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Informationen zum Dokument  BGer B 60/2006  Materielle Begründung
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BGer B 60/2006 vom 09.05.2007
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 7}
 
B 60/06
 
Arrêt du 9 mai 2007
 
IIe Cour de droit social
 
Composition
 
MM. les Juges U. Meyer, Président,
 
Lustenberger, Borella, Kernen et Seiler.
 
Greffière: Mme Moser-Szeless.
 
Parties
 
G.________,
 
recourante, représentée par Me Bruno Kaufmann, avocat, rue de Lausanne 18, 1700 Fribourg,
 
contre
 
Fondation Patria pour le développement de l'assurance en faveur du personnel, St. Alban-Anlage 26, 4002 Bâle,
 
intimée.
 
Objet
 
Prévoyance professionnelle,
 
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 30 janvier 2006.
 
Faits:
 
A.
 
A l'issue d'une procédure de divorce ouverte le 8 décembre 1998, le Tribunal civil de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a, par jugement du 3 novembre 2004, prononcé le divorce de G.________ et E.________, mariés depuis le 26 septembre 1975. Il a par ailleurs ordonné que la moitié de la prestation de sortie de l'époux soit transférée sur le compte de libre passage de l'épouse auprès du Fonds Interprofessionnel de prévoyance (ch. VI du dispositif). Il a encore jugé que E.________ était débiteur de G.________ de la somme de 100'000 fr. à titre d'indemnité équitable au sens de l'art. 124 CC à la condition suspensive que le versement de la somme due par la caisse de pension de E.________ à celle de G.________ fût impossible (ch. VII du dispositif).
 
B.
 
Après l'entrée en force du jugement de divorce le 25 novembre 2004 et le transfert du dossier au Tribunal des assurances du canton de Vaud pour exécution du partage, celui-ci a procédé à diverses mesures d'instruction. C'est ainsi que la Fondation Patria pour le développement de l'assurance en faveur du personnel (ci-après : la fondation), à laquelle l'ex-époux avait été affilié du 1er septembre 1976 au 31 janvier 2002, a indiqué qu'elle avait reçu un formulaire «annonce de sortie», daté du 14 octobre 2002 et signé par E.________ et son employeur, l'informant de la fin des rapports de travail au 31 janvier 2002. Après lui avoir fait remplir le formulaire «prestation complémentaire avec questionnaire sur l'état de santé» (daté du 4 novembre 2002), la fondation avait versé à E.________ le montant de 159'229 fr. 15 (valeur au 31 janvier 2002) au titre de paiement de l'avoir de vieillesse en capital en raison de la retraite anticipée à 61 ans. Ce montant correspondait aux prestations dues en vertu, d'une part, du contrat de prévoyance n° 15319.1.20 conclu le 1er janvier 1985 sous forme de rente (par 145'008 fr. 80) et, d'autre part, du contrat de prévoyance n° 37711.4.20 conclu le 1er janvier 1995 sous forme de capital (par 14'220 fr. 35).
 
De son côté, E.________ a indiqué que la Caisse de pension du groupe X.________, à laquelle il avait été affilé de 1972 au 31 août 1976, avait versé une prestation de libre passage de 7'071 fr. 15 à l'institution de prévoyance de son nouvel employeur.
 
Statuant le 30 janvier 2006, le Tribunal des assurances du canton de Vaud a jugé qu'il ne pouvait être procédé au partage et a rayé la cause du rôle.
 
C.
 
G.________ a interjeté un recours de droit administratif contre le jugement cantonal, en concluant, sous suite de frais et dépens, à ce que la fondation fût condamnée à lui verser «le capital de compensation accordé» par le jugement de divorce.
 
Par détermination du 17 août 2006, la fondation a conclu au rejet du recours. Le Fonds interprofessionnel de prévoyance, auquel est affiliée l'ex-épouse, ne s'est pas prononcé sur le recours, tandis que E.________ n'a pas fait usage de la possibilité de se déterminer. De son côté, l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a préavisé pour l'admission du recours.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).
 
2.
 
Le litige porte sur le partage par moitié de la prestation de sortie acquise par E.________ durant le mariage, en exécution du jugement de divorce des époux G.________ et E.________ du 3 novembre 2004. Singulièrement il s'agit d'examiner si le partage conformément à l'art. 122 al. 1 CC est possible. A défaut - la condition prévue par le ch. VII du dispositif du jugement de divorce étant alors réalisée -, la recourante a droit à l'indemnité équitable au sens de l'art. 124 CC fixée par le juge du divorce.
 
