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Informationen zum Dokument  BGer 6P.23/2005  Materielle Begründung
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BGer 6P.23/2005 vom 22.07.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6P.23/2005
 
6S.69/2005 /rod
 
Arrêt du 22 juillet 2005
 
Cour de cassation pénale
 
Composition
 
MM. les Juges Schneider, Président,
 
Kolly et Karlen.
 
Greffière: Mme Kistler.
 
Parties
 
X.________,
 
recourant, représenté par Me Pierre-André Oberson, avocat,
 
contre
 
Ministère public du canton de Vaud,
 
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
 
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, rte du Signal 8, 1014 Lausanne.
 
Objet
 
Procédure pénale, appréciation des preuves, principe "in dubio pro reo"; escroquerie (art. 146 CP), interdiction d'exercer une profession, une industrie ou un commerce (art. 54 CP),
 
recours de droit public et pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, du 19 octobre 2004.
 
Faits:
 
A.
 
Par jugement rendu le 11 juin 2004, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de La Côte a condamné X.________ à la peine de deux ans et demi d'emprisonnement pour escroquerie par métier, ivresse au volant et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. En outre, il a reconnu le condamné débiteur de l'Etat de Vaud d'une créance compensatrice de 60'000 francs et lui a interdit, pour une durée de cinq ans dès jugement définitif et exécutoire, d'exercer une profession soumise à autorisation officielle en matière financière.
 
Statuant le 19 octobre 2004, la Cour de cassation pénale du canton de Vaud a rejeté le recours de X.________. Comme la contravention à la LStup s'était prescrite en cours de procédure, elle l'a d'office libéré de ce chef d'accusation, mais a maintenu la peine infligée par les premiers juges, vu le caractère mineur de l'infraction à la LStup par rapport aux autres infractions retenues.
 
B.
 
En résumé, la condamnation de X.________ repose sur les faits suivants:
 
B.a En compagnie de deux associés, X.________ a créé la société A.________ SA, au début de l'année 1998. Active dans le domaine de la finance, plus particulièrement sur le marché des produits dérivés, cette société faisait office d'intermédiaire ("introducing broker") entre le client investisseur et le broker, seul habilité à traiter en bourse des valeurs mobilières. Le but était le conseil des clients quant à la stratégie des investissements, notamment concernant l'acquisition d'options. Cette société est devenue ensuite B.________ SA, puis C.________, toujours selon le même mode de fonctionnement. Les trois associés assumaient la direction des affaires, donnant les ordres pour la stratégie à une équipe de courtiers (ou prétendus tels), soit une équipe de démarcheurs par téléphone. Les courtiers engagés étaient formés en quelques jours par les associés; ils n'avaient à la base aucune autre formation financière. Ils étaient payés à la commission et fortement incités à démarcher de manière agressive ou, à tout le moins, insistante. Ces méthodes ont amené divers mécontents à signaler la situation à la justice.
 
B.b Les contrats passés entre la société des associés et les divers plaignants pouvaient être divisés en deux catégories: les contrats dits de la "première génération" et ceux de la "seconde génération". C'est à la fin de l'année 1998 que la société a modifié ses contrats, passant de la "première" à la "seconde génération". La différence essentielle entre les deux sortes de contrat était l'existence, pour la "seconde génération", d'une annexe qui donnait un exemple de calculation et qui, surtout, évoquait un pourcentage, généralement de 20 % ou 25 %, de montants de commissions forfaitaires, l'autre différence importante résidant dans la disparition de la commission de succès de 20 % existant dans les contrats de la "première génération". Les plaignants n'avaient pas compris, pour la quasi totalité d'entre eux, que la commission forfaitaire s'entendait, malgré l'adjectif "forfaitaire", par contrat d'option et non par transaction. Autrement dit, l'effet multiplicateur de la commission forfaitaire s'était révélé totalement incompris des clients.
 
B.c Pendant les années 1998, 1999 et 2000, aucun client n'a gagné quoi que ce soit alors qu'ils étaient plusieurs centaines à s'être adressés à la société des associés. Les apports totaux de la clientèle se sont élevés à 7,1 millions de francs et la rémunération de l'ensemble des collaborateurs de A.________ SA se montait à 4,2 millions de francs. Les clients ont globalement perdu le 84 % de leurs avoirs.
 
