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Informationen zum Dokument  BGer 4A_692/2012  Materielle Begründung
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BGer 4A_692/2012 vom 15.04.2013
 
Bundesgericht
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
{T 0/2}
 
4A_692/2012
 
Arrêt du 15 avril 2013
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mme et MM. les Juges fédéraux Klett, présidente, Corboz et Kolly.
 
Greffier: M. Ramelet.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________,
 
recourant,
 
contre
 
Y.________, représenté par Me Valérie Mérinat,
 
intimé.
 
Objet
 
contrat de vente,
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours civile, du 31 août 2012.
 
Faits:
 
A.
 
Dans le courant de la seconde quinzaine du mois de janvier 2007, Y.________ et X.________ ont négocié les conditions de la vente par celui-là à celui-ci d'un véhicule de marque Fiat Doblo 1,9 D. Les précités se connaissaient déjà auparavant. Il a ainsi été retenu que Y.________ avait effectué quelques travaux de peinture dans l'appartement de X.________.
 
Du 8 janvier au 29 janvier 2007, X.________ a été en arrêt maladie à la suite d'une affection pulmonaire aiguë dont le traitement a nécessité la prise de plusieurs médicaments jusqu'au début février 2007.
 
Par contrat de vente signé le 5 février 2007, Y.________ a vendu à X.________ ledit véhicule pour le prix de 14'000 fr., que ce dernier lui a versé. Le contrat a été rédigé par X.________, qui seul parle le français, les cocontractants étant tous deux de langue maternelle portugaise. L'accord précisait notamment que la voiture, de trois ans d'âge, se trouvait à l'état de neuf, d'importantes réparations, confirmées par des factures, ayant été opérées.
 
Y.________ n'était pas un habitué des affaires; c'était la première fois qu'il procédait à ce genre de transaction. Selon les déclarations des parties, Y.________, qui avait besoin d'une somme de 14'000 fr. pour financer l'achat d'un camping-car, en aurait fait part à X.________, lequel aurait accepté de payer ce prix pour l'automobile; X.________ a indiqué qu'il était conscient que le prix de vente était trop élevé, mais qu'il souhaitait contribuer au projet d'acquisition de Y.________, car il trouvait ce dernier sympathique.
 
Le 7 février 2007, X.________ a fait évaluer le véhicule auprès de A.________ SA à ..., société qui a estimé le prix de vente à 6'829 fr. selon la norme Eurotax et à 4'585 fr. si la voiture était reprise par un garage.
 
Le 4 avril 2007, X.________ a invoqué la lésion (art. 21 CO) et requis une réduction amiable du prix de vente en faisant référence à la valeur indiquée par la norme Eurotax.
 
B.
 
Par requête adressée le 22 mai 2007 à la Justice de paix du district de Morges, X.________ a conclu au paiement par Y.________ de la somme de 7'171 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 5 février 2007, plus 350 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 22 février 2007.
 
Le défendeur a conclu à libération.
 
Il a été ordonné une expertise concernant la valeur du véhicule au moment de la vente. Selon l'expert, le prix de 14'000 fr. était absolument exagéré; compte tenu des frais engendrés par la réparation de dégâts préexistants, le prix d'achat aurait dû être arrêté à environ 6'000 fr.
 
Le juge de paix a également requis une expertise médicale relative à la capacité de discernement de l'acheteur lors de la vente. Selon le Centre Universitaire Romand de Médecine Légale (ci-après: le centre), X.________ avait probablement une pneumonie à cette époque; se rapportant aux ordonnances délivrées au patient, le centre a affirmé qu'il était très peu vraisemblable que les médicaments administrés aient pu interférer de manière significative sur sa capacité de discernement au moment où le contrat a été signé.
 
Ce magistrat a encore fait droit à une requête d'expertise psychiatrique présentée par le demandeur. L'expert psychiatre a déclaré que le demandeur présente une atteinte psychiatrique (un trouble schizotypique, un trouble anxieux et dépressif mixte accompagné d'un trouble cognitif léger). L'ensemble de ces troubles peuvent impliquer pour l'intéressé un état de faiblesse permanent dans ses rapports avec les tiers. L'expert a précisé ne pouvoir écarter que ces troubles puissent, sur le plan médico-théorique, être parfois exploités par autrui, dans une mesure toutefois impossible à quantifier.
 
Par jugement du 23 février 2012, dont la motivation a été communiquée le 16 mai 2012, le juge de paix a entièrement débouté le demandeur. Ce magistrat a considéré que si la condition objective de la lésion était remplie (disproportion évidente entre les prestations), le défendeur n'avait pas exploité la faiblesse du demandeur, à supposer encore que les affections psychiques dont souffre ce dernier aient pu réellement altérer sa capacité de discernement lors de la conclusion de la vente.
 
