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Informationen zum Dokument  BGer 6S.145/2005  Materielle Begründung
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BGer 6S.145/2005 vom 17.07.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6S.145/2005 /rod
 
Arrêt du 17 juillet 2005
 
Cour de cassation pénale
 
Composition
 
MM. les Juges Schneider, Président,
 
Wiprächtiger, Kolly, Karlen et Zünd.
 
Greffière: Mme Kistler.
 
Parties
 
X.________,
 
recourant, représenté par Me Stéphane Riand, avocat,
 
contre
 
D.________,
 
B.________,
 
intimées, représentées par Me Yannis Sakkas, avocat,
 
Procureur général du canton du Valais,
 
case postale 2282, 1950 Sion 2.
 
Objet
 
Violation de la LAVI,
 
pourvoi en nullité contre la décision du Tribunal de Monthey, Juge I, du 14 mars 2005.
 
Faits:
 
A.
 
A.________, née le 22 septembre 1964, et X.________, né le 28 novembre 1972, de nationalité camerounaise, se sont mariés le 16 février 1999. Ils ont eu le 4 mai 1998 une enfant, dénommée B.________. A.________ avait déjà d'un précédent mariage trois enfants, C.________, né le 30 août 1986, D.________, née le 14 août 1988, et E.________, née le 22 mars 1991. A la suite de son divorce, elle avait eu la garde sur ses trois enfants, si bien que ceux-ci ont toujours vécu avec leur beau-père.
 
A la suite d'une dénonciation de A.________, le juge d'instruction valaisan a ouvert, le 27 août 2002, une instruction d'office contre X.________ pour actes d'ordre sexuel sur D.________ et sur B.________. Le 16 décembre 2002, il a chargé le Dr M.________, pédopsychiatre, de se prononcer sur la crédibilité à attribuer aux déclarations des fillettes. Il ressort de l'expertise déposée le 21 janvier 2003 que les déclarations des deux enfants faites à la police sont crédibles, le spécialiste précisant que les fillettes ne présentaient ni l'une ni l'autre des facteurs prédictifs négatifs ou psychopathologiques qui seraient de nature à faire douter de la réalité de leurs dires.
 
Le 7 février 2003, X.________ a requis une contre-expertise. Par décision du 19 février 2003, le juge d'instruction a rejeté cette requête, décision confirmée le 6 août 2003 par la Chambre pénale du Tribunal cantonal valaisan.
 
B.
 
Après le renvoi de la cause devant l'autorité de jugement, X.________ a déposé, le 8 février 2005, après l'expiration du délai imparti pour requérir l'administration de preuves aux débats, un courrier de M. G.________, psychologue et professeur à l'université de Montréal, qui relevait un certain nombre de faiblesses dans le rapport d'expertise du Dr M.________. Celui-ci aurait notamment omis de considérer toute autre hypothèse que l'abus sexuel perpétré par X.________ pour expliquer les verbalisations et les comportements des fillettes et aurait ignoré une très abondante littérature scientifique sur la suggestibilité de tout enfant.
 
Par décision du 14 mars 2005, le Juge de district de Monthey a décidé de joindre au dossier le courrier de M. G.________, bien qu'il ait été déposé tardivement, et a ordonné une nouvelle expertise de crédibilité, au motif que le Dr M.________ n'expliquait pas dans son rapport la méthodologie utilisée pour l'évaluation de la crédibilité des témoignages des fillettes et qu'il ne semblait pas avoir utilisé les critères scientifiques mentionnés à l'ATF 128 I 81.
 
C.
 
X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral contre cette dernière décision. Après avoir requis une contre-expertise, il s'oppose à celle-ci une fois qu'il l'a obtenue, en faisant valoir l'intérêt de l'enfant (art. 10c al. 1 de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions; LAVI; RS 312.5). Il conclut à l'annulation de la décision attaquée et sollicite, en outre, l'assistance judiciaire et l'effet suspensif, qui lui a été accordé à titre superprovisionnel le 15 avril 2005.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Dans un premier grief, le recourant fait valoir que la décision attaquée, qui ordonne une expertise de crédibilité des enfants victimes, violerait l'art. 10c LAVI.
 