Une audience de conciliation tenue le 7 mai 2004 par le Président du Tribunal correctionnel de l'arrondissement de La Côte a permis de trouver un accord général entre tous les plaignants, ceux-ci recevant le 84,5 % du montant de leur investissement, le total distribué s'élevant à 2'582'032 francs, somme payée avec les montants séquestrés dans le cadre de cette affaire.
 
B.d En droit, la cour cantonale a considéré que les clients avaient été astucieusement induits en erreur. Selon elle, la duperie consistait à faire croire aux clients, sur la base d'un contrat usant de termes incompréhensibles pour eux, qu'ils ne payeraient qu'une commission très modeste de 200 francs par transaction et qu'ils ne s'acquitteraient de plus amples montants qu'en cas de gain, alors qu'en réalité la société se réservait une part substantielle du capital versé par les clients en veillant à ne jamais les informer de l'importance des commissions et en leur faisant croire que l'entier de leur perte était dû au jeu de la bourse.
 
La cour cantonale a ainsi condamné les trois associés pour escroquerie par métier s'agissant des affaires effectuées sous l'empire du contrat qualifié de "première génération", soit celui concernant essentiellement l'année 1998. En ce qui concerne les contrats de la "deuxième génération", soit ceux rédigés à l'entête de B.________ SA, les juges ont estimé que l'information donnée par ces documents était suffisante pour que le client puisse s'y retrouver, les trois associés étant ainsi libérés de l'accusation d'escroquerie par métier pour les années 1999 et 2000.
 
C.
 
Contre cet arrêt cantonal, X.________ dépose un recours de droit public et un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral. Dans le premier, il invoque les art. 9 et 32 al. 1 Cst. Dans le second, il se plaint d'une violation des art. 146 et 54 CP. Dans les deux recours, il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et sollicite l'effet suspensif, qui lui a été accordé le 6 avril 2005.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Selon le règlement du Tribunal fédéral, la Cour de cassation pénale connaît des pourvois en nullité et des recours de droit public pour violation des art. 8, 9 et 29 Cst., connexes à un pourvoi en nullité pendant (art. 7 du règlement du 14 décembre 1978 du Tribunal fédéral; RS 173.111.1).
 
Conformément à l'art. 275 al. 5 PPF, le recours de droit public est examiné en premier lieu.
 
I. Recours de droit public
 
2.
 
2.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindre d'une violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi en nullité (art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dans le cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ; art. 269 al. 2 PPF).
 
2.2 En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation. Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier de lui-même si la décision attaquée est en tous points conforme au droit ou à l'équité. Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours. Le recourant ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou de renvoyer aux actes cantonaux (ATF 129 I 185 consid. 1.6 p. 189, 113 consid. 2.1 p. 120; 125 I 71 consid. 1c p. 76). Le Tribunal fédéral n'entre pas non plus en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495).
 
3.
 
Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir résumé les faits en trois pages et demie et d'avoir renvoyé, pour le surplus, au jugement de première instance. Selon lui, ce procédé serait contraire à l'art. 452 let. b du Code de procédure pénale vaudois (ci-après: CPP/VD) et violerait le droit d'être entendu, car la motivation serait insuffisante.
 
3.1 L'application du droit cantonal est examinée par le Tribunal fédéral sous l'angle de l'arbitraire (ATF 128 I 177 consid. 2.1 p. 182; sur la notion d'arbitraire, cf. ci-dessous 4.1). L'art. 452 let. b CPP/VD prévoit que tout arrêt de la cour de cassation vaudoise doit indiquer les faits nécessaires à l'intelligence de l'arrêt. On ne voit pas en l'espèce les faits que l'arrêt attaqué aurait omis et qui seraient pertinents pour la compréhension de la cause. Le recourant n'apporte aucune précision à cet égard. Son grief ne satisfait donc pas aux exigences de précision et de clarté posées à l'art. 90 al. 1 let. b OJ et doit en conséquence être déclaré irrecevable.
 