X.________ a interjeté un recours au sens de l'art. 319 let. a CPC contre ce jugement devant la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal vaudois, concluant à ce que le défendeur lui doive paiement de 7'521 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 février 2007. Par arrêt du 31 août 2012, la cour cantonale a confirmé le jugement attaqué, en adoptant les motifs du premier juge.
 
C.
 
X.________ exerce contre l'arrêt cantonal un recours en matière civile, subsidiairement un recours constitutionnel. Dans les deux recours, il requiert principalement la condamnation du défendeur au paiement de 7'521 fr. avec intérêts à 5% dès le 5 janvier 2007; à titre subsidiaire, il sollicite l'annulation de l'arrêt déféré et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants.
 
Par ordonnance présidentielle du 19 décembre 2012, l'effet suspensif a été accordé au recours.
 
L'intimé propose le rejet du recours. Il sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire.
 
Le recourant a répliqué.
 
Considérant en droit:
 
1.
 
1.1 Devant l'autorité précédente, le litige ne portait que sur une demande en capital de 7'521 fr., entièrement contestée (cf. art. 51 al. 1 let. a et al. 3 LTF). La valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. requise par l'art. 74 al. 1 let. b LTF pour que puisse être intenté un recours en matière civile n'est pas atteinte. Le recourant soutient toutefois que ledit recours est recevable sans égard à la valeur litigieuse, car la contestation soulève une question juridique de principe (art. 74 al. 2 let. a LTF). Celle-ci consisterait à déterminer si l'exploitation de la gêne, de la légèreté ou de l'inexpérience de la victime de la lésion pourrait se déduire également d'actes concluants.
 
Selon la jurisprudence, il y a question juridique de principe lorsque dans l'intérêt général, en particulier dans l'intérêt de la sécurité juridique, une question controversée doit être résolue par la juridiction suprême afin de parvenir à une interprétation et à une application uniforme du droit fédéral (ATF 137 III 580 consid. 1.1 p. 583; 135 III 397 consid. 1.2 p. 399).
 
La présente querelle ne porte que sur l'examen des conditions de la lésion, lesquelles font l'objet d'une jurisprudence bien établie (cf. ATF 123 III 292), rappelée plus récemment dans l'arrêt 4A_21/2009 du 11 mars 2009 consid. 3, in: ZBGR 91/2010 p. 109. Le recourant ne prétend pas - à juste titre - que cette jurisprudence fasse l'objet de critiques réitérées de la doctrine. Contrairement à ce qu'il déclare, il n'y a aucune question juridique de principe à résoudre. Le recours en matière civile est donc irrecevable.
 
Le recours constitutionnel est en revanche recevable à titre subsidiaire (art. 113 LTF).
 
1.2 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions en paiement et qui a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision (art. 115 LTF), le recours, déposé dans le délai (art. 100 al. 1 et 117 LTF) et dans la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, est en principe recevable, puisqu'il est dirigé contre une décision finale (art. 117 et 90 LTF) rendue par un tribunal supérieur statuant sur recours en dernière instance cantonale (art. 113 et 114 LTF).
 
1.3 Le recours subsidiaire ne peut être interjeté que pour violation des droits constitutionnels (art. 116 LTF). La partie recourante doit indiquer quel droit constitutionnel aurait été violé et montrer, par une argumentation circonstanciée, en quoi consiste la violation (ATF 134 I 83 consid. 3.2 p. 88; 134 II 244 consid. 2.2 p. 246). Le Tribunal fédéral ne peut examiner la violation d'un droit de rang constitutionnel ou un grief constitutionnel en relation avec l'application du droit cantonal que si le grief a été invoqué et suffisamment motivé dans l'acte de recours (art. 106 al. 2 LTF applicable par le renvoi de l'art. 117 LTF).
 
Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 118 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis en violation d'un droit constitutionnel (art. 118 al. 2 et 116 LTF), ce que le recourant doit invoquer avec précision (art. 106 al. 2 LTF applicable par le renvoi de l'art. 117 LTF). Aucun fait nouveau ou preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision attaquée (art. 99 al. 1 LTF applicable par le renvoi de l'art. 117 LTF).
 
1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 117 et 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 117 et 99 al. 2 LTF).
 
2.
 
Selon l'arrêt attaqué, les parties ont conclu un contrat de vente (cf. art. 184 al. 1 CO) ayant pour objet un véhicule d'occasion. Le recourant, qui soutient que cet accord est lésionnaire, affirme que l'application opérée par la cour cantonale de l'art. 21 CO consacre une violation de son droit d'être entendu et est de surcroît incompatible avec l'art. 9 Cst.
 
