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Regeste
Sachverhalt
Extrait des considérants:
2. Le recourant conteste le prononcé de son expulsion. ...
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22. Extrait de l'arrêt de la Cour de droit pénal dans la cause A. contre Ministère public central du canton de Vaud (recours en matière pénale)
 
 
6B_627/2022 du 6 mars 2023
 
 
Regeste
 
Art. 66a und 66d StGB; strafrechtliche Landesverweisung.
 
Vorliegend stellte das kantonale Gericht eine Gefahr für eine unmenschliche oder erniedrigende Behandlung im Falle einer Rückkehr des tibetischen Beschwerdeführers in die Volksrepublik China fest, welche dem Vollzug der Landesverweisung in dieses Land in Anwendung von Art. 66d Abs. 1 lit. b StGB entgegensteht. Indem das kantonale Gericht eine Landesverweisung des Beschwerdeführers "in einen Drittstaat" unter Ausschluss der Volksrepublik China aussprach, ohne Präzisierung des Drittstaats, hat es Bundesrecht verletzt. Eine Landesverweisung kann nicht gestützt auf blosse Vermutungen in Bezug auf das Ausreiseland ausgesprochen werden. Des Weiteren verlangt die Wegweisung in einen Drittstaat, dass eine solche möglich ist, d.h. der Ausländer dort über ein Aufenthaltsrecht verfügt (E. 2.4).
 
 
Sachverhalt
 
BGE 149 IV 231 (232)A. Par jugement du 19 mai 2021, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a notamment condamné A. pour agression, vol, recel, brigandage, utilisation frauduleuse d'un ordinateur et utilisation frauduleuse d'un ordinateur d'importance mineure, à une peine privative de liberté de 30 mois, sous déduction de 245 jours de détention avant jugement, et à une amende de 300 fr., convertible en 6 jours de peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement, a révoqué le sursis qui lui avait été accordé par le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne le 15 juillet 2020 et ordonné l'exécution de la peine pécuniaire, a renoncé à prononcer l'expulsion du territoire suisse, a constaté qu'il avait subi 10 jours de détention dans des conditions illicites et a ordonné que 5 jours soient déduits de la peine.
B. Statuant sur l'appel formé par le Ministère public vaudois, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois l'a, par jugement du 20 décembre 2021, partiellement admis et a prononcé l'expulsion de A. du territoire suisse pour une durée de 8 ans, vers un pays tiers, à l'exclusion de la République populaire de Chine.
En bref, il en ressort les éléments suivants.
A., né en 1999 au Tibet, d'où il est ressortissant, est arrivé en Suisse en 2012, alors qu'il était âgé de douze ans, accompagné de sa mère, son frère et ses deux soeurs, tandis que son père était déjà en Suisse depuis plusieurs années, au bénéfice d'un permis B. Ils sont partis du Tibet, plus précisément de la province de U., pour se rendre en Inde, puis en Suisse. Il parle le tibétain avec sa famille mais ne connaît pasBGE 149 IV 231 (232) BGE 149 IV 231 (233)le mandarin. Il n'a pas de passeport de la République populaire de Chine. En Suisse, il est au bénéfice d'un permis F, soit d'une admission provisoire en qualité de réfugié à qui l'asile n'a pas été accordé. Après avoir terminé l'école obligatoire à 15 ans, il a suivi quelques stages et débuts d'apprentissages, sans pour autant terminer de formation. Avant son arrestation, il était domicilié avec sa famille à V. mais indique qu'il dormait la plupart du temps chez un ami, en allant voir ses parents deux fois par semaine.
C. A. forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à l'annulation de "l'Arrêt de la Chambre d'appel pénale du 20 décembre 2021" et à la confirmation du jugement du Tribunal correctionnel du 19 mai 2021 en tant qu'il a renoncé à l'expulser du territoire suisse. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de "l'Arrêt de la Chambre pénale de recours du 5 février 2021 (ACPR/75/2021)" et au retour du "dossier à la Chambre pénale de recours pour nouvel examen au sens des considérants". Il requiert, par ailleurs, l'octroi d'une juste et équitable indemnité valant participation aux honoraires de son avocat et l'octroi de l'assistance judiciaire.
Invités à déposer des observations, la cour cantonale et le Ministère public y ont renoncé, se référant aux considérants de la décision attaquée. Ces écritures ont été communiquées pour information à A.
Le Tribunal fédéral a admis le recours dans la mesure où il est recevable.
 
