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Informationen zum Dokument  BGer 2F_24/2012  Materielle Begründung
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BGer 2F_24/2012 vom 21.06.2013
 
2F_24/2012
 
2F_25/2012
 
{T 0/2}
 
 
Arrêt du 21 juin 2013
 
 
IIe Cour de droit public
 
Composition
 
MM. les Juges fédéraux Zünd, Président,
 
Donzallaz et Stadelmann.
 
Greffière: Mme Cavaleri Rudaz.
 
 
Participants à la procédure
 
X.________,
 
représenté par Me Olivier Wehrli, avocat,
 
requérant,
 
contre
 
Administration cantonale des impôts du canton de Vaud,
 
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public.
 
Objet
 
Révision de l'arrêt du Tribunal fédéral 2P.278/2002 du 2 octobre 2003,
 
 
Faits:
 
 
A.
 
X.________, ancien cambiste auprès de la Société de Banque Suisse à Genève, domicilié depuis le 1er janvier 2001 aux Bermudes, a travaillé pour les sociétés Y.________ SA puis Z.________ SA. Pour les périodes fiscales 1985-1986 et 1987-1988, X.________ a été taxé sur des revenus estimés sur la base de ses dépenses, faute d'avoir donné les renseignements demandés à l'autorité de taxation.
 
 
B.
 
Les deux décisions sur réclamation précitées ont fait l'objet de recours auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif). Alors que la procédure devant cette instance était pendante, la Division d'enquêtes spéciales de l'Administration fédérale des contributions (ci-après: la Division d'enquêtes), qui soupçonnait X.________ de s'être soustrait à ses obligations fiscales, a ouvert une enquête. Dans ce cadre, un mandat de perquisition a été décerné le 3 mars 1999 mentionnant que "le séquestre des papiers susmentionnés concerne particulièrement les années 1989 à 1998, mais également tout document notable antérieur à 1989 ou postérieur à 1998". De nombreuses perquisitions ont été effectuées, au domicile de X.________, à son lieu de travail, ainsi qu'auprès de fiduciaires, sociétés de gestion de fortune, de banques et de cabinets d'avocats.
 
 
C.
 
Par arrêt du 21 octobre 2002, le Tribunal administratif a rejeté les recours de X.________ et a maintenu les décisions de taxation ainsi que les amendes prononcées. Il a notamment retenu que X.________ n'avait pas déclaré tous ses comptes bancaires; de plus, il détenait la moitié du capital-actions des sociétés panaméennes C.________ et D.________ et il avait disposé, pour ses besoins personnels, des avoirs desdites sociétés. En conséquence, en application du principe de la transparence, la moitié des revenus réalisés par ces sociétés devait lui être attribuée.
 
 
D.
 
Le 26 mars 2004, X.________ a saisi la Cour européenne des droits de l'homme (ci-après: la CourEDH) d'une requête, alléguant des violations du droit au procès équitable tel que garanti par l'art. 6 CEDH.
 
Par arrêt du 5 avril 2012, devenu définitif le 5 juillet suivant, la CourEDH a partiellement admis la requête dont elle était saisie, en ce sens qu'elle a constaté la violation du droit de ne pas être contraint à s'incriminer soi-même et du droit à l'égalité des armes, garantis par l'art. 6 par. 1 CEDH. Elle a de ce chef condamné la Confédération suisse à verser au requérant des sommes équivalant à 5'000 fr. à titre de préjudice matériel et 10'000 fr. pour ses frais et dépens, plus tous montants pouvant être dus par lui à titre d'impôt.
 
 
Considérant en droit:
 
 
1.
 
La demande de révision ayant été déposée après l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007 (RO 2006 p. 1242), de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), la procédure est régie par le nouveau droit (art. 132 al. 1 LTF; ATF 134 III 45 consid. 1 p. 47).
 
1.1. L'arrêt dont la révision est requise a été rendu à l'issue d'une procédure dans laquelle deux dossiers, l'un concernant l'impôt cantonal (2F_24/2002) et l'autre l'impôt fédéral direct (2F_25/2002), ont été ouverts et joints. Ces deux causes seront également traitées conjointement dans le cadre de la présente procédure.
 
