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Informationen zum Dokument  BGer I 294/2000  Materielle Begründung
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BGer I 294/2000 vom 15.12.2000
 
[AZA 7]
 
I 294/00 Mh
 
IIIe Chambre
 
composée des Juges fédéraux Schön, Spira et Widmer; Berset,
 
Greffière
 
Arrêt du 15 décembre 2000
 
dans la cause
 
J.________, recourante, représentée par Pro Infirmis Vaud, rue Pichard 11, Lausanne,
 
contre
 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, rue du Lac 37, Clarens, intimé,
 
et
 
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
 
A.- Souffrant de paraparésie, J.________ a été mise au bénéfice d'une rente entière d'invalidité à partir de mars 1996. En outre, divers moyens auxiliaires lui ont été octroyés.
 
Le 22 février 1999, la prénommée a présenté une demande d'allocation pour impotent à l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : OAI). Elle a décrit, de manière détaillée, les difficultés qu'elle rencontre dans l'accomplissement des cinq actes ordinaires de la vie autres que les déplacements à l'extérieur, tout en indiquant qu'elle était capable de les accomplir seule, mais que cela lui prenait plus de temps. Elle a précisé qu'à l'extérieur, elle était dépendante de l'aide d'autrui.
 
Il résulte, par ailleurs, de ses explications qu'elle doit porter la journée des protections contre l'incontinence, car elle n'a pas le temps d'aller aux toilettes et que la nuit, elle "fait automatiquement dans ses langes" car l'acte d'aller aux toilettes exige de sa part trop d'efforts et de temps.
 
Dans un rapport du 2 mars 1999, le docteur M.________, gynécologue traitant, a diagnostiqué, notamment, une incontinence urinaire type flooding avec urgences mictionnelles, des troubles mictionnels chez une patiente avec paraparésie spastique des membres inférieurs, un status après spondylite TCB et cyphose dorsale résiduelle (Pott). En sus du problème urinaire qu'il qualifie d'extrêmement invalidant, ce praticien fait état d'une incontinence ano-rectale occasionnelle survenant surtout lors d'émissions de selles liquides. Il a joint à son rapport un avis du 16 septembre 1998 du docteur K.________, médecin adjoint au service de neurologie du Centre Hospitalier Z.________, dont il ressort que J.________ présente un handicap moteur sévère associé à une dysurie à l'initiation à la miction, ainsi que des urgences mictionnelles motivant le port d'une garniture permanente.
 
Par décision du 19 juillet 1999, l'OAI a rejeté la demande d'allocation pour impotent.
 
B.- J.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud en concluant à l'octroi d'une allocation pour impotent.
 
Dans le cadre de l'instruction a été produit un rapport du 3 septembre 1999 du docteur D.________, médecin traitant et chef du service d'orthopédie et traumatologie Z.________. Ce praticien a constaté qu'à part la déformation séquellaire rachidienne, la patiente présentait des séquelles neurologiques importantes touchant la fonction vésico-sphinctérienne ainsi que la marche et la verticalisation; toute mobilisation, même sur de courts trajets, nécessitait beaucoup de temps et d'énergie, ainsi que des efforts intenses quasi permanents, représentant par là une surcharge très importante pour la vie quotidienne de la patiente.
 
Par jugement du 30 novembre 1999, la cour cantonale a rejeté le recours de l'assurée.
 
C.- Assistée, comme en première instance, par Pro Infirmis Vaud, la prénommée interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont elle demande l'annulation, en concluant à l'octroi d'une allocation pour impotence de degré moyen.
 
L'OAI propose implicitement le rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) ne s'est pas déterminé.
 
Considérant en droit :
 
1.- a) La recourante semble tout d'abord reprocher au tribunal cantonal de ne l'avoir pas invitée à s'expliquer oralement comme elle l'avait demandé.
 
b) Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel (art. 29 al. 2 Cst.), dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 124 V 183 consid. 4a, 122 II 469 consid. 4a et les arrêts cités).
 
La jurisprudence en a déduit, en particulier, le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 124 I 51 consid. 3a, 242 consid. 2, 124 II 137 consid. 2b, 124 V 181 consid. 1a, 375 consid. 3b et les références).
 