3.2 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236; 126 I 15 consid. 2a/aa p. 17, 97 consid. 2b p. 102 s.). Il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 123 I 31 consid. 2c p. 34; 122 IV 8 consid. 2c p. 14 s.). L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui paraissent pertinents (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102 s. et les arrêts cités). Les exigences posées par la jurisprudence fédérale sont manifestement respectées en l'espèce. A tout le moins, le recourant ne démontre pas en quoi elles ne le seraient pas, de sorte que son grief est irrecevable (art. 90 al. 1 let. b OJ).
 
4.
 
Se fondant sur l'art. 9 Cst., le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir établi les faits de manière arbitraire et d'avoir ainsi violé la présomption d'innocence (art. 32 al. 1 Cst. et 6 § 2 CEDH). En particulier, l'autorité cantonale n'aurait pas posé les éléments nécessaires pour établir l'intention du recourant de commettre une escroquerie.
 
4.1 Une décision est arbitraire et donc contraire à l'art. 9 Cst. lorsqu'elle viole clairement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou contredit de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si sa décision apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision soient insoutenables, il faut encore que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. A cet égard, il ne suffit pas non plus qu'une solution différente de celle retenue par l'autorité cantonale apparaisse également concevable ou même préférable (ATF 128 II 259 consid. 5 p. 280; 127 I 54 consid. 2b p. 56, 60 consid. 5a p. 70; 124 IV 86 consid. 2a p. 88 et les arrêts cités).
 
En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, une décision est entachée d'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un moyen de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur le sens et la portée d'un tel élément, ou encore lorsqu'elle tire des déductions insoutenables à partir des éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4a p. 211).
 
4.2 Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir retenu qu'il avait réalisé et voulu tromper les clients durant l'année 1998, alors qu'elle a exclu toute activité illicite depuis 1999 (contrat de la "deuxième génération").
 
Le grief du recourant n'est pas pertinent. L'autorité cantonale explique clairement que le juge de première instance n'a pas retenu l'escroquerie pour les contrats de la "seconde génération", car il n'avait pas été possible de déterminer comment les clients avaient compris les dits contrats et, partant, de prouver la tromperie astucieuse. Faisait ainsi défaut un des éléments objectifs de la tromperie astucieuse. En revanche, l'autorité cantonale n'a jamais affirmé que le recourant n'avait pas eu, dans ce cas, la volonté de tromper les clients et que l'élément subjectif n'aurait donc pas été réalisé. Il n'y a donc pas de contradiction entre l'analyse de l'élément subjectif dans les deux situations.
 
4.3 Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir arbitrairement déduit l'intention délictueuse du fait qu'il avait travaillé pour une société dont les représentants avaient connu des ennuis judiciaires et qu'il avait décidé de poursuivre pour son propre compte l'activité qu'il déployait précédemment pour cette société. Selon le recourant, les représentants auraient été acquittés; à cet égard, il cite un jugement du Tribunal d'arrondissement de Lausanne et un arrêt du Tribunal fédéral.
 
Le jugement du 3 décembre du Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne n'est d'aucun secours au recourant, puisque le Tribunal déclare en page 23 que "l'instruction est restée relativement sommaire, de sorte que le jugement qui sera rendu ne saurait en aucune façon lier une autre juridiction pénale qui pourrait être saisie de faits similaires. On sait à cet égard que l'accusé X.________ fait l'objet d'une enquête pénale diligentée par le juge d'instruction de la Côte". L'arrêt du Tribunal fédéral n'est pas plus utile au recourant, puisque le Tribunal fédéral a déclaré le pourvoi irrecevable, les plaignants n'ayant pas qualité pour recourir (cf. 6S.668/2000). Mal fondé, le grief soulevé doit donc être rejeté.
 
4.4 Selon le recourant, l'autorité cantonale aurait déduit de manière arbitraire l'intention délictueuse du fait que les courtiers engagés n'avaient aucune formation financière et étaient incités à démarcher les clients de manière agressive.
 