Le jugement entrepris expose correctement les règles légales sur la forme des prestations de la prévoyance professionnelle (art. 37 LPP, dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004, applicable au présent cas [ATF 129 V 1 consid. 1.2 p. 4 et les arrêts cités]), sur le partage, en cas de divorce, des prestations de sortie acquises durant le mariage, ainsi que sur le droit à une indemnité équitable lorsque le partage n'est pas possible (art. 122 et 124 CC; art. 22 LFLP). Il suffit d'y renvoyer.
 
3.
 
3.1 Considérant qu'un cas de prévoyance était survenu avec la naissance du droit à des prestations de vieillesse en raison de la retraite anticipée de l'assuré, la juridiction cantonale a retenu que les versements effectués par la fondation intimée au titre de paiement de l'avoir de vieillesse en capital à E.________, les 25 octobre et 5 décembre 2002, soit antérieurement à l'entrée en force du jugement de divorce, avaient rendu impossible le partage d'une prestation de sortie de cet assuré. Examinant par ailleurs si ces versements avaient été effectués valablement au regard du devoir de diligence de l'institution de prévoyance, elle en a admis la validité: ces versements n'étaient pas soumis à l'exigence (légale ou réglementaire) du consentement du conjoint et le délai de trois ans dans lequel devait intervenir la déclaration de l'assuré quant au versement sous forme de capital au lieu de rente au sens de l'art. 37 al. 3 LPP n'était pas impératif. Enfin, même si l'ex-époux avait menti à la fondation quant à son état civil et s'était affilié comme indépendant tout en indiquant avoir pris une retraite anticipée, on ne pouvait qualifier son comportement d'abus de droit, ni reprocher à l'institution de prévoyance une violation de son devoir de diligence dès lors que des investigations plus poussées auraient excédé le cadre légal et statutaire. En conclusion, celle-ci n'avait pas à verser la prestation de libre passage à l'ex-épouse et le partage ne pouvait être exécuté.
 
3.2 Invoquant la mauvaise foi de l'intimée, qui avait connaissance «des agissements frauduleux» de E.________, la recourante soutient que la fondation est tenue de verser une seconde fois la moitié du capital de libre passage en ses mains.
 
De son côté, l'intimée conteste tout abus de sa part. Dès lors que le versement de prestations de vieillesse au sens de l'art. 37 LPP en cas de pré-retraite n'était pas soumis à l'exigence de l'accord du conjoint, elle n'avait pas à vérifier l'état civil de E.________.
 
Pour sa part, l'OFAS est d'avis qu'au regard du comportement abusif de l'assuré, la fondation aurait dû soit traiter l'annonce de pré-retraite comme une demande de versement en espèces au sens de l'art. 5 LFLP et requérir le consentement du conjoint, soit refuser le versement de plus de la moitié de la prestation de sortie. A défaut, elle s'exposait au risque de prester une seconde fois. En tout état de cause, le versement des prestations relatifs au contrat n° 15319.1.20 devait être considéré comme nul, puisque la déclaration de l'assuré au sens de l'art. 37 al. 3 LPP ne respectait pas le délai de trois ans prévu par la disposition réglementaire y relative, qui ne prévoyait pas une dérogation au délai légal.
 
4.
 
4.1
 
4.1.1 Selon la jurisprudence, la survenance du cas de prévoyance au sens des art. 122 et 124 CC se produit au moment où l'assuré perçoit réellement des prestations de vieillesse de son institution de prévoyance professionnelle, et non pas dès l'instant où il pourrait prendre une retraite anticipée selon le règlement de son institution de prévoyance (ATF 130 III 297 consid. 3.3.1p. 301).
 
