VerfassungsgeschichteVerfassungsvergleichVerfassungsrechtRechtsphilosophie
UebersichtWho-is-WhoBundesgerichtBundesverfassungsgerichtVolltextsuche...

Informationen zum Dokument  BGer 1P.557/2005  Materielle Begründung
Druckversion | Cache | Rtf-Version

Bearbeitung, zuletzt am 16.03.2020, durch: DFR-Server (automatisch)  
 
BGer 1P.557/2005 vom 31.10.2005
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
1P.557/2005/col
 
Arrêt du 31 octobre 2005
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges Féraud, Président,
 
Aemisegger et Reeb.
 
Greffier: M. Parmelin.
 
Parties
 
A.________,
 
recourant, représenté par Me Bernard Katz, avocat,
 
contre
 
Pierre Muller, Juge à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud, p.a. Palais de Justice de l'Hermitage, route du Signal 8, 1014 Lausanne,
 
C.________, représenté par Me Jean-Daniel Théraulaz, avocat,
 
D.________,
 
intimés,
 
Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Palais de Justice de l'Hermitage,
 
route du Signal 8, 1014 Lausanne.
 
Objet
 
récusation,
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Cour
 
administrative du Tribunal cantonal du canton de
 
Vaud du 4 juillet 2005.
 
Faits:
 
A.
 
Un litige est pendant devant la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud entre C.________, d'une part, et A.________ et D.________, d'autre part. L'instruction de la cause a été confiée au juge cantonal Pierre Muller.
 
Le 15 juin 2005, A.________ a requis la récusation de ce magistrat qu'il tenait pour prévenu à son égard en raison de plusieurs prises de position insolites en faveur de la partie adverse.
 
Par arrêt du 4 juillet 2005, la Cour administrative du Tribunal cantonal (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté la demande qu'elle estimait mal fondée.
 
B.
 
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt, qui violerait la garantie d'un juge indépendant et impartial consacrée aux art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH.
 
Le Tribunal cantonal se réfère aux considérants de son arrêt. Pierre Muller renvoie à la détermination qu'il a adressée au Président du Tribunal cantonal le 21 juin 2005. C.________ conclut au rejet du recours. D.________ n'a pas déposé d'observations.
 
Le Tribunal fédéral considère en droit:
 
1.
 
Formé en temps utile contre une décision rendue en dernière instance cantonale et relative à la récusation d'un magistrat, le recours de droit public est recevable au regard des art. 86 al. 1, 87 al. 1 et 89 al. 1 OJ. L'auteur de la demande de récusation a qualité, au sens de l'art. 88 OJ, pour en contester le rejet.
 
2.
 
Le recourant reproche au Tribunal cantonal d'avoir violé les art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH en rejetant sa demande de récusation. Il se borne toutefois à rappeler les éléments qui démontreraient, selon lui, la partialité du juge à son égard ou la connivence de celui-ci avec la partie adverse, sans chercher à démontrer en quoi l'argumentation retenue dans l'arrêt attaqué pour écarter ces griefs serait arbitraire. Il est douteux que le recours réponde aux exigences de motivation de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (cf. ATF 128 I 295 consid. 7a p. 312). Peu importe, car les manquements reprochés au juge Pierre Muller, pris dans leur ensemble ou séparément, ne sont de toute manière pas de nature à justifier sa récusation.
 
2.1 La garantie d'un tribunal indépendant et impartial consacrée aux art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH permet au plaideur de s'opposer à une application arbitraire des règles cantonales sur l'organisation et la composition des tribunaux, qui comprennent les prescriptions relatives à la récusation des juges. Elle permet aussi, indépendamment du droit cantonal, d'exiger la récusation du juge dont la situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute sur son impartialité; elle tend notamment à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du juge est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 131 I 24 consid. 1.1 p. 25 et les arrêts cités).
 
2.2 Le recourant croit discerner un premier motif de récusation dans l'entretien téléphonique que le juge instructeur a eu le 8 juin 2005, sans l'en informer, avec le conseil de la partie adverse, à propos de la demande de restitution de délai dont il avait saisi ce magistrat; un tel procédé serait contraire aux usages et à l'égalité des parties ancrée à l'art. 1er al. 3 du Code de procédure civile vaudois (CPC vaud.).
 
