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Informationen zum Dokument  BGer 8C_803/2012  Materielle Begründung
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BGer 8C_803/2012 vom 15.10.2013
 
{T 0/2}
 
8C_803/2012
 
 
Arrêt du 15 octobre 2013
 
 
Ire Cour de droit social
 
Composition
 
Mmes et M. les Juges fédéraux Leuzinger, Présidente, Frésard et Heine.
 
Greffière: Mme von Zwehl.
 
 
Participants à la procédure
 
D.________,
 
représenté par Me Gilbert Bratschi,
 
recourant,
 
contre
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne,
 
intimée.
 
Objet
 
Assurance-accidents (révision de la rente),
 
recours contre le jugement de la Cour de justice de
 
la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 3 septembre 2012.
 
 
Faits:
 
 
A.
 
A.a. Le 12 avril 1997, D.________, né en 1959, s'est blessé à la cheville droite en jouant au football, ce qui lui a occasionné une fracture-luxation (type Maisonneuve), une fracture partielle de la malléole postérieure et une déchirure du ligament deltoïde. A l'époque, il travaillait comme grutier et exerçait une activité accessoire de nettoyeur. Pour les suites de cet accident, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) lui a alloué une rente LAA fondée sur une incapacité de gain de 45 % dès le 1er octobre 1999, ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 5 % (décision du 24 décembre 1999).
 
Egalement saisi d'une demande de prestations, l'Office cantonal genevois de l'assurance-invalidité (OCAI) lui a octroyé un quart de rente d'invalidité dès le 1er avril 1998 (décisions des 14 avril 2000 et 5 novembre 2001).
 
A.b. Le 4 novembre 2002, D.________ a débuté une activité à mi-temps comme magasinier auprès de l'entreprise X.________ SA. Le 13 février 2004, cet employeur a signalé à la CNA une rechute de l'accident du 12 avril 1997.
 
Par décision du 3 juin 2004, confirmée sur opposition le 14 novembre 2007, la CNA a refusé d'allouer des prestations pour les troubles et l'incapacité de travail annoncés. L'assuré a recouru devant le Tribunal cantonal genevois des assurances sociales, en l'informant qu'il allait se soumettre à une triple arthrodèse du pied droit le 2 mai 2008. Le tribunal cantonal a partiellement admis son recours au sens des considérants et renvoyé la cause à la CNA pour nouvelle décision (jugement du 15 septembre 2008). Par arrêt du 14 mai 2009 [cause 8C_880/2008], le Tribunal fédéral a rejeté le recours en matière de droit public interjeté contre ce jugement. En bref, il a constaté que l'assuré souffrait d'une déformation de l'arrière-pied droit préexistante à l'accident mais décompensée par celui-ci. Cette aggravation ne modifiait toutefois pas l'exigibilité fixée précédemment par la CNA (activités adaptées essentiellement en position assise), et ne justifiait par conséquent aucune révision du taux de la rente LAA. En revanche, l'assureur-accidents était tenu de prendre en charge l'intervention chirurgicale du 2 mai 2008.
 
Entre-temps, l'OCAI a aussi rejeté une demande de révision de la rente AI (décision du 8 décembre 2006 confirmée par jugement du Tribunal cantonal genevois des assurances sociales du 5 mai 2008 et par arrêt du Tribunal fédéral du 14 mai 2009 [cause 8C_983/2008]).
 
A.c. A la suite du jugement fédéral, la CNA a remboursé les frais de l'opération du 2 mai 2008 pratiquée par le docteur C.________ de l'Hôpital Y.________. Dans un premier temps, ce chirurgien a fait état d'une amélioration de la situation de l'assuré. Cependant, une tentative de reprise de travail à 50 % en février 2009 a échoué. Le 19 mars suivant, D.________ a demandé que sa rente LAA soit fixée sur la base d'un degré d'invalidité de 100 % compte tenu de son incapacité de travail totale depuis le 1er mai 2008. La CNA lui a répondu qu'elle examinerait cette question une fois son état stabilisé.
 
