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Informationen zum Dokument  BGer 6P.28/2005  Materielle Begründung
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BGer 6P.28/2005 vom 08.06.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6P.28/2005
 
6S.99/2005 /pai
 
Arrêt du 8 juin 2005
 
Cour de cassation pénale
 
Composition
 
MM. les Juges Schneider, Président,
 
Wiprächtiger et Kolly.
 
Greffière: Mme Paquier-Boinay.
 
Parties
 
X.________,
 
recourant, représenté par Me Christophe Piguet, avocat,
 
contre
 
Ministère public du canton de Vaud,
 
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
 
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des révisions civiles et pénales, route du Signal 8,
 
1014 Lausanne.
 
Objet
 
6P.28/2005
 
Art. 9 Cst., art. 6 CEDH (procédure pénale; arbitraire,
 
in dubio pro reo)
 
6S.99/2005
 
Art. 397 CP (révision),
 
recours de droit public (6P.28/2005) et pourvoi en nullité (6S.99/2005) contre l'arrêt de la Chambre des révisions civiles et pénales du Tribunal cantonal vaudois du
 
16 février 2005.
 
Faits:
 
A.
 
A.a Par jugement du 2 mai 2003, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne a reconnu X.________ coupable de vol et de recel et l'a condamné à dix mois d'emprisonnement, sous déduction de la détention préventive subie, ainsi qu'à l'expulsion du territoire suisse pour une durée de trois ans.
 
Le Tribunal a admis que, le 29 novembre 1999, X.________, A.________ et B.________ avaient forcé la porte d'un appartement au Tessin et y avaient dérobé un coffre-fort, qui a été retrouvé non ouvert dans une voiture louée à Lausanne par X.________ et dont A.________ détenait les clés. A.________ et X.________ ont été interpellés le jour même. Les juges ont fondé leur conviction notamment sur trois éléments. D'une part, les empreintes digitales des trois accusés ont été relevées à divers endroits du véhicule ainsi que sur des déchets de victuailles trouvés à l'intérieur de celui-ci. D'autre part, B.________, qui a été jugé séparément de ses deux coaccusés a déclaré, les 8, 12, 18 septembre et 27 novembre 2002 au juge d'instruction et à la police vaudoise, qu'il s'était rendu de Lausanne à Lugano le jour en question avec deux comparses, qu'il a identifiés sur photo comme étant A.________ et X.________, ainsi qu'avec C.________, l'amie de celui-ci également identifiée sur photo. Le Tribunal a, enfin, pris en considération les aveux de A.________, qui a admis, lors d'une confrontation avec B.________, avoir commis ce vol, mais en soutenant avoir agi seul, aveux qu'il a confirmés lors des débats.
 
A.b Par arrêt du 10 septembre 2003, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par X.________ contre ce jugement.
 
A.c Le 9 mars 2004, le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure où il était recevable, le recours de droit public formé par X.________ contre l'arrêt cantonal.
 
B.
 
Le 26 novembre 2004, X.________ a déposé une demande de révision du jugement du Tribunal correctionnel. A l'appui de sa requête, il a produit une déclaration solennelle, signée le 25 novembre 2004 par-devant un notaire lausannois par B.________, dans laquelle celui-ci affirme avoir fait des déclarations erronées à la police et au juge d'instruction et soutient que X.________ n'est en rien impliqué dans le vol de Lugano.
 
C.
 
Par arrêt du 16 février 2005, la Chambre des révisions civiles et pénales du Tribunal cantonal vaudois a rejeté la demande de révision au motif que le fait invoqué par X.________ était certes nouveau mais pas sérieux au sens des art. 397 CP et 455 al. 1 CPP/VD.
 
D.
 
X.________ forme un recours de droit public contre cet arrêt. Invoquant une violation des art. 9 Cst. et 6 CEDH, il conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué.
 
E.
 