En revanche, l'art. 29 al. 2 Cst. ne garantit pas plus que l'art. 4 al. 1 aCst. le droit de s'exprimer oralement devant l'autorité appelée à statuer (ATF 125 I 219 consid. 9b; Auer/Malinverni/Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II, n° 1300).
 
c) Par ailleurs, l'obligation d'organiser des débats publics dans le contentieux de l'assurance sociale au sens de l'art. 6 § 1 CEDH suppose une demande du plaideur. Pour qu'une telle demande puisse être prise en considération, elle doit être formulée de manière claire et indiscutable.
 
A cet égard, on considère que lorsqu'une partie sollicite sa comparution personnelle, cela n'équivaut pas à une demande de débats publics (ATF 125 V 38 consid. 2; Jean-Maurice Frésard, L'applicabilité de l'art. 6 § 1 CEDH au contentieux de l'assurance sociale et ses conséquences sous l'angle du principe de la publicité des débats, RSA 1994, p. 194 ss).
 
d) En l'espèce, la recourante a eu largement la possibilité de s'expliquer par écrit dans la procédure cantonale, au cours des deux échanges d'écritures ordonnés par le premier juge. Par ailleurs, elle a seulement demandé à être entendue personnellement par le tribunal cantonal, ce qui, selon la jurisprudence précitée, n'équivaut pas à une demande formelle d'organiser des débats. On peut dès lors admettre qu'en refusant de donner suite à la requête de la recourante, le premier juge n'a pas porté atteinte à ses droits de partie. Le grief tiré de la violation du droit d'être entendu se révèle dès lors mal fondé.
 
2.- Le litige porte sur le point de savoir si la recourante a droit à une allocation pour impotent et si oui, de quel degré.
 
3.- a) Est considéré comme impotent l'assuré qui, en raison de son invalidité, a besoin de façon permanente de l'aide d'autrui ou d'une surveillance personnelle pour accomplir les actes ordinaires de la vie (art. 42 al. 2 LAI). Selon la jurisprudence, sont déterminants les six actes ordinaires suivants :
 
- se vêtir et se dévêtir;
 
- se lever, s'asseoir, se coucher;
 
- manger;
 
- faire sa toilette (soins du corps)
 
- aller aux W.-C.;
 
- se déplacer à l'intérieur ou à l'extérieur, établir
 
des contacts (ATF 124 II 247 sv., 121 V 90 consid. 3a
 
et les références).
 
b) L'art. 36 RAI prévoit trois degrés d'impotence. En vertu de l'al. 2 de cette disposition, l'impotence est moyenne si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, abesoin :
 
a) d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir la plupart des actes ordinaires de la vie oub) d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, une surveillance personnelle permanente.
 
En revanche, selon l'art. 36 al. 3 RAI, il y a impotence de faible degré si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, abesoin :
 
a) de façon régulière et importante, de l'aide d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie oub) d'une surveillance personnelle permanente ouc) de façon permanente, de soins particulièrement astreignants, nécessités par l'infirmité de l'assuré oud) lorsqu'en raison d'une grave atteinte des organes sensoriels ou d'une grave infirmité corporelle, il ne peut entretenir des contacts sociaux avec son entourage que grâce à d'importants services fournis de façon régulière par des tiers.
 
4.- a) En l'espèce le premier juge a considéré que la recourante avait besoin de l'aide d'autrui uniquement pour les déplacements à l'extérieur et que, partant, les conditions de l'octroi d'une allocation d'impotence de faible degré n'étaient pas remplies.
 
b) La recourante conteste cette appréciation. Elle soutient que c'est seulement au prix d'efforts excessifs qu'elle parvient à accomplir les cinq actes de la vie quotidienne autres que les déplacements à l'extérieur et fait valoir qu'elle est inapte à accomplir ces actes de manière habituelle au sens de l'arrêt ATF 106 V 153, de sorte qu'elle remplirait les conditions des art. 42 al. 2 LAI et 36 al. 2 RAI.
 