Comme le relève pertinemment le Tribunal cantonal, l'initiative du coup de téléphone incriminé revient au conseil de la partie adverse et non au juge lui-même. Selon ses dires non contestés, celui-ci n'a pas conféré du litige à cette occasion, mais il s'est limité à prendre acte de la position de C.________ sur la demande de restitution de délai présentée par le recourant, sans discuter de la suite de la procédure et de l'issue qu'il entendait donner à cette requête. Replacé dans son contexte, cet épisode ne consacre ainsi aucune violation de l'égalité des parties et ne révèle aucune apparence de partialité du magistrat intimé. Au surplus, le fait que ce dernier a restitué le délai de réponse aux conditions posées par le demandeur ne permet pas d'établir un parti pris de sa part à l'égard du recourant, dans la mesure où l'art. 36 al. 1 CPC vaud. subordonne en principe une telle restitution à l'accord de la partie adverse.
 
A.________ voit un deuxième motif de prévention du juge instructeur à son endroit dans le fait que ce dernier a proposé de tenir une audience de conciliation, alors qu'il était saisi d'une requête d'appel en cause. En vertu de l'art. 126 CPC vaud., le juge doit tenter la conciliation en cours d'instance, mais au plus tard à l'audience de jugement; il peut, dans n'importe quel état de la cause, citer à cet effet les parties à son audience. Le juge jouit ainsi d'une importante liberté d'appréciation en ce qui concerne le moment auquel il convient de tenter la conciliation; en l'espèce, le magistrat intimé n'a pas cité les parties à comparaître, mais il les a interpellées sur l'opportunité de mettre en oeuvre une audience de conciliation avant de statuer sur la requête d'appel en cause dont il était saisi. En cas de réponse positive et d'entente entre les parties, le litige aurait pu être réglé sans autre mesure d'instruction. Cette démarche était non seulement conforme à la loi, mais également appropriée au regard des principes de célérité et d'économie de la procédure ancrés à l'art. 1er al. 3 CPC vaud.; elle ne procédait en tout état de cause pas d'un parti pris en faveur de C.________. Au demeurant, vu l'opposition du recourant, le juge instructeur n'a donné aucune suite à cette proposition.
 
A.________ se prévaut enfin de la lettre que le juge Pierre Muller lui a adressée le 7 juin 2005 pour l'informer qu'à défaut d'avoir déposé la réponse dans le délai, il était déchu du droit de le faire et lui rappeler qu'un éventuel recours contre le jugement incident du 28 avril 2005 rejetant la demande de suspension de la procédure n'aurait pas d'effet suspensif de par la loi. Le magistrat intimé n'a pas attendu l'échéance du délai de vingt jours fixé à l'art. 36 al. 1 CPC vaud. pour lui adresser cette lettre. De là à lui reprocher une diligence peu commune dans le suivi d'une procédure et tendant à privilégier la partie adverse, il y a un pas que le Tribunal cantonal pouvait sans arbitraire ne pas franchir. Quant au rappel de la disposition légale suivant laquelle un éventuel recours contre ce jugement n'interrompait pas l'instruction, il pouvait objectivement être compris en ce sens que s'il entendait recourir, A.________ n'était pas dispensé pour autant de déposer une demande de restitution de délai en temps utile et non comme un moyen de pression inadmissible, visant à le dissuader de contester ce jugement. A tout le moins, l'argumentation retenue en ce sens dans l'arrêt attaqué est-elle soutenable. Au demeurant, même si l'on voulait voir dans cette intervention une erreur de procédure ou d'appréciation, celle-ci ne revêtirait pas la gravité requise pour fonder objectivement un soupçon de prévention (ATF 116 Ia 14 consid. 5 p. 20; 113 Ia 407 consid. 2b p. 410; 111 Ia 259 consid. 3b/aa p. 264).
 
En refusant de donner suite à la demande de récusation formée par le recourant, le Tribunal cantonal n'a donc pas contrevenu aux art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH.
 
3.
 
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Une indemnité de dépens doit être accordée à l'intimé qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 159 al. 1 OJ).
 
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant ainsi qu'une indemnité de 1'000 fr. en faveur de C.________, à titre de dépens.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
 
Lausanne, le 31 octobre 2005
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le président: Le greffier:
 
© 1994-2020 Das Fallrecht (DFR).