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Informationen zum Dokument  BGer 5A_637/2013  Materielle Begründung
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BGer 5A_637/2013 vom 01.10.2013
 
{T 0/2}
 
5A_637/2013
 
 
Arrêt du 1er octobre 2013
 
 
IIe Cour de droit civil
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges fédéraux von Werdt, Président, Hohl et Herrmann.
 
Greffière: Mme Achtari.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
représentée par Me Christian Favre, avocat,
 
recourante,
 
contre
 
1. B.________,
 
représenté par Me Stéphanie Brun Poggi, avocate,
 
2. C.________,
 
représentée par Me Ana Rita Perez, avocate,
 
intimés.
 
Objet
 
déplacement illicite d'enfant,
 
recours contre le jugement de la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 29 août 2013.
 
 
Faits:
 
A. A.________, de nationalités allemande et marocaine, et B.________, de nationalité française, se sont rencontrés en septembre 2010 et ont vécu ensemble en France sans être mariés.
 
 
B.
 
B.a. Le 30 octobre 2012, B.________ a saisi le Juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Besançon d'une assignation en référé. Après avoir tenu son audience le 8 novembre 2012, à laquelle A.________ n'a pas comparu, le juge a rendu une ordonnance de référé en date du 22 novembre 2012. Celle-ci constate notamment que l'autorité parentale sur C.________ est exercée en commun par les deux parents, fixe la résidence habituelle de l'enfant chez le père, la mère disposant d'un droit de visite et d'hébergement les week-ends pairs et pendant une partie des vacances scolaires.
 
B.b. Pour sa part, A.________ a ouvert le 18 février 2013 une procédure devant le Président du Tribunal civil de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois, visant notamment à obtenir une contribution d'entretien en faveur de l'enfant.
 
 
C.
 
C.a. Le 15 mars 2013, B.________ a fait parvenir à l'Office fédéral de la justice une requête en vue du retour de l'enfant selon la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants du 25 octobre 1980 (ci-après: CLaH80).
 
 
C.b.
 
C.b.a. Par requête adressée le 20 mars 2013 à la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal vaudois, B.________ a requis des mesures de protection immédiate tendant notamment à interdire à A.________ de quitter le territoire suisse et a conclu, au fond, à ce qu'il soit ordonné le retour immédiat de l'enfant en France au domicile de son père ainsi que la remise immédiate de l'enfant par la mère en mains du SPJ, sous la menace de l'art. 292 CP, pour que celui-ci la remette à son père, B.________ ou se charge de son rapatriement, et à ce que le SPJ soit chargé de l'exécution du retour, le cas échéant, avec le concours des agents de la force publique.
 
C.b.b. Le 22 avril 2013, une audience s'est tenue devant la Chambre des curatelles, durant laquelle les parties ont conclu une convention prévoyant notamment qu'elles s'engageaient à entamer une procédure de médiation, qu'elles requéraient la suspension de la procédure de retour jusqu'au 31 octobre 2013 ou jusqu'à réquisition de l'une ou l'autre partie, qu'elles s'engageaient à requérir la suspension des procédures pendantes en Suisse et en France d'ici au 30 avril 2013, que B.________ déclarait renoncer à l'exécution de l'ordonnance de référé du juge aux affaires familiales du 22 novembre 2012 jusqu'à la reprise de la procédure de retour, qu'elles admettaient que, durant la suspension, A.________ s'occupe de C.________, celle-ci vivant auprès d'elle, que B.________ aura l'enfant auprès de lui un week-end sur deux du vendredi 18 h au dimanche 18 h la première fois le 3 mai 2013, à charge pour lui d'aller la chercher et la ramener, et que B.________ contribuera à l'entretien de l'enfant par le versement depuis le 1
 
C.b.c. Le 21 août 2013, une audience s'est tenue devant la Chambre des curatelles, qui a tenté sans succès la conciliation.
 