2.1.1 La clause de rigueur décrite à l'art. 66a al. 2 CP permet de garantir le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.; ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; ATF 144 IV 332 consid. 3.3.1). Elle doit être appliquéeBGE 149 IV 231 (233) BGE 149 IV 231 (234)de manière restrictive (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; ATF 144 IV 332 consid. 3.3.1). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; ATF 144 IV 332 consid. 3.3.2), il convient de s'inspirer des critères énoncés à l'art. 31 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA; RS 142.201) et de la jurisprudence y relative, dans le cadre de l'application de l'art. 66a al. 2 CP. L'art. 31 al. 1 OASA prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité. L'autorité doit tenir compte notamment de l'intégration du requérant selon les critères définis à l'art. 58a al. 1 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse, de l'état de santé ainsi que des possibilités de réintégration dans l'Etat de provenance. Comme la liste de l'art. 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du condamné (ATF 147 IV 453 consid. 1.4.5; ATF 144 IV 332 consid. 3.3.2). En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (ATF 147 IV 453 consid. 1.4.5).
Les éventuels obstacles à l'expulsion, au sens de l'art. 66d al. 1 CP, doivent déjà être pris en compte au moment du prononcé deBGE 149 IV 231 (234) BGE 149 IV 231 (235)l'expulsion, pour autant que ces circonstances soient stables et puissent être déterminées de manière définitive (arrêts 6B_884/2022 du 20 décembre 2022 consid. 3.2.1; 6B_1015/2021 précité consid. 1.2.2; 6B_38/2021 précité consid. 5.5.3 et les références citées).
Il existe deux types de condition au report de l'exécution de l'expulsion, l'une relative, qui suppose que le statut de réfugié ait été d'abord reconnu par la Suisse à l'étranger expulsé (art. 66d al. 1 let a CP, "flüchtlingsrechtliches Nonrefoulement-Prinzip"), et l'autre absolue, qui s'applique à toute personne quel que soit son statut (art. 66d al. 1 let. b CP, "menschenrechtliches Nonrefoulement-Prinzip"). L'exception au principe de non-refoulement qui protège les réfugiés (art. 66d al. 1 let. a, 2e phrase, CP) doit être interprétée restrictivement, l'auteur doit en particulier représenter un danger pour la collectivité du pays d'accueil. Le principe de non-refoulement découlant des normes de droit international ("menschenrechtliches Nonrefoulement-Prinzip") est absolu, en ce sens qu'il vaut indépendamment des infractions commises ou du potentiel de dangerosité de l'auteur (arrêt 6B_38/2021 précité consid. 5.5.3 et les références citées).
2.1.5 La condition de report de l'expulsion prévue par l'art. 66d al. 1 let. b CP est fondée sur le principe de non-refoulement découlant des normes impératives du droit international en matière de droits humains. Il convient sur ce plan de se référer à l'art. 25 al. 3 Cst., aux termes duquel nul ne peut être refoulé sur le territoire d'un Etat dans lequel il risque la torture ou tout autre traitement ou peine cruels et inhumains ainsi qu'à l'art. 3 par. 1 de la Convention du 10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants qui prévoit qu'aucun Etat partie n'expulsera,BGE 149 IV 231 (235) BGE 149 IV 231 (236)ne refoulera, ni n'extradera une personne vers un autre Etat où il y a des motifs sérieux de croire qu'elle risque d'être soumise à la torture (arrêt 6B_884/2022 précité consid. 3.2.4 et les références citées). L'art. 3 CEDH dispose que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH), pour apprécier l'existence d'un risque réel de mauvais traitements au sens de l'art. 3 CEDH, il convient d'appliquer des critères rigoureux. Il s'agit de rechercher si, eu égard à l'ensemble des circonstances de la cause, il y a des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé, si on le renvoie dans son pays, y courra un risque réel d'être soumis à un traitement contraire à l'art. 3 CEDH (arrêts de la CourEDH F.G. contre Suède du 23 mars 2016, § 113; Saadi contre Italie du 28 février 2008, § 125 et 128; Chahal contre Royaume-Uni du 15 novembre 1996, § 74 et 96).
