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Informationen zum Dokument  BGer 1P.87/2005  Materielle Begründung
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BGer 1P.87/2005 vom 23.02.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1P.87/2005 /col
 
Arrêt du 23 février 2005
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Féraud, Président, Aeschlimann et Reeb.
 
Greffière: Mme Revey.
 
Parties
 
A.________,
 
recourant, représenté par Me Nicolas Riedo, avocat,
 
contre
 
Président du Tribunal pénal de la Gruyère,
 
Le Château, case postale 364, 1630 Bulle,
 
Ministère public du canton de Fribourg,
 
rue de Zaehringen 1, 1700 Fribourg,
 
Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'Etat
 
de Fribourg, case postale 56, 1702 Fribourg.
 
Objet
 
refus de mise en liberté,
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre pénale du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg
 
du 23 décembre 2004.
 
Faits:
 
A.
 
Ressortissant croate né en 1955, A.________ a fait l'objet de plusieurs poursuites pénales, essentiellement en raison de violations d'une obligation d'entretien. De ce dernier chef, il a d'abord été condamné par défaut à trois peines de six mois d'emprisonnement, prononcées successivement les 12 avril 1996 et 7 janvier 1997 par le Tribunal correctionnel de la Gruyère, puis le 19 décembre 2000 par le Tribunal pénal de la Gruyère. Le 7 décembre 2004, le Tribunal pénal de la Gruyère lui a ensuite infligé, au terme d'une procédure contradictoire, une peine de huit mois d'emprisonnement. A la même date, le Président de ce tribunal a refusé d'accorder le relief du jugement rendu le 19 décembre 2000. Enfin, ce magistrat a ordonné l'arrestation immédiate de l'intéressé, qui présentait un risque important de se soustraire à la justice.
 
Statuant le 23 décembre 2004 sur recours de A.________, la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton de Fribourg a confirmé l'ordonnance d'arrestation. Les soupçons pesant sur l'intéressé associés à un risque de fuite justifiaient la mise en détention préventive. Le principe de la proportionnalité demeurait respecté compte tenu notamment de la durée des peines à subir et de l'impossibilité de garantir la présence de A.________ par une mesure moins sévère.
 
B.
 
Agissant le 4 février 2005 par la voie du recours de droit public, A.________ requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt rendu le 23 décembre 2004 par la Chambre pénale. Il invoque les art. 9, 10 al. 2, 31 et 32 Cst.
 
La Chambre pénale et le Président du Tribunal pénal de la Gruyère renoncent à s'exprimer. Le Ministère public du canton de Fribourg s'en remet à justice en rappelant ses déterminations déposées le 20 décembre 2004 auprès de la Chambre pénale.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Le recourant est personnellement touché par l'arrêt attaqué, qui confirme sa mise en détention préventive. Partant, il a qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ. Formé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale, le recours est ainsi recevable au regard des art. 84 ss OJ.
 
2.
 
Le recourant se plaint d'arbitraire. Pour autant que l'on puisse le suivre, il reproche à l'autorité intimée de l'avoir incarcéré en "exécution de peine", alors qu'il ne serait frappé d'aucune peine à la fois non prescrite et exécutoire. Les peines infligées les 12 avril 1996 et 7 janvier 1997 seraient en effet prescrites, tandis que celles prononcées les 19 décembre 2000 et 7 décembre 2004 n'étaient pas exécutoires au moment de l'arrêt attaqué, des recours ayant du reste été déposés par la suite.
 
Ces arguments tombent à faux, puisque le recourant a été incarcéré à titre préventif exclusivement.
 
3.
 
Une mesure de détention préventive est compatible avec la liberté personnelle, garantie par les art. 10 al. 2 Cst., 5 CEDH et 9 Pacte ONU II, pour autant qu'elle repose sur une base légale, qu'elle réponde à un intérêt public et qu'elle respecte le principe de la proportionnalité (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion ou de réitération. Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes (ATF 116 Ia 143 consid. 3 p. 144). Cette dernière exigence coïncide avec la règle de l'art. 5 par. 1 let. c CEDH, qui autorise l'arrestation d'une personne s'il y a des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis une infraction.
 
