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Informationen zum Dokument  BGer 2A.583/2000  Materielle Begründung
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BGer 2A.583/2000 vom 06.04.2001
 
[AZA 0/2]
 
2A.583/2000
 
IIe COUR DE DROIT PUBLIC
 
***********************************************
 
6 avril 2001
 
Composition de la Cour: MM. les Juges Wurzburger, président,
 
Müller et Berthoud, juge suppléant. Greffier: M. Langone.
 
___________
 
Statuant sur le recours de droit administratif
 
formé par
 
B.________, né le 6 mars 1970, représenté par Me Benoît Carron, avocat à Genève,
 
contre
 
l'arrêt rendu le 13 novembre 2000 par le Juge unique de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la cause qui oppose le recourant au Service de l'état civil et des étrangers du canton du V a l a i s;
 
(art. 13e LSEE; assignation au territoire)
 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent
 
les faits suivants:
 
A.- Le 10 août 1998, l'Office fédéral des réfugiés a rejeté la seconde demande d'asile déposée par B.________, d'origine palestinienne, et sommé celui-ci de quitter la Suisse jusqu'au 30 septembre 1998, sous peine de refoulement.
 
Placé en détention préventive le 10 juin 1998, B.________ a été condamné, le 11 novembre 1998, à une peine de vingt et un mois de réclusion et à l'expulsion de Suisse d'une durée de huit ans pour vol et dommages à la propriété.
 
Il a été libéré, à titre conditionnel, le 10 août 1999, avec un délai d'épreuve de deux ans. Le 30 novembre 1999, il a été arrêté à l'aéroport de Zurich alors qu'il était en possession d'un faux passeport hollandais. Le 3 décembre 1999, il a été condamné de ce chef à septante-cinq jours d'emprisonnement.
 
Après avoir purgé sa peine, l'intéressé a été remis aux autorités valaisannes chargées de l'exécution de son renvoi.
 
Par décision du 13 février 2000, confirmée le 17 février 2000 par le Juge unique de la Cour de droit publicdu Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: le Tribunal cantonal) et par le Tribunal fédéral (arrêt du 28 mars 2000), le Service de l'état civil et des étrangers du canton du Valais (ci-après: le Service cantonal) a ordonné la mise en détention immédiate en vue de refoulement de B.________ pour une durée de trois mois au plus, des indices faisant craindre que l'intéressé tente de se soustraire à son renvoi.
 
Par arrêt du 10 mai 2000, le Tribunal cantonal a confirmé le prononcé du Service cantonal prolongeant pour six mois au plus la détention de l'intéressé. Le 3 juillet 2000, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours de droit administratif interjeté par B.________ en limitant la prolongation de la détention à une durée de trois mois au plus, soit jusqu'au 12 août 2000.
 
B.- Le 17 juillet 2000, le Service cantonal a ordonné la levée de la détention de B.________ et son assignation au territoire du canton du Valais pour une durée indéterminée.
 
Saisi d'un recours, le Tribunal cantonal l'a rejeté le 13 novembre 2000. Il a retenu en substance que B.________ avait été condamné pénalement à deux reprises, qu'il refusait de coopérer avec les autorités chargées d'organiser son renvoi et que son comportement justifiait une mesure d'assignation.
 
Cette mesure n'était en outre pas disproportionnée, l'intéressé conservant la possibilité de mener une vie sociale convenable et d'obtenir ponctuellement l'autorisation de quitter le canton du Valais pour rendre visite à son frère ou à sa fiancée, domiciliés dans le canton de Neuchâtel.
 
Le Tribunal cantonal a rejeté la demande d'assistance judiciaire de B.________ mais l'a exempté des frais de la cause.
 
C.- Agissant par la voie du recours de droit administratif, B.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt rendu le 13 novembre 2000 par le Tribunal cantonal, de dire que toute mesure d'assignation à son encontre est levée et qu'il est mis au bénéfice de l'assistance judiciaire dès le 21 août 2000.
 
Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer. Le Service cantonal et l'Office fédéral des étrangers proposent de rejeter le recours.
 
Considérant en droit :
 
1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 126 I 81 consid. 1 p. 83; 126 III 274 consid. 1 p. 275 et les arrêts cités).
 
La décision attaquée a été prise par une autorité judiciaire statuant en dernière instance cantonale au sens de l'art. 98 lettre g OJ; elle échappe aux exceptions prévues aux art. 98 à 102 OJ - en particulier à l'art. 100 al. 1 lettre b OJ - et elle est fondée sur le droit public fédéral.
 
Déposé en temps utile et dans les formes prescrites, le présent recours est donc en principe recevable en vertu des art. 97 ss OJ.
 
Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation.
 
Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen (ATF 125 III 209 consid. 2 p. 211; 122 IV8 consid. 1b p. 11). Comme il n'est pas lié par les motifsque les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer l'arrêt attaqué pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 121 II 473 consid. 1b p. 477 et les arrêts cités; voir également ATF 124 II 103 consid. 2b p. 109).
 
