VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 6S.439/1999  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 6S.439/1999 vom 17.04.2000
 
[AZA 0]
 
6S.439/1999/mnv
 
COUR DE CASSATION PENALE
 
*************************************************
 
17 avril 2000
 
(suite à la délibération du 24 février 2000)
 
Composition de la Cour: M. Schubarth, Président, Président du Tribunal fédéral, M. Schneider, M. Wiprächtiger, M. Kolly, Juges, et Mme Brahier Franchetti, Juge suppléante.
 
Greffière: Mme Michellod.
 
_________
 
Statuant sur le pourvoi en nullité
 
formé par
 
X.________, représenté par Me Stéphane Riand, avocat à Sion,
 
contre
 
le jugement rendu le 21 mai 1999 par la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal valaisan dans la cause qui oppose le recourant au Ministère public du Valais central;
 
(art. 251 aCP et 46 al. 1 let. k LB, concours)
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
 
les faits suivants:
 
A.- Par jugement du 27 avril 1998, le Tribunal du IIe arrondissement pour le district de Sion a notamment condamné X.________ pour divers faux dans les titres à huit mois d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans.
 
X.________ a interjeté appel. Par jugement du 21 mai 1999, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal valaisan a partiellement réformé le jugement du 27 avril 1998; elle a acquitté X.________ sur un point et a réduit sa peine à six mois d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans.
 
B.- La Cour d'appel a notamment retenu les faits suivants:
 
X.________ était chef contrôleur de la Banque cantonale du Valais (BCV) depuis le 1er janvier 1985. A ce titre, il était non seulement contrôleur interne mais aussi réviseur indépendant au sens de la loi sur les banques. Dans sa fonction de réviseur, X.________ a notamment établi les rapports de révision des 26 avril 1989 et 22 mai 1990 relatifs aux exercices 1988 et 1989.
 
Ces deux rapports de révision n'affirmaient rien d'inexact mais ils étaient lacunaires sur des points importants. Le rapport 1988 ne faisait pas expressément mention de Y.________, ni du fait que les dépassements le concernant provenaient d'un abus de sa position de représentant indépendant de la BCV à Fully; il ne précisait pas non plus que la régularisation des suspens sur le compte représentant se faisait par le biais du compte courant privé de Y.________.
 
Dans le rapport 1989, il n'était pas fait mention du lien entre les suspens et les dépassements de crédit par Y.________, ni du fait que ces suspens avaient été remplacés par d'autres tout aussi critiquables; il n'était rien dit au sujet de la politique du fait accompli pratiquée par Y.________ pour dépasser ses limites de crédit, ni du dépassement de plus de 13 millions de francs sur le compte courant de Z.________, frère de
 
Y.________. Ces lacunes objectives sur des points importants étaient de nature à convaincre le lecteur de l'absence d'irrégularités; c'était notamment le cas des membres du conseil d'administration de la BCV, personnes étrangères au domaine bancaire.
 
X.________ avait connaissance des dépassements de comptes, des abus de la position de représentant, de la longueur anormale des suspens et des faiblesses du système de contrôle interne des représentants; il avait aussi conscience de ses obligations de contrôleur, notamment de son devoir d'informer sans délai le conseil d'administration et l'autorité de surveillance des irrégularités qu'il constatait. Par son silence, il a appuyé la politique du secret voulue par le directeur A.________. En revanche, aucune connivence avec Y.________ n'a été établie.
 
La Cour d'appel a estimé que X.________ avait, en rédigeant les rapports relatifs aux exercices 1988 et 1989, commis un faux dans les titres par omission au sens de l'art. 251 aCP. Elle a par contre abandonné l'accusation de violation de l'art. 46 al. 1 let. k de la loi sur les banques, cette infraction étant prescrite.
 
C.- X.________ a interjeté un pourvoi en nullité.
 
Invité à se déterminer, le Ministère public du Valais central s'est purement et simplement référé aux considérants du jugement attaqué.
 
Considérant en droit :
 
1.- Le pourvoi en nullité ne peut être formé que pour violation du droit fédéral (art. 269 PPF). Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués dans le pourvoi mais il ne peut aller au-delà des conclusions (art. 277bis PPF), lesquelles doivent être interprétées à la lumière de leur motivation; celle-ci circonscrit donc les points litigieux que le Tribunal fédéral peut examiner (ATF 124 IV 53 consid. 1; 123 IV 125 consid. 1).
 