Le raisonnement de l'autorité cantonale ne prête pas le flanc à la critique. Le défaut de formation financière des courtiers et la politique de démarchage qu'ils menaient démontrent que les trois associés n'avaient pas pour but principal de gérer au mieux les intérêts des clients et de leur donner de bons renseignements quant à la stratégie des investissements, mais bien plus d'obtenir que les clients leur confient leur argent afin de s'enrichir indûment. Dans ces conditions, il n'est pas arbitraire de déduire du défaut de formation des courtiers et de leur politique de "vente" agressive que le recourant avait la volonté de tromper ses clients. Mal fondé, le grief du recourant doit être rejeté.
 
4.5 Aux yeux du recourant, c'est à tort que l'autorité cantonale se serait fondée pour retenir la volonté délictueuse sur le fait que les clients n'avaient rien compris à l'art. 2.1 relatif à la commission forfaitaire et que le montant effectif de cette commission avait été soigneusement tu. Selon le recourant, l'art. 2.1 n'était pas trompeur. En outre, le montant des commissions était inscrit sur les décomptes remis aux clients lors de chaque transaction.
 
L'autorité cantonale n'est pas tombée dans l'arbitraire en déduisant la volonté de tromper de la confection de documents peu clairs. On ne saurait à cet égard sérieusement soutenir que l'art. 2.1 est d'une compréhension aisée et que les décomptes indiquaient clairement le montant des commissions, puisque le montant total n'était pas mentionné, mais supposait une multiplication. Pour le surplus, savoir si cette mise en scène peut être qualifiée de tromperie astucieuse est une question de droit, que la cour de céans ne peut revoir dans le cadre d'un recours de droit public. Mal fondé, le grief soulevé doit être écarté.
 
4.6 Le recourant reproche à l'autorité cantonale de ne pas avoir tenu compte du fait que les trois associés avaient régulièrement consulté une étude d'avocats genevoise. Par l'intermédiaire de cette étude, les associés se seraient notamment adressés à la Commission fédérale des banques pour s'assurer de la conformité de leur activité avec la loi fédérale du 24 mars 1995 sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières.
 
Le simple fait de consulter un avocat ne saurait exclure l'intention de commettre une infraction. Encore faut-il que l'avocat ait donné des informations concernant l'infraction en cause et que, se fondant sur celles-ci, l'auteur n'ait pas eu conscience de commettre une infraction. En l'occurrence, la cour de céans ignore les circonstances exactes dans lesquelles les associés auraient consulté cette étude, les mandats donnés et les informations reçues, de sorte qu'elle ne saurait se prononcer sur la pertinence du grief du recourant. Le grief soulevé est dès lors irrecevable (art. 90 al. 1 let. b OJ).
 
5.
 
Le recourant reproche en outre à l'autorité cantonale d'avoir procédé à une appréciation arbitraire des faits et des preuves en relation avec la présomption d'innocence.
 
5.1 La présomption d'innocence et le principe "in dubio pro reo", qui en est le corollaire, sont des garanties de rang constitutionnel, dont la violation ne peut donc être invoquée que par la voie du recours de droit public (art. 269 al. 2 PPF; ATF 120 Ia 31 consid. 2b p. 35/36 et 2e p. 38). Elles concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 2c p. 36). En tant que règles sur le fardeau de la preuve, ces principes signifient, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter à l'accusé. Comme règles sur l'appréciation des preuves, ils sont violés lorsque le juge, qui s'est déclaré convaincu, aurait dû éprouver des doutes quant à la culpabilité de l'accusé au vu des éléments de preuve qui lui étaient soumis (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2c p. 37). Le Tribunal fédéral examine librement si ces principes ont été violés en tant que règles sur le fardeau de la preuve, mais il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire la question de savoir si le juge aurait dû éprouver un doute, c'est-à-dire celle de l'appréciation des preuves (ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2e p. 38).
 
