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BGer 1C_297/2021 vom 04.01.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
[img]
 
 
1C_297/2021
 
 
Arrêt du 4 janvier 2022
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges fédéraux Kneubühler, Président, Chaix, Jametti, Haag et Müller.
 
Greffière : Mme Tornay Schaller.
 
 
Participants à la procédure
 
1. Comité d'initiative "Bouclier LAMaL: Stopper enfin l'escalade des primes maladie ! ",
 
2. Céline Amaudruz,
 
recourants,
 
contre
 
Conseil d'Etat d u canton de Genève,
 
rue de l'Hôtel-de-Ville 2, 1204 Genève.
 
Objet
 
Initiative populaire cantonale IN 175 "Bouclier LAMal : Stopper enfin l'escalade des primes maladie !",
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton
 
de Genève, Chambre constitutionnelle, du 15 avril 2021 (ACST/12/2021 - A/3058/2020-INIT).
 
 
Faits :
 
A.
Par arrêté du 26 février 2020, publié dans la Feuille d'avis officielle du 28 février 2020, le Conseil d'État du canton de Genève (ci-après: le Conseil d'État) a constaté l'aboutissement de l'initiative populaire cantonale intitulée "Bouclier LAMal: stopper enfin l'escalade des primes maladie!" (ci-après: l'initiative ou l'IN 175). Cette initiative législative porte sur la modification de l'art. 32 let. a de la loi cantonale sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP; RSG D 3 08) dont la teneur est la suivante:
Art. 32, Déduction de santé
Sont déduits du revenu:
a) Un montant forfaitaire correspondant au double de la prime moyenne cantonale de l'assurance-maladie obligatoire des soins pour le contribuable et les personnes à sa charge durant l'année fiscale considérée.
Selon l'exposé des motifs, cette initiative instaure un mécanisme destiné à forcer l'État à agir contre la cherté des primes, en aménageant une déduction fiscale forfaitaire pour les frais de santé fixée au double de la prime moyenne cantonale de l'assurance obligatoire des soins; l'État devrait ainsi rétrocéder, par le biais des impôts, une partie du pouvoir d'achat dont les Genevois sont privés du fait de l'augmentation des primes d'assurance-maladie; si celles-ci augmentaient, le montant de la déduction fiscale en ferait de même et si elles diminuaient, la déduction fiscale suivrait le même sort; l'État ne serait perdant que s'il n'entreprenait rien pour s'opposer efficacement aux hausses de ces primes.
B.
Invitée à se déterminer sur la conformité de l'initiative à la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID; RS 642.14), l'Administration fédérale des contributions a relevé plusieurs problèmes: même si l'art. 9 al. 2 let. g LHID ne contenait aucune limite de déduction, un montant forfaitaire correspondant au double de la prime moyenne paraissait en principe trop élevé et sans proportion raisonnable avec les dépenses effectives consenties par les contribuables, de sorte que l'IN 175 n'était pas conforme à la LHID; en tant qu'elle était accordée à tous les contribuables, indépendamment des frais effectifs, il pouvait toutefois s'agir d'une mesure tarifaire relevant de l'autonomie des cantons, sur laquelle il lui était difficile de se prononcer par rapport à sa conformité au droit supérieur; par ailleurs, la déduction pour l'assurance-accidents facultative n'était, selon le texte de l'initiative, pas comprise dans la déduction forfaitaire, si bien que les dispositions cantonales ne correspondaient plus à l'art. 9 al. 2 let. g LHID et rendaient le droit fédéral harmonisé directement applicable.
Le comité d'initiative s'est déterminé sur les observations de l'Administration fédérale des contributions, les 17 et 24 juin 2020.
Par arrêté du 26 août 2020, le Conseil d'État a déclaré l'IN 175 nulle, pour non-conformité au droit supérieur.
Par acte du 28 septembre 2020, Céline Amaudruz et le comité d'initiative ont interjeté recours auprès de la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après : la Cour de justice) contre l'arrêté du Conseil d'État déclarant l'IN 175 nulle. Par arrêt du 15 avril 2021, la Cour de justice a rejeté le recours.
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Céline Amaudruz et le comité d'initiative demandent principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 15 avril 2021 et "de le réformer en tant que les conditions de validité de l'IN 175 sont réalisées au sens des considérants". Ils concluent subsidiairement au renvoi de la cause à la cour cantonale afin de respecter leur droit d'être entendu.
Invitée à se déterminer, la Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Conseil d'État persiste dans les motifs et les conclusions de son arrêté du 26 août 2020.
 