En l'espèce, le recourant ne se plaint que d'une violation de l'art. 251 aCP; il ne remet pas en cause l'application des art. 18 ss de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne (RS 952. 0, LB) et 43 ss de l'ordonnance sur les banques et les caisses d'épargne (RS 952. 02, OB), dispositions fixant le contenu des rapports de révision bancaire; il n'y a donc pas à revenir sur cette question.
 
Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait contenues dans la décision attaquée (art. 277bis al. 1 PPF). Il est également lié par les constatations d'instances inférieures ou d'experts lorsque la dernière instance cantonale s'y réfère ou y renvoie, explicitement ou implicitement (ATF 118 IV 122 consid. 1). Le Tribunal fédéral ne peut pas lui-même compléter l'état de fait; il n'examine l'application du droit fédéral que sur la base de l'état de fait retenu (ATF 106 IV 338 consid. 1). Dans la mesure où l'argumentation du recourant serait fondée sur des faits qui ne sont pas constatés dans l'arrêt attaqué, il n'est pas possible d'en tenir compte; le pourvoi en nullité est une voie de recours qui provoque le contrôle de l'application du droit fédéral à un état de fait arrêté définitivement par l'autorité cantonale (ATF 124 IV 81 consid.
 
2a).
 
2.- Le recourant invoque une violation de l'art. 251 aCP. Il estime que cette disposition n'est pas applicable aux faux rapports de révision bancaire litigieux, car ceux-ci ne sont pas aptes à prouver la véracité de leur contenu.
 
a) Les infractions du droit pénal relatif aux titres protègent la confiance qui, dans les relations juridiques, est placée dans un titre comme moyen de preuve. C'est pourquoi parmi les titres on ne trouve notamment que les écrits destinés et propres à prouver un fait ayant une portée juridique (art. 110 ch. 5 al. 1 CP). Le caractère de titre d'un écrit est relatif. Par certains aspects, il peut avoir ce caractère, par d'autres non. Selon la jurisprudence, la destination d'un écrit à prouver peut se déduire directement de la loi ou, à défaut, du sens et de la nature de l'écrit en question. Savoir si un écrit est propre à prouver se détermine en vertu de la loi ou, à défaut, des usages commerciaux (ATF 125 IV 17 consid. 2a/aa p. 22, 273 consid. 3a/aa).
 
L'art. 251 ch. 1 aCP vise non seulement la création d'un titre faux ou la falsification d'un titre (faux matériel), mais aussi l'établissement d'un titre mensonger (faux intellectuel). Il y a création d'un titre faux lorsqu'une personne fabrique un titre dont l'auteur réel ne coïncide pas avec l'auteur apparent, alors que le faux intellectuel vise l'établissement d'un titre qui émane de son auteur apparent, mais qui est mensonger dans la mesure où son contenu ne correspond pas à la réalité (ATF 125 IV 17 consid. 2a/aa p. 22 et les arrêts cités).
 
Il est toutefois généralement admis qu'un simple mensonge écrit ne constitue pas un faux intellectuel. La confiance que l'on peut avoir à ne pas être trompé sur la personne de l'auteur est plus grande que celle que l'on peut avoir à ce que l'auteur ne mente pas par écrit; pour cette raison, la jurisprudence exige, dans le cas du faux intellectuel, que le document ait une crédibilité accrue et que son destinataire puisse s'y fier raisonnablement.
 
Une simple allégation, par nature sujette à vérification ou discussion, ne suffit pas; il doit résulter des circonstances concrètes ou de la loi que le document est digne de confiance, de telle sorte qu'une vérification par le destinataire n'est pas nécessaire et ne saurait être exigée (ATF 123 IV 61 consid. 5b p. 64 s.; 122 IV 332 consid. 2c p. 339). Tel est le cas lorsque certaines assurances objectives garantissent aux tiers la véracité de la déclaration; il peut s'agir, par exemple, d'un devoir de vérification qui incombe à l'auteur du document ou encore de l'existence de dispositions légales comme les art. 958 ss CO relatifs au bilan, qui définissent le contenu du document en question. En revanche, le simple fait que l'expérience montre que certains écrits jouissent d'une crédibilité particulière ne suffit pas, même si dans la pratique des affaires il est admis que l'on se fie à de tels documents. Il faut noter, enfin, que la limite entre le mensonge écrit et le faux intellectuel dans les titres doit être fixée de cas en cas en fonction des circonstances concrètes de l'espèce (ATF 125 IV 17 consid. 2a/aa, 273 consid. 3a/aa et les arrêts cités).
 