1.1 Dans l'ATF 129 IV 179, le Tribunal fédéral a déclaré recevable un pourvoi en nullité déposé par l'enfant victime contre une décision qui ordonnait, en cours d'instruction, une expertise de crédibilité en dérogation de l'art. 10c al. 1 LAVI, considérant que cette décision était irrémédiable et que les éventuels effets néfastes sur l'enfant ne pouvaient pas être annulés plus tard rétroactivement. Au demeurant, il était conforme à l'esprit de la loi de garantir les intérêts de l'enfant victime au plan fédéral en ouvrant le pourvoi en nullité, puisque la loi prévoit que l'autorité pénale peut classer une procédure pénale si l'intérêt de l'enfant l'exige impérativement (art. 10d al. 1 LAVI) et que la décision de cette autorité de ne pas classer la procédure peut faire l'objet d'un pourvoi (art. 10d al. 3 LAVI).
 
Au vu de cette jurisprudence, la décision attaquée, qui ordonne une expertise de crédibilité, peut donc faire l'objet d'un pourvoi en nullité. Toutefois, en l'occurrence, le pourvoi n'est pas déposé par la victime, mais par l'auteur de l'infraction. Se pose dès lors la question de l'intérêt du recourant à se plaindre de la violation de l'art. 10c LAVI.
 
1.2
 
1.2.1 Bien que l'art. 270 let. a PPF ne le précise pas expressément, le pourvoi en nullité suppose que l'accusé soit atteint par la décision cantonale et ait un intérêt juridique digne de protection à son annulation (ATF 128 IV 34 consid. 1b p. 36; 124 IV 94 consid. 1a p. 95; 101 IV 324 consid. 1 p. 325; 96 IV 64 consid. 1 p. 67).
 
L'intérêt au pourvoi doit être personnel. La violation d'un intérêt relevant d'un autre sujet de droit est insuffisante pour créer la qualité pour agir. Ainsi, l'accusé ne pourra se plaindre par la voie du pourvoi de la manière dont un coaccusé a été traité (ATF 120 IV 17 consid. 2d p. 24; Corboz, Le pourvoi en nullité, in: Les recours au Tribunal fédéral, Publications FSA, vol. 15, p. 67; Schweri, Eidgenössische Nichtigkeitsbeschwerde in Strafsachen, Berne 1993, n. 226 p. 80; Sträuli, Pourvoi en nullité et recours de droit public au Tribunal fédéral, thèse Genève 1995, p. 101 s. n. 248 s.). De même, un condamné ne pourra requérir un second procès au motif que le juge aurait violé l'art. 10 LAVI en rejetant la requête de la victime tendant à ce que le tribunal comprenne au moins une personne du même sexe qu'elle (Sträuli, op. cit., p. 102 n. 249).
 
1.2.2 Le 23 mars 2001, les Chambres fédérales ont introduit dans la LAVI des dispositions particulières pour protéger la personnalité des enfants victimes dans la procédure pénale (section 3a; art. 10a à 10d LAVI). Parmi ces dispositions figure l'art. 10c LAVI, selon lequel l'enfant ne doit en principe pas être soumis à plus de deux auditions sur l'ensemble de la procédure (al. 1). L'alinéa 3 précise qu'une seconde audition est organisée si, lors de la première, les parties n'ont pas pu exercer leurs droits, ou si cela est indispensable au bon déroulement de l'enquête ou à la sauvegarde de l'intérêt de l'enfant. Dans son rapport, la Commission des affaires juridiques du Conseil national explique que cette disposition se justifie, car un interrogatoire sur les circonstances de l'acte peut entraîner chez l'enfant victime un effet traumatisant et que cette seconde atteinte psychique, appelée "victimisation secondaire", est à peine moindre que celle qui est subie du fait de l'infraction (FF 2000 p. 3510 ss, spéc. p. 3525; ATF 129 IV 179 consid. 2.3 p. 183).
 
Il résulte tant de la systématique de la loi que des travaux préparatoires que ce nouvel art. 10c al. 1 LAVI a été introduit dans l'intérêt de l'enfant victime et non de l'auteur de l'infraction. En ordonnant une expertise de crédibilité, alors que les fillettes ont déjà été entendues à deux reprises dans la procédure pénale, la décision attaquée déroge au principe des deux auditions posé à l'art. 10c al. 1 LAVI, ce qui pourrait avoir un effet traumatisant pour les jeunes victimes. Elles seules auraient donc pu recourir contre cette décision pour sauvegarder leurs intérêts. En revanche, le recourant, qui n'est pas touché directement par cette décision, ne saurait se prévaloir que le tribunal a violé l'art. 10c al. 1 LAVI pour obtenir une amélioration de sa propre situation. Le recourant n'a donc pas d'intérêt juridique pour contester l'application de l'art. 10c al. 1 LAVI, de sorte que son grief est irrecevable.
 
2.
 