En l'espèce, il n'appert nullement, et le recourant ne le prétend d'ailleurs pas lui-même, que l'autorité cantonale aurait renversé le fardeau de la preuve, ni qu'elle aurait éprouvé un doute qu'elle aurait interprété en défaveur de l'accusé. La seule question est donc de savoir si l'autorité aurait dû éprouver un doute, question qui relève de l'appréciation des preuves et ne peut être examinée que sous l'angle de l'arbitraire, de sorte que ce grief se confond avec celui d'appréciation arbitraire des preuves, qui a été déclaré mal fondé.
 
6.
 
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ).
 
II. Pourvoi en nullité
 
7.
 
Le recourant conteste s'être rendu coupable d'escroquerie (art. 146 CP).
 
7.1 Aux termes de l'art. 146 CP, se rend coupable d'escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais, ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.
 
7.2 L'escroquerie suppose donc une tromperie, qui peut se présenter sous la forme d'affirmations fallacieuses, de dissimulation de faits vrais ou encore consister à conforter la dupe dans l'erreur. La loi pénale ne tend pas à protéger la personne qui aurait pu éviter d'être trompée en faisant preuve d'un minimum d'attention. C'est pourquoi elle exige que la tromperie soit astucieuse. Tel est notamment le cas si l'auteur recourt à des manoeuvres frauduleuses, à une mise en scène comportant des documents ou des actes ou à un échafaudage de mensonges qui se recoupent de façon si raffinée que même une victime critique se laisserait tromper (ATF 126 IV 165 consid. 2a p. 171). L'astuce sera également admise si l'auteur exploite un rapport de confiance préexistant qui dissuade la dupe de vérifier (ATF 122 IV 246 consid. 3a p. 248) ou si la dupe n'a pas la possibilité de vérifier ou si des vérifications seraient trop difficiles et que l'auteur exploite cette situation (ATF 125 IV 124 consid. 3a p. 127).
 
La conséquence de la tromperie astucieuse doit être que la dupe, dans l'erreur, accomplit un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. La dupe doit conserver une certaine liberté; elle se lèse elle-même par son acte ou lèse une autre personne sur le patrimoine de laquelle elle a un certain pouvoir de disposition (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol I, Berne 2002, n. 28, art. 146 CP). L'erreur engendrée ou confortée par la tromperie doit motiver l'acte (ATF 119 IV 210 consid. 3d p. 214).
 
Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle, l'intention devant porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction. L'auteur doit en outre avoir agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime.
 
7.3 On peut concéder au recourant que le contrat remis aux clients mentionnait que les transactions sur instruments dérivés étaient de nature hautement spéculative et qu'elles comportaient un risque élevé de pertes importantes. La tromperie ne portait cependant pas sur ce ce point, mais sur l'importance des commissions. A cet égard, il convient de mettre en relation le texte du contrat avec le démarchage téléphonique et le texte peu clair des documents remis aux clients.
 
Il a ainsi été établi que les courtiers menaient un démarchage agressif et insistaient beaucoup sur la commission de 20 %, due en cas de gain, de sorte que les clients croyaient que le risque de perte était faible, la société gagnant sa vie grâce à cette commission de 20 %. Les courtiers passaient en revanche sous silence la commission forfaitaire. Le contrat prévoyait certes cette commission au point 2.1. La terminologie utilisée était cependant compliquée, de sorte que les clients ont cru que la société leur facturait une commission pour chaque transaction, indépendamment du fait que celle-ci englobait un ou plusieurs contrats. Les décomptes envoyés au client "statement order" après chaque transaction n'apportaient guère d'éclaircissement, puisque le montant total de la commission n'apparaissait pas d'un premier coup d'oeil, mais qu'il nécessitait un calcul.
 
Selon les constatations cantonales, les clients étaient ainsi convaincus qu'ils ne payeraient qu'une commission très modeste de 200 francs par transaction et ne s'acquitteraient de plus amples montants qu'en cas de gain, alors qu'en réalité la société se réservait une part substantielle du capital versé par les clients en veillant à ne jamais les informer de l'importance des commissions et en leur faisant croire que l'entier de leur perte était dû au jeu de la bourse.
 