Le 13 octobre 2009, le docteur C.________ a procédé à une ablation du matériel d'ostéosynthèse. Le 3 février 2010, le docteur L.________, médecin d'arrondissement de la CNA, a procédé à un examen final de l'assuré, à l'issue duquel il a constaté une bonne consolidation osseuse et conclu à une exigibilité inchangée de 100 % dans une activité adaptée sédentaire; il a aussi réévalué l'atteinte à l'intégrité, qu'il a fixée à 15 %. Le docteur M.________, également de la CNA, a confirmé ce point de vue après un examen sur dossier (appréciation médicale du 14 juin 2010). En octobre 2010, au vu de la persistance des plaintes de l'assuré, le docteur C.________ a suggéré une nouvelle intervention que la CNA a été d'accord de prendre en charge mais à laquelle l'intéressé a finalement renoncé. Après avoir requis un nouvel avis du docteur M.________ (du 20 mai 2011), la CNA a, par décision du 1 er juillet 2011, porté le taux d'atteinte à l'intégrité à 15 % et versé une indemnité en conséquence, tout en refusant une augmentation de la rente LAA. Elle a cependant annoncé qu'elle assumerait le suivi médical de l'atteinte au pied par des spécialistes. L'assuré a fait opposition, faisant valoir que les opérations subies avaient empiré son état et qu'il lui était impossible de reprendre une activité aux mêmes conditions que celles fixées antérieurement en raison de ses douleurs. Il s'est référé aux avis des docteurs C.________, O.________ et J.________. Dans une nouvelle décision du 18 août 2011, la CNA a écarté l'opposition.
 
De son côté, l'OCAI a mandaté le docteur S.________ pour une expertise médicale (rapport du 10 novembre 2011). Celui-ci a posé les diagnostics de podalgies droites chroniques et de cervicalgies chroniques actuellement sans radiculalgies (hernies discales étagées de C3 à C7 et troubles dégénératifs sous la forme d'une ostéophytose antérieure et de discopathies cervicales étagées). Il a conclu à une capacité de travail résiduelle maximale de 50 % dans une activité adaptée (diminution de rendement y comprise) à partir de mars 2010. Sur cette base, l'OCAI a retenu que D.________ présentait désormais un degré d'invalidité de 72 % et lui a alloué une rente entière dès le 1er juin 2010 (décision du 5 avril 2012).
 
B. Après avoir invité le docteur C.________ à répondre à un questionnaire (cf. rapport du 13 juin 2012), la Chambre des assurances sociales de la Cour de Justice du canton de Genève a rejeté le recours formé par l'assuré contre la décision sur opposition de la CNA du 18 août 2011 (jugement du 3 septembre 2012).
 
C. D.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement cantonal, dont il requiert l'annulation. Sous suite de frais et dépens, il conclut à ce que la CNA soit condamnée à lui verser une rente LAA fondée sur un degré d'invalidité de 72 % à partir du 1er juin 2010.
 
La CNA conclut au rejet du recours. L'Office fédéral de la santé publique a renoncé à présenter une détermination.
 
 
Considérant en droit:
 
1. Le litige porte sur le point de savoir si l'intimée était fondée, par sa décision sur opposition du 18 août 2011, à refuser de réviser le taux de la rente d'invalidité allouée au recourant. Sur ce point, le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'état de fait constaté par la juridiction inférieure (art. 97 al. 2 LTF).
 
2. La rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA) peut être révisée à la suite d'une modification notable du taux d'invalidité (art. 17 al. 1 LPGA). Cette modification peut concerner aussi bien l'état de santé que les conséquences économiques d'un état de santé demeuré en soi in-changé (ATF 130 V 343 consid. 3.5 p. 349 s.). Pour être prise en considération, une péjoration de l'état de santé doit être en relation de causalité avec l'événement assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 66/94 du 4 novembre 1994 consid. 3b).
 
3. La juridiction cantonale a considéré que les avis médicaux figurant au dossier (des docteurs C.________, O.________, J.________, médecin traitant, S.________, expert AI, ainsi que L.________ et M.________, de la CNA) ne permettaient pas clairement d'établir si l'assuré avait ou non retiré un bénéfice des interventions chirurgicales réalisées en mai 2008 et octobre 2009, mais que l'on pouvait en tout cas en déduire que la situation en relation avec le pied droit ne s'était pas aggravée de manière significative depuis le 14 novembre 2007, date de la dernière décision de la CNA. Il ressortait en particulier du rapport d'expertise du docteur S.________ que l'aggravation de l'état de santé de l'assuré était liée à l'apparition de cervicalgies plus importantes depuis le mois de mars 2010 et que c'étaient ces troubles-là, d'origine dégénérative, qui avaient conduit cet expert à retenir une capacité de travail résiduelle diminuée de 50 % (par rapport à 100 % antérieurement). Or cette aggravation de l'état de santé ne se trouvait pas en lien de causalité avec l'accident assuré. Il n'y avait donc pas de matière à une révision de la rente LAA.
 
4. Le recourant conteste ce point de vue. A ses yeux, les premiers juges ont fait une lecture erronée du rapport d'expertise du docteur S.________. Dans son rapport, l'expert avait mis en avant la progression des deux atteintes concernées (nuque et membre inférieur droit) pour conclure à la diminution du taux d'activité exigible. En outre, au plan orthopédique, l'évolution post-opératoire s'était révélée défavorable avec des déficiences objectives indéniables (démarche en supinatus antalgique; appui du 1er rayon déficient; troubles trophiques au pied et à la cheville; boiterie). Le docteur R.________, du Service médical régional de l'assurance-invalidité (SMR) avait d'ailleurs reconnu que son état entraînait une incapacité de travail de 100 % dans quelque activité que ce soit depuis le 13 octobre 2009 (avis médical du 9 novembre 2010). Le docteur C.________ en avait fait de même dans son rapport du 14 octobre 2010 (voir également l'avis de la doctoresse O.________ du 8 juillet 2011).
 