X.________ se pourvoit également en nullité contre cet arrêt. Invoquant une violation de l'art. 397 CP et soutenant que la cour cantonale a abusé de son pouvoir d'appréciation en posant des exigences trop élevées quant au sérieux du fait nouveau, le recourant conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué. Il sollicite en outre l'effet suspensif.
 
F.
 
L'autorité cantonale a renoncé à se déterminer sur les recours, se référant aux considérants de son arrêt.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
I. Recours de droit public
 
1.
 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 130 II 249 consid. 2; 129 IV 216 consid. 1; 126 IV 107 consid. 1 p. 109 et les arrêts cités).
 
2.
 
Selon le recourant, c'est sur la base d'une appréciation arbitraire des éléments de fait dont elle disposait que l'autorité cantonale est parvenue à la conclusion que la déclaration faite par B.________ devant un notaire était un fait nouveau mais pas sérieux en ce sens qu'elle n'était pas de nature à ébranler les constatations qui fondent la condamnation du recourant.
 
2.1 Une décision est arbitraire et donc contraire à l'art. 9 Cst. lorsqu'elle viole nettement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou contredit de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si sa décision apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision soient insoutenables, il faut encore que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. A cet égard, il ne suffit pas non plus qu'une solution différente de celle retenue par l'autorité cantonale apparaisse également concevable ou même préférable (ATF 128 II 259 consid. 5 p. 280; 127 I 54 consid. 2b p. 56, 60 consid. 5a p. 70; 124 IV 86 consid. 2a p. 88 et les arrêts cités).
 
En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, une décision est entachée d'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un moyen de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur le sens et la portée d'un tel élément, ou encore lorsqu'elle tire des déductions insoutenables à partir des éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1; 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4a).
 
2.2 En l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que B.________ a été entendu à quatre reprises entre début septembre et fin novembre 2002 et qu'à ces occasions il a expliqué qu'il avait accepté la proposition d'un Albanais prénommé A.________ de l'accompagner au Tessin pour y commettre un vol et avait fait en voiture le voyage de Lausanne à Lugano en compagnie de celui-ci et d'un autre Albanais, dont il avait oublié le nom et qu'il a identifié sur photo comme étant X.________, ainsi que l'amie de ce dernier, qu'il a également identifiée sur photo. L'autorité cantonale a relevé que ces déclarations étaient parfaitement crédibles notamment eu égard au fait que l'intéressé se chargeait lui-même et n'avait pas de raison d'en vouloir au recourant qu'il ne connaissait pas et avait identifié sur photo.
 
En outre, le fait nouveau dont se prévaut le recourant est une déclaration faite devant notaire, par laquelle B.________ revient sur les dépositions qu'il avait faites à la police et au juge d'instruction et affirme que le recourant ne s'est pas rendu à Lugano avec lui le jour du vol. Il explique que lorsque la police lui avait demandé la première fois de confirmer que le recourant était avec lui, il avait répondu par l'affirmative car c'était effectivement la voiture de celui-ci. D'après B.________, il aurait alors été plus difficile de dire la vérité car la police aurait cru qu'il voulait minimiser l'affaire. Par la suite, il n'aurait pas rétabli la vérité par peur de se contredire par rapport à sa première déclaration car il voulait en finir avec cette affaire. B.________ a encore ajouté que s'il avait su que ses fausses déclarations pouvaient causer du tort au recourant il aurait dit la vérité.
 
L'autorité cantonale a considéré que les motifs invoqués par B.________ pour justifier sa rétractation n'étaient pas convaincants. On ne saurait y voir une appréciation arbitraire des faits tant il est vrai qu'il est difficile de croire notamment qu'une personne qui est elle-même l'objet d'une enquête puisse dénoncer un tiers pour avoir participé à une infraction sans imaginer que ces déclarations puissent nuire à celui-ci. De même, c'est sans arbitraire que les juges cantonaux ont estimé que les dépositions de B.________ confirmées à quatre reprises au cours de l'instruction et qui n'apparaissaient dictées ni par une quelconque animosité envers le recourant qu'il ne connaissait pas ni par un intérêt personnel puisqu'elles avaient au contraire pour conséquence de charger leur auteur, ne pouvaient pas être sérieusement remises en question par une simple rétractation justifiée par des motifs peu convaincants.
 