1.2. L'art. 42 al. 2 LTF est une disposition générale de procédure, applicable en matière de révision. Cette disposition exige que les motifs exposent succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Pour satisfaire à cette obligation de motiver, le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit; il n'est pas indispensable qu'il indique expressément les dispositions légales - le numéro des articles de loi - ou qu'il désigne expressément les principes non écrits de droit qui auraient été violés; il suffit qu'à la lecture de son exposé, on comprenne clairement quelles règles de droit auraient été, selon lui, transgressées (cf. ATF 133 IV 119 consid. 6.3 p. 120 s., 286 consid. 1.4 p. 287; arrêt 5A_129/2007 du 28 juin 2007, consid. 1.4 et les références citées dans ces arrêts). La motivation doit être contenue dans l'acte de recours et le renvoi à d'autres écritures n'est en principe pas pris en considération (arrêts 2C_1035/2011 du 19 avril 2012 consid. 3; 9C_47/2008 du 29 septembre 2008 consid. 2.2; cf. sous l'empire de l'art. 108 al. 2 aOJ, ATF 131 III 384 consid. 2.3 p. 387 s.; 130 I 290 consid. 4.10 p. 302, et les références).
 
 
2.
 
En vertu de l'art. 122 let. a LTF, la révision d'un arrêt du Tribunal fédéral pour violation de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH) peut être demandée si la CourEDH a constaté, par un arrêt définitif, une violation de la CEDH ou de ses protocoles. En pareil cas, la demande de révision doit être déposée devant le Tribunal fédéral au plus tard 90 jours après que l'arrêt de la CourEDH soit devenu définitif au sens de l'art. 44 CEDH (art. 124 al. 1 let. c LTF). En outre, le requérant doit avoir la qualité pour former une demande de révision et, notamment, disposer d'un intérêt actuel à obtenir un nouveau jugement sur le point litigieux (cf. arrêts 2F_1/2012 du 8 mars 2012 consid. 2; 2F_11/2008 du 6 juillet 2009, consid. 2).
 
 
3.
 
3.1. Le motif de révision de l'art. 122 LTF suppose, outre qu'une requête individuelle ait été admise pour la violation d'un droit garanti par la CEDH (let. a), qu'une indemnité ne soit pas de nature à remédier aux effets de la violation (let. b), soit que la situation contraire au droit perdure malgré le constat de violation et l'octroi d'une indemnité, des intérêts matériels ne restants pas seuls en jeu ( Pierre Ferrari, in Bernard Corbozet al., Commentaire de la LTF, 2009, n° 9 ad art. 122 LTF; Yves Donzallaz, Loi sur le Tribunal fédéral: Commentaire, n° 4684 p. 1686). Le versement d'une telle indemnité ne libère en effet pas forcément l'Etat concerné de son obligation, prévue à l'art. 46 CEDH, de se conformer aux arrêts de la CourEDH. L'Etat défendeur, reconnu responsable d'une violation de la Convention ou de ses Protocoles, est appelé à choisir, sous le contrôle du Comité des Ministres, les mesures générales et/ou, le cas échéant, individuelles à adopter dans son ordre juridique interne, afin de mettre un terme à la violation constatée et d'en effacer autant que possible les conséquences (cf., parmi d'autres références, arrêts de la CourEDH Hurter contre Suisse du 15 mai 2012, résumé in Plaidoyer 2012/5 p. 56; Öcalan contre Turquie du 6 juillet 2010; Verein gegen Tierfabriken Schweiz (VgT) contre Suisse du 30 juin 2009). Si les États ont la liberté de choisir les moyens de se conformer aux arrêts de la Cour, ils ont toutefois une obligation de résultat, et doivent pour cela placer le requérant le plus possible dans la situation qui serait la sienne s'il n'y avait eu aucune violation de la CEDH, selon le principe de la restitutio in integrum ( Maya Hertig Randall/ Xavier-Baptiste Ruedin, L'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme à la lumière de l'arrêt Vertein gegen Tierfabriken Schweiz (VGT) c. Suisse du 4 octobre 2007, in PJA 2008, p. 651 ss, p. 659).
 