D. Par acte du 9 septembre 2013, A.________ exerce un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral contre cette décision, concluant à titre de mesure provisionnelle à ce que l'effet suspensif soit accordé au recours, et au fond, principalement, à sa réforme en ce sens que le retour de C.________ est refusé et qu'il est constaté que cet enfant est valablement domiciliée à D.________ auprès de sa mère depuis le 22 octobre 2012, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause pour nouvelle décision dans le sens des considérants. En substance, elle se plaint de la violation de son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst.), d'arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'établissement des faits et dans l'application du droit (art. 5 LF-EEA et 13 CLaH80), ainsi que de la violation de ces mêmes dispositions.
 
E. Par ordonnance du 9 septembre 2013, il a été ordonné qu'aucune mesure d'exécution de la décision attaquée ne soit prise jusqu'à décision sur la requête d'effet suspensif.
 
 
Considérant en droit:
 
1. Les décisions statuant sur le retour d'un enfant en application de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants du 25 octobre 1980 (CLaH80, RS 0.211.230.02) ne sont pas des affaires civiles. Il s'agit d'entraide administrative entre les États contractants (ATF 120 II 222 consid. 2b), donc d'une question relevant du droit public mais qui est en rapport direct avec le respect et la mise en oeuvre du droit civil étranger (art. 72 al. 2 let. b ch. 1 LTF; ATF 133 III 584). La Chambre des curatelles du Tribunal cantonal vaudois a statué en instance cantonale unique conformément à l'art. 7 al. 1 de la loi fédérale sur l'enlèvement international d'enfants et les Conventions de La Haye sur la protection des enfants et des adultes du 21 décembre 2007 (LF-EEA, RS 211.222.32); il y a ainsi exception légale au principe du double degré de juridictions cantonales (art. 75 al. 2 let. a LTF). Le délai légal de 10 jours (art. 100 al. 2 let. c LTF) est en outre respecté de sorte que le recours en matière civile est en principe recevable.
 
 
2.
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral et du droit international (art. 95 let a et b LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 133 III 545 consid. 2.2). Il ne connaît cependant de la violation des droits fondamentaux ou du droit cantonal que si ce grief a été soulevé et motivé (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 I 83 consid. 3.2; 133 II 249 consid. 1.4.2). Si le recourant se plaint de la violation de tels droits, il doit ainsi satisfaire au principe d'allégation, en indiquant précisément quelle disposition constitutionnelle ou légale a été violée et en démontrant, par une argumentation précise, en quoi consiste la violation (ATF 133 IV 286 consid. 1.4; 133 II 249 consid. 1.4.2).
 
2.2. Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), c'est-à-dire que les constatations de fait sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.2.2), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (cf. 
 
3. L'autorité cantonale a tout d'abord rappelé les motifs pour lesquels la demande d'audition de témoins par la recourante avait été rejetée, à savoir que ces mesures d'instruction étaient liées à des allégués relatifs au conflit conjugal qui n'apparaissaient pas déterminants pour statuer sur le retour de l'enfant, et a rejeté pour les mêmes motifs la requête de l'intimé de produire un rapport de police relatif à une dispute survenue le 23 mai 2013 entre les parties.
 
4. La recourante ne conteste pas le déplacement illicite de l'enfant au sens de l'art. 3 CLaH80. Elle soutient en revanche que l'exception au retour de l'enfant en France prévue à l'art. 13 al. 1 let. b CLaH80 est réalisée.
 
 
5.
 
 
5.1.
 
5.1.1. La France comme la Suisse ont ratifié aussi bien la CLaH80 que la Convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (CLaH96, RS 0.211.231.011). En vertu de l'art. 50 CLaH96, la CLaH96 n'affecte cependant pas la CLaH80 dans les relations entre les États parties aux deux conventions, de sorte que le retour de l'enfant peut être demandé sur la base de la CLaH80 (arrêt 5A_479/2012 du 13 juillet 2012 consid. 4.1, publié 
 
5.1.2. En principe, lorsqu'un enfant a été déplacé ou retenu illicitement, l'autorité saisie ordonne son retour immédiat (art. 1 let. a et 12 al. 1 CLaH80).
 