Contrairement à ce que soutient le recourant, la tromperie astucieuse ne suppose pas nécessairement l'usage d'un faux dans les titres, mais peut résulter de manoeuvres frauduleuses comportant des documents et des actes. Le plan mis sur pied par les associés, combinant démarchage agressif et documents peu clairs masquant l'effet démulticateur de la commission forfaitaire, doit objectivement être qualifié d'astucieux. Sauf à être versé en matière financière ou expérimenté, qualités dont étaient dépourvus les clients, le montage astucieux n'était pas facilement détectable, de sorte que l'on ne peut imputer à ceux-ci une quelconque coresponsabilité.
 
7.4 Ce que l'auteur savait, voulait ou ce dont il s'accommodait relève du contenu de la pensée, soit de faits "internes" qui, en tant que faits, ne peuvent en principe pas être revus dans le cadre d'un pourvoi en nullité (art. 273 al. 1 let. b et 277bis PPF), même si l'autorité cantonale s'est prononcée à cet égard, en l'absence d'aveux de l'auteur, en se fondant sur des éléments extérieurs révélateurs (ATF 125 IV 242 consid. 3c p. 252).
 
Toutefois, la question de savoir si les éléments extérieurs retenus en tant que révélateurs du contenu de la conscience et de la volonté autorisent à admettre que l'auteur a agi par dol éventuel relève du droit. Ainsi, lorsque l'autorité cantonale a déduit l'élément subjectif du dol éventuel sur la base d'éléments extérieurs, faute d'aveux de l'auteur, les questions de fait et de droit interfèrent sur certains points. Le Tribunal fédéral peut dès lors revoir, dans une certaine mesure, si ces éléments extérieurs ont été correctement appréciés au regard de la notion juridique du dol éventuel. En conséquence, le juge doit exposer ces éléments extérieurs le plus exhaustivement possible, afin que l'on puisse discerner ce qui l'a conduit à retenir que l'auteur a envisagé le résultat dommageable et s'en est accommodé (cf. ATF 125 IV 242 consid. 3c p. 252; 121 IV 249 consid. 3a/aa p. 253; Martin Schubarth, Nichtigkeitsbeschwerde - Staatsrechtliche Beschwerde - Einheitsbeschwerde, PJA 1992 p. 849 ss, spéc. 851 s.). Parmi les éléments extérieurs permettant de conclure que l'auteur s'est accommodé du résultat dommageable pour le cas où il se produirait figurent notamment les mobiles de l'auteur et la manière dont il a agi (ATF 125 IV 242 consid. 3c in fine p. 252).
 
En l'occurrence, l'autorité cantonale a déduit la volonté délictueuse de plusieurs éléments. Elle a d'abord constaté que les trois associés avaient poursuivi pour leur propre compte l'activité qu'ils déployaient avec la société qui les employait précédemment et dont ils savaient que les représentants avaient connu des ennuis judiciaires. En outre, les associés agissaient par l'intermédiaire de courtiers formés rapidement, qui obéissaient à des directives claires et uniformes données par les associés, qui n'avaient à la base aucune autre formation financière et qui étaient payés à la commission et incités à démarcher de manière agressive en expliquant les possibilités de gain aux interlocuteurs, qu'ils recontactaient souvent à plusieurs reprises. Enfin, les associés expliquaient aux clients les pertes comme résultant des aléas boursiers, taisant soigneusement le montant effectif de la commission forfaitaire.
 
En déduisant de ces éléments la volonté d'escroquer les clients, l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral. Il résulte en effet clairement des circonstances susmentionnées que le but du recourant était d'amener les clients à lui confier leur argent afin de prélever une importante commission et non de placer les valeurs sur le marché boursier selon les règles de l'art en vue de les faire fructifier. L'absence de formation des courtiers en matière de produits dérivés est à cet égard particulièrement révélateur.
 
7.5 Au vu de ce qui précède, c'est donc à juste titre que l'autorité cantonale a retenu l'escroquerie par métier. Les éléments objectifs et subjectifs de cette infraction sont réalisés. Mal fondés, les griefs du recourant concernant l'application de l'art. 146 CP doivent donc être rejetés.
 
8.
 
Enfin, le recourant fait valoir que l'autorité cantonale a violé l'art. 54 CP en lui interdisant d'exercer une profession soumise à autorisation dans le domaine de la finance durant cinq ans.
 
