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Informationen zum Dokument  BGer 5A_40/2013  Materielle Begründung
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BGer 5A_40/2013 vom 29.10.2013
 
{T 0/2}
 
5A_40/2013
 
 
Arrêt du 29 octobre 2013
 
 
IIe Cour de droit civil
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges fédéraux von Werdt, Président,
 
Hohl et Marazzi.
 
Greffière: Mme Jordan.
 
 
Participants à la procédure
 
Mme B. X.________, représentée par Me Alexandre Davidoff et Me Julien Fivaz,
 
recourante,
 
contre
 
G.________,
 
représenté par Me Dominique Sierro, avocat,
 
intimé.
 
Objet
 
mainlevée provisoire de l'opposition,
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton du Valais, Juge de la Chambre civile, du 23 novembre 2012.
 
 
Faits:
 
 
A.
 
A.a. M. A.X.________, né en 1923 à Grosni (Russie), est décédé le 14 novembre 2001 à Genève, sans laisser de dispositions testamentaires. Ses héritiers sont sa femme, Mme B.X.________, et ses trois enfants majeurs, C.X.________, D.X.________ et E.X.________, ce dernier étant né d'une relation hors mariage du défunt.
 
A.b. De leur vivant, M. A.Y.________ et M. A.X.________ ont travaillé ensemble sur de nombreux projets, notamment pétroliers.
 
A.c. Depuis 2003, de nombreuses procédures opposent les héritiers X.________, soit en Tunisie, soit à Genève, notamment sur les questions du for et du droit applicable à la liquidation de la succession.
 
B. Sur requête de Me G.________, représentant la succession de M. A.Y.________, l'Office des poursuites du district de Sierre a notifié à Mme B.X.________ un commandement de payer (poursuite n o xxxxx) la somme, convertie en francs suisses, de 2'243'703 fr. 17, avec intérêts à 5% l'an dès le 24 novembre 2004. Etait invoqué comme titre de la créance ou cause de l'obligation: " Contre-valeur de USD 2'500'000 au taux de 0'8974 USD/CHF. Reconnaissance de dette du 24 septembre 2004 ".
 
C. Mme B.X.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral, concluant au rejet de la requête de mainlevée provisoire.
 
 
Considérant en droit:
 
 
1.
 
1.1. Le recours a été déposé en temps utile (art. 45 al. 1, 46 al. 1 let. c et 100 al. 1 LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF; ATF 134 III 115 consid. 1.1 p. 117) rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF, en relation avec l'art. 82 LP) par le tribunal supérieur d'un canton ayant statué sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF); la valeur litigieuse est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF); la poursuivante, qui a succombé devant la juridiction précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).
 
1.2. La décision attaquée ne porte pas sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF, en sorte que la cognition du Tribunal fédéral n'est pas restreinte à la violation des droits constitutionnels (ATF 133 III 399 consid. 1.5 p. 400; 135 III 670 consid. 1.3.1 p. 673).
 
2. Selon la recourante, le juge cantonal ne pouvait se passer d'examiner si elle avait ou non les pouvoirs d'engager valablement l'hoirie X.________, motif pris que cette question n'aurait été pertinente que si la poursuite avait été dirigée à l'encontre de la communauté. Elle soutient que le document manuscrit du 24 septembre 2004 ne saurait constituer une reconnaissance de dette au sens de l'art. 82 al. 1 LP pouvant valablement l'engager à titre d'héritière tenue solidairement et personnellement des dettes du de cujus, dès lors qu'il n'a pas été signé par l'ensemble des membres de l'hoirie, lesquels ne l'auraient par ailleurs pas autorisée à reconnaître une telle dette.
 
2.1. Partant du principe selon lequel la recourante était actionnée en tant qu'héritière tenue personnellement et solidairement des dettes du de cujus, l'autorité cantonale a jugé qu'il n'était pas nécessaire d'examiner si la poursuivie avait ou non les pouvoirs d'engager valablement l'hoirie, cette question n'ayant de pertinence que si la poursuite avait été dirigée à l'encontre de la communauté héréditaire.
 
2.2. Selon l'art. 82 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (al. 1); le juge la prononce si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (al. 2).
 
2.3. En l'espèce, le document litigieux établi le 24 septembre 2004 consiste en la reconnaissance par " Mme B.X.________ et famille " d'une dette de deux millions et demi de dollars USD. Il a été rédigé à la première personne du pluriel (" nous ") par la prénommée qui l'a signé en son nom et au nom de sa famille (" Mme B.X.________ et famille "), afin de régler " toutes obligations " entre les parties, " ce qui n'a[vait] pu être fait plus tôt en raison du décès de [leur] bien-aimé mari et père". Il n'est pas contesté qu'il s'agit là de la reconnaissance post mortem d'une dette du de cujus qui était en relation d'affaires avec le créancier désigné.
 
2.4. Certes, il n'appartient pas au juge de la mainlevée d'examiner la réalité de la dette contractée par le de cujus, dès lors qu'il doit se borner, à ce stade, à examiner l'existence et la force probante du titre produit par le créancier. Il lui incombe en revanche de vérifier l'existence matérielle de la reconnaissance de dette ( GILLIÉRON, op. cit., n° 73 ad art. 82 LP). Il doit ainsi contrôler si elle émane de tous les membres de l'hoirie. Ce n'est en effet que si la reconnaissance de dette est valablement souscrite par l'ensemble des héritiers qu'elle justifie la mainlevée contre chacun des membres de la communauté héréditaire poursuivi en sa qualité d'héritier tenu personnellement (art. 560 al. 2 CC) et solidairement (art. 603 al. 1 CC; implicitement: arrêt 5P.107/1998 du 3 juin 1988; sur la portée de cette responsabilité: STEINAUER, op. cit., n
 
2.5. En l'espèce, il résulte des termes mêmes du document produit (cf. en particulier: " Mme B.X.________ et famille ", " notre bien-aimé mari et père ") que les héritiers formant l'hoirie X.________ sont le débiteur désigné. Si la recourante y reconnaît devoir un certain montant, elle l'a fait, non à titre personnel, mais, en sa qualité d'héritière, au nom de l'ensemble des héritiers. Or, comme il a été dit (supra, consid. 2.3), la responsabilité solidaire et personnelle de chacun des héritiers, dont fait partie la recourante, n'est engagée que si la reconnaissance de dette a été valablement souscrite par l'ensemble des héritiers ou par leur représentant autorisé. Dans ces conditions, l'autorité cantonale ne pouvait, sans violer le droit fédéral, se passer d'analyser si la recourante avait, en l'espèce, les pouvoirs de passer un tel engagement au nom des héritiers.
 
3. Cela étant, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée au juge cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. L'intimé, qui, en sa qualité d'exécuteur testamentaire de la succession Y.________, a la capacité de faire valoir en justice en son propre nom le droit d'un tiers (Prozessstandschaft; ATF 116 II 131), doit être considéré comme celui qui succombe. Les frais et dépens de la procédure doivent ainsi être mis à sa charge (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF), mais ils seront payés par la succession pour laquelle il agit (cf. arrêts 5A_261/2008 du 10 juin 2008 consid. 7 et C.245/1984 du 3 octobre 1984 consid. 5).
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
 
1. Le recours est admis, l'arrêt attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
 
2. Les frais judiciaires, arrêtés à 12'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé.
 
3. Une indemnité de 12'000 fr., à payer à la recourante à titre de dépens, est mise à la charge de l'intimé.
 
4. Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Juge de la Chambre civile.
 
Lausanne, le 29 octobre 2013
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président: von Werdt
 
La Greffière: Jordan
 
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