5.2. En l'espèce, tout d'abord, au vu du très jeune âge de l'enfant née en 2012 et du fait que celle-ci a toujours été prise en charge par la recourante, une séparation d'avec sa mère créerait une situation intolérable pour elle, en ce sens que son hébergement auprès de l'intimé qui a demandé le retour ne répond manifestement pas à son intérêt (art. 13 al. 1 let. b CLaH80; art. 5 let. a LF-EEA).
 
5.3. Il reste à examiner encore les griefs de la recourante, dans l'hypothèse où les garanties selon lesquelles l'enfant ne sera pas séparée d'elle jusqu'à la fin de la procédure au fond statuant définitivement sur la garde seraient obtenues.
 
5.3.1. En substance, la recourante affirme qu'elle ne peut pas retourner dans la région de F.________, où elle ne trouverait ni logement ni travail en raison de l'influence de la famille de l'intimé, et où elle serait exposée à des violences de la part de celui-ci, de sorte que la condition de l'art. 5 let. b LF-EEA serait réalisée.
 
5.3.2. Dans l'hypothèse où, malgré l'obtention des garanties précitées, la recourante refuserait de retourner volontairement en France pour y prendre soin de son enfant dans le délai qui lui aura été précédemment fixé, il appartiendrait encore à l'autorité cantonale de déterminer si l'enfant pourrait être placée auprès de l'intimé jusqu'à la décision définitive sur l'attribution du droit de garde. En effet, même s'il a été dit précédemment que l'enfant en bas âge doit pouvoir rester auprès de sa mère, une séparation doit néanmoins avoir lieu et le retour être exécuté si la mère refuse d'accomplir ses devoirs parentaux au préjudice de son enfant et que le père est apte à en assumer la garde.
 
6. En conclusion, le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. Les art. 26 CLaH80 et 14 LF-EEA prévoient la gratuité de la procédure; toutefois, conformément aux dispositions de l'art. 42 CLaH80 et par application de l'art. 26 par. 3 CLaH80, la France a déclaré qu'elle ne prendra en charge les frais visés à l'alinéa 2 de l'article 26 que dans la mesure où ces frais sont couverts par le système français d'aide judiciaire. La Suisse applique dans ce cas le principe de la réciprocité (art. 21 al. 1 let. b de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités [RS 0.111]), de sorte que la procédure devant le Tribunal fédéral n'est pas gratuite (arrêts 5A_25/2010 du 2 février 2010 consid. 3; 5A_840/2011 du 13 janvier 2012 consid. 6). L'intimé, qui succombe, supportera ainsi les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) arrêtés à 3'000 fr., dont font partie les frais de représentation de l'enfant par 1'000 fr. (arrêt 5A_346/2012 du 12 juin 2012 consid. 6; 5A_840/2011 du 13 janvier 2012 consid. 6). Il versera en outre à la recourante une indemnité de dépens à hauteur de 2'000 fr. (art. 68 al. 1 LTF) pour l'instance fédérale (art. 68 al. 5 LTF).
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1. Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr. (y compris les frais de représentation de l'enfant), sont mis à la charge de l'intimé.
 
3. Une indemnité de 2'000 fr., à payer à la recourante à titre de dépens pour l'instance fédérale, est mise à la charge de l'intimé.
 
4. Une indemnité de 1'000 fr. est allouée à Me Ana Rita Perez à titre d'honoraires, qui lui sera payée par la Caisse du Tribunal fédéral.
 
5. Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre des curatelles du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Office fédéral de la justice, Autorité centrale en matière d'enlèvement international d'enfants.
 
Lausanne, le 1er octobre 2013
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: von Werdt
 
La Greffière: Achtari
 
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