8.1 Selon l'art. 54 al. 1 CP, lorsqu'un crime ou un délit a été commis dans l'exercice, subordonné à une autorisation officielle, d'une profession, d'une industrie ou d'un commerce, et lorsque le délinquant a été, en raison de cette infraction, condamné à une peine privative de liberté supérieure à trois mois, le juge, s'il y a lieu de craindre de nouveaux abus, pourra interdire au condamné l'exercice de sa profession, de son industrie ou de son commerce pour une durée de six mois à cinq ans.
 
8.2 L'application de cette disposition est ainsi subordonnée à la réalisation de trois conditions. Il faut d'abord que le délinquant ait été condamné, pour un crime ou un délit, à une peine privative de liberté supérieure à trois mois. Il faut ensuite que l'infraction ait été commise dans l'exercice, subordonné à une autorisation officielle, d'une profession, d'une industrie ou d'un commerce. L'activité en question doit nécessiter une autorisation officielle (Stratenwerth, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil II: Strafen und Massnahmen, Berne 1989, n. 31 § 6). Il n'est pas nécessaire que le condamné ait obtenu cette autorisation; il peut très bien exercer cette activité sans droit. Enfin, il faut que de nouveaux abus soient à craindre de la part de l'accusé. Le juge devra rechercher si, compte tenu des infractions commises ainsi que des mobiles, des antécédents et de la situation personnelle du délinquant, il existe un risque qu'il commette de nouveaux actes punissables dans l'exercice de sa profession. Le cas échéant, il devra se demander si une interdiction au sens de l'art. 54 CP se justifie pour prévenir ce risque, compte tenu en particulier de la nature et de l'importance des biens juridiques qui pourraient être mis en péril, mais aussi des conséquences d'une telle interdiction pour l'intéressé (arrêt du 20 août 1998 du Tribunal fédéral 6S.412/1998, consid. 1b).
 
L'interdiction peut être prononcée pour une durée de six mois à cinq ans (art. 54 al. 1 CP). Le juge fixera cette durée en fonction du but de protection auquel il s'agit de répondre, en particulier de l'importance du risque à prévenir et de la nature des nouveaux abus qui sont à craindre (cf. Stratenwerth, op.cit., n. 35 § 6 ).
 
8.3 En l'espèce, le recourant conteste la réalisation de la deuxième condition. Il fait valoir qu'il exerçait l'activité de "introducing broker", profession qui ne serait pas soumise à une autorisation officielle. A titre subsidiaire, il soutient que l'autorisation aurait dû être délivrée à la société, de sorte qu'il n'exerçait pas personnellement une activité soumise à autorisation. En outre, il soutient qu'il ignorait que son activité était soumise à autorisation (erreur de droit, art. 20 CP).
 
8.3.1 La loi fédérale sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières (ci-après: LBVM; RS 954.1) subordonne l'exercice de l'activité de négociant en valeurs mobilières à l'octroi d'une autorisation de l'autorité de surveillance (art. 10 al. 1 LBVM).
 
Par négociant, on entend toute personne physique ou morale ou société de personnes qui achète et vend à titre professionnel des valeurs mobilières sur le marché secondaire, qui les offre au public sur le marché primaire ou qui crée elle-même et offre au public des dérivés (art. 2 let. d LBVM). Un intermédiaire n'est négociant qu'à partir du moment où il intervient comme partie dans une transaction; les produits traités doivent ainsi entrer dans ses livres et être inscrits sur un compte dont il est lui-même le titulaire.
 
Peu importe de savoir dans quelle finalité économique l'intermédiaire prend part à la transaction, en particulier s'il est premier acheteur et revendeur au profit d'un émetteur (maison d'émission), s'il est créateur et donc premier vendeur du produit (fournisseur de dérivés), s'il tient un stock en vue de faire le marché (market maker) ou s'il opère en vue de gérer les ressources de ses clients à partir de comptes à son nom (négociant pour le compte de clients) (art. 3 OBVM) (cf. Circulaire de la Commission fédérale des banques 98/2 négociants; Jean-Baptiste Zufferey/Alessandro Bizzozzero/Lorenzo Piaget, Qui est négociant en valeurs mobilières, Aspects administratifs et fiscaux, Lausanne 1997, p. 19, p. 42 ss; Hertig/Schuppisser, Basler Kommentar, Kommentar zum schweizerischen Kapitalmarktrecht, p. 24 ss).
 