1.
Selon l'art. 82 let. c LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires. Le recours est formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et 88 al. 2 LTF).
La qualité pour recourir dans le domaine des droits politiques appartient à toute personne disposant du droit de vote dans l'affaire en cause (art. 89 al. 3 LTF), même si elle n'a aucun intérêt juridique personnel à l'annulation de l'acte attaqué (ATF 138 I 171 consid. 1.3). La qualité pour agir de Céline Amaudruz, citoyenne genevoise et membre du comité d'initiative, est ainsi indiscutable. Elle doit aussi être reconnue au comité d'initiative (ATF 139 I 195 consid. 1.4; 134 I 172 consid. 1.3).
Il y a donc lieu d'entrer en matière.
2.
Les trois conditions de validité d'une initiative que prévoit l'art. 60 de la Constitution genevoise du 14 octobre 2012 (Cst-GE; RSG A 2 00) sont l'unité du genre, l'unité de la matière et la conformité au droit supérieur; s'y ajoutent, déduites de la liberté de vote garantie par les art. 34 al. 2 Cst. et 44 Cst-GE, l'exigence de clarté du texte de l'initiative et celle d'exécutabilité de l'initiative (ATF 133 I 110 consid. 8; arrêt 1C_146/2020 du 7 août 2020 consid. 3.1).
D'une manière générale, une initiative populaire cantonale, quelle que soit sa formulation, doit respecter les conditions matérielles qui lui sont imposées. Elle ne doit, en particulier, rien contenir de contraire au droit supérieur, qu'il soit cantonal, intercantonal, fédéral ou international. En vertu du principe de la force dérogatoire du droit fédéral ancré à l'art. 49 al. 1 Cst., les cantons ne sont pas autorisés à légiférer dans les matières exhaustivement réglementées par le droit fédéral. Dans les autres domaines, ils peuvent édicter des règles de droit, pour autant qu'elles ne violent ni le sens ni l'esprit du droit fédéral et qu'elles n'en compromettent pas la réalisation (ATF 143 I 129 consid. 2.1 et les arrêts cités).
Pour examiner la validité matérielle d'une initiative, la première règle d'interprétation est de prendre pour point de départ le texte de l'initiative, qu'il faut interpréter selon sa lettre et non pas selon la volonté des initiants. Il peut être tenu compte d'une éventuelle motivation de l'initiative et des prises de position de ses auteurs. Bien que l'interprétation repose en principe sur le libellé, une référence à la motivation de l'initiative n'est pas exclue si elle est indispensable à sa compréhension. La volonté des auteurs doit être prise en compte, à tout le moins, dans la mesure où elle délimite le cadre de l'interprétation de leur texte et du sens que les signataires ont pu raisonnablement lui attribuer (ATF 143 I 129 consid. 2.2 et les arrêts cités).
Lorsque, à l'aide des méthodes reconnues, le texte d'une initiative se prête à une interprétation la faisant apparaître comme conforme au droit supérieur, elle doit être déclarée valable et être soumise au peuple. L'interprétation conforme doit ainsi permettre d'éviter autant que possible les déclarations d'invalidité. Tel est le sens de l'adage "in dubio pro populo", selon lequel un texte n'ayant pas un sens univoque doit être interprété de manière à favoriser l'expression du vote populaire. Cela découle également du principe de la proportionnalité (art. 34 et 36 al. 2 et 3 Cst.), selon lequel une intervention étatique doit porter l'atteinte la plus restreinte possible aux droits des citoyens. Les décisions d'invalidation doivent autant que possible être limitées, en retenant la solution la plus favorable aux initiants.