5. Les reproches que le recourant adresse au jugement entrepris sont mal fondés.
 
Du fait qu'il a été mandaté par l'OCAI et non pas par l'intimée, le docteur S.________ avait pour mission d'évaluer l'état de santé de l'assuré dans sa globalité. Dans ses réponses aux questions posées, il a néanmoins émis des considérations dont on est fondé à déduire que la problématique cervicale présentée par l'assuré joue un rôle prépondérant par rapport aux séquelles du membre inférieur droit dans la diminution de la capacité de travail résiduelle constatée. Tout d'abord, l'expert a décrit, en relation avec le pied et la cheville droits, des limitations fonctionnelles similaires à avant (pas de port de charge, ni de marche en terrain irrégulier, impossibilité de demeurer debout; voir pour comparaison l'arrêt fédéral du 14 mai 2009 [8C_880/2008], consid. 5), alors que se sont ajoutées à celles-ci, en raison des atteintes à la nuque, notamment une limitation à rester assis ou debout en position statique et la nécessité d'alterner les positions toutes les 30 minutes (voir la page 12 du rapport). Ensuite, le docteur S.________ a situé l'aggravation de l'état de santé de l'assuré en mars 2010, date à laquelle une nouvelle IRM cervicale avait été pratiquée à cause d'une augmentation des plaintes au niveau de la nuque. Enfin, il a souligné que "[...] les orthopédistes qui ont suivi l'assuré en 2009 et 2010 se sont principalement basés sur l'atteinte à la santé du pied et de la cheville droits et n'ont pas ou peu tenu compte de l'atteinte à la santé cervicale de l'assuré, ce qui explique cette estimation à 50 % du taux d'incapacité de travail dans une activité adaptée". Ces propos vont clairement dans le sens compris par les premiers juges, de sorte que le moyen tiré d'une mauvaise interprétation de l'expertise doit être écarté.
 
Le recourant ne saurait rien non plus tirer en sa faveur des autres rapports au dossier même s'il en ressort que les opérations effectuées n'ont pas apporté l'amélioration attendue au plan fonctionnel (en particulier une meilleure performance à la marche) et ont justifié une augmentation de son taux d'atteinte à l'intégrité. En avril 2011, le docteur C.________ a constaté qu'il n'y avait pas de surcharge cutanée du bord externe du pied droit malgré la démarche en supinatus (ce qui lui apparaissait "assez paradoxal"), ni d'abaissement du 1er rayon contrairement à ce que semblait le penser l'assuré, et confirmé une incapacité de travail totale dans l'ancienne profession. Interrogé par le juge délégué cantonal sur le point de savoir si l'exigibilité fixée antérieurement était toujours valable, il a clairement répondu par l'affirmative ("Oui absolument, en lien avec l'affection du pied et la cheville droits."). On notera que dans le rapport du 14 octobre 2010 auquel se réfère le recourant, ce chirurgien avait pris en considération les autres plaintes exprimés par l'assuré (gonalgies, dorsalgies, cervicales), de sorte qu'on ne saurait y voir un revirement d'opinion incompréhensible de sa part comme le soutient le recourant. Quant à l'avis médical du docteur R.________, du SMR, il se rapporte à la situation de l'assuré à un moment où son état n'était pas encore stabilisé. Il n'y a finalement que la doctoresse O.________ qui a évoqué une diminution de rendement probable dans une activité adaptée assise à plein temps en raison des douleurs (rapport du 8 juillet 2011). Dans la mesure toutefois où elle a fait état de limitations fonctionnelles similaires à celles prévalant avant les opérations, et réservé son avis, en indiquant que le docteur C.________ ne s'était pas encore explicitement prononcé sur la capacité de travail résiduelle et en suggérant une expertise, cette déclaration ne saurait prendre le pas sur les avis ultérieurs de ce chirurgien et de l'expert S.________, lesquels ne remettent pas en cause les conclusions des médecins de la CNA.
 
Il s'ensuit que les conditions d'une révision de la rente LAA ne sont pas données et que le recours doit être rejeté.
 
6. Vu l'issue du litige, le recourant doit supporter les frais judiciaires et n'a pas droit à des dépens (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 LTF).
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1. Le recours est rejeté.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 750 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3. Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique.
 
Lucerne, le 15 octobre 2013
 
Au nom de la Ire Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente: Leuzinger
 
La Greffière: von Zwehl
 
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