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Informationen zum Dokument  BGer 4P.256/2004  Materielle Begründung
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BGer 4P.256/2004 vom 26.01.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
4P.256/2004 /grl
 
Arrêt du 26 janvier 2005
 
Ire Cour civile
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges Corboz, président, Favre et Kiss.
 
Greffière: Mme Cornaz.
 
Parties
 
X.________ SA,
 
recourante, représentée par Me Alain Schweingruber, avocat,
 
contre
 
A.________ (en France),
 
intimée, représentée par Me Yves Richon, avocat,
 
Cour civile du Tribunal cantonal de la République et
 
Canton du Jura, Le Château, case postale 24,
 
2900 Porrentruy 2.
 
Objet
 
art 9 Cst. (procédure civile),
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Cour civile du Tribunal cantonal de la République et Canton du Jura
 
du 4 octobre 2004.
 
Faits:
 
A.
 
A.________ a été employée par l'entreprise X.________ SA, en qualité de frontalière au bénéfice d'un permis G, pendant près de vingt-cinq ans, jusqu'à son licenciement, le 30 avril 2001. Pour obtenir le permis G, l'employeur a dû soumettre les conditions de travail de son employée au Service des Arts et Métiers du Travail de la République et Canton du Jura (ci-après: SAMT). Pour la période de décembre 1998 à octobre 1999, le salaire horaire de base déclaré était de 15 fr. 80 et pour celle de novembre 1999 à octobre 2000, de 15 fr. 90. L'examen des bulletins de salaire de A.________ révèle que, pour la période de décembre 1998 à décembre 1999, le salaire horaire avec coefficient personnel était de 15 fr. 05 et pour celle de janvier 2000 à octobre 2000, de 15 fr. 20.
 
B.
 
Le 27 janvier 2004, A.________ a introduit devant le Conseil de prud'hommes du Tribunal de Porrentruy une action en paiement portant sur 2'263 fr. 95 avec intérêt à 5% depuis l'échéance. La somme réclamée représentait la différence entre le salaire horaire de base annoncé au SAMT et le salaire horaire avec coefficient personnel effectivement reçu entre décembre 1998 et octobre 2000. A.________ a invoqué l'arrêt non publié du Tribunal de céans rendu dans la cause opposant une de ses collègues à X.________ SA (cf. arrêt 4P.181/2003 du 3 novembre 2003).
 
X.________ SA a conclu au déboutement de A.________, en relevant qu'il n'appartenait pas au juge civil de se substituer à l'autorité administrative qui avait arrêté la rémunération de la travailleuse en application de l'art. 9 OLE (RS 823.21), conformément à l'ATF 129 III 618. De plus la demande était abusive, parce qu'interjetée deux ans et demi après la cessation des rapports de travail.
 
Par jugement du 28 avril 2004, la présidente du Conseil de prud'hommes a condamné X.________ SA à payer à A.________ la somme brute de 2'263 fr. 95 dès l'échéance moyenne fixée au 1er juillet 2001. Dans le rapport fourni ultérieurement, le 2 juin 2004, la présidente a indiqué qu'elle avait suivi les motivations de la Cour civile dans son arrêt du 14 juillet 2003 et du Tribunal fédéral dans celui du 3 novembre 2003 susmentionné.
 
Statuant sur pourvoi en nullité de X.________ SA, la Cour civile du Tribunal cantonal jurassien a, par arrêt du 4 octobre 2004, rejeté le pourvoi, ce qui impliquait la confirmation du jugement entrepris. En substance, elle a estimé que la travailleuse se plaignait que le salaire autorisé par le SAMT n'avait pas été versé entièrement, de sorte qu'elle disposait d'une prétention devant la juridiction civile, habilitée à voir si le salaire fixé dans l'autorisation de travail avait été versé. En l'absence d'une décision interprétative d'une autorité administrative, rendue dans un cas d'espèce, le juge civil pouvait interpréter l'autorisation administrative, au même titre qu'une clause contractuelle litigieuse, pour déterminer si les prétentions du travailleur étaient fondées. Il n'était ainsi pas arbitraire d'admettre que le salaire de base par heure comprenait le salaire de base à strictement parler et le coefficient personnel, à l'exclusion des primes de présence et d'assiduité. La Cour civile a écarté la référence à la jurisprudence genevoise qui avait trait à un salaire "global", et non à un salaire "horaire de base". Enfin, comme la présidente du Conseil de prud'hommes avait remarqué que la travailleuse n'avait pas adopté un comportement manifestement contraire à la bonne foi en déposant son action, le grief d'abus de droit devait être écarté.
 
