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Informationen zum Dokument  BGer 6S.269/2005  Materielle Begründung
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BGer 6S.269/2005 vom 22.09.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
6S.269/2005 /rod
 
Arrêt du 22 septembre 2005
 
Cour de cassation pénale
 
Composition
 
MM. les Juges Schneider, Président,
 
Kolly et Zünd.
 
Greffière: Mme Paquier-Boinay.
 
Parties
 
X.________,
 
recourant, représenté par Me Basile Schwab, avocat,
 
contre
 
Ministère public du canton de Neuchâtel,
 
rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1.
 
Objet
 
Détournement de retenues sur les salaires (159 CP),
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois du 27 juin 2005.
 
Faits:
 
A.
 
Par acte constitutif du 6 juillet 1998, X.________ a, avec deux partenaires, fondé la société "A.________ SA". Chacun des trois fondateurs était administrateur, X.________ s'occupant plus particulièrement, par le truchement de sa fiduciaire, de la comptabilité de la société.
 
En proie à de grosses difficultés financières, la société a adressé au juge le 26 juin 2000 un avis de surendettement au sens de l'art. 725 CO, à la suite de quoi la faillite a été prononcée le 12 juillet 2000.
 
Une plainte pénale émanant d'un ancien employé de la société, ainsi que d'autres dénonciations qui l'ont suivie, ont abouti à l'ouverture d'une instruction pénale contre X.________ et l'un des autres administrateurs, à l'issue de laquelle a été rendue, le 22 janvier 2004, une ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi. Il était notamment reproché à X.________ d'avoir déduit sur les salaires des employés des cotisations d'assurances sociales ainsi que des impôts à la source et d'avoir omis de verser ces montants à l'institution à laquelle ils étaient destinés.
 
B.
 
Le Tribunal pénal économique neuchâtelois a admis que X.________, en sa qualité d'administrateur, n'avait pas reversé à la compagnie d'assurance les montants prélevés sur les salaires des employés à titre de couverture complémentaire LAA et d'indemnités journalières en cas de maladie, bien qu'il ait disposé à chaque fin de mois de liquidités importantes après paiement des salaires, et qu'il ne s'était par ailleurs pas acquitté de la totalité des impôts à la source alors que des retenues avaient été effectuées à ce titre auprès des employés. Par conséquent il a, dans son jugement du 9 novembre 2004, reconnu X.________ coupable de détournement de diverses cotisations d'assurances sociales (art. 159 CP et 87 al. 3 LAVS), de soustraction au paiement de cotisations d'assurances sociales (art. 87 al. 2 LAVS) et de détournement d'impôts retenus à la source (art. 187 LIFD et 113 de la loi neuchâteloise sur les contributions directes dues par les personnes morales et instituant un impôt à la source; ci-après LCdirPMIS), les autres préventions étant abandonnées. Partant, il l'a condamné à 5 mois d'emprisonnement avec sursis pendant 3 ans et a mis à sa charge une partie des frais de justice.
 
C.
 
Par arrêt du 27 juin 2005, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois a rejeté le pourvoi en cassation formé par X.________ contre ce jugement.
 
La cour cantonale a admis que sur une période de deux ans la priorité avait été donnée au règlement d'autres créances alors qu'après paiement des salaires la société disposait à chaque fin de mois de liquidités importantes avant les prélèvements en compte-courant. Elle a encore noté que X.________ avait conscience d'opérer ce mauvais choix dans les priorités. Partant, elle a considéré que sa condamnation en application des art. 159 CP, 87 LAVS, 187 LIFD et 113 LCdirPMIS ne violait pas ces dispositions.
 
D.
 
X.________ se pourvoit en nullité contre cet arrêt. Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir adopté un raisonnement permettant dans certains cas la condamnation d'un employeur alors même que l'entreprise se trouve dans l'impossibilité matérielle de s'acquitter des cotisations sociales. Il soutient que la société n'était pas en mesure de s'acquitter des cotisations sociales prélevées sur les salaires des employés et fait en outre valoir que la solvabilité de la société a été constatée de manière manifestement contraire au résultat indiscutable de l'administration des preuves dans la mesure où les éléments retenus iraient à l'encontre d'une expertise comptable figurant au dossier. Partant, le recourant conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau. Il sollicite en outre l'assistance judiciaire.
 
E.
 
L'autorité cantonale a déclaré n'avoir pas d'observations à formuler, se référant aux considérants de son arrêt.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral, qui revêt un caractère purement cassatoire (art. 277ter al. 1 PPF), ne peut être formé que pour violation du droit fédéral, à l'exception de la violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 269 PPF). Le pourvoi n'est donc pas recevable dans la mesure où il est dirigé contre la condamnation du recourant en application de l'art. 113 LCdirPMIS puisqu'il s'agit d'une disposition de droit cantonal dont la violation ne peut pas être invoquée dans ce contexte.
 
