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Informationen zum Dokument  BGer 9C_371/2008  Materielle Begründung
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BGer 9C_371/2008 vom 02.02.2009
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
9C_371/2008
 
Arrêt du 2 février 2009
 
IIe Cour de droit social
 
Composition
 
MM. les Juges U. Meyer, Président,
 
Borella et Kernen.
 
Greffier: M. Piguet.
 
Parties
 
Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité, rue de Lyon 97, 1203 Genève,
 
recourant,
 
contre
 
B.________,
 
intimée, représentée par le Centre social protestant, rue du Village-Suisse 14, 1205 Genève.
 
Objet
 
Assurance-invalidité,
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève du 19 mars 2008.
 
Faits:
 
A.
 
A.a B.________ est arrivée en Suisse au milieu des années 80. Durant la décennie suivante, elle a alterné des périodes d'emploi temporaire et de chômage. Le 10 octobre 2001, elle a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité, alléguant souffrir de problèmes psychiques. L'Office genevois de l'assurance-invalidité (ci-après: l'office AI) a alors recueilli les renseignements médicaux usuels auprès des médecins traitants de l'assurée, à savoir les docteurs M.________ (rapport du 2 août 2002) et H.________ (rapport du 25 août 2002). D'après ceux-ci, l'assurée présentait des troubles de la personnalité paranoïaque et un épisode dépressif moyen, lesquels engendraient une incapacité de travail totale depuis le 1er juin 2001. Par décision du 28 octobre 2002, l'office AI a rejeté la demande de prestations, motif pris que les troubles dont souffrait l'assurée remontaient généralement à l'adolescence, de sorte qu'elle ne pouvait justifier d'une année de cotisation au moment de la survenance de l'invalidité.
 
A.b Le 31 mars 2005, B.________ a déposé une nouvelle demande de prestations. A cette occasion, le docteur M.________ a indiqué que le diagnostic avait été revu depuis l'époque de la première demande de prestations et que l'affection en cause pouvait, en fait, avoir débuté à l'âge adulte. Il a expliqué qu'il manquait alors de recul pour déterminer la véritable nature des troubles présentés par l'assurée (lettres des 25 avril 2005 et 15 août 2006). Par décision du 19 juin 2006, confirmée sur opposition le 7 novembre suivant, l'office AI a refusé d'entrer en matière sur la nouvelle demande de prestations, faute pour l'assurée d'avoir établi l'existence d'une modification de son état de santé.
 
B.
 
B.________ a déféré au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève la décision sur opposition de l'office AI. Au cours d'une audience d'instruction qui s'est tenue le 17 octobre 2007, le docteur D.________ a indiqué que l'assurée souffrait d'une schizophrénie paranoïde, affection qui apparaît habituellement à l'âge adulte, et expliqué les raisons pour lesquelles ce diagnostic n'avait pas pu être posé plus rapidement. Considérant que les conditions d'une révision procédurale étaient remplies, le Tribunal cantonal des assurances sociales a, par jugement du 19 mars 2008, admis le recours, annulé les décisions des 28 octobre 2002, 19 juin et 7 novembre 2006, et alloué à l'assurée une rente entière d'invalidité à compter du 1er février 2002.
 
C.
 
L'office AI interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont il demande l'annulation; à titre subsidiaire, il conclut au renvoi de la cause pour instruction complémentaire et nouvelle décision. Il assortit son recours d'une requête d'effet suspensif.
 
B.________ conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales en propose l'admission.
 
D.
 
Par ordonnance du 10 septembre 2008, le juge instructeur a accordé l'effet suspensif au recours.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être limité par les arguments du recourant ou par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération. Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).
 
2.
 
