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Informationen zum Dokument  BGer 9C_149/2008  Materielle Begründung
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BGer 9C_149/2008 vom 27.10.2008
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
9C_149/2008
 
Arrêt du 27 octobre 2008
 
IIe Cour de droit social
 
Composition
 
MM. les Juges U. Meyer, Président,
 
Kernen et Seiler.
 
Greffière: Mme Moser-Szeless.
 
Parties
 
Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité, rue de Lyon 97, 1203 Genève,
 
recourant,
 
contre
 
A._________,
 
intimé, représenté par Christine Bulliard, Forum Santé, Boulevard Helvétique 27, 1207 Genève.
 
Objet
 
Assurance-invalidité,
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 15 janvier 2008.
 
Faits:
 
A.
 
A.________, né en 1951, d'origine irakienne et naturalisé suisse depuis 1998, a présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité le 10 octobre 2002. Après avoir requis l'avis du médecin traitant, l'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité (ci-après: l'office AI) a chargé son Service médical régional (SMR) d'examiner l'assuré. Selon les docteurs P._________ et V._________, qui ont examiné l'intéressé le 26 octobre 2004, celui-ci ne souffrait d'aucune atteinte psychique, mais présentait des lombalgies chroniques et persistantes, des cervicalgies chroniques dans le cadre de troubles dégénératifs étagés et une fibromyalgie; sa capacité de travail dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles décrites était entière.
 
Après avoir refusé toute prestation à l'assuré (décision sur opposition du 5 décembre 2006), l'office AI est revenu sur sa décision et a repris l'instruction du dossier. Dans ce cadre, il a recueilli l'avis du docteur G._________, psychiatre, qui a diagnostiqué un trouble dépressif, épisode actuel moyen, combiné à un trouble de la personnalité, un syndrome post-traumatique et un trouble de l'adaptation (rapport du 24 janvier 2006). L'assuré a été soumis à un nouvel examen au SMR, où la doctoresse Y._________ est arrivée à la conclusion que la capacité de travail exigible était toujours entière du point de vue psychiatrique, quelle que soit l'activité envisagée (rapport du 12 juin 2006). Par décision sur opposition du 21 juillet 2006, l'office AI a derechef refusé à l'intéressé tout droit à une rente d'invalidité, au motif qu'il disposait d'une capacité de travail entière dans son activité habituelle, ce qui excluait toute perte de gain et, partant, le droit à la prestation sollicitée.
 
B.
 
B.a Saisi d'un recours de l'assuré contre cette décision (sur opposition), le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève a chargé le docteur B._________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, d'une expertise. Selon les conclusions de l'expert, rendues le 3 septembre 2007, A.________ présentait une incapacité totale de travail depuis 2002. Le 20 novembre 2007, le tribunal cantonal a rendu un jugement par lequel il a admis le recours (ch. 2 du dispositif). En substance, il a considéré que les troubles psychiques de l'assuré se manifestaient avec une telle sévérité qu'ils excluaient toute mise en valeur de sa capacité de travail.
 
B.b A réception du jugement cantonal expédié le 27 novembre 2007, l'office AI a requis du Tribunal cantonal genevois des assurances sociales de préciser à partir de quelle date l'assuré avait droit à une rente d'invalidité (courrier du 21 décembre 2007).
 
Après avoir informé les parties qu'il allait rendre un arrêt en révision, le tribunal cantonal a, par jugement du 15 janvier 2008, annulé le dispositif de son prononcé du 20 novembre 2007, admis le recours et dit que l'assuré avait droit à une rente entière d'invalidité depuis septembre 2003.
 
C.
 
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre le jugement du 15 janvier 2008, en concluant à son annulation et à la confirmation de sa décision sur opposition du 21 juillet 2006.
 
Le tribunal cantonal et l'Office fédéral des assurances sociales renoncent à se déterminer, tandis que A.________ conclut au rejet du recours.
 