4.1.2 Selon d'autres arrêts, par survenance du cas de prévoyance au sens des art. 122 et 124 CC, il faut entendre la naissance d'un droit concret à des prestations de la prévoyance professionnelle, qui rend impossible le partage des avoirs de prévoyance à la base des prestations servies (RSAS 2004 p. 572, B 19/03, consid. 5.1). Dès lors, la survenance du cas de prévoyance «vieillesse» ne se produit pas au moment où l'assuré pourrait prendre une retraite anticipée selon le règlement de prévoyance, mais dès que les conditions de la naissance du droit à de telles prestations sont réalisées et que l'ayant droit fait valoir ses prétentions. Ce moment peut coïncider avec celui où l'assuré touche effectivement les prestations, mais un certain décalage temporel entre la naissance du droit concret à des prestations et le versement de celles-ci a souvent lieu en pratique. En ce sens, la formulation de l'ATF 130 III 297 consid. 3.3 p. 300 (reprise dans la RSAS 2006 p. 39, B 19/05), selon laquelle la survenance du cas de prévoyance «vieillesse» se produit au moment où l'assuré «perçoit réellement/touche» des prestations de vieillesse de son institution de prévoyance, ne peut pas être comprise en ce sens que serait déterminant pour la survenance du cas de prévoyance le moment du versement effectif des prestations. Une telle interprétation, trop restrictive, ne tiendrait pas compte du fait que la survenance du cas de prévoyance ne saurait dépendre du moment où l'institution de prévoyance verse effectivement les prestations, mais de la réalisation des conditions posées pour la naissance du droit à celles-ci et du moment à partir duquel elles sont dues.
 
4.1.3 En l'espèce, la question n'a pas besoin d'être tranchée définitivement. En effet, que l'on prenne en considération la date du versement effectif de la prestation de vieillesse ou celle de la naissance du droit à la prestation, celles-ci se situent plus de deux ans avant l'entrée en force du jugement de divorce.
 
4.2 Une fois que le cas de prévoyance est survenu, un partage n'est techniquement plus possible, dès lors que cette circonstance a pour effet de supprimer toute prétention à une prestation de sortie. Dans ce cas, comme dans celui de l'impossibilité de procéder au partage, seule une indemnité équitable peut être fixée (ATF 130 III 297 consid. 3.3.1 p. 300, 129 V 444 consid. 5.1 p. 446 et les références; RSAS 2004 p. 572, B 19/03, consid. 5.1).
 
4.3
 
4.3.1 Les dispositions réglementaires de la fondation applicables aux deux contrats de prévoyance en cause prévoient qu'un assuré a la possibilité de demander des prestations de prévoyance «vieillesse» au plus tôt cinq ans avant l'âge terme (fixé, pour les hommes, au premier jour du mois qui suit la date où l'âge de 65 ans révolus a été atteint; art. 3.1 [«plan de prévoyance»] du règlement de la fondation et 4.3 des «dispositions générales», version janvier 1995, applicables au contrat n° 15319.1.20, respectivement art. 5 du règlement de la fondation, version janvier 1995, applicable au contrat n° 37711.4.20, en relation avec l'art. 13 al. 2 LPP).
 
En l'espèce, la naissance du droit à des prestations de vieillesse au titre de retraite anticipée suppose donc, en plus de la cessation des rapports de travail avant l'âge réglementaire normal maximal de la retraite et la survenance de l'âge terme, une déclaration de volonté correspondante de l'assuré (voir aussi l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 38/00 du 24 juin 2002, auquel renvoie l'ATF 129 V 381 consid. 4.6 p. 387).
 
4.3.2 Comme l'ont à juste titre retenu les premiers juges, en déclarant vouloir recevoir des prestations de la part de l'institution de prévoyance, au moyen du formulaire «annonce de sortie» signé le 14 octobre 2002, E.________, âgé alors de 61 ans, a fait usage de la possibilité prévue par les règlements de la fondation de demander le versement de prestations de vieillesse de la prévoyance professionnelle. Certes, il apparaît qu'avec les indications données dans le formulaire, l'assuré visait à bénéficier d'une prestation de sortie au sens de l'art. 5 LFLP (en évitant, par la mention «divorcé», que l'institution ne requière le consentement de la recourante). L'intimée a toutefois considéré au vu des circonstances concrètes du cas (âge de l'assuré et fin des rapports de travail) que la demande ne pouvait concerner que le cas de la retraite anticipée et le versement de prestations de vieillesse, ce que l'assuré n'a pas contesté; à cet égard, la correspondance échangée entre l'intimée et l'assuré se réfère aux prestations de vieillesse ensuite d'une retraite anticipée au 1er février 2002.
 