8.3.2 Selon une lettre du 4 décembre 1998 de la Commission fédérale des banques (ci-après: CFB), dont le contenu a été partiellement repris dans l'arrêt attaqué, A.________ SA "a exercé depuis sa mise en activité, en février 1998, et ce durant plusieurs mois, une activité illicite (au regard de l'art. 10 al. 1 LBVB) de négociant en valeurs mobilières, dans la mesure notamment où elle détenait en son propre nom, auprès de D.________ SA, Lausanne, un compte collectif sur lequel étaient déposés les avoirs de plus de 20 de ses clients". Cette même commission écrivait le 18 janvier 1999 à la Police de sûreté vaudoise que "D'après nos premières investigations, il apparaît que A.________ a exercé une activité non autorisée de négociant en valeurs mobilières, en ouvrant auprès du négociant D.________ SA un compte collectif et en y déposant les avoirs de ses clients".
 
Il ressort de ces courriers que la société A.________ SA a exercé une activité de négociant pour le compte de clients. Contrairement à ce que soutient le recourant, la société ne se contentait pas de mettre en relation deux parties à une transaction, mais agissait en son nom dans ses rapports avec les brokers, puisqu'elle gérait les valeurs des clients à partir de comptes à son nom. Dans la mesure où le recourant se fonde sur la page 10 de la circulaire/CFB 98/2 "négociant" pour soutenir que sa société ne tombait pas sous le coup de la LBVM, son grief n'est pas pertinent, vu que le passage cité se réfère aux négociants étrangers.
 
En conséquence, il faut admettre que les opérations accomplies par le recourant au sein de la société A.________ SA relevaient bien, en tout cas de février à octobre 1998, d'une activité soumise à autorisation de négociant en valeurs mobilières. Celui qui, au sein d'une société active sur le marché des valeurs mobilières, exerce une activité de négociant, exerce une activité soumise à autorisation officielle au sens de l'art. 54 CP, même si l'autorisation est - ou devrait être - délivrée à la société. Il est enfin sans importance pour l'application de l'art. 54 CP que le recourant n'ait pas su que son activité nécessitait une autorisation officielle. Le recourant méconnaît en effet que l'erreur de droit ne s'applique qu'à l'erreur sur l'illicéité d'un comportement déterminé. L'erreur est en revanche sans conséquence si elle porte sur des éléments qui ne conditionnent pas l'illégalité du comportement, telles les conditions d'application de la sanction.
 
8.3.3 Pour le surplus, les deux autres conditions prévues à l'art. 54 CP sont réalisées. Le recourant a été condamné à une peine privative de liberté de deux ans et demi d'emprisonnement, soit à une peine supérieure à trois mois. En outre, il résulte de l'arrêt attaqué que le recourant, qui dirigeait la société A.________ SA, n'a retiré aucun enseignement de l'affaire E.________ SA dans laquelle il était directement impliqué, reproduisant au contraire les méthodes commerciales de cette société. Dans ces conditions, les juges cantonaux pouvaient considérer, sans abuser de leur pouvoir d'appréciation, qu'il y avait lieu de craindre de nouveaux abus de la part du recourant.
 
8.4 Au vu de l'ensemble de ce qui précède, l'interdiction litigieuse d'exercer une profession soumise à autorisation dans le domaine de la finance durant cinq ans ne viole donc pas le droit fédéral.
 
9.
 
Ainsi, le pourvoi doit être rejeté.
 
Le recourant, qui succombe, doit être condamné aux frais (art. 278 al. 1 PPF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Le pourvoi est rejeté.
 
3.
 
Un émolument judiciaire de 4'000 francs est mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale.
 
Lausanne, le 22 juillet 2005
 
Au nom de la Cour de cassation pénale
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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