Par ordonnance du Juge instructeur du 25 avril 2008, l'effet suspensif sollicité par l'office AI a été accordé.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
1.1 Le recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit selon l'art. 95 sv. LTF. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Cette disposition lui donne la faculté de rectifier ou compléter d'office l'état de fait de l'arrêt attaqué dans la mesure où des lacunes ou erreurs dans celui-ci lui apparaîtraient d'emblée comme manifestes. Quant au recourant, il ne peut critiquer la constatation de faits importants pour le jugement de la cause que si ceux-ci ont été constatés en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF).
 
1.2 En ce qui concerne plus particulièrement l'évaluation de l'invalidité, les principes relatifs au pouvoir d'examen développés dans l'ATF 132 V 393 consid. 3 p. 397 ss (en relation avec l'art. 132 OJ dans sa version en vigueur du 1er juillet au 31 décembre 2006) continuent à s'appliquer pour distinguer les constatations de fait de l'autorité précédente (qui lient en principe le Tribunal fédéral) de l'application qu'elle fait du droit (question qui peut être examinée librement en instance fédérale). Conformément à ces principes, les constatations de l'autorité cantonale de recours sur l'atteinte à la santé, la capacité de travail de l'assuré et l'exigibilité relèvent d'une question de fait et ne peuvent être contrôlées que sous un angle restreint (ATF 132 V 393 consid. 3.2 p. 398). Dans la mesure cependant où il en va de l'évaluation de l'exigibilité d'une activité professionnelle au regard de l'expérience générale de la vie, il s'agit d'une question de droit qui peut être examinée librement en instance fédérale; il en va ainsi des conclusions tirées de l'expérience médicale, comme par exemple, la présomption que les troubles somatoformes douloureux ou un autre syndrome semblable dont l'étiologie est incertaine et leurs effets peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 132 V 65 consid. 4.2.1 p. 70 s. et les arrêts cités, 393 consid. 3.2 p. 398 s. et les arrêts cités).
 
1.3 Les modifications de la LAI du 6 octobre 2006 (5ème révision de la LAI), entrées en vigueur le 1er janvier 2008, n'ont pas à être prises en considération dans le présent litige, eu égard au principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment de la réalisation de l'état de fait dont les conséquences juridiques font l'objet de la décision (ATF 129 V 1 consid. 1.2 p. 4 et les arrêts cités).
 
2.
 
Le litige porte sur le droit de l'intimé à une rente de l'assurance-invalidité. A cet égard, le jugement du 20 novembre 2007 expose correctement les règles légales et jurisprudentielles sur la notion d'invalidité et son évaluation, ainsi que les principes jurisprudentiels relatifs aux troubles somatoformes douloureux (applicables par analogie à la fibromyalgie), à la libre appréciation des preuves et à la valeur probante des rapports médicaux. Il suffit d'y renvoyer.
 
On ajoutera qu'en principe, le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 352 consid. 3b/aa et les références).
 
3.
 
3.1 Invoquant une appréciation arbitraire des preuves, le recourant reproche tout d'abord aux premiers juges d'avoir accordé pleine valeur probante à l'expertise du docteur B._________ et d'avoir omis sans aucune raison sérieuse "tous les autres éléments de preuves existant au dossier".
 
L'appréciation des preuves est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, en contradiction avec le dossier, ou contraire au sens de la justice et de l'équité (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40, 118 Ia 28 consid. 1b p. 30) ou lorsque l'autorité ne tient pas compte, sans raison sérieuse, d'un élément propre à modifier la décision, se trompe sur le sens et la portée de celui-ci ou, se fondant sur les éléments recueillis, en tire des constatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9, 127 I 38 consid. 2a p. 41).
 
3.2 Pour motiver le grief tiré de l'appréciation arbitraire des preuves, le recourant se limite dans une très large mesure à renvoyer à l'avis du SMR du 11 octobre 2007, dont il cite de larges extraits. Il est douteux que la reprise telle quelle d'une appréciation médicale, qui n'est pratiquement pas assortie d'explication propre au recourant, constitue une argumentation suffisamment précise pour démontrer dans quelle mesure les premiers juges auraient abusé de leur pouvoir d'appréciation dans l'administration des preuves et, plus particulièrement, qu'ils auraient tiré des constatations insoutenables des éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9).
 