c) Le dossier médical fait ressortir sans équivoque que la recourante présente un handicap moteur sévère doublé d'une incontinence urinaire grave et d'une incontinence ano-rectale occasionnelle. La recourante déclare, à cet égard, qu'elle est contrainte de porter des protections contre l'incontinence la journée et des langes la nuit et qu'elle "fait automatiquement dans les langes", car l'acte d'aller aux toilettes exige trop d'efforts et de temps de sa part. Dans son rapport du 16 septembre 1998, le docteur K.________ avait d'ailleurs constaté que la dysurie à l'initiation à la miction et les urgences mictionnelles dont souffrait la recourante motivaient le port d'une garniture permanente.
 
d) Selon la jurisprudence, de manière générale on ne saurait réputer apte à un acte ordinaire de la vie l'assuré qui ne peut l'accomplir que d'une façon non conforme aux moeurs usuelles (ATF 106 V 159 consid. 2b). Ce principe est en particulier applicable lorsqu'il s'agit d'apprécier la capacité d'accomplir l'acte consistant à aller aux toilettes (ATF 121 V 95 consid. 6c, cf. également ATF 121 V 94 consid. 6b et les références). Par ailleurs, le Tribunal fédéral des assurances a jugé que, sous l'angle juridique, il n'y a aucune raison de traiter différemment un assuré qui n'est plus en mesure d'accomplir une fonction (partielle) en tant que telle ou ne peut l'exécuter que d'une manière inhabituelle et un assuré qui peut encore accomplir cet acte, mais n'en tire aucune utilité (ATF 117 V 151 consid. 3b).
 
e) En l'espèce, il est constant que le double handicap de la recourante l'empêche d'accomplir, d'une manière conforme aux moeurs usuelles, l'acte d'aller aux toilettes. Par ailleurs, force est de constater que même si, au prix de grands efforts, la recourante est apte à se déplacer seule jusqu'aux toilettes, le temps dont elle a besoin pour y accéder et se dévêtir est insuffisant, de sorte que sa capacité technique de s'y rendre sans l'aide d'autrui ne lui est d'aucune utilité. On doit dès lors considérer, en application de la jurisprudence précitée, qu'elle n'est pas apte à accomplir seule cet acte ordinaire de la vie. Compte tenu de son incapacité de se déplacer sans l'aide d'autrui à l'extérieur - admise à juste titre par la cour cantonale - il y a donc lieu de retenir que la recourante remplit les conditions des art. 42 al. 2 LAI et 36 al. 3 let. a RAI.
 
f) Contrairement à ce qu'allègue la recourante, la jurisprudence citée au consid. 4d ci-dessus n'est pas applicable aux autres actes de la vie quotidienne, dans la mesure où leur fonction et leur utilité sont maintenues dans le cas particulier. De surcroît, il faut rappeler que si certains actes sont rendus plus difficiles ou même ralentis par l'infirmité, cela ne suffit pas pour conclure à l'existence d'une impotence (RCC 1989 p. 228 et 1986 p. 507). Par ailleurs, le dossier n'établit pas que la recourante aurait besoin d'une surveillance personnelle permanente au sens de l'art. 36 al. 2 let. b RAI, de sorte qu'elle ne remplit pas les conditions du droit à une allocation d'impotence de degré moyen.
 
g) Sur le vu de ce qui précède, la recourante a droit à une allocation pour impotence de degré faible. C'est dans ce sens qu'il convient d'accueillir ses conclusions et d'annuler le jugement attaqué.
 
Représentée par Pro Infirmis, la recourante a droit à des dépens (arrêt non publié K. du 30 avril 1998, I 501/97 et VSI 2000, p. 295 consid. 2).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
 
prononce :
 
I. Le recours est admis et le jugement du 30 novembre
 
1999 du Tribunal des assurances du canton de Vaud,
 
ainsi que la décision du 19 juillet 1999 de l'Office
 
cantonal vaudois de l'assurance-invalidité sont annulés.
 
La recourante a droit à une allocation pour
 
impotence de degré faible.
 
II. Il n'est pas perçu de frais de justice.
 
III. L'intimé versera à la recourante la somme de 2000 fr.
 
(y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de
 
dépens pour l'instance fédérale.
 
IV. Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera sur les dépens pour la procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de dernière instance.
 
V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
 
Tribunal des assurances du canton de Vaud et à
 
l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 15 décembre 2000
 
Au nom du
 
Tribunal fédéral des assurances
 
Le Président de la IIIe Chambre :
 
La Greffière :
 
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