b) Le rapport de révision bancaire est exigé par la loi qui en définit le contenu (art. 21 LB et 43 ss OB). L'organe de révision, extérieur à la banque, doit être agréé par la Commission fédérale des banques (CFB, art. 20 LB et 35 ss OB); sous l'ancien droit, qui admettait que les rapports de révision relatifs à des banques cantonales soient établis par le service de révision de la banque même, la CFB contrôlait si ce service était suffisant et pouvait intervenir auprès de la banque si tel n'était pas le cas (art. 18 al. 2 aLB, RS 1848-1947, vol. 10 p. 325; art. 34 aOB du 17 mai 1972, RO 1972 832). Le but du rapport de révision est de permettre aux organes responsables de la banque et à la CFB de prendre les décisions nécessaires à l'application de la loi et de veiller au respect des prescriptions légales. La valeur probante d'un tel rapport s'impose à l'évidence. Le grief est donc infondé.
 
3.- Le recourant soutient que l'art. 251 aCP n'entre pas en considération lorsqu'un rapport de révision bancaire est incomplet; seuls seraient applicables l'art. 46 al. 1 let. k LB et, subsidiairement, l'art. 49 al. 1 let. e LB.
 
a) Les banques sont tenues de soumettre chaque année leur compte annuel au contrôle de réviseurs indépendants de l'établissement (art. 18 LB). Toutefois, jusqu'en 1994, les banques cantonales étaient dispensées de faire appel à un réviseur externe si elles possédaient un service de révision exercé par des personnes qualifiées (art. 18 al. 2 aLB). La CFB décidait si ce service de révision était suffisant et, le cas échéant, invitait la banque cantonale soit à le modifier soit à confier la révision à une institution reconnue extérieure (art. 34 aOB).
 
Les réviseurs doivent s'assurer que les comptes annuels sont établis, tant à la forme qu'au fond, conformément aux prescriptions des lois, statuts et règlements (art. 19 al. 1 LB). Le rapport de révision doit notamment faire apparaître clairement la situation financière générale de la banque; il doit indiquer en premier lieu si les engagements, portés au bilan régulièrement établi, sont couverts par les actifs et si les fonds propres qui y figurent sont intacts; le rapport s'ouvre par un résumé des irrégularités constatées et des réserves émises, avec un renvoi aux passages y relatifs du rapport (art. 43 OB).
 
Les art. 46 à 51bis LB contiennent des dispositions pénales. En vertu de l'art. 46 al. 1 let. k LB, est passible de l'emprisonnement jusqu'à six mois ou de l'amende jusqu'à 50'000 francs celui qui, intentionnellement, aura, en exécutant le contrôle ou en établissant le rapport y afférent, violé de manière grossière les obligations que cette loi ou les dispositions d'exécution lui assignent en qualité d'organe de révision agréé, et aura en particulier fourni dans le rapport de révision de fausses indications ou dissimulé des faits importants; s'il a agi par négligence, la peine est de 30'000 francs d'amende au plus (art. 46 al. 2 LB). Quant à l'art. 49 al. 1 let. e LB, il prévoit qu'est puni des arrêts ou de l'amende jusqu'à 20'000 francs celui qui, intentionnellement, aura omis de fournir à la CFB les informations qu'il était tenu de lui communiquer; en cas de négligence, la peine est de 10'000 francs d'amende au plus (art.
 
49 al. 2 LB).
 
b) Comme l'ont relevé le Tribunal d'arrondissement et la Cour d'appel, lorsque des indications intentionnellement fausses ou incomplètes figurent dans les rapports que l'institution de révision d'une banque adresse au conseil d'administration ou à la CFB, se pose le problème du concours entre les art. 46 al. 1 let. k LB et 251 aCP, si ces avis inexacts ou ces faux rapports réunissent les éléments constitutifs objectifs et subjectifs des deux normes pénales.
 
