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Informationen zum Dokument  BGer 4A_282/2009  Materielle Begründung
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BGer 4A_282/2009 vom 15.12.2009
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
4A_282/2009
 
Arrêt du 15 décembre 2009
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mmes et MM. les juges Klett, présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss.
 
Greffier: M. Thélin.
 
Parties
 
A.________ et
 
B.________,
 
demandeurs et recourants, représentés par
 
Me Marie-Claude de Rham - Casthélaz,
 
contre
 
X.________,
 
défenderesse et intimée, représentée par
 
Me Maurizio Locciola.
 
Objet
 
responsabilité contractuelle; dommages-intérêts
 
recours contre l'arrêt rendu le 24 avril 2009 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Faits:
 
A.
 
Selon acte authentique du 24 octobre 2005, X.________, d'une part, et A.________ et B.________, d'autre part, ont respectivement promis irrévocablement de vendre et d'acheter une villa sise à Anières. La venderesse était alors copropriétaire de l'immeuble avec son époux; leur divorce était en cours et, selon la convention soumise au juge pour ratification, la propriété entière lui serait attribuée dès l'entrée en force du jugement, soit dès le 15 mars 2006 au plus tard. Le prix de vente inscrit dans l'acte s'élevait à 2'425'000 fr.; les acquéreurs remettaient immédiatement 425'000 fr. au notaire et le solde de 2'000'000 de fr., à couvrir par un emprunt hypothécaire, serait payé le 31 mars 2006. Le contrat de vente définitif serait conclu aussi le 31 mars 2006; la venderesse s'obligeait à évacuer la villa et à la remettre aux acquéreurs à cette même date. En cas de retard dans l'évacuation des lieux, la venderesse acquitterait une astreinte de 500 fr. par jour.
 
Le prix de vente inscrit dans l'acte était inexact: hors de la vue du notaire, les acquéreurs avaient versé un montant supplémentaire de 300'000 francs.
 
La venderesse a appelé du jugement de divorce, ce qui eut pour effet de prolonger le régime de la copropriété avec son époux. Au 31 mars 2006, elle s'est refusée à conclure le contrat de vente définitif et elle a continué d'occuper la villa. Elle faisait valoir que la promesse de vente était nulle parce que simulée, le prix indiqué dans l'acte ne correspondant pas à la réelle et commune intention des cocontractants.
 
Les acquéreurs s'étaient procuré un crédit bancaire au montant de 2'000'000 de francs, remis au notaire à la date initialement convenue. Ils ont exposé divers frais pour constituer les garanties exigées par l'établissement bancaire; ils ont ensuite acquitté les intérêts. Du juge compétent, ils ont requis et obtenu des mesures provisionnelles contre la venderesse, consistant dans l'inscription provisoire, sur le registre foncier, d'une restriction du droit d'aliéner sa part de copropriété; ensuite, ils lui ont intenté une action tendant à ce qu'elle fût condamnée à exécuter la promesse de vente.
 
B.
 
Les parties ont conclu une nouvelle convention le 21 novembre 2006. La villa devait être vendue aux acquéreurs au plus tard le 23 du même mois, au prix de 2'725'000 fr., puis évacuée par la venderesse le 30 décembre suivant. Les acquéreurs renonçaient à percevoir l'astreinte de 500 fr. par jour à compter du 31 mars 2006; en contrepartie, la venderesse les indemniserait « de leur dommage effectif résultant du non-respect de ses obligations découlant de la promesse de vente du 24 octobre 2005 » (art. 5 ch. 3). Il n'existait pas d'accord sur le montant de ce dommage et celui-ci serait donc établi par la voie judiciaire. Afin de garantir l'exécution du jugement futur, la venderesse s'obligeait à consigner un montant de 110'000 francs. Les acquéreurs se désisteraient de l'action alors pendante, tendant à l'exécution de la promesse initiale, et ils demanderaient la restitution partielle de l'émolument de mise au rôle. Les autres frais de l'instance étaient visés par une clause ainsi conçue (art. 12 al. 2): « La cause sera retirée sans dépens. Le sort de ceux-ci sera réglé dans le cadre de l'indemnité stipulée sous art. 5 ch. 3. »
 
Cette convention fut entièrement exécutée, hormis le dédommagement qui restait à liquider, et les acquéreurs reçurent les clés de la villa le 21 décembre 2006.
 