2.1 Se prévalant tout d'abord des art. 29 al. 2 Cst. ainsi que de l'art. 6 CEDH, le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir fondé son arrêt sur un courriel en langue portugaise qu'il a adressé à l'intimé le 28 janvier 2007, mal traduit en français et sur lequel il n'a pas été en mesure de se déterminer. Dans ce message, le recourant faisait part à l'intimé qu'il acceptait le prix de vente de 14'000 fr. parce qu'il espérait la conclusion d'une contre-affaire pouvant générer des revenus de l'ordre de 100'000 fr.
 
2.1.1 En vertu de l'art. 6 par. 1 CEDH, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil.
 
Si tant est que le recourant entende reprocher à la cour cantonale de n'avoir pas eu droit à un procès équitable, le grief ne répond manifestement pas aux exigences strictes de motivation posées par l'art. 106 al. 2 LTF - auquel l'art. 117 LTF renvoie - lorsque la violation de droits fondamentaux est invoquée.
 
Concernant le droit d'être entendu, il est de jurisprudence que l'art. 6 par. 1 CEDH n'a pas une portée plus large que celle qui découle de l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 138 I 484 consid. 2.1 p. 485 s. et les références).
 
2.1.2 Le droit d'être entendu découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. comprend en particulier le droit pour le justiciable de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos; le droit d'être entendu est à la fois une institution servant à l'instruction de la cause et une faculté de la partie, en rapport avec sa personnalité, de participer au prononcé de décisions qui touchent à sa situation juridique (ATF 137 II 266 consid. 3.2 p. 270; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293; 135 I 187 consid. 2.2 p. 190).
 
Dans le jugement de première instance rendu le 23 février 2012 - dont l'état de fait a été adopté par la cour cantonale (cf. consid. C in initio de l'arrêt déféré, p. 3) -, le juge de paix se rapporte explicitement au courriel du 28 janvier 2007, expliquant que le demandeur y fait mention d'une contre-affaire. Il est donc inexact d'affirmer, à l'instar du recourant, que ce magistrat n'a pas du tout fait référence à ce document. On voit donc que le recourant aurait pu prendre position sur le contenu de cette pièce, dont il avait eu connaissance à la lecture du jugement de première instance.
 
On ne discerne aucune violation du droit d'être entendu.
 
2.2 Invoquant enfin la protection contre l'arbitraire ancrée à l'art. 9 Cst., le recourant prétend qu'il était insoutenable de se fonder sur le courriel du 28 janvier 2007, car cette pièce, imparfaitement traduite, était irrecevable.
 
Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral ne s'écarte de la décision attaquée que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; 136 III 552 consid. 4.2 p. 560; 135 V 2 consid. 1.3).
 
Le grief ne contient aucune démonstration d'arbitraire, d'où son irrecevabilité (art. 106 al. 2 et 117 LTF). Le recourant ne soutient pas que la cour cantonale a violé de manière indéfendable une norme procédurale en admettant la production de cette pièce. Lorsqu'il allègue que le courriel était mal traduit, il ne dit même pas comment il aurait fallu comprendre ce document.
 
Le moyen est irrecevable.
 
3.
 
En résumé, le recours en matière civile est irrecevable et le recours constitutionnel doit être rejeté en tant qu'il est recevable.
 
L'intimé a sollicité l'assistance judiciaire (art. 64 LTF). Il l'avait déjà obtenue dans la procédure cantonale. L'assistance d'un avocat lui était manifestement nécessaire pour défendre au recours. Comme ses conclusions tendaient au rejet des recours, elles n'étaient à l'évidence pas dépourvues de chances de succès. Dès lors, les conditions de l'assistance judiciaire sont réunies et celle-ci doit être accordée. Elle n'aura toutefois d'importance pratique que si les dépens accordés ne peuvent pas être recouvrés.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1.
 
Le recours en matière civile est irrecevable.
 
2.
 
Le recours constitutionnel subsidiaire est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
3.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le recourant versera à l'intimé une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens.
 
5.
 
L'assistance judiciaire est accordée à l'intimé. Me Valérie Mérinat est désignée comme avocate d'office. Une indemnité de 2'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires à payer par la Caisse du Tribunal fédéral au cas où les dépens mis à la charge du recourant ne pourraient pas être recouvrés.
 
6.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours civile.
 
Lausanne, le 15 avril 2013
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente: Klett
 
Le Greffier: Ramelet
 
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