La Cour d'appel, en se référant aux motifs du Tribunal d'arrondissement, a estimé que le faux dans les titres au sens de l'art. 251 aCP n'était pas absorbé par une éventuelle infraction à l'art. 46 al. 1 let. k LB. Le Tribunal d'arrondissement s'est basé sur l'avis de Niklaus Schmid. Cet auteur relève que la question du concours entre les deux dispositions est controversée mais qu'étant donné la différence entre les biens juridiques protégés, on tend à admettre le concours idéal parfait; il ajoute que cette solution s'impose lorsque les rapports de révision ne sont pas adressés seulement à la CFB en tant qu'instrument de surveillance, mais qu'ils sont aussi présentés au conseil d'administration et correspondent alors plutôt au rapport de l'organe de révision des art. 729 et 729b CO (Niklaus Schmid, La responsabilité pénale du réviseur, Publications de la Chambre fiduciaire, vol. 149, Zurich 1997, p. 91 s.).
 
Le Tribunal d'arrondissement a estimé que tel était le cas en l'espèce. Il a constaté que les rapports litigieux établis par le recourant n'avaient pas seulement servi au contrôle administratif par la CFB mais avaient aussi été communiqués au conseil d'administration et à la direction, que le recourant n'était pas seulement réviseur indépendant mais également responsable de l'inspectorat interne, que les rapports étaient mis en discussion avec les responsables concernés et que le recourant, lorsqu'il constatait des infractions ou manquements graves, était tenu d'en rapporter immédiatement, par oral et par écrit, à la direction, au président du conseil d'administration et au gouvernement cantonal. Le Tribunal d'arrondissement en a conclu que les rapports litigieux n'étaient pas uniquement destinés à la CFB en tant qu'instrument de surveillance des banques.
 
Le recourant soutient en revanche que les art. 46 ss LB forment un corps de dispositions pénales cohérent et autonome, que les éléments constitutifs de l'art. 46 al. 1 let. k LB recouvrent complètement ceux de l'art. 251 aCP et que le concours idéal parfait aurait pour conséquence que toute violation de l'art. 46 al. 1 let. k LB serait aussi réprimée par l'art. 251 aCP, ce que le législateur ne peut avoir voulu. Les rapports de révision n'étant pas remis à des tiers hors de la CFB et de la banque, ils n'ont servi qu'à éluder une réglementation administrative, ce qui, par application de la jurisprudence rendue en matière de faux dans la procédure fiscale ou d'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger, exclut l'application de l'art. 251 aCP.
 
c) Afin de déterminer si l'art. 46 al. 1 let. k LB entre en concours avec l'art. 251 aCP, il convient d'examiner l'évolution de la loi sur les banques depuis son adoption en 1934.
 
Jusqu'en 1971, les dispositions pénales des art. 46 à 51 LB avaient la teneur reçue lors de l'adoption de la loi en 1934. L'art. 47 al. 1 let. a aLB/1934 prévoyait l'emprisonnement pour six mois au plus ou l'amende de 20'000 francs au plus pour celui qui, intentionnellement, en sa qualité de réviseur ou d'aide-réviseur, manquait gravement aux devoirs qui lui incombaient lorsqu'il procédait à une révision ou rédigeait le rapport de révision. L'art. 47 al. 2 aLB/1934 prévoyait une amende de 10'000 francs au plus en cas de négligence (RS 1848-1947, vol. 10 p. 342). Selon le message, cette disposition s'inspirait du projet de code pénal mais le maximum des peines était abaissé parce que ces dispositions spéciales visaient dans une large mesure des fautes administratives; il était néanmoins précisé que si les infractions à la loi sur les banques constituaient un délit de droit commun, le code pénal était applicable (FF 1934 I 189 s.). L'art. 50 al. 1 aLB/1934 renvoyait aux dispositions générales du code pénal fédéral du 4 février 1853 (RO III 1851/53 335); elles correspondaient aux art. 1 à 110 CP entrés en vigueur le 1er janvier 1942. Enfin, en vertu de l'art. 50 al. 2 aLB/1934, la poursuite de toutes les infractions prévues aux art. 46 ss aLB/1934 incombait aux cantons.
 