C.
 
Le 27 février 2007, A.________ et B.________ ont derechef ouvert action contre X.________ devant le Tribunal de première instance du canton de Genève; la défenderesse devait être condamnée à payer 140'111 fr.50 à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux de 5% par an dès le 22 décembre 2006.
 
La défenderesse a conclu au rejet de l'action.
 
Le tribunal s'est prononcé le 10 septembre 2008; il a accueilli l'action selon les conclusions de la demande.
 
La Cour de justice a statué le 24 avril 2009 sur l'appel de la défenderesse; elle a réformé le jugement en ce sens que cette partie doit payer 19'600 fr. seulement, avec suite d'intérêts selon les conclusions de la demande. Cette même partie est condamnée à assumer un dixième des dépens de première instance et d'appel.
 
D.
 
Agissant par la voie du recours en matière civile, les demandeurs requièrent le Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la Cour de justice en ce sens que la défenderesse soit condamnée à payer 56'552 fr., avec suite d'intérêts, et à assumer les trois quarts des dépens de première instance et d'appel. Des conclusions subsidiaires tendent à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de la cause à la Cour de justice.
 
La défenderesse conclut au rejet du recours.
 
Le Tribunal fédéral délibère en public le 15 décembre 2009.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
Le recours est dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF), rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) et en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). Ses auteurs ont pris part à l'instance précédente et succombé dans leurs conclusions (art. 76 al. 1 LTF). La valeur litigieuse excède le minimum légal de 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. b LTF). Introduit en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 al. 1 à 3 LTF), le recours est en principe recevable, alors même que, conformément aux observations de la défenderesse, le libellé des conclusions pourrait prêter à confusion.
 
Le recours est ouvert pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique ce droit d'office, hormis les droits fondamentaux (art. 106 LTF). Il n'est pas lié par l'argumentation des parties et il apprécie librement la portée juridique des faits; il s'en tient cependant, d'ordinaire, aux questions juridiques que la partie recourante soulève dans la motivation du recours (art. 42 al. 2 LTF; ATF 133 II 249 consid. 1.4.1 p. 254), et il ne se prononce sur la violation de droits fondamentaux que s'il se trouve saisi d'un grief invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 134 II 244 consid. 2.2 p. 246; 133 II 249 consid. 1.4.2). Le recours n'est pas recevable pour violation du droit cantonal, hormis les droits constitutionnels cantonaux (art. 95 let. c LTF) et certaines dispositions sans pertinence en matière civile (art. 95 let. d LTF).
 
Le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement juridique sur la base des faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 LTF); en règle générale, les allégations de fait et les moyens de preuve nouveaux sont irrecevables (art. 99 al. 1 LTF). Le tribunal peut compléter ou rectifier même d'office les constatations de fait qui se révèlent manifestement inexactes, c'est-à-dire arbitraires aux termes de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.1.2 p. 252), ou établies en violation du droit (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante est autorisée à attaquer des constatations de fait ainsi irrégulières si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
 
2.
 
En instance fédérale, il n'est plus contesté que la défenderesse doive réparer le dommage consécutif à son retard dans l'exécution de la promesse de vente du 24 octobre 2005; le montant des dommages-intérêts est seul litigieux.
 
3.
 
Les demandeurs persistent à réclamer 50'952 fr. au titre des intérêts qu'il ont versés, pour rémunération du crédit bancaire, du 1er avril au 21 décembre 2006. La Cour de justice rejette cette prétention au motif que les demandeurs auraient dû acquitter ces mêmes intérêts si leur cocontractante avait exécuté la promesse de vente sans délai.
 
La notion juridique du dommage est commune aux responsabilités contractuelle et délictuelle (art. 99 al. 3 CO; ATF 87 II 290 consid. 4a p. 291): consistant dans la diminution involontaire de la fortune nette, le dommage correspond à la différence entre le montant actuel du patrimoine du lésé et le montant que ce même patrimoine aurait si l'événement dommageable - ou la violation du contrat - ne s'était pas produit. Il peut survenir sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif (ATF 133 III 462 consid. 4.4.2 p. 471; 132 III 359 consid. 4 p. 366; 132 III 321 consid. 2.2.1 p. 323/324).
 