S'agissant d'une restriction grave à la liberté personnelle, le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de la constatation des faits et de l'appréciation des preuves, revues sous l'angle de l'arbitraire (ATF 123 I 268 consid. 2d p. 271).
 
4.
 
De l'avis du recourant, "sa détention ne repose sur aucun titre valable de sorte qu'elle est dépourvue de base légale." Toutefois, le recourant ne dénie pas que l'art. 110 du code de procédure pénale du canton de Fribourg du 14 novembre 1996 autorise expressément la mise en détention préventive lorsque sont réalisés les motifs retenus par l'autorité intimée, soit de forts soupçons - d'un crime ou d'un délit - conjugués à un risque de fuite. Ce moyen doit donc être rejeté dans la mesure de son intelligibilité.
 
5.
 
Le recourant conteste présenter un danger de fuite.
 
5.1 Selon la jurisprudence, le risque de fuite ne peut s'apprécier sur la seule base de la gravité de l'infraction même si, compte tenu de l'ensemble des circonstances, la perspective d'une longue peine privative de liberté permet souvent d'en présumer l'existence; il doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62 et les arrêts cités).
 
La Chambre pénale a relevé que le recourant devait exécuter les peines prononcées les 12 avril 1996 et 7 janvier 1997, totalisant douze mois d'emprisonnement, tandis que les deux condamnations plus récentes, de six et huit mois respectivement, n'étaient pas définitives. Ses arriérés de pension ascendaient à 312'832 fr. depuis 1994 et, depuis le dépôt de la plainte ayant abouti au jugement du 7 décembre 2004, à 146'252 fr. Bien qu'il eût perdu son permis d'établissement en 1996, le recourant n'avait pas quitté la Suisse pour autant, vivant ainsi pendant huit ans dans la clandestinité, dont les dernières années chez son amie qui l'entretenait. Il n'exerçait pas d'activité lucrative et ne disposait d'aucun revenu, alors qu'il admettait pouvoir gagner sa vie et assurer ses responsabilités. Au vu de ces circonstances, le recourant présentait un risque de fuite sérieux et concret car, déjà condamné à des peines totalisant douze mois d'emprisonnement, il avait un intérêt certain à se soustraire à la procédure et à l'exécution des deux peines non encore exécutoires. Enfin, toujours selon la décision incriminée, aucune mesure de substitution moins incisive n'était propre à garantir sa présence.
 
5.2 Pour sa part, le recourant conteste nourrir le dessein de quitter la Suisse. Il fait valoir les liens amicaux créés et sa relation avec son amie, chez laquelle il vit depuis plusieurs années. Il relève encore qu'il aurait entrepris diverses démarches afin de modifier les contributions d'entretien dues et de régulariser son statut d'étranger en Suisse.
 
5.3 Ces arguments sont mal fondés, sinon appellatoires.
 
Il est constant que le recourant a su disparaître dans la clandestinité pendant huit ans. En dépit de ses liens avec son amie, il est ainsi susceptible de se soustraire derechef à la justice, non pas nécessairement en quittant la Suisse, mais en retournant dans la clandestinité. Au demeurant, à supposer même que les peines prononcées les 12 avril 1996 et 7 janvier 1997 soient prescrites (art. 73 ss CP), ce qu'il n'y a pas lieu de trancher ici, les deux procédures plus récentes restent de nature à l'inciter à disparaître, puisqu'elles le condamnent en l'état à une peine totale de quatorze mois d'emprisonnement. De ce point de vue, il est sans importance que ces jugements ne soient pas encore entrés en force. L'existence d'un risque suffisant de fuite doit ainsi être confirmée, ce qui permet en l'espèce de tenir pour justifiée la mise en détention préventive. Le recourant n'ayant pas soulevé de grief afférent au principe de la proportionnalité, notamment à l'éventualité d'une mesure moins incisive, il n'y a pas lieu de traiter ce point (art. 90 al. 1 let. b OJ). Vue sous cet angle, la situation du recourant pourrait être revue par l'autorité à brève échéance.
 
6.
 
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Il n'est pas accordé de dépens (art. 159 al. 2 OJ).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Président du Tribunal pénal de la Gruyère, au Ministère public et à la Chambre pénale du Tribunal de l'Etat de Fribourg.
 
Lausanne, le 23 février 2005
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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