Dans un second grief, le recourant se plaint de la violation du principe "ne bis in idem". En effet, par décision du 6 août 2003, la Chambre pénale du Tribunal cantonal valaisan a confirmé la décision du juge d'instruction refusant une contre-expertise. En outre, le 15 septembre 2004, le Juge de district de Monthey aurait également rejeté une requête tendant à une contre-expertise.
 
2.1 Alors que le Tribunal fédéral a expressément reconnu que l'enfant victime, entendu déjà à deux reprises, pouvait interjeter un pourvoi en nullité contre la décision incidente ordonnant une nouvelle audition, en violation de l'art. 10c LAVI (notamment par analogie avec l'art. 10d al. 3 LAVI; cf. consid. 1.1), il a laissé indécise, dans un arrêt, non publié, du 12 mai 2005 (6S.488/2004), la question de savoir s'il convenait d'ouvrir, de manière générale, le pourvoi en nullité contre les décisions incidentes de procédure fédérale ou s'il fallait suivre la voie du recours de droit public pour violation des droits constitutionnels.
 
Dans cet arrêt, il a précisé que, dans tous les cas, que l'on opte pour la voie du pourvoi en nullité ou pour celle du recours de droit public, la décision incidente ne pouvait être contestée que si elle entraînait un dommage irréparable. Cette exigence découle de l'art. 87 al. 2 OJ pour le recours de droit public. Elle se justifie pour des raisons d'économie de la procédure; en tant que cour suprême, le Tribunal fédéral doit en principe ne s'occuper qu'une seule fois d'un procès, et cela seulement lorsqu'il est certain que le recourant subit effectivement un dommage définitif (ATF 116 Ia 197 consid. 1b p. 199). Pour les mêmes raisons, le pourvoi en nullité devrait aussi se limiter aux décisions incidentes de procédure dont il résulte un dommage irréparable. Du reste, la nouvelle loi sur le Tribunal fédéral, adoptée par les Chambres fédérales le 17 juin 2005 et soumis au délai référendaire jusqu'au 6 octobre 2005, ouvre le futur recours en matière pénale uniquement contre les décisions préjudicielles et incidentes qui causent un préjudice irréparable ainsi que dans certains cas où une décision finale peut être immédiatement provoquée (art. 93 LTF, FF 2005 p. 3829 ss, spéc. 3854).
 
2.2 Un préjudice irréparable n'est réalisé que lorsque l'intéressé subit un dommage de nature juridique qu'une décision favorable sur le fond ne ferait pas disparaître complètement (ATF 122 I 39 consid. 1a/bb p. 42 et les arrêts cités). Un dommage de pur fait, comme la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n'est pas tenu pour irréparable de ce point de vue (ATF 123 I 325 consid. 3c p. 328, 116 II 80 consid. 2c p. 83). En principe, les décisions relatives à l'administration des preuves ne sont pas de nature à causer aux intéressés un dommage irréparable, tel qu'il vient d'être défini. En effet, la partie qui conteste une décision rendue en ce domaine dans un procès qui la concerne pourra attaquer, le cas échéant, cette décision incidente en même temps que la décision finale (ATF 99 Ia 437 consid. 1 p. 438 et les arrêts cités; pour plus de détails, cf. Ludwig, Endentscheid, Zwischenentscheid und Letztinstanzlichkeit im staatsrechtlichen Beschwerdeverfahren, in RJB 110/1974, p. 181 ch. 4.4).
 
En l'occurrence, le recourant s'en prend à l'expertise de crédibilité, qui aurait été ordonnée en violation du principe "ne bis idem". Le point contesté concerne l'administration des preuves et pourra être attaqué en même temps que la décision finale de la dernière instance cantonale. La décision attaquée n'est donc pas propre à léser de manière irrémédiable les intérêts juridiques du recourant. Faute de dommage irréparable, le grief soulevé est dès lors irrecevable.
 
3.
 
En définitive, le pourvoi est irrecevable, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si la décision du juge de district de Monthey a été prise en dernière instance cantonale comme le soutient le recourant (cf. art. 268 ch. 1 PPF).
 
Succombant, le recourant doit être condamné aux frais (art. 278 al. 1 PPF). Comme le pourvoi était d'emblée dépourvu de chances de succès, l'assistance judiciaire doit être refusée (art. 152 al. 1 OJ).
 
Vu l'issue du pourvoi, la requête d'effet suspensif devient sans objet.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le pourvoi est irrecevable.
 
2.
 
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
 
3.
 
Un émolument judiciaire de 800 francs est mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Procureur général du canton du Valais et au Tribunal de Monthey, Juge I.
 
Lausanne, le 17 juillet 2005
 
Au nom de la Cour de cassation pénale
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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