Les demandeurs ne contestent pas qu'ils auraient dû acquitter les intérêts aussi s'ils avaient pu occuper la villa dès le 31 mars 2006. Ils affirment que la Cour de justice, parce que la promesse de vente prévoyait une exécution simultanée des prestations réciproques, aurait dû comparer leur fortune nette au 31 mars 2006 avec la même au 21 décembre 2007. Cette thèse est erronée: le seul point décisif a pour objet de déterminer si le retard de la défenderesse, quel que fût le moment auquel ils devaient eux-mêmes fournir leur propre prestation, a entraîné un dommage. A juste titre, la Cour a donc comparé la fortune nette des demandeurs après que le retard avait pris fin, soit au 21 décembre 2007, avec ce que ladite fortune aurait été au même moment mais sans ce retard.
 
Il est par ailleurs vrai que les demandeurs ont payé des intérêts afférents à un laps de plusieurs mois, durant lequel, à cause du retard de l'autre partie, ils étaient privés de la jouissance de la villa. La privation de l'usage d'une chose se trouve éventuellement à l'origine d'un dommage, mais, à elle seule, elle n'en constitue pas un (ATF 126 III 388 consid. 11 p. 392). Contrairement à l'opinion des demandeurs, ce principe est pleinement applicable en l'espèce: il n'existe aucun lien de cause à effet entre la privation de l'usage de la villa et le versement des intérêts. Il n'y a d'ailleurs pas lieu de se référer à une notion du dommage autre que celle consacrée par la jurisprudence déjà citée, qui serait centrée sur l'absence d'utilité, pour les demandeurs, de payer des intérêts alors qu'ils n'ont pas la villa (cf. Ingeborg Schwenzer, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 5e éd., 2009, p. 80 n° 14.11; Niklaus Lüchinger, Schadenersatz im Vertragsrecht, 1999, p. 171 nos 496 et ss; Eugen Bucher, Schweizerisches Obligationenrecht, 2e éd., 1988, p. 360; Hans Merz, Obligationenrecht, in Schweizerisches Privatrecht, vol. VI/1, 1984, p. 196/197). Il ne se justifie pas non plus de prendre en considération que dans l'hypothèse où les demandeurs se seraient départis de la promesse de vente, plutôt que réclamer et obtenir, en définitive, l'exécution de ce contrat, les intérêts versés eussent constitué un dommage sujet à réparation (cf. Schwenzer, op. cit, p. 90 n° 14.30; Lüchinger, op. cit., p. 156 nos 447 et ss). Les demandeurs réclament vainement le complètement des constatations de fait sur divers points qui ne sont d'aucune pertinence au regard de la notion juridique du dommage. Sur leur prétention correspondant aux intérêts, le jugement de la Cour échappe à toute critique.
 
4.
 
Les demandeurs s'étant désistés de leur action en exécution contre la défenderesse, ils ont sollicité la réduction de l'émolument de mise au rôle; en définitive, celui-ci fut fixé à 9'600 francs. En appel, la défenderesse reconnaissait leur devoir ce montant et ils l'ont donc obtenu. En outre, la Cour de justice leur accorde un dédommagement de 10'000 fr. pour leurs frais d'avocat relatifs à la préparation et à la négociation de la convention du 21 novembre 2006.
 
Sur la base de la note d'honoraires de leur avocat, les demandeurs réclamaient en bloc 48'890 fr.80 au titre des frais de conseil nécessaires à la défense de leurs intérêts. Comme on l'a vu, sur ce montant, la Cour alloue ex aequo et bono 10'000 fr. pour la préparation et la négociation de la transaction extrajudiciaire. Pour le surplus, elle retient que les services de l'avocat se rapportaient aussi à des démarches qui ne tendaient pas à l'exécution de la promesse de vente, et dont les coûts n'étaient donc pas imputables à la défenderesse, ou que les demandeurs se trouvaient déjà dédommagés par les dépens obtenus à l'issue de la procédure de mesures provisionnelles. Enfin, la Cour rejette toute prétention consécutive aux frais d'avocat dans l'action principale en exécution de la promesse de vente. Sur ce dernier point, elle retient que ces frais auraient pu être couverts par les dépens à obtenir à l'issue de cette action. En renonçant à ces dépens selon les termes de la convention du 21 novembre 2006, les demandeurs ont aussi renoncé à réclamer le remboursement des frais d'avocat dans une instance ultérieure.
 