2.1 Le Tribunal cantonal des assurances sociales a retenu que les conditions de l'art. 53 al. 1 LPGA étaient réalisées et qu'il convenait de procéder à la révision de la décision du 28 octobre 2002. Il a constaté que l'office AI avait jadis nié le droit à des prestations de l'assurance-invalidité, au motif que l'assurée souffrait d'un trouble de la personnalité de type paranoïaque, dont l'origine remontait en règle générale à l'adolescence. L'office AI en avait déduit qu'elle présentait une invalidité totale depuis sa dix-huitième année, soit à une époque où elle ne comptait pas une année de cotisations. Dans le cadre de la présente procédure, les premiers juges ont considéré que les rapports et déclarations des docteurs M.________ et D.________ apportaient un éclairage nouveau sur la nature des troubles psychiques dont souffrait l'assurée et sur le début de son invalidité. En particulier, les explications données par le docteur D.________ faisaient apparaître de façon convaincante que, contrairement à ce que laissaient supposer les faits connus et retenus dans la procédure initiale, l'évolution des troubles psychiques de l'assurée, caractérisée notamment par l'apparition quasiment constante d'hallucinations et d'idées délirantes, avait permis au corps médical de se rendre compte a posteriori que l'invalidité de l'assurée n'était pas due à un trouble de la personnalité paranoïaque apparu lors de l'adolescence, mais bien à une schizophrénie paranoïde dont les premières manifestations étaient apparues en 2001, soit à l'âge adulte. Ce fait n'était pas connu en octobre 2002 et ne pouvait être connu ni de l'assurée, ni de l'administration, de sorte que l'office AI avait apprécié le début de l'invalidité dans l'ignorance de circonstances essentielles à ce sujet.
 
2.2 A l'appui de son recours, l'office AI fait valoir que loin de mettre en évidence des éléments nouveaux au sens de la jurisprudence, les docteurs M.________ et D.________ n'ont fait que donner une appréciation différente du cas. Que le diagnostic de schizophrénie ait été posé par ces médecins en 2003 ne signifiait en rien que l'assurée ne présentait pas, auparavant déjà, des troubles psychiques l'empêchant d'exercer de manière durable une activité lucrative. Les docteurs M.________ et D.________ ont tout au plus démontré que l'état de santé de l'assurée s'était aggravé depuis 2003, sans exclure toutefois que les troubles psychiques constatés antérieurement par la doctoresse H.________ n'étaient pas déjà la cause d'une incapacité totale de travailler. S'ils fournissaient des indications quant à l'évolution dans le temps des troubles présentés par l'assurée, les renseignements fournis par les docteurs M.________ et D.________ n'étaient pas de nature à modifier l'état de fait qui était à la base de la décision initiale de l'office AI.
 
2.3 Selon l'art. 53 al. 1 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l'assuré ou l'assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits auparavant. Sont « nouveaux » au sens de cette disposition, les faits qui se sont produits jusqu'au moment où, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables, mais qui n'étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence. En outre, les faits nouveaux doivent être importants, c'est-à-dire qu'ils doivent être de nature à modifier l'état de fait qui est à la base de l'arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte. Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit les faits nouveaux importants, qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n'avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure. Une preuve est considérée comme concluante lorsqu'il faut admettre qu'elle aurait conduit le juge à statuer autrement s'il en avait eu connaissance dans la procédure principale. Ce qui est décisif, c'est que le moyen de preuve ne serve pas à l'appréciation des faits seulement, mais à l'établissement de ces derniers. Ainsi, il ne suffit pas qu'un nouveau rapport médical donne une appréciation différente des faits; il faut bien plutôt des éléments de fait nouveaux, dont il résulte que les bases de la décision entreprise comportaient des défauts objectifs. Pour justifier la révision d'une décision, il ne suffit pas que le médecin ou expert tire ultérieurement, des faits connus au moment du jugement principal, d'autres conclusions que le tribunal. Il n'y a pas non plus motif à révision du seul fait que le tribunal paraît avoir mal interprété des faits connus déjà lors de la procédure principale. L'appréciation inexacte doit être, bien plutôt, la conséquence de l'ignorance ou de l'absence de preuve de faits essentiels pour le jugement (ATF 127 V 353 consid. 5b p. 358 et les références).
 