La Cour de cassation n'est pas liée par les motifs invoqués, mais elle ne peut aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Les conclusions devant être interprétées à la lumière de leur motivation (ATF 127 IV 101 consid. 3 p. 103; 126 IV 65 consid. 1 p. 66 et les arrêts cités), le recourant a clairement circonscrit la question litigieuse que le Tribunal fédéral peut examiner.
 
En revanche, la Cour de cassation saisie d'un pourvoi en nullité est liée par les constatations de fait de l'autorité cantonale, sous réserve de la rectification d'une inadvertance manifeste (art. 277bis al. 1 PPF). Le recourant ne peut pas présenter de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 273 al. 1 let. b PPF).
 
2.
 
La réalisation des infractions imputées au recourant suppose notamment que l'employeur ait eu les moyens de s'acquitter du montant des cotisations au moment où il a effectué la retenue (ATF 122 IV 270 consid. 2c, p. 274; 117 IV 78 consid. 2d/aa, p. 81) et qu'il ait omis de transférer les cotisations échues à la dernière date possible (ATF 122 IV 270 consid. 2c p. 275), bien qu'il en ait eu la faculté ou parce que son incapacité à le faire résulte d'une violation fautive du devoir de garder à disposition les fonds nécessaires. L'obligation de conserver la substance de ces fonds correspond à un devoir général de diligence de l'entrepreneur, dont la violation est punissable. Il ne s'agit pas de fonds confiés à l'employeur par l'employé, mais de cotisations déduites du salaire par l'employeur, qui est chargé de les gérer, sans toutefois pouvoir en disposer, conformément à une obligation imposée par le droit public d'opérer certaines déductions du salaire et de transférer ces sommes à l'organisme auquel elles sont destinées. C'est la raison pour laquelle l'employeur viole l'obligation qui lui incombe s'il provoque ou tolère volontairement une situation qui le prive des moyens d'effectuer le transfert au dernier moment possible. Il faut entendre par là des actes ou des omissions qui font courir aux montants prélevés des risques déraisonnables ou inhabituels, une gestion propre à porter atteinte à la substance de l'entreprise ou à sa solvabilité, ainsi que tout procédé auquel ne recourrait pas un employeur consciencieux (ATF 122 IV 270 consid. 2c p. 275 s. et les arrêts cités).
 
Le recourant soutient que la société n'était pas en mesure de s'acquitter des cotisations prélevées sur les salaires de ses employés. Cette affirmation est en contradiction avec les constatations de l'arrêt attaqué, desquelles il ressort que la société disposait à chaque fin de mois de liquidités importantes, avant les prélèvements en compte-courant. Le recourant estime toutefois que ce fait essentiel a été constaté de manière manifestement contraire au résultat indiscutable de l'administration des preuves.
 
L'inadvertance manifeste ne doit pas être confondue avec l'arbitraire dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits. Il n'y a inadvertance manifeste que lorsque l'autorité cantonale, par une simple inattention, a retenu un état de fait qui ne correspond manifestement pas avec le résultat de l'administration des preuves. Tel est le cas par exemple si l'autorité a omis de mentionner un fait clairement établi ou si, par une simple inattention, elle s'est à l'évidence trompée sur un point de fait établi sans équivoque. Il n'y a en revanche pas d'inadvertance manifeste lorsque l'autorité cantonale a retenu ou écarté un fait à la suite d'un raisonnement ou d'un choix dans l'appréciation des preuves (ATF 121 IV 104 consid. 2b; 118 IV 88 consid. 2b p.90. Voir également Kolly, Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral, Berne 2004, p. 47; Corboz, Le pourvoi en nullité, SJ 1991 p. 93 note 237). En l'espèce, l'autorité cantonale a noté que le fait que la société ait disposé à chaque fin de mois de liquidités importantes résultait en particulier d'une expertise comptable. Il ne s'agit pas d'une simple inattention, mais d'un fait retenu d'une manière délibérée, qui ne relève donc pas d'une inadvertance manifeste et ne peut par conséquent pas faire l'objet d'une rectification d'office en application de l'art. 277bis al. 1 PPF.
 
Etant ainsi établi, d'une manière qui lie la Cour de cassation saisie d'un pourvoi en nullité (art. 277bis al. 1 PPF), que la société avait, sur une période de deux ans, disposé régulièrement à chaque fin de mois de liquidités importantes, le recourant ne saurait prétendre s'être trouvé, sans faute de sa part, dans l'impossibilité de verser la moindre somme pour s'acquitter des cotisations échues. C'est donc sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a reconnu le recourant coupable des infractions qui lui étaient imputées.
 
3.
 
Comme le pourvoi apparaissait d'emblée dénué de chances de succès, la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 152 al. 1 OJ) et le recourant, qui succombe, en supportera les frais (art. 278 al. 1 PPF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
 
3.
 
Un émolument judiciaire de 800 fr. est mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal et au Ministère public du canton de Neuchâtel.
 
Lausanne, le 22 septembre 2005
 
Au nom de la Cour de cassation pénale
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: La greffière:
 
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