Les art. 46 ss LB ont été une première fois révisés par loi du 11 mars 1971 entrée en vigueur le 1er juillet 1971 (RO 1971 808). Selon le message, il s'agissait de les adapter à l'évolution de la législation pénale administrative, notamment par le groupement plus rigoureux des infractions en délits et contraventions selon la nature de l'élément constitutif, par le relèvement massif des amendes et par le transfert de la compétence pénale au Département fédéral des finances et des douanes (FF 1970 I 1158, 1173 ss et 1196 ss). Les nouveaux art. 46 à 49 sont, pour l'essentiel, toujours en vigueur; tel est notamment le cas de l'art. 46 al. 1 let. k LB. La loi du 11 mars 1971 a également modifié les dispositions relatives à la procédure. L'art. 51bis aLB/1971 prévoyait nouvellement que les infractions aux art. 46, 49 et 50 LB seraient poursuivies et jugées par le Département conformément à la loi fédérale du 15 juin 1934 sur la procédure pénale, tandis que les infractions aux art. 47 et 48 LB, relatives à la violation du secret bancaire et à l'atteinte au crédit d'une banque, resteraient de la compétence des cantons, pour le motif que ces dernières devaient plutôt être considérées comme relevant du droit commun.
 
Les art. 46 ss LB ont été à nouveau révisés le 22 mars 1974 dans le cadre de l'adoption de la loi fédérale sur le droit pénal administratif (DPA), entrée en vigueur le 1er janvier 1975 (RO 1974 1857). Selon le message, les modifications étaient avant tout d'ordre rédactionnel (FF 1971 I 1017, p. 1045). Néanmoins, à cette occasion a été introduit un nouvel article prévoyant que les art. 14 à 18 DPA seraient applicables (art. 50bis LB). L'art. 51 LB a été modifié en ce sens que les art. 2 à 13 DPA s'appliqueraient aux infractions prévues aux art. 46, 49, 50 et 50bis LB (art. 51 al. 2 LB), et que les art. 1 à 110 CP s'appliqueraient aux infractions prévues aux art. 47 et 48 LB (art. 51 al. 1 LB; RO 1974 1857, p. 1929).
 
d) S'agissant de la question du concours, il apparaît que le législateur de 1934 n'entendait pas faire de l'art. 47 al. 1 let. a aLB/1934 une disposition régissant le faux rapport du réviseur bancaire de manière exclusive; selon son intention clairement exprimée, le droit pénal ordinaire devait rester applicable lorsque les éléments constitutifs d'une infraction étaient donnés (FF 1934 I 189 s.). Il n'y a pas de motif de retenir que cela ne s'appliquait pas, dès l'entrée en vigueur du nouveau code pénal en 1942, à l'art. 251 aCP réprimant le faux dans les titres.
 
La situation a changé au 1er janvier 1975. L'art. 51 al. 2 LB alors entré en vigueur a défini l'infraction de l'art. 46 al. 1 let. k LB comme du droit pénal administratif (cf. Bodmer/Kleiner/Lutz, Kommentar zum Bundesgesetz über die Banken und Sparkassen, 10e éd., Zurich 1999, remarques préliminaires ad art. 38-49, n° 6); l'art. 50bis LB a déclaré les art. 14 à 18 DPA applicables. Selon l'art. 15 DPA, le faux dans les titres dont le but est de procurer un avantage illicite selon la législation administrative fédérale ou de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou à d'autres droits des pouvoirs publics est puni de l'emprisonnement ou d'une amende de 30'000 francs au plus. Cette norme spéciale, créée pour la législation administrative fédérale, exclut l'application de l'art. 251 aCP; l'application de l'art. 251 aCP est en particulier exclue en cas de faux intellectuel, que l'art. 15 DPA, à la différence de l'art. 251 aCP, ne rend pas punissable (ATF 113 II 181 consid. 3b/aa; 108 IV 180 consid. 3b).
 
Il en découle que la rédaction et la présentation d'un rapport de révision inexact ou incomplet ne tombent pas sous le coup de l'art. 251 aCP lorsque le réviseur agit dans le seul but d'éluder le contrôle prévu par le droit administratif fédéral (cf. aussi Hans Walder, Die Technik und Taktik der Untersuchung in Strafsachen, dargestellt anhand von Beispielen aus der Praxis, Kriminalistik 1978, p. 265 i.f.; Bodmer/Kleiner/Lutz, op. cit. , remarques préliminaires ad art. 38-49, n° 9; de manière générale: Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, Bes. Teil II, 4e éd., Berne 1995, § 36 n° 60 i.f.). Dans ce cas, le réviseur tombe sous le coup de l'art. 15 DPA s'il falsifie un rapport et sous celui de l'art. 46 al. 1 let. k LB s'il établit un rapport faux. Par contre, si le réviseur agit également dans un autre but ou consent à tout le moins à une autre utilisation, par exemple s'il remet le rapport à un tiers qui n'en est pas le destinataire légal pour en retirer un avantage illicite, il y a, comme en cas de faux en matière fiscale (cf. ATF 122 IV 25 consid. 3 p. 30), concours entre l'infraction administrative et le faux ou l'usage de faux du droit ordinaire (cf. Stratenwerth, op. cit. , loc. cit. ).
 