Outre l'âge de l'assuré et la cessation des rapports de travail (au 31 janvier 2002), la déclaration de E.________ constituait une condition suffisante au regard des dispositions légales et réglementaires applicables pour entraîner la survenance du cas de prévoyance et, partant, ouvrir le droit à des prestations de vieillesse, sous forme de rente ou, si les conditions en étaient remplies, de capital.
 
Que E.________ ait alors donné de fausses informations sur son état civil et sur le commencement d'une activité lucrative indépendante ne portait pas à conséquence quant à la naissance du droit aux prestations de vieillesse, puisque ce droit ne dépendait ni de l'état civil de l'ayant droit, ni de l'absence de toute activité lucrative (indépendante ou salariée auprès d'un nouvel employeur). On ne saurait pas non plus reprocher à la fondation intimée, comme le font la recourante et l'autorité de surveillance, de n'avoir pas bloqué les avoirs de vieillesse de son assuré. Dès lors que les conditions du droit aux prestations de vieillesse étaient remplies et que le cas de prévoyance était survenu, l'institution de prévoyance n'avait pas à différer l'allocation de ses prestations, du moins pas en l'absence de mesures judiciaires lui en interdisant le versement, sous une forme ou une autre. On ne voit pas non plus quelle obligation de diligence aurait imposé à l'intimée de vérifier l'indication de l'assuré sur son état civil, puisque ni la loi, ni les dispositions réglementaires ne font du consentement du conjoint une condition de la naissance du droit aux prestations de vieillesse.
 
4.3.3 Cela étant, à la date de l'entrée en force du jugement de divorce, le 25 novembre 2004 - jour déterminant pour décider si le partage des prestations de sortie de E.________ était possible conformément à l'art. 122 CC (ATF 132 III 401) -, le cas de prévoyance vieillesse était survenu. Cette circonstance excluait donc le partage des avoirs de prévoyance entre les époux, ceux-ci devant servir à verser des prestations de vieillesse à E.________.
 
Dans cette mesure et dès lors que seule l'application de l'art. 124 CC entrait en ligne de compte, la forme des prestations de vieillesse - rente ou capital - versées à l'assuré ne jouait aucun rôle du point de vue du partage des prestations de prévoyance entre les époux G.________ et E.________ dans le cadre du divorce. Ainsi, à supposer que les conditions du versement en capital des prestations de vieillesse relatives au contrat n° 15319.1.20 n'eussent pas été remplies, celles-ci n'auraient de toute façon pas pu être partagées en tant que prestations de sortie au sens de l'art. 122 CC. Il n'est par conséquent pas nécessaire de se prononcer sur une éventuelle application par analogie, dans le cas où, comme en l'espèce, l'assuré demande le versement de sa prestation de vieillesse sous forme de capital selon l'art. 37 al. 3 LPP (dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004), de l'exigence du consentement du conjoint prévue par l'art. 5 al. 2 LFLP pour le paiement en espèces de la prestation de sortie (question laissée ouverte dans l'ATF 125 V 165 et à laquelle la doctrine apporte une réponse négative [SUZETTE SANDOZ, Prévoyance professionnelle et consentement du conjoint à propos de l'ATF 125 V 165, SJ 2000 II 449]).
 
Il en va de même de la problématique évoquée par l'OFAS relative au respect du délai de trois ans avant la naissance du droit, dans lequel l'assuré doit faire connaître sa volonté d'exiger les prestations de vieillesse en capital au lieu d'une rente conformément à l'art. 37 al. 3 2ème phrase LPP.
 
4.4 Il résulte de ce qui précède que c'est à juste titre que la juridiction cantonale a nié le droit de la recourante au versement de la moitié de la prestation de sortie de son ex-époux à son institution de prévoyance, tandis qu'elle a droit à une indemnité équitable au sens de l'art. 124 CC, fixée à 100'000 fr. par le juge du divorce.
 
Le recours apparaît dès lors mal fondé.
 
5.
 
La cause étant à même d'être jugée compte tenu de l'ensemble des pièces du dossier, il n'y a pas lieu d'ordonner un second échange d'écritures, ni de faire verser à la procédure le dossier du Tribunal d'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, comme le demande la recourante.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours de droit administratif est rejeté.
 
2.
 
Il n'est pas perçu de frais de justice.
 
3.
 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à E.________, au Fonds Interprofessionnel de Prévoyance, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 9 mai 2007
 
Au nom de la IIe Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: La Greffière:
 
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