3.2. La révision doit également être nécessaire pour remédier aux effets de la violation constatée (art. 122 let. c LTF). Il incombe en effet aux États contractants d'apprécier la manière la plus adéquate de rétablir une situation conforme à la CEDH et d'assurer une protection effective des garanties qui y sont ancrées. La constatation d'une violation de l'art. 6 CEDH ne commande pas, à elle seule, la révision de la décision portée devant la CourEDH (cf. Hurter contre Suisse du 15 mai 2012; ATF 137 I 86 consid. 3 p. 89s.; arrêts 5F_8/2010 du 26 mai 2011 consid. 2; 5F_4/2011 du 8 septembre 2011 consid. 2). La révision fondée sur l'art. 122 LTF n'est nécessaire que si l'issue de la procédure devait être différente sans la violation de la Convention. De la sorte, les irrégularités de procédure ne constituent un motif de révision que si elles ont été déterminantes pour la solution au fond. L'adéquation de la révision comme réponse aux effets de la violation constatée dépend en définitive de la nature de la violation de la CEDH ( Elisabeth Escher in Marcel Alexander Niggliet al., Bundesgerichtsgesetz, n° 6 ad art. 122, Ferrari, op. cit., no 10 et 13 ad art. 122 LTF). Il incombe par conséquent au requérant d'exposer en quoi il existe un motif de révision et dans quelle mesure ce motif conduit à la modification du dispositif de la décision ( Elisabeth Escher, ibidem;Ferrari, op. cit., n° 11 ad art. 122 LTF; cf. sous l'ancienne OJ, 2A.526/2001 du 29 avril 2002 consid. 3.1).
 
 
4.
 
La CourEDH a octroyé au recourant, sur la base de l'art. 41 CEDH, 5'000 fr. à titre de préjudice matériel, montant qui correspond aux amendes infligées en violation de l'art. 6 § 1 CEDH. Cette somme lui a été versée, ce ne qu'il ne conteste pas. Le recourant soutient cependant que le respect de son droit à consulter le dossier de l'administration fédérale aurait conduit à l'admission de ses recours dans le cadre de la procédure de taxation d'office et à leur renvoi à l'instance précédente. Les décisions de taxations sont entachées du vice de la violation de la CEDH et doivent être annulées, car seule la restitution des impôts versés à ce titre mettrait un terme aux violations constatées.
 
4.1. Il sied d'observer, à titre liminaire, que la CourEDH n'a pas appliqué l'art. 6 CEDH au volet civil de la procédure ayant pour objet la détermination des obligations fiscales du recourant, mais au caractère pénal de la procédure pour soustraction d'impôt, dans la mesure où il s'est étendu à la présente procédure sur réclamation.
 
4.2. Le recourant admet avoir eu accès, postérieurement à l'arrêt du 2 octobre 2003, à l'ensemble du dossier de l'Administration fédérale des contributions, mais ne prétend pas que sa connaissance des pièces qu'il contenait aurait dû conduire à une modification des décisions de taxation, manquant à ses obligations de motivation (art. 42 LTF).
 
Faute d'exposer en quoi la décision de la CourEDH constatant la violation de la Convention ne suffisait pas à remédier à la violation de la procédure, et que les décisions de taxations auraient, au fond, été différentes, le recourant échoue à prouver que la révision est nécessaire pour remédier aux effets des violations constatées (art. 122 let. c LTF).
 
4.3. Comme le principe de la restitutio in integrum n'impose pas que les sommes versées sur la base des décisions de taxation soient restituées, le remboursement des amendes suffit dans le cas d'espèce à remédier aux effets de la violation et à placer le recourant dans la situation qui serait la sienne sans la violation des droits de procédure constatée (art. 122 let. b LTF).
 
4.4. Il ressort de ce qui précède que les conditions de l'art. 122 LTF ne sont pas réunies et que par conséquent, la requête de révision doit être rejetée. Il n'y a dès lors pas lieu d'entrer en matière sur les conclusions du recourant relatives au rescisoire.
 
 
5.
 
En conclusion, la demande de révision est rejetée. Le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 3 LTF).
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
 
1.
 
Les causes 2F_24/2012 et 2F_25 /2012 sont jointes.
 
 
2.
 
La demande de révision en matière d'impôt cantonal et communal (2F_ 24/2012) est rejetée.
 
 
3.
 
La demande de révision en matière d'impôt fédéral direct (2F_ 25/2012) est rejetée.
 
 
4.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 20'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
 
5.
 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à l'Administration cantonale des impôts et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions, Division juridique impôt fédéral direct, et à l'Office fédéral de la justice, Représentation de la Suisse devant la Cour européenne des droits de l'homme.
 
Lausanne, le 21 juin 2013
 
Au nom de la IIe Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: Zünd
 
La Greffière: Cavaleri Rudaz
 
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