e) Pour déterminer si les personnes auxquelles le recourant a remis ses rapports font partie des destinataires légaux au sens de la loi sur les banques, il est nécessaire d'examiner le système prévu par cette loi et son ordonnance.
 
aa) L'art. 23bis al. 2 LB prévoit que la CFB peut demander que le rapport de révision lui soit remis (cf. art. 47a OB, introduit par ordonnance du 14 janvier 1976, RO 1976 91). Cette faculté a été introduite par loi du 11 mars 1971 afin d'améliorer l'information de la CFB (RO 1971 808); précédemment, la CFB n'avait normalement pas accès aux rapports de révision (FF 1970 I 1157, p. 1170).
 
Il apparaît donc que l'art. 47 al. 1 let. a aLB/1934, correspondant à l'art. 46 al. 1 let. k LB, n'a pas été introduit pour sanctionner la confection d'un faux rapport destiné à la CFB; un tel rapport tombait sous cette disposition pénale indépendamment de sa connaissance par la CFB.
 
bb) S'agissant des autres destinataires, l'art. 21 al. 2 LB prévoit que le rapport de révision est communiqué aux organes de la banque préposés à la haute direction, à la surveillance et au contrôle en vertu de la loi, des statuts, du contrat de société ou du règlement; si la banque a la personnalité juridique, il est également remis à l'organe de contrôle prévu par le code des obligations. Selon l'art. 48 al. 1 OB, les banques dotées de la personnalité juridique doivent faire circuler leur rapport de révision parmi les membres de l'organe responsable de la direction supérieure, de la surveillance et du contrôle; le rapport doit être discuté lors d'une séance de cet organe, avec établissement d'un procès-verbal; les comptes annuels ne peuvent être soumis à l'approbation de l'assemblée générale qu'après que les membres de cet organe ont pris connaissance du rapport de révision relatif à l'exercice précédent (art. 48 al. 2 OB).
 
On peut se demander si l'ordonnance sur les banques, qui parle d'organe au singulier, entend restreindre la diffusion du rapport de révision à un seul organe ou si celui-ci doit être distribué à tous les organes chargés des tâches de haute direction, de surveillance et de contrôle comme le prévoit le texte de l'art. 21 al. 2 LB.
 
L'art. 21 al. 2 aLB/1934 prévoyait, dans les trois langues, que le rapport de révision était communiqué "aux organes responsables de la direction supérieure, de la surveillance et du contrôle". Modifié par loi du 11 mars 1971, l'art. 21 al. 2 LB, dans ses versions française et italienne, prévoit toujours la communication "aux organes préposés à la haute direction, à la surveillance et au contrôle"; en revanche, dans le texte en langue allemande, il est nouvellement question de la communication "dem ... Organ". Quant aux anciennes dispositions d'exécution, elles parlaient, dans les trois langues, d'organe au singulier (art. 41 al. 3 du règlement d'exécution de la LB du 26 février 1935, RS 1848-1947, vol. 10 p. 344; art. 42 du règlement d'exécution de la LB du 30 août 1961, RO 1961 703, cf. RS 952. 821).
 
Les travaux préparatoires n'expliquent pas le remplacement du pluriel par le singulier dans le texte allemand de l'art. 21 al. 2 LB. Il faut en déduire que le législateur n'a matériellement rien voulu changer et que l'art. 21 al. 2 LB prévoit la communication à tous les organes remplissant les fonctions de la haute direction, de la surveillance et du contrôle afin que leurs membres en prennent connaissance et en discutent. Lorsque la banque est une société anonyme, cela a lieu par la remise d'un exemplaire du rapport au président du conseil d'administration (art. 47 al. 2 let. a OB); avec son accord, des exemplaires peuvent être directement envoyés à d'autres destinataires (Bodmer/Kleiner/Lutz, op. cit. , art. 18-22, n° 126).
 