Pour tomber sous le coup de l'art. 3 CEDH, un mauvais traitement doit toutefois atteindre un minimum de gravité (arrêt de la CourEDH Saadi contre Italie précité, § 134). L'appréciation de ce minimum dépend de l'ensemble des données de la cause (ATF 134 I 221 consid. 3.2.1). Si l'existence d'un tel risque est établie, l'expulsion, respectivement le refoulement emporterait nécessairement violation de l'art. 3 CEDH, que le risque émane d'une situation générale de violence, d'une caractéristique propre à l'intéressé, ou d'une combinaison des deux (cf. arrêt de la CourEDH F.G. contre Suède précité, § 116 et les références citées).
2.2 Après un examen des critères pertinents et une pesée des intérêts, la cour cantonale a estimé qu'il n'y avait pas lieu de faire bénéficier le recourant de la clause de rigueur de l'art. 66a al. 2 CP. Elle a ensuite examiné si le renvoi du recourant dans son pays d'origine risquait de l'exposer à des actes de torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, au sens de l'art. 3 CEDH, compte tenu de son ethnie tibétaine. A cet égard, elle a relevé que la soeur aînée du recourant avait témoigné lors de l'audience d'appel et avait expliqué les circonstances du départ de la famille du Tibet, ainsi que le trajet effectué pour se rendre en Suisse, en passant par les montagnes, puis en rejoignant l'Inde, pays depuis lequel la famille avait pris un vol jusqu'en Suisse. Elle avait également déclaré que, si les communistes chinois apprenaient le retour d'un ou de plusieurs membres de la famille, après leur fuite en Suisse il y a onze ans, ils les condamneraient ou les mettraient dans des camps.BGE 149 IV 231 (236) BGE 149 IV 231 (237)Le recourant, par son défenseur, avait produit lors de l'audience d'appel un bordereau de pièces faisant principalement un état des lieux du respect (ou de l'absence de celui-ci) des droits humains et des libertés au Tibet. Il en ressortait notamment que cinquante experts indépendants des droits humains des Nations Unies avaient formulé de vives critiques à l'égard de la Chine, entre autres pour la répression qu'elle exerçait à l'encontre des minorités ethniques et religieuses au Tibet. Par ailleurs, selon la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral, le renvoi d'une personne d'ethnie tibétaine ne pouvait en aucun cas être exécuté vers la République populaire de Chine, puisqu'elle risquerait d'y être soumise à des traitements inhumains ou d'y être torturée. Néanmoins, en réponse à une interpellation déposée par une conseillère nationale le 29 septembre 2017, le Conseil fédéral avait indiqué qu'il était possible de renvoyer dans un Etat tiers des requérants d'asile tibétains déboutés. Au vu de ces éléments, la cour cantonale a estimé qu'il était non seulement justifié, mais aussi proportionné, de prononcer l'expulsion du recourant du territoire suisse vers un pays tiers, à l'exclusion de la République populaire de Chine. La cour cantonale a encore relevé que, compte tenu du fait que le recourant ne semblait pas avoir de lien avec un autre pays, qu'il avait toute sa famille proche en Suisse et qu'il était encore jeune, la durée de cette expulsion pouvait être fixée à huit ans. La question d'un éventuel report de l'exécution de cette mesure, en application de l'art. 66d CP, pourrait encore être tranchée par l'autorité administrative compétente.
La cour cantonale a en outre indiqué que le Ministère public avait requis l'inscription de l'expulsion au Système d'information Schengen (ci-après: SIS). Toutefois, elle a indiqué que, par inadvertance, le dispositif de sa décision notifié aux parties ne prévoyait pas que la mesure d'expulsion soit inscrite au SIS. Il n'était pas possible de rectifier cette erreur à ce stade, de sorte qu'il serait renoncé à inscrire la mesure dans le SIS.