Au surplus, il faut encore noter que dans le cadre de l'application de l'art. 397 CP les seules questions de fait, qui peuvent donner lieu à un recours de droit public, sont de savoir si les faits ou moyens de preuve invoqués étaient inconnus des premiers juges, ce qui n'est pas litigieux en l'espèce, et s'ils sont propres, en fonction d'une appréciation des preuves, à ébranler la conviction des juges sur la constatation d'un fait pertinent influençant la décision, la vraisemblance étant à cet égard suffisante (ATF 130 IV 72 consid. 1; 122 IV 66 consid. 2a; 116 IV 353 consid. 2b et les références citées).
 
Dès lors, dans la mesure où le recourant semble reprocher à l'autorité cantonale d'avoir posé des exigences excessives pour établir le caractère sérieux des faits invoqués, il s'en prend à l'interprétation de l'art. 397 CP, grief qui relève du pourvoi en nullité et ne peut donc être invoqué dans le cadre d'un recours de droit public eu égard au caractère subsidiaire de celui-ci.
 
3.
 
Le recourant reproche en outre à l'autorité cantonale d'avoir violé la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 CEDH ainsi que la maxime "in dubio pro reo" qui en découle.
 
En tant que règles sur le fardeau de la preuve, ces principes signifient, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter à l'accusé; comme règles sur l'appréciation des preuves, ils sont violés lorsque le juge, qui s'est déclaré convaincu, aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité de l'accusé au vu des éléments de preuve qui lui étaient soumis (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2c p. 37). Le Tribunal fédéral examine librement si ces principes ont été violés en tant que règles sur le fardeau de la preuve, mais il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire la question de savoir si le juge aurait dû éprouver un doute, c'est-à-dire celle de l'appréciation des preuves (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2e p. 38).
 
Il faut relever en premier lieu que le recourant ne saurait se prévaloir de ce principe dans le cadre de la présente procédure de révision puisqu'il ne sortit ses effets que jusqu'à l'entrée en force du jugement de condamnation (ATF 114 IV 138 consid. 2b p. 141; Moreillon, La recherche des preuves dans l'instruction pénale, RPS 122 / 2004 p. 145; Corboz, In dubio pro reo, RJB 129 / 1993 p. 411 s. et les références citées).
 
Par ailleurs, le recourant ne prétend ni que l'autorité cantonale aurait renversé le fardeau de la preuve ni qu'elle aurait éprouvé un doute qu'elle aurait interprété en sa défaveur, de sorte que son grief tiré de la violation du principe "in dubio pro reo" se confond avec celui d'appréciation arbitraire des preuves qui a déjà été examiné. Le recours de droit public doit donc être rejeté.
 
4.
 
Vu le sort du recours de droit public, les frais afférents à celui-ci doivent être mis à la charge du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ).
 
II Pourvoi en nullité
 
5.
 
A l'appui de son pourvoi en nullité, le recourant invoque une violation de l'art. 397 CP. Il soutient que l'autorité cantonale a abusé de son pouvoir d'appréciation en posant des exigences trop élevées quant au caractère sérieux du fait nouveau invoqué.
 
5.1 L'art. 397 CP impose aux cantons de prévoir un recours en révision en faveur du condamné contre les jugements rendus en vertu du droit fédéral "quand des faits ou des moyens de preuve sérieux et dont le juge n'avait pas eu connaissance lors du premier procès viennent à être invoqués". La loi prévoit ainsi une double exigence: les faits ou moyens de preuve invoqués doivent être d'une part nouveaux et d'autre part sérieux. Les faits ou moyens de preuve sont nouveaux, au sens de cette disposition, lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire qu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit (ATF 130 IV 72 consid. 1; 122 IV 66 consid. 2a et les arrêts cités). Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et qu'un état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 130 IV 72 consid. 1; 122 IV 66 consid. 2a et les arrêts cités).
 
Savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception des notions de faits nouveaux, de moyens de preuve nouveaux ou "sérieux" au sens de l'art. 397 CP est une question de droit, qui peut faire l'objet d'un pourvoi en nullité conformément à l'art. 269 al. 1 PPF. C'est en revanche une question de fait de savoir si un fait nouveau ou un moyen de preuve nouveau est propre à modifier l'état de fait retenu (ATF 130 IV 72 consid. 1; 122 IV 66 consid. 2a et les arrêts cités), puisqu'il s'agit alors d'une question d'appréciation des preuves, étant rappelé qu'une vraisemblance suffit au stade du rescindant (ATF 130 IV 72 consid. 1; 122 IV 66 consid. 2a; 116 IV 353 consid. 5a). C'est à nouveau une question de droit de savoir si la modification de l'état de fait est juridiquement pertinente, c'est-à-dire de nature, en fonction des règles de droit de fond applicables, à entraîner une décision plus favorable au condamné en ce qui concerne la culpabilité, la peine ou les mesures (ATF 130 IV 72 consid. 1; 125 IV 298 consid. 2b p. 301 s.; 122 IV 66 consid. 2a; 116 IV 353 consid. 2b et les références citées).
 
5.2 En l'espèce, se référant à une jurisprudence récente, la cour cantonale définit de manière parfaitement correcte la notion de fait sérieux. En outre, il ressort de sa motivation qu'elle n'a pas accordé grand crédit à la rétractation invoquée par le recourant à l'appui de sa demande de révision. Ainsi, l'arrêt attaqué mentionne que "les motifs invoqués par B.________ pour expliquer sa rétractation ne convainquent nullement", qu'"à elle seule, l'invraisemblance des explications données par B.________ à l'appui de sa rétractation suffit à démontrer que celle-ci n'est pas crédible" et encore que "la rétractation de B.________ survient cinq ans après les faits, alors que X.________ a perdu toute chance d'obtenir une modification du jugement par la voie ordinaire" de sorte qu'"au vu de tous ces éléments, on ne peut que conclure que les nouvelles déclarations de B.________ sont de pure circonstance". Force est donc de constater que l'autorité cantonale n'a pas rejeté la requête du recourant parce qu'elle aurait mal interprété la notion de fait sérieux au sens de l'art. 397 CP et exigé une certitude quant à un jugement favorable, mais bien parce qu'elle n'était pas convaincue par le moyen de preuve nouveau invoqué.
 
En réalité, l'argumentation du recourant consiste principalement à dire que l'élément nouveau invoqué était propre à ébranler la conviction sur le fait qu'il a participé au vol commis au Tessin. Or, sur ce point, il s'agit précisément d'apprécier l'influence de la rétractation invoquée par rapport à l'ensemble des autres éléments dont dispose l'autorité cantonale. Il s'agit d'une question qui relève de l'appréciation des preuves et de l'établissement des faits, qui ne peut faire l'objet d'un pourvoi en nullité. Etant admis que c'est sans arbitraire que l'autorité cantonale est parvenue à la conclusion que les éléments nouveaux invoqués n'étaient pas crédibles, elle n'a pas violé le droit fédéral en considérant qu'ils n'étaient pas sérieux au sens de l'art. 397 CP. Le pourvoi doit donc également être rejeté.
 
6.
 
Vu l'issue de ce recours, les frais afférents au pourvoi doivent être mis à la charge du recourant qui succombe (art. 278 al. 1 PPF).
 
Enfin, la cause étant ainsi tranchée, la requête d'effet suspensif est devenue sans objet.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours de droit public est rejeté.
 
2.
 
Le pourvoi est rejeté.
 
3.
 
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud et à la Chambre des révisions civiles et pénales du Tribunal cantonal vaudois.
 
Lausanne, le 8 juin 2005
 
Au nom de la Cour de cassation pénale
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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