Sur ce même point, les demandeurs se plaignent d'une constatation arbitraire des clauses topiques de la convention, et d'une application incorrecte du droit fédéral. Ils réclament qu'un montant supplémentaire de 6'000 fr. leur soit alloué au titre des frais d'avocat dans l'action en exécution, ou que la cause soit renvoyée à la Cour de justice pour l'estimation de ce montant supplémentaire.
 
Sur la base du dossier, il s'impose de compléter les constatations de fait en ce sens que l'art. 12 al. 2 de la convention du 21 novembre 2006 a la teneur déjà indiquée sous let. B ci-dessus: « La cause sera retirée sans dépens. Le sort de ceux-ci sera réglé dans le cadre de l'indemnité stipulée sous art. 5 ch. 3. »
 
En règle générale, lorsque le droit de procédure civile permet au plaideur de se faire dédommager de tous les frais nécessaires et indispensables qu'il a consacrés au procès, ce droit est seul applicable, et il ne laisse aucune place à une action civile séparée ou ultérieure qui serait fondée sur le droit civil fédéral (arrêt 4C.51/2000 du 7 août 2000, SJ 2001 I 153, consid. 3; Roland Brehm, in Commentaire bernois, 3e éd., 2006, n° 88 ad art. 41 CO; voir aussi ATF 133 II 361 consid. 4.1 p. 363). Toutefois, cela concerne avant tout la responsabilité délictuelle; en matière de responsabilité contractuelle, compte tenu que selon l'art. 19 al. 1 CO, les cocontractants jouissent de la plus grande liberté dans l'organisation de leur relation juridique, cette règle doit céder le pas à la convention différente que ceux-ci ont éventuellement adoptée. En l'espèce, les parties ont explicitement, et sans ambiguïté, renvoyé les frais de l'action en exécution de la promesse de vente à une action civile ultérieure. Les demandeurs ont donc le droit de se faire dédommager non seulement de l'émolument de mise au rôle mais aussi de leurs frais d'avocat. Il incombe à la juridiction cantonale de constater ou d'évaluer le montant dû à ce titre; à cette fin, après annulation de la décision attaquée, la cause sera renvoyée à la Cour de justice.
 
5.
 
A teneur de l'art. 178 de la loi genevoise de procédure civile (LPC gen.), si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs de la contestation, le juge décide si elles doivent se rembourser leurs dépens et, dans l'affirmative, dans quelle proportion. Invoquant l'art. 9 Cst., les demandeurs se plaignent d'une application arbitraire de cette disposition - quoique leur écriture fasse référence à d'autres règles concernant les dépens - en tant que leur adverse partie doit assumer seulement un dixième des dépens de première instance et d'appel. Or, il n'est pas nécessaire de statuer sur ce grief car la Cour de justice devra de toute manière prendre une nouvelle décision et effectuer une nouvelle répartition des dépens.
 
6.
 
Compte tenu qu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, il y a lieu de répartir l'émolument judiciaire et de compenser partiellement les dépens de l'instance fédérale; il sera pris en considération que les demandeurs succombent sur la plus importante des prétentions qu'ils élevaient encore.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours est partiellement admis, l'arrêt de la Cour de justice est annulé et la cause est renvoyée à cette autorité pour nouvelle décision.
 
2.
 
Les parties acquitteront un émolument judiciaire de 2'500 fr., à raison de 2'250 fr. à la charge des demandeurs et de 250 fr. à la charge de la défenderesse.
 
3.
 
Les demandeurs verseront, à titre de dépens et solidairement entre eux, une indemnité de 2'500 fr. à la défenderesse.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 15 décembre 2009
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La présidente: Le greffier:
 
Klett Thélin
 
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