En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris des règles essentielles de procédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ; ATF 125 II 633 consid. 1c). Il ressort de l'arrêt attaqué que le recourant a "plongé dans la clandestinité" du 10 août au 30 novembre 1999. Or, cette constatation de fait - qui résulte déjà des arrêts du Tribunal fédéral des 28 mars et 3 juillet 2000 - n'est pas manifestement inexacte, contrairement à ce qu'allègue le recourant pour la première fois. De plus, on ne voit pas que l'état de fait serait manifestement incomplet.
 
Le recourant reproche certes à l'autorité intimée de ne pas avoir tenu compte de son bon comportement actuel.
 
Mais il ne s'agit pas là d'une question de fait mais d'une question de droit que le Tribunal fédéral revoit librement et d'office.
 
2.- a) Selon l'art. 13e LSEE, "l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger qui n'est pas titulaire d'une autorisation de séjour ou d'établissement et qui trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics, notamment en vue de lutter contre le trafic illégal de stupéfiants, de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée". Les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée, introduites par le chiffre I de la loi fédérale du 18 mars 1994 sur les mesures de contrainte en matière de police des étrangers (RO 1995 146), répondent à deux préoccupations. Elles permettent d'intervenir pour protéger la sécurité et l'ordre publics - plus particulièrement dans les domaines qui ne peuvent guère être couverts par le droit pénal - à l'encontre de ressortissants étrangers dont le départ ne peut pas être exigé en raison d'une demande d'asile pendante ou de l'absence de titre de voyage. En outre, elles peuvent être ordonnées à l'égard d'étrangers dont le renvoi est durablement entravé et pour lesquels il est nécessaire soit de les tenir éloignés d'un endroit déterminé, soit de pouvoir les surveiller; dans cette hypothèse, l'étranger est passible d'une peine d'emprisonnement ou d'arrêts s'il n'observe pas les mesures imposées (Message du Conseil fédéral du 22 décembre 1993 à l'appui d'une loi fédérale sur les mesures de contrainte en matière de droit des étrangers, in Feuille Fédérale 1994 I 301 ss, plus spéc. p. 324 ss).
 
b) L'assignation d'un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée ne peuvent pas être imposées à tout étranger dépourvu d'une autorisation de séjour ou d'établissement. Selon le législateur, le seuil à partir duquel il est loisible d'ordonner de telles mesures n'a pas été placé très haut dès lors que la restriction de liberté imposée constitue une atteinte relativement légère à la liberté personnelle. Pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l'ordre publics, on se fondera sur la notion très générale de la protection des biens par la police.
 
Ainsi, cette notion ne recouvre pas seulement un comportement délictueux, comme par exemple des menaces envers le directeur d'un foyer ou d'autres requérants d'asile. Il y a aussi trouble ou menace de la sécurité et de l'ordre publics si des indices concrets font soupçonner que des délits sont commis, par exemple dans le milieu de la drogue, s'il existe des contacts avec des extrémistes ou que, d'une manière générale, l'étranger enfreint grossièrement les règles tacites de la cohabitation sociale. Dès lors, il est aussi possible de sanctionner (par exemple en transférant l'intéressé dans un endroit isolé) un comportement rétif ou asocial, mais sans pour autant s'attacher à des vétilles (FF 1994 Ip. 325).
 
c) Les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée doivent enfin respecter le principe de la proportionnalité.
 
Elles doivent être nécessaires et suffisantes pour empêcher que la sécurité et l'ordre publics ne soient troublés ou menacés; les moyens doivent être proportionnés au but poursuivi, au regard notamment de la délimitation géographique et de la durée de la mesure.
 
3.- a) En l'espèce, le recourant a été détenu en vue de refoulement, au sens de l'art. 13b al. 1 lettre c LSEE, du 13 février au 17 juillet 2000. Il a déclaré à plusieurs reprises qu'il n'entendait pas retourner dans son pays d'origine et n'a entrepris aucune démarche, jusqu'au 10 août 2000, pour se procurer un titre de voyage. A cet égard, comme le Tribunal fédéral l'a relevé dans son arrêt du 3 juillet 2000, il est douteux que son passeport ait réellement été égaré par son frère. Après sa libération conditionnelle, survenue le 10 août 1999, le recourant ne s'est pas tenu à disposition des autorités valaisannes, chargées d'organiser son départ, mais est entré dans la clandestinité. Ce n'est qu'à la faveur de son arrestation le 30 novembre 1999, à l'aéroport de Kloten, que les autorités valaisannes ont pu le localiser. Il est établi qu'à cette occasion, le recourant avait fait sciemment usage d'un passeport falsifié, délit réprimé par l'art. 23 al. 1 LSEE. Si l'on ajoute que le recourant est entré illégalement sur le territoire suisse avant d'y déposer ses deux demandes d'asile, force est de constater qu'il a violé à de réitérées reprises et de façon grave les prescriptions de police des étrangers. En adoptant l'art. 13e al. 1 LSEE, le législateur visait avant tout à lutter contre le trafic illégal de stupéfiants. Mais cette disposition légale constitue une clause générale permettant de prendre des mesures également à l'encontre d'étrangers qui ont gravement violé, comme en l'espèce, les prescriptions de police des étrangers qui tendent à garantir l'ordre public en Suisse (arrêt non publié du 13 juillet 1995 en la cause K.R. c. le canton des Grisons, consid. 2b). L'autorité cantonale pouvait dès lors, sans violer le droit fédéral, considérer que le recourant, par son comportement, avait troublé l'ordre public et qu'une mesure d'assignation d'un lieu de séjour était justifiée.
 