Quoi qu'il en soit, les critiques du recourant à l'égard de l'appréciation des preuves de la juridiction cantonale ne sont pas pertinentes. Contrairement à ce qu'il soutient, les premiers juges n'ont pas "omis" d'autres éléments de preuve au dossier que l'expertise du docteur B._________, puisqu'ils ont expliqué de manière circonstanciée les raisons qui les ont conduits à s'écarter des avis successifs du SMR. Ainsi, compte tenu de la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral (arrêt I 65/07 du 31 août 2007) concernant les rapports médicaux signés par la doctoresse Y._________ avec l'indication "Psychiatre FMH", ils étaient en droit d'écarter l'appréciation du 12 juin 2006, dont on ne voit pas qu'elle aurait été cosignée par d'autres médecins du SMR comme le prétend le recourant. L'avis du 19 juin 2006 signé par les docteurs U._________ et I._________, qui renvoient au rapport de la doctoresse Y._________ pour l'évaluation psychiatrique de l'assuré, ne fait pas des premiers nommés les coauteurs du rapport du 12 juin 2006, ce d'autant moins qu'ils n'ont pas eux-mêmes participé à l'examen du 8 juin 2006. Quant au rapport du SMR du 25 novembre 2004, c'est précisément parce qu'il entrait en contradiction avec les conclusions du docteur G._________, tant sur les diagnostics psychiatriques que sur leur influence sur la capacité de travail du recourant, que la juridiction cantonale a procédé à des investigations supplémentaires en ordonnant une expertise psychiatrique judiciaire.
 
En ce qui concerne l'avis du docteur U._________ (du 11 octobre 2007), la juridiction cantonale a considéré qu'il n'était pas apte à mettre sérieusement en doute les conclusions de l'expert judiciaire, ce d'autant moins que le docteur U._________ n'était pas spécialiste en psychiatrie. Il est vrai, comme l'affirme le recourant, que le fait que ce médecin ne soit pas titulaire d'une spécialisation en psychiatrie ne justifie pas en soi d'écarter son avis, puisqu'un médecin, quelle que soit sa spécialisation, est en principe en mesure d'émettre un avis sur la cohérence d'un rapport d'un confrère. Les critiques du docteur U._________ ne mettent toutefois pas en évidence des contradictions manifestes dans l'expertise, mais visent plutôt à démontrer que le rapport du SMR du 12 juin 2006 serait plus crédible que celui de l'expert. A cet égard, on précisera que lorsque l'autorité cantonale juge l'expertise judiciaire concluante et en suit le résultat, le Tribunal fédéral n'admet le grief d'appréciation arbitraire que si l'expert n'a pas répondu aux questions posées, si ses conclusions sont contradictoires ou si, d'une quelconque autre façon, l'expertise est entachée de défauts à ce point évidents et reconnaissables, même sans connaissances spécifiques, que le juge ne pouvait tout simplement pas les ignorer. Il n'appartient pas au Tribunal fédéral de vérifier si toutes les affirmations de l'expert sont exemptes d'arbitraire; sa tâche se limite bien plutôt à examiner si l'autorité inférieure pouvait, sans arbitraire, se rallier au résultat de l'expertise (arrêt 4P.263/2003 du 1er avril 2004; voir également consid. 2).
 