C.
 
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral, X.________ SA (la recourante) conclut à l'annulation de l'arrêt du 4 octobre 2004, avec suite de frais et dépens.
 
A.________ (l'intimée) conclut au rejet du recours, avec suite de frais et dépens. Pour sa part, la Cour civile a présenté des observations, en se référant aux considérants de son arrêt et en concluant au rejet du recours.
 
Le 7 janvier 2005, X.________ SA a requis l'édition du dossier de procédure administrative jurassienne no 50/04, contenant notamment une lettre du SAMT du 6 mars 2000.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
1.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ).
 
L'arrêt attaqué est final dans la mesure où la cour cantonale a statué au fond, sur une demande pécuniaire, par une décision qui n'est susceptible d'aucun autre moyen de droit sur le plan fédéral ou cantonal, s'agissant du grief de violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ).
 
La recourante est personnellement touchée par la décision entreprise, qui la condamne au paiement d'une somme d'argent, de sorte qu'elle a un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cette décision n'ait pas été adoptée en violation de ses droits constitutionnels; en conséquence, la qualité pour recourir (art. 88 OJ) doit lui être reconnue.
 
Interjeté en temps utile (art. 89 al. 1 OJ), dans la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1 OJ), le présent recours est à cet égard recevable.
 
1.2 Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 262; 129 I 113 consid. 2.1; 128 III 50 consid. 1c p. 53 s. et les arrêts cités).
 
Dans le cas particulier, la recourante a repris ses précédents moyens en qualifiant d'arbitraire l'interprétation donnée par la cour cantonale à l'art. 9 OLE et le fait de ne pas avoir retenu l'existence d'un abus de droit à faire valoir des prétentions, plus de deux ans et demi après l'extinction des rapports de travail. Malgré le caractère laconique de l'exposé de ce grief, on peut comprendre de l'ensemble de l'argumentation que la recourante entend se plaindre d'atteintes à la garantie constitutionnelle de l'interdiction de l'arbitraire, énoncée à l'art. 9 Cst. A cet égard, la motivation paraît suffisante.
 
1.3 Lorsque le Tribunal fédéral est saisi d'un recours contre la décision d'une instance cantonale, dont le pouvoir d'examen est identique au sien, statuant sur un recours de droit public, il examine librement si c'est à juste titre que l'autorité cantonale n'a pas retenu l'arbitraire (cf. ATF 125 I 492 consid. 1a/cc p. 494; plus récemment arrêt 4P.181/2003 du 3 novembre 2003 consid. 1.3 in fine).
 
2.
 
La recourante invoque l'arbitraire dans l'interprétation de l'art. 9 OLE, puis dans le refus de voir un abus de droit, lié à la formulation tardive des prétentions de l'intimée contre elle.
 
2.1 Le litige portant sur une valeur litigieuse inférieure à la limite ouvrant la voie du recours en réforme (art. 46 OJ), la recourante peut, sous l'angle de l'arbitraire, émettre des critiques relevant de l'application du droit fédéral sans porter atteinte au caractère subsidiaire du recours de droit public (cf. art. 84 al. 2 OJ; cf. ATF 124 III 134 consid. 2b).
 
2.2 Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 129 I 8 consid. 2.1; 127 I 60 consid. 5a p. 70). Arbitraire et violation de la loi ne sauraient être confondus; une violation doit être manifeste et reconnue d'emblée pour être considérée comme arbitraire. Le Tribunal fédéral n'a pas à examiner quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement dire si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'une autre solution paraît également concevable, voire même préférable (ATF 126 III 438 consid. 3 in fine; 125 II 129 consid. 5 p. 134). En outre, pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 129 I 8 consid. 2.1 in fine; 128 I 177 consid. 2.1).
 