b) Le recourant soutient que son comportement est exempt de reproches depuis sa libération et qu'il ne présente plus, actuellement, une menace à la sécurité et à l'ordre publics. Cette évolution ne saurait occulter la gravité des faits pour lesquels le recourant a été condamné pénalement. Son activité délictueuse dans le canton de Neuchâtel s'est déroulée pendant plusieurs mois et le butindes différents vols perpétrés représente une somme dépassant 150'000 fr. Quelques mois seulement après sa libération conditionnelle, le recourant a en outre été condamné à une nouvelle peine d'emprisonnement pour falsification de papiers de légitimation et usage de faux papiers. C'est dire que le risque de récidive ne peut pas être écarté et que le recourant présente encore un danger pour la sécurité et l'ordre publics. En outre, il faut rappeler que le délai d'épreuve de deux ans depuis la libération conditionnelle du recourant ne sera échu que le 10 août 2001 et que la menace d'une exécution du solde de la peine n'est peut-être pas étrangère à son comportement actuel. Enfin, la mesure d'assignation au canton du Valais, même si elle n'est pas de nature à empêcher le recourant de commettre de nouveaux délits, permet de le tenir éloigné du canton de Neuchâtel, où il a commis, en compagnie d'un compatriote domicilié à Neuchâtel, les délits les plus graves.
 
c) Le recourant fait valoir que la mesure d'assignation viole le principe de la proportionnalité ainsi que son droit à des relations personnelles et intimes avec sa fiancée et à des relations familiales avec son frère.
 
Sur le plan de la délimitation géographique, la mesure d'assignation litigieuse n'est pas critiquable. Le canton du Valais est vaste et offre, dans plusieurs localités, la possibilité d'y nouer des contacts sociaux. Sur le plan de la durée, elle n'est pas disproportionnée dès lors que le délai d'épreuve lié à la libération conditionnelle du recourant n'est même pas échu. Le recourant conservera la possibilité de requérir la levée de l'assignation lorsqu'il aura concrètement apporté la preuve, après l'écoulement d'un certain laps de temps à compter du 10 août 2001, qu'il ne représente plus de danger pour la sécurité et l'ordre publics. Enfin, l'assignation est plus efficace qu'une autre mesure, telle que l'obligation de se présenter à intervalles réguliers pour des contrôles, au regard notamment des sanctions prévues par l'art. 23a LSEE.
 
Pour le surplus, le recourant a la possibilité de rencontrer son frère et sa fiancée dans le canton du Va-lais. Une telle limitation est assurément compatible avec les relations usuellement entretenues entre frères. Elle pourrait heurter la protection que l'art. 8 CEDH confèreaux fiancés. Encore faudrait-il, conformément à la jurisprudence, que le mariage soit sérieusement voulu et imminent (Alain Wurzburger, La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers, in RDAF 1997, p. 284, note 43). Or, en l'espèce, non seulement les pro-jets de mariage évoqués ne sont pas en voie de concrétisation immédiate, mais le recourant a tenté, le 30 novembre 1999, de quitter la Suisse à destination du Canada sans emmener sa fiancée. Par ailleurs, le recourant a la possibilité de solliciter ponctuellement une autorisation de quitter le territoire valaisan pour rendre visite à ses proches.
 
d) Enfin, c'est à tort que le recourant se plaint de ce que le juge de la détention a rejeté sa requête d'assistance judiciaire tendant à la désignation d'un avocat d'office et au versement d'une indemnité à titre d'honoraires. En effet, le Tribunal cantonal pouvait, sans violer la Constitution, rejeter cette requête au motif que le recours était manifestement dépourvu de chances de succès (cf. ATF 125 II 265 consid. 4 et les arrêts cités). Ce refus apparaît d'autant moins arbitraire que le recourant a été exempté des frais de justice.
 
4.- Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.
 
Dès lors que les conclusions du recours apparaissaient d'emblée dépourvues de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire complète présentée par le recourant doit être rejetée (art. 152 al. 1 et 2 OJ). Succombant, le recourant doit supporter un émolument judiciaire qui sera fixéen tenant compte de l'ensemble des circonstances (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs,
 
le Tribunal fédéral :
 
1. Rejette le recours.
 
2. Rejette la demande d'assistance judiciaire.
 
3. Met un émolument judiciaire de 500 fr. à la charge du recourant.
 
4. Communique le présent arrêt en copie au mandataire du recourant, au Service de l'état civil et des étrangers et à la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais, ainsi qu'à l'Office fédéral des étrangers.
 
_____________
 
Lausanne, le 6 avril 2001 LGE/mnv
 
Au nom de la IIe Cour de droit public
 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
 
Le Président, Le Greffier,
 
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