Tel est le cas en l'espèce puisque l'expertise du docteur B._________ remplit, quoi qu'en dise le recourant, les exigences auxquelles la jurisprudence soumet la valeur probante d'un tel document. Les conclusions procèdent en effet d'une analyse complète de l'ensemble des circonstances déterminantes ressortant de l'anamnèse, du dossier médical et de l'examen. Les réponses apportées par l'expert aux questions posées par la juridiction cantonale sont par ailleurs complètes et convaincantes. Le docteur B._________ a notamment expliqué les raisons pour lesquelles il diagnostiquait des atteintes psychiques à l'inverse des médecins du SMR, mais en accord avec les conclusions du docteur G._________. Son rapport ne contient en outre pas de contradictions, ni de défauts manifestes. En particulier, à la lecture de l'expertise, on ne voit pas sur quels éléments concrets sont fondées les allégations du docteur U._________ quant à l'absence d'objectivité scientifique de son confrère. Le fait, enfin, que l'expert n'a pas eu en mains le rapport du SMR du mois d'octobre 2004 n'entache en rien la valeur probante de son appréciation, dès lors qu'il a pris connaissance des avis subséquents du SMR (des 3 novembre 2005 et 12 juin 2006) qui en reprenaient dans une très large mesure les conclusions.
 
4.
 
Le recourant reproche ensuite aux premiers juges d'avoir établi certains faits de manière manifestement inexacte. En ce qui concerne la date à partir de laquelle l'intimé aurait diminué son temps de travail et l'aggravation de l'état psychique qu'aurait mentionnée le docteur P._________, on ne voit cependant pas en quoi la rectification de ces faits - dût-on admettre qu'ils eussent été constatés de manière manifestement inexacte par l'autorité cantonale - aurait une influence sur le sort du litige au sens de l'art. 97 al. 1 LTF; le recourant ne motive du reste pas ce point.
 
Il soutient encore que la constatation des premiers juges, selon laquelle l'incapacité de travail de l'intimé aurait débuté en septembre 2002, entrerait en complète contradiction avec les rapports du SMR du 22 (recte 25) novembre 2004, du docteur Z._________ du 21 novembre 2003 et de l'annexe à l'avis du docteur O._________ du 7 février 2006. En l'espèce, dans les rapports mentionnés, tant le docteur Z._________ que le docteur H._________ du SMR ont conclu que l'assuré était capable de travailler à 100% - dans une activité adaptée pour le médecin prénommé -, de sorte qu'ils ne se sont de toute évidence pas prononcé sur le début de l'incapacité de travail de l'intimé. Faute de concerner ce point, ces deux pièces médicales ne peuvent servir à remettre en cause la constatation de l'autorité cantonale de recours relative à la date du début de l'incapacité de travail de l'intimé. Quant au docteur O._________, il a fait état dans son rapport du 7 février 2006 d'une incapacité de travail totale de l'intimé à partir de septembre 2002, ce qui correspond précisément à la date retenue par la juridiction cantonale dans l'arrêt entrepris. Le recourant ne saurait, de plus, rien tirer en sa faveur du fait que le médecin a évalué à 50% la capacité résiduelle de travail de l'intimé (annexe au rapport), puisqu'une telle appréciation n'a pas été suivie par la juridiction cantonale. Le grief tiré d'une constatation manifestement inexacte des faits pertinents doit dès lors être rejeté.
 
5.
 
Dans un troisième grief, le recourant s'en prend à l'appréciation des critères permettant d'admettre le caractère invalidant d'un syndrome douloureux somatoforme effectuée par les premiers juges. Dès lors qu'il se limite à affirmer que l'intimé ne remplit pas les conditions posées par la jurisprudence en se référant au rapport du SMR du 8 juin 2006, son argumentation doit être rejetée faute de motivation. Pour le surplus, compte tenu des diagnostics posés par l'expert, l'appréciation des premiers juges sur le caractère invalidant des troubles psychiques présentés par l'intimé n'apparaît pas critiquable.
 
6.
 
Il ressort de ce qui précède que le recours est mal fondé.
 
7.
 
Compte tenu de l'issue du litige, les frais de justice doivent être supportés par le recourant qui succombe (art. 66 al. 1 première phrase en relation avec l'art. 65 al. 4 let. a LTF). Il en va de même de l'indemnité de dépens à laquelle a droit l'intimé (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le recourant versera à l'intimé la somme de 1'000 fr. à titre de dépens pour la dernière instance.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 27 octobre 2008
 
Au nom de la IIe Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: La Greffière:
 
Meyer Moser-Szeless
 
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