2.3 Dans une jurisprudence constante, le Tribunal fédéral admet que l'art. 9 OLE déploie des effets de droit civil, dans le sens où cette disposition oblige l'employeur de respecter les conditions qui assortissent l'autorisation délivrée, en particulier de verser le salaire approuvé par l'autorité administrative; le travailleur dispose alors d'une prétention qu'il peut faire valoir devant les juridictions civiles, conformément à l'art. 342 al. 2 CO; il en découle que la clause du contrat individuel de travail prévoyant un salaire inférieur au salaire fixé par l'autorité administrative compétente, en application de l'art. 9 OLE, est entachée de nullité de par la loi. Le juge civil est alors lié par les conditions de rémunération fixées concrètement dans l'autorisation administrative délivrée pour un emploi donné. Dès lors que la décision administrative est entrée en force, le travailleur a droit au salaire fixé et il n'y a plus à prendre en considération ni accord individuel ni convention collective, et il importe peu que la rémunération contractuelle, bien qu'inférieure au salaire fixé par l'autorité administrative, dépasse le salaire usuel dans la branche pour l'emploi considéré (ATF 129 III 618 consid. 5.1 p. 621 s. et les références citées).
 
En l'espèce, la cour cantonale ne s'est pas écartée de l'art. 342 al. 2 CO ni de l'art. 9 OLE, dès lors que, considérant que l'intimée avait touché une rémunération de base inférieure au salaire indiqué dans l'autorisation administrative, elle a alloué à celle-ci la rémunération minimale approuvée par l'autorité administrative.
 
2.4 En réalité, le litige concerne la façon dont cette autorisation administrative a été interprétée par la Cour civile et relève de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits.
 
En ce domaine, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur le sens et la portée d'un tel élément, ou lorsqu'elle tire des conclusions insoutenables des éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1; 127 I 38 consid. 2a p. 41).
 
Dans le cas présent, la Cour civile a jugé qu'elle gardait une entière liberté d'interpréter l'autorisation administrative donnée en application de l'art. 9 OLE, en l'absence d'une décision interprétative de cette dernière par une autorité compétente. En effet, la Chambre administrative du Tribunal cantonal jurassien a décidé, par arrêt du 17 août 2004, que la recourante ne disposait pas d'un intérêt digne de protection à obtenir l'interprétation de l'autorisation administrative délivrée par le SAMT. En conséquence, le juge civil n'était pas lié.
 
Sur la base de ces considérations, la Cour civile a décidé, dans l'arrêt entrepris, qu'il n'était pas arbitraire de considérer comme salaire de base par heure le salaire de base au sens strict, augmenté du coefficient personnel, mais à l'exclusion des primes, et ceci même si, avec l'addition de ces dernières, l'employée a finalement reçu une rémunération totale supérieure au montant déclaré par l'employeur et se trouvant à l'origine de l'autorisation administrative du SAMT.
 
Ce raisonnement, s'appuyant aussi sur l'arrêt non publié du Tribunal de céans du 3 novembre 2003 susmentionné rendu dans la cause opposant la recourante à une collègue de l'intimée, peut être suivi et approuvé pour les raisons suivantes.
 
2.4.1 Dans les conflits de compétence entre les autorités administratives et le pouvoir judiciaire (qui comprend les tribunaux ordinaires civils, pénaux et administratifs), la règle tirée du principe de la séparation des pouvoirs exige que les agents administratifs et les juges interviennent de manière indépendante dans le champ de leur compétence propre, et respectent chacun les décisions de l'autre ordre. Ce principe d'indépendance réciproque, ou d'autonomie, connaît une exception lorsqu'une disposition légale particulière le prévoit expressément, ou lorsqu'une autorité administrative doit rendre une décision sur la base d'un jugement de renvoi d'un tribunal administratif, assorti d'instructions concrètes liant l'autorité administrative de base concernée. Quant à la reconnaissance réciproque des décisions, elle vaut uniquement pour leur dispositif, et non pas pour les motifs à l'appui de ce dernier. Par exception à cette norme, les décisions administratives nulles, qui, en raison de leur caractère vicié, n'emportent aucun effet juridique, ne lient naturellement pas les tribunaux (cf. Häfelin/Müller, Allgemeines Verwaltungsrecht, 4ème éd., Zurich 2002, n. 50 à 57 p. 14 s.).
 