Cela étant, la marge d'appréciation de l'autorité de contrôle est évidemment plus grande lorsqu'elle examine une initiative non formulée que lorsqu'elle se trouve en présence d'une initiative rédigée de toutes pièces, sous la forme d'un acte normatif. Cependant lorsque, de par son but même ou les moyens mis en oeuvre, le projet contenu dans une telle initiative ne pourrait être reconnu conforme au droit supérieur que moyennant l'adjonction de réserves ou de conditions qui en modifient profondément la nature, une telle interprétation entre en conflit avec le respect, fondamental, de la volonté des signataires de l'initiative et du peuple appelé à s'exprimer; la volonté de ce dernier ne doit pas être faussée par la présentation d'un projet qui, comme tel, ne serait pas constitutionnellement réalisable (ATF 143 I 129 consid. 2.2 et les arrêts cités).
3.
Les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir confirmé la non-conformité au droit supérieur de l'IN 175. L'initiative litigieuse a une double conséquence fiscale. D'une part, elle modifie le mode de déduction des primes d'assurance-maladie et tend à déduire un montant forfaitaire correspondant au double de la prime moyenne cantonale de l'assurance-maladie obligatoire des soins pour le contribuable et les personnes à sa charge durant l'année fiscale considérée. D'autre part, l'initiative supprime les déductions relatives aux primes d'assurance-accidents.
3.1. A teneur de l'art. 60 al. 4 Cst./GE, l'initiative dont une partie n'est pas conforme au droit est déclarée partiellement nulle si la ou les parties qui subsistent sont en elles-mêmes valides. À défaut, l'initiative est déclarée nulle.
3.2. Il convient d'abord de déterminer si la possibilité de déduire un montant forfaitaire correspondant au double de la prime moyenne cantonale de l'assurance-obligatoire des soins pour le contribuable et les personnes à sa charge est compatible avec l'art. 9 al. 2 let. g LHID.
3.2.1. La Confédération fixe les principes de l'harmonisation des impôts directs de la Confédération, des cantons et des communes; elle prend en considération les efforts des cantons en matière d'harmonisation (art. 129 al. 1 Cst.). L'harmonisation s'étend à l'assujettissement, à l'objet et à la période de calcul de l'impôt, à la procédure et au droit pénal en matière fiscale. Les barèmes, les taux et les montants exonérés de l'impôt, notamment, ne sont pas soumis à l'harmonisation fiscale (art. 129 al. 2 Cst.).
Sur cette base constitutionnelle, le législateur a adopté la LHID, qui désigne les impôts directs que les cantons doivent prélever et fixe les principes selon lesquels la législation cantonale les établit (art. 1 al. 1 LHID).
L'art. 9 LHID traite des déductions pouvant être défalquées du revenu imposable et les énumère. Il ressort de la lettre de cette disposition que les déductions autorisées sur le revenu y sont réglées exhaustivement. Ainsi les dépenses d'acquisition du revenu sont définies à l'art. 9 al. 1 LHID. L'art. 9 al. 2 LHID donne une liste exhaustive des déductions sociopolitiques autorisées (déductions générales ou anorganiques). En font partie les versements, cotisations et primes d'assurance-vie, d'assurance-maladie et d'assurance-accidents ainsi que les intérêts des capitaux d'épargne du contribuable et des personnes à l'entretien desquelles il pourvoit, jusqu'à concurrence d'un montant déterminé par le droit cantonal, qui peut revêtir la forme d'un forfait (art. 9 al. 2 let. g). Les cantons ont l'obligation de reprendre ces déductions au plan cantonal, une compétence cantonale n'étant réservée que dans certains cas et son étendue expressément limitée au choix des montants des déductions. Il résulte en particulier du texte de la LHID, qui prévoit la déduction "jusqu'à concurrence d'un montant déterminé par le droit cantonal", que les cantons sont tenus de limiter le montant des déductions générales prévues à l'art. 9 al. 2 let. g LHID, de manière à respecter le sens et l'esprit de cette disposition, même si la LHID ne donne aucune précision sur le montant que les cantons doivent fixer dans leur législation (arrêt 2C_162/2010 du 21 juillet 2010 consid. 6.1).