2.4 Des faits retenus par la juridiction cantonale, il ressort que le raisonnement de la doctoresse H.________ repose sur la prémisse que l'assurée souffrait d'un trouble de la personnalité paranoïaque, dont l'origine remonte généralement, selon l'expérience médicale, au moment de l'adolescence. Il en a été déduit que le parcours scolaire et professionnel chaotique de l'assurée ne pouvait être que l'expression anamnestique de cette affection. Les considérations des docteurs M.________ et D.________, fondées sur une période d'observation plus étendue et, partant, plus propice pour permettre de poser un diagnostic sûr et précis, apportent un éclairage nouveau et consensuel sur la situation de l'assurée et permettent de remettre fondamentalement en cause l'hypothèse sur laquelle était fondée la décision initiale. En tant qu'il reposait sur des fondements médicaux sérieux et pertinents, il n'appartenait pas à l'administration de remettre en cause le nouveau diagnostic posé par le corps médical. Il s'agissait en outre clairement d'un fait nouveau faisant apparaître que la décision initiale comptait un défaut objectif pouvant justifier sa révision.
 
2.5 Malgré la révision du diagnostic, l'office AI estime que rien ne permet de remettre en cause le fait que l'assurée souffre depuis son adolescence d'un trouble de la personnalité qui l'a toujours empêchée d'exercer de manière durable une activité lucrative. Cela étant, il convient de constater que le refus du droit aux prestations prononcé par l'office AI repose essentiellement, sinon exclusivement, sur le diagnostic de troubles de la personnalité et l'expérience médicale. Dans la mesure où le corps médical a retiré tout fondement au diagnostic posé initialement, l'office AI ne saurait encore se baser sur les conclusions formulées à l'époque par la doctoresse H.________ pour justifier son point de vue. En tant qu'il voit le parcours scolaire et professionnel chaotique de l'assurée comme étant le symptôme indubitable d'un trouble de la personnalité, il ne saurait non plus être suivi. Les raisons précises qui ont conduit à l'interruption de la scolarité et de l'apprentissage de l'assurée ne sont pas connues de manière précise et ne sauraient résulter nécessairement d'un éventuel trouble de la personnalité, tant il existe d'autres facteurs - notamment socio-culturels - qui peuvent entrer en ligne de compte. De même, rien au dossier ne permet d'étayer le fait que ce seraient les effets d'une atteinte à la santé psychique qui auraient systématiquement entraîné la fin des rapports de travail ou les difficultés à retrouver un emploi. Le parcours socio-professionnel de l'assurée durant les années 90 démontre au contraire qu'elle était en mesure d'exercer une activité lucrative, l'assurance-chômage l'ayant reconnue apte au placement durant cette période.
 
2.6 Il s'ensuit que le Tribunal cantonal des assurances sociales n'a pas violé le droit fédéral en considérant que les conditions d'une révision procédurale étaient réalisées en l'espèce.
 
3.
 
Dans un second moyen, l'office recourant conteste la méthode d'évaluation du degré d'invalidité, faisant valoir qu'au regard des circonstances, c'est la méthode spécifique qui aurait dû s'appliquer en lieu et place de la méthode générale de comparaison des revenus. Cela étant, les motifs invoqués par l'office AI ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation de la situation à laquelle ont procédé les premiers juges. Le fait que l'assurée n'ait pas travaillé de manière constante durant les années 90 ne saurait signifier qu'elle entendait se contenter d'un statut de femme au foyer. La longue période de chômage démontre que cette situation n'était pas volontaire, mais qu'elle résultait bien plutôt des circonstances économiques. De plus, un examen attentif de la situation familiale (mari retraité et enfant adolescent) tend à établir qu'elle aurait très vraisemblablement exercé une activité lucrative à plein temps si elle avait été en bonne santé. Le grief de l'office recourant est par conséquent mal fondé.
 
4.
 
En tous points mal fondé, le recours doit être rejeté. L'office recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires afférents à la présente procédure (art. 66 al. 1, 1ère phrase, LTF). L'intimée a droit à une indemnité de dépens à charge de l'office recourant (art. 68 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le recourant versera à l'intimée la somme de 1'500 fr. à titre de dépens pour la dernière instance.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 2 février 2009
 
Au nom de la IIe Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Le Greffier:
 
Meyer Piguet
 
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