Pour ce qui est des questions préjudicielles, le droit suisse, suivant en cela le droit allemand, mais à l'opposé du droit français, qui prévoit la suspension de la procédure jusqu'à la décision de l'organe compétent, dispose en général que l'autorité compétente sur le fond l'est également pour statuer sur toutes les questions préjudicielles ou incidentes. Celle-ci doit les aborder sans attendre la décision de l'autorité normalement compétente pour la matière faisant l'objet de la question préjudicielle, et ce pour autant qu'aucune disposition légale ne l'interdise. Toutefois, en tranchant la question préjudicielle, l'autorité saisie doit respecter la pratique clairement établie de l'autorité ordinairement compétente. Lorsque cette dernière s'est déjà prononcée, le principe de la séparation des pouvoirs l'emporte, en ce sens que l'autorité appelée à statuer sur la question à titre préjudiciel ne doit pas décider de façon indépendante, mais est liée au prononcé de l'autorité normalement compétente (cf. Tschannen/Zimmerli, Allgemeines Verwaltungsrecht, 2ème éd., Berne 2005, n. 10 et 12 p. 114 s.; Häfelin/Müller, op. cit., n. 72 p. 17). Dans ce cas, les organes administratifs sont soumis aux décisions judiciaires qui ont résolu la question préjudicielle, avec force de chose jugée. De plus, si le juge ne doit tenir aucun compte des décisions administratives inexistantes ou nulles, il doit suivre celles auxquelles la loi confère un caractère obligatoire pour lui.
 
2.4.2 En l'espèce, la recourante a indiqué au SAMT, en vue de l'obtention du permis G pour la travailleuse, un salaire horaire de base de 15 fr. 80 pour la période de décembre 1998 à octobre 1999 et de 15 fr. 90 pour celle de novembre 1999 à octobre 2000. Comme l'a relevé la jurisprudence, d'ailleurs citée par les parties, un salaire inférieur à cette rémunération fixée par l'autorité administrative compétente, en application de l'art. 9 OLE, est entaché de nullité de par la loi, le juge civil étant lié par les conditions salariales déterminées concrètement dans l'autorisation administrative délivrée pour un emploi donné (ATF 129 III 618 consid. 5.1 p. 621 et les références citées).
 
En accordant à l'intimée la rémunération arrêtée par l'autorité administrative, les précédents juges n'ont pas empiété sur le domaine de compétence de celle-ci, puisqu'ils se sont fondés sur le montant du salaire de base indiqué dans les demandes de la recourante auprès du SAMT, et approuvé par celui-ci. C'est à juste titre, donc sans arbitraire, que la Cour civile a relevé que la travailleuse ne se plaignait pas du caractère insuffisant du salaire décidé dans l'autorisation administrative, mais de ce qu'elle estimait que le salaire autorisé n'avait pas été versé entièrement, parce qu'il ne devait pas inclure certaines primes (de présence et d'assiduité).
 
En dehors du délai de recours, soit le 7 janvier 2005, la recourante a demandé au Tribunal fédéral l'édition du dossier de la procédure administrative jurassienne no 50/04, contenant la lettre du SAMT du 6 mars 2000, dont elle mentionne un extrait en p. 6 de son acte de recours. Indépendamment du caractère tardif de la requête, il n'y a pas lieu d'y donner suite, dès lors que les éléments réunis au dossier permettent de répondre à l'argumentation de la recourante (cf. ATF 124 I 274 consid. 5b p. 285; 122 III 219 consid. 3c p. 223 s.; 122 V 157 consid. 1d p. 162; 119 Ib 492 consid. 5b/bb p. 505 s.).
 
