances ne jouent toutefois aucun rôle décisif au moment d'examiner le comportement de la banque selon l'art. 3 al. 2 CC.
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Le cas du dernier ordre (1'000'000 euros le 22 mai 2007) est différent, puisque le représentant l'a exécuté en passant par la plateforme e-banking de la cliente, celle-ci lui ayant donné son propre mot de passe. Il était dès lors impossible à la banque de savoir que l'ordre avait été donné par le représentant; dans ces conditions, on ne saurait reprocher à la banque de n'avoir pas interpellé la cliente pour obtenir des renseignements quant à l'étendue des pouvoirs du représentant. Cela étant, il faut considérer que le virement a été exécuté par la banque sur mandat de la cliente.
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3.4.2 En ce qui concerne les 9 ordres (encore litigieux) donnés par le représentant après août 2007, il convient d'emblée de relever le contexte particulier dans lequel ceux-ci s'inscrivaient (conflit d'intérêts de la banque): les montants prélevés par le gérant, qui étaient placés sur ses comptes, servaient de garantie pour les crédits que la banque lui accordait. Dans cette situation, celle-ci se devait d'être particulièrement attentive, ce d'autant plus que le représentant a effectué 9 prélèvements, à chaque fois pour un montant important.
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La cour cantonale a en outre établi que, dans ce contexte particulier, le gestionnaire G., auxiliaire de la banque gérant les comptes de la cliente, a eu des doutes quant à la légitimation du représentant et qu'il s'est même trouvé "emprunté, ceci notamment compte tenu du lien d'amitié de plus de vingt ans [entre le représentant et la cliente]". L'autre témoin (H., conseiller en investissement, auxiliaire de la banque), auquel se réfèrent explicitement les juges cantonaux, a déclaré qu'il s'était aussi "effectivement posé des questions", qu'il en avait alors parlé à G. qui était compétent pour opérer une vérification, qu'ensemble "ils [s'étaient posé] des questions", mais qu'"à sa connaissance rien n'avait été fait".
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A ce constat (doutes des auxiliaires opposables à la banque selon l'art. 101 al. 1 CO) s'ajoute le fait que le représentant, par ses prélèvements successifs, a finalement vidé totalement le compte de la cliente auprès de la banque.
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Dans ces conditions, on doit retenir que la banque n'a pas fait preuve de l'attention que les circonstances permettaient d'exiger d'elle (art. 3 al. 2 CC); elle aurait dû procéder à des vérifications auprès de la cliente.
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(...)
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Les parties peuvent toutefois modifier conventionnellement la réglementation légale du risque de défaut de légitimation, en adoptant une clause de transfert de risque ( ATF 132 III 449 consid. 2 p. 452).
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5.1 Selon la jurisprudence, la banque, qui subit le dommage du fait de l'exécution d'un paiement sans mandat, peut tout au plus demander des dommages-intérêts à son client si celui-ci a fautivement contribué à causer ou à aggraver le dommage qu'elle a ainsi subi (art. 97 al. 1 et/ou art. 41 al. 1 CO; ATF 111 II 263 consid. 1c et 2a; arrêt 4A_119/2018 précité consid. 5.2). Il s'agit là d'une "action" en dommages-intérêts de la banque contre son client fondée principalement sur l'art. 97 al. 1 CO que celle-ci oppose en compensation à l'action en restitution de l'avoir en compte introduite par le client.
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La responsabilité de l'art. 97 al. 1 CO, qui repose ici sur le rapport juridique noué entre les parties, est soumise à quatre conditions: la violation du contrat, le dommage, le rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation contractuelle et le dommage, ainsi que la faute.
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Dans le cadre de la prétention compensante de la banque contre le client, le dommage (deuxième condition) est celui subi par la banque et correspond au montant que celle-ci doit payer une seconde fois, au client, en raison des transferts qu'elle a exécutés sans mandat de celui-ci.
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Le non-respect de ses obligations contractuelles par le client, présumé fautif (quatrième condition), contribue au dommage ou en entraîne l'aggravation (troisième condition).
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Le client viole ses obligations contractuelles (première condition) lorsque, d'une manière ou d'une autre, il contribue à causer le dommage parce qu'il incite la banque à procéder au transfert indu (arrêts 4A_54/2009 du 20 avril 2009 consid. 1; 4A_438/2007 précité consid. 5.1) ou parce qu'il contribue à aggraver le dommage (arrêts 4A_119/2018 précité consid. 5.2 et 6; 4A_379/2016 précité consid. 3.2.2 et 5.4). Selon la jurisprudence, le client contribue à aggraver le dommage de la banque, notamment en ne contestant pas les écritures irrégulières ou infondées qu'il aurait pu ou dû constater en consultant les relevés de compte qu'il a reçus ou en ne relevant pas, ni ne contrôlant son courrier en banque restante (i.e. en ne surveillant pas son gérant indépendant) (arrêt 4A_119/2018 précité consid. 5.2 et 6).
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La Cour de céans peut toutefois renoncer à lui renvoyer la cause dès lors que la banque n'a pas démontré avoir, devant les autorités précédentes et en conformité avec les règles de la procédure, allégué les faits et fourni les moyens de preuve propres à établir l'existence et la quotité de la prétention qu'elle entendait opposer en compensation, en indiquant les passages topiques de ses écritures et en renvoyant précisément aux pièces du dossier ( ATF 140 III 86 consid. 2 p. 90). Le seul fait qu'elle ait invoqué, dans sa réponse en première instance, l'art. 7 de ses Conditions générales n'est à cet égard pas suffisant.
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