2.3 Le recourant conteste la non-inscription de son expulsion dans le SIS. Dans la mesure où l'absence d'inscription est une mesure en sa faveur, il ne dispose pas d'intérêt juridique protégé à contester cet élément, si bien que son argumentation est irrecevable. Par ailleurs, il consacre également de longs développements à invoquer le droit des Etats étrangers à être informés du motif de son expulsion - soit des infractions pénales graves et un risque élevé de récidive - et au comportement "déloyal" de la Suisse en l'absence d'une inscriptionBGE 149 IV 231 (237) BGE 149 IV 231 (238)au SIS. Là encore, le recourant ne dispose pas d'intérêt juridiquement protégé, dans la mesure où il invoque les droits de tiers, et son recours est également irrecevable pour ce motif. Par ailleurs, une partie de son recours tend à contester l'appel du Ministère public. Ce faisant, le recourant perd de vue que le recours au Tribunal fédéral ne peut porter que sur une décision cantonale de dernière instance (art. 80 al. 1 LTF). En tant qu'il concerne l'appel du Ministère public, son recours est également irrecevable.
Se fondant notamment sur la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral, la cour cantonale a admis l'existence d'un risque de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour du recourant en République populaire de Chine. Sur la base des constatations cantonales, sur lesquelles il n'y a pas lieu de revenir, le recourant peut donc se prévaloir de la protection des art. 25 al. 3 Cst. et 3 CEDH. Le principe de non-refoulement faisant obstacle au prononcé de son expulsion en République populaire de Chine, c'est à bon droit que la cour cantonale a refusé de prononcer l'expulsion du recourant dans ce pays. Toutefois, la cour cantonale a estimé, se référant à une réponse du Conseil fédéral à une interpellation d'une conseillère nationale, que l'expulsion du recourant dans un "pays tiers" était possible. Elle n'a toutefois aucunement indiqué quel "pays tiers" elle envisageait et semble plutôt estimer que le recourant peut être expulsé dans n'importe quel autre pays que la République populaire de Chine. Cette approche abstraite ne saurait être suivie. On ne peut fonder une expulsion sur de simples spéculations quant au pays de renvoi.BGE 149 IV 231 (238) BGE 149 IV 231 (239)Or, en l'espèce, on ignore si un établissement dans un autre pays du monde serait possible. Il ne ressort aucunement du jugement entrepris que le recourant serait susceptible d'obtenir un permis de séjour ailleurs qu'en République populaire de Chine, dont il est ressortissant. Bien au contraire, la cour cantonale a elle-même constaté que le recourant n'a pas de lien avec un autre pays que son pays d'origine et la Suisse. En outre, à suivre le raisonnement de la cour cantonale, le prononcé d'une expulsion serait toujours possible en cas de risque de traitements inhumains ou dégradants puisqu'il suffirait d'exclure les pays où ce risque existe et d'expulser le condamné dans "tout autre pays". Par ailleurs, s'il ressort effectivement de la réponse du Conseil fédéral à laquelle se réfère la cour cantonale (Réponse du 15 novembre 2017 du Conseil fédéral concernant l'interpellation 17.3917 de la Conseillère nationale Barbara Gysi - Sécurité des procédures liées au renvoi des requérants d'asile tibétains déboutés), que les personnes tibétaines peuvent se rendre dans un "Etat tiers", cette notion doit être comprise au regard du droit des étrangers (cf. en particulier art. 83 al. 1 et 2 LEI). A cet égard, le renvoi dans un Etat tiers nécessite qu'un tel renvoi soit possible, c'est-à-dire que l'étranger y dispose d'un droit de séjour. L'"Etat tiers" ne peut à l'évidence pas être compris comme étant "n'importe quel autre Etat", sans aucune autre précision.
Au vu de ce qui précède, la cour cantonale a violé le droit fédéral en prononçant l'expulsion du recourant du territoire suisse "vers un pays tiers, à l'exclusion de la République populaire de Chine". L'arrêt cantonal sera donc réformé (cf. art. 107 al. 2 LTF) en ce sens qu'il est renoncé au prononcé de l'expulsion.BGE 149 IV 231 (239)