En effet, la lettre du SAMT du 6 mars 2000 ne revêt pas la portée que lui prête la recourante, si on la lit de manière exhaustive, en la replaçant dans son contexte. A la suite d'une visite de l'entreprise de la recourante, le SAMT a constaté que le système de rémunération de cette dernière prenait comme salaire de base les quatre éléments suivants, soit le salaire horaire, le coefficient personnel, la prime de présente (recte: présence) et la prime d'assiduité. Toutefois, plus loin, le SAMT remarquait que ce système, qui incluait les éléments aléatoires qu'étaient la prime de présence et la prime d'assiduité, pouvait, d'après les variations enregistrées sur ces deux dernières données (les deux primes), amener une rémunération inférieure à celle annoncée en vertu de l'art. 9 OLE. Le SAMT a alors rappelé que la pratique de ce système salarial n'était pas conforme aux art. 9 OLE et 324a CO, de sorte qu'il a imparti à la recourante un délai au 30 juin 2000 pour rétablir la situation, dans l'idée que "les salaires minimaux de base annoncés et exigés au sens de l'art. 9 OLE doivent être intégralement versés à l'exclusion de toute prime quelle qu'elle soit".
 
Il s'ensuit que la recourante ne peut prétendre que le SAMT avait admis que le salaire de base était composé des quatre éléments susmentionnés, puisque le même courrier faisait état des défauts intrinsèques de ce système et de sa non-conformité aux art. 9 OLE et 324a CO, suivant les incidences concrètes variables de la prime de présence et/ou d'assiduité sur la rémunération de chaque travailleur. Finalement, les 27 février et 27 avril 2001, le SAMT et la recourante ont passé un accord selon lequel, pour chaque demande de nouveau permis, celle-ci n'indiquerait que le salaire de base et le coefficient personnel, les primes de présence et d'assiduité n'étant mentionnées qu'à titre indicatif.
 
2.4.3 Au vu de ces considérations, qui ressortent également de l'arrêt du 17 août 2004 de la Chambre administrative du Tribunal cantonal, consid. 3, il n'était nullement arbitraire pour la Cour civile d'estimer que le salaire de base, y compris le coefficient personnel, mais à l'exclusion des deux primes, en raison de leur caractère aléatoire, pouvait être pris comme le salaire dû par l'employeur, au sens de l'autorisation administrative, ce qui découle aussi de l'arrêt non publié du Tribunal de céans du 3 novembre 2003 susmentionné, consid. 3.4.
 
En conséquence, le grief d'application arbitraire des art. 342 al. 2 CO et 9 OLE est dépourvu de tout fondement et doit être rejeté.
 
3.
 
La recourante se plaint en second lieu de l'abus de droit de l'intimée, qui avait travaillé près de vingt-cinq ans dans son entreprise sans faire aucune remarque sur le mode de rémunération, d'une part, et qui avait introduit son action en justice plus de deux ans et demi après la cessation des rapports de travail, d'autre part.
 
A ce sujet, il convient de renvoyer la recourante à la jurisprudence qu'elle cite (ATF 129 III 171 consid. 2.4 p. 176, 618 consid. 5.2 p. 622; arrêt 4P.181/2003 du 3 novembre 2003 consid. 2.2), qui ne voit pas un abus de droit dans le fait que la travailleuse n'ait soulevé ses prétentions qu'à l'expiration des rapports de travail. Quant au fait d'avoir attendu plus de deux ans et demi avant d'introduire une action en justice, il est expliqué par la volonté de l'intimée de connaître l'issue de la procédure engagée par une de ses collègues, et qui a donné lieu à l'arrêt non publié du Tribunal de céans du 3 novembre 2003 susmentionné, notifié le 5 décembre 2003. En agissant le 27 janvier 2004, l'intimée n'a pas adopté une attitude qui serait contraire au principe de la bonne foi, de sorte que le grief d'arbitraire dans l'application de l'art. 2 al. 2 CC doit également être écarté.
 
En tous points infondés, le recours doit être rejeté.
 
4.
 
Même si la procédure est gratuite, en raison de la valeur litigieuse (art. 343 al. 2 et 3 CO; ATF 115 II 30 consid. 5b p. 41), la recourante, qui succombe, sera condamnée au paiement d'une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens en faveur de l'intimée (art. 159 al. 1 OJ; ATF 115 II 30 consid. 5c et l'arrêt cité).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais.
 
3.
 
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des par-ties et à la Cour civile du Tribunal cantonal de la République et Canton du Jura.
 
Lausanne, le 26 janvier 2005
 
Au nom de la Ire Cour civile
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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