Il est à noter que le réviseur qui ne remet pas le rapport au président du conseil d'administration peut être puni en vertu de l'art. 50 LB, disposition pénale administrative (cf. art. 51 al. 2 LB). La remise du rapport de révision aux organes chargés de la haute direction, de la surveillance et du contrôle par l'entremise du président du conseil d'administration constitue donc l'exécution d'une obligation duré viseur découlant du droit administratif fédéral.
 
f) Les organes de la BCV préposés à la haute direction, à la surveillance et au contrôle se déterminent selon la loi, les statuts et les règlements (art. 21 al.
 
2 LB).
 
La BCV est une banque cantonale qui, au moment des faits, était régie par un décret du 24 juin 1969 sur la Banque cantonale du Valais, complété par un règlement du 19 février 1969, approuvé par le parlement le 24 juin 1969. Selon la législation précitée, le parlement cantonal exerçait la haute surveillance par l'intermédiaire du gouvernement cantonal; les organes de la BCV étaient le conseil d'administration, le comité de banque, la direction et l'office de contrôle.
 
En vertu de l'art. 34 du règlement, la direction assistait aux séances du conseil d'administration et du comité avec voix consultative; il faut en déduire qu'elle était un organe chargé de la haute direction, de la surveillance et du contrôle de la BCV; le fait qu'elle recevait ainsi connaissance du rapport de révision lors de sa discussion par le conseil d'administration ne signifie pas que le rapport était remis à des tiers. La même conclusion s'impose à l'égard du membre du gouvernement qui participait aux séances du conseil d'administration en tant qu'observateur avec voix consultative, puisque le gouvernement valaisan était, en vertu de la législation, un organe préposé à la haute surveillance de la BCV.
 
L'autorité cantonale n'a pas constaté que les deux rapports de révision litigieux auraient été communiqués à d'autres destinataires que ceux prévus aux art. 21 al. 2 LB, 47 al. 2 let. a et 47a al. 1 OB; le rapport du 26 avril 1989 mentionne d'ailleurs qu'il est adressé en quatorze exemplaires ausiègedelaBCVàl'attentionde"MonsieurlePrésidentduConseild'administration"etenunexemplaireàlaCFB.
 
Elle n'a pas non plus constaté que le recourant envisageait de remettre les rapports à d'autres personnes ou à les utiliser à des fins étrangères aux buts d'un rapport de révision. On ne saurait non plus retenir qu'il devait, de par la nature de ces rapports de révision ou pour d'autres motifs, s'attendre à ce qu'ils soient remis en mains de personnes autres que les destinataires prévus par la loi sur les banques.
 
Quant au fait, relevé par l'autorité cantonale, que le recourant était aussi chef du service de contrôle interne, il est sans pertinence dès lors que cette double fonction, admise par l'art. 18 al. 2 aLB/1934 pour les réviseurs de banques cantonales, impliquait nécessairement la connaissance du rapport par l'organe responsable du contrôle de la banque.
 
Au vu de ce qui précède, il apparaît que les omissions reprochées au recourant relèvent exclusivement des dispositions pénales de la loi sur les banques et que l'art. 251 aCP ne trouve donc pas application dans le cas d'espèce. La cour cantonale a par conséquent violé le droit fédéral en condamnant le recourant pour faux dans les titres au sens de l'art. 251 aCP.
 
4.- Le recourant soulève encore d'autres griefs en relation avec la violation de l'art. 251 aCP. Cette disposition ne s'appliquant pas en l'espèce, il n'est pas nécessaire de les examiner.
 
Comme le recourant obtient gain de cause, il ne sera pas perçu de frais et une indemnité lui sera versée par la Caisse du Tribunal fédéral (art. 278 al. 3 PPF).
 
Par ces motifs,
 
le Tribunal fédéral :
 
1. Admet le pourvoi, annule le jugement attaqué et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
 
2. Dit qu'il n'est pas perçu de frais.
 
3. Dit que la Caisse du Tribunal fédéral versera au recourant une indemnité de 2'500 francs à titre de dépens.
 
4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant, au Ministère public du Valais central et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal valaisan.
 
__________
 
Lausanne, le 17 avril 2000
 
Au nom de la Cour de cassation pénale
 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
 
Le Président,
 
La Greffière,
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).