3.2.2. En droit genevois, la LIPP régit la perception de l'impôt sur le revenu et l'impôt sur la fortune des personnes physiques (art. 1 LIPP). L'impôt sur le revenu a pour objet tous les revenus, prestations et avantages du contribuable, qu'ils soient uniques ou périodiques, en espèces ou en nature et quelle qu'en soit l'origine, avant déductions (art. 17 LIPP). Le revenu net se calcule en défalquant du total des revenus imposables les déductions générales et les frais mentionnés aux art. 29 à 37 (art. 28 LIPP). En font partie les déductions de santé visées à l'art. 32 LIPP, en particulier les primes d'assurances-maladie et celles d'assurance-accidents du contribuable et des personnes à sa charge, à concurrence d'un montant équivalant, pour l'année fiscale considérée, au double de la prime moyenne cantonale relative à l'assurance obligatoire des soins déterminée par l'office fédéral de la santé publique par classe d'âge des assurés (let. a).
3.2.3. L'IN 175, entièrement rédigée, vise à remplacer l'actuel art. 32 let. a LIPP par une nouvelle disposition prévoyant une déduction forfaitaire correspondant au double de la prime moyenne cantonale de l'assurance-maladie obligatoire des soins pour le contribuable et les personnes à sa charge durant l'année fiscale en cause. Elle implique ainsi de modifier le mode de déduction des primes d'assurance-maladie, en faisant passer celles-ci d'un montant maximal admissible à un montant forfaitaire. L'art. 9 al. 2 let. g LHID permet aux cantons de prévoir que le montant de la déduction pour les primes visées par cette disposition puisse revêtir la forme d'un forfait; seul est contesté le plafond ainsi fixé.
Si l'art. 9 al. 2 let. g LHID ne laisse aucune marge de manoeuvre en faveur des cantons autre que la possibilité de fixer le montant des déductions, ils n'en sont pas moins tenus de plafonner celles-ci, comme le rappelle le texte de cette disposition ainsi que la jurisprudence. Les cantons ne sont pas non plus totalement libres dans la limitation dudit montant.
Le Tribunal fédéral a en effet déjà jugé que les primes d'assurances de rente viagère visées à l'art. 9 al. 2 let. g LHID ne pouvaient faire l'objet que d'une déduction très partielle, et que des plafonds si élevés qu'ils autorisaient de fait les contribuables à déduire le plus souvent l'intégralité de primes périodiques substantielles ainsi qu'une partie appréciable, voire la totalité, des primes uniques, n'était pas admissible sous l'angle de la LHID (arrêt 2P.170/2003 du 13 février 2004consid. 6 et 7.2). Quoi qu'en disent les recourants, cette jurisprudence peut aussi s'appliquer à la déduction des primes d'assurance-maladie, visées à l'art. 9 al. 2 let. g LHID aux côtés des versements, cotisations et primes d'assurance-vie, comme les primes d'assurances de rente viagère, ainsi que les intérêts des capitaux d'épargne.
A cela s'ajoute que le Tribunal fédéral a considéré que l'obligation de souscrire une assurance-maladie ne conduisait pas à une déduction complète des primes relatives à l'assurance obligatoire, contrairement à la pleine déduction des primes des deux piliers obligatoires de la prévoyance vieillesse (arrêt 2C_162/2010 du 21 juillet 2010 consid. 6.4).
De plus, la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD; RS 642.11) prévoit une déductibilité très partielle des primes d'assurance-maladie et d'assurance-accidents à concurrence d'un montant global de 3'500 francs pour les époux vivant en ménage commun et de 1'700 francs pour les autres contribuables. Le principe de cohérence veut que, dans un souci d'harmonisation verticale, le droit cantonal soit interprété de la même manière que le droit fédéral, étant précisé qu'il n'existe aucune différence significative entre l'art. 33 al. 1 let. g LIFD et l'art. 9 al. 2 let. g LHID (arrêt 2C_429/2008 du 10 décembre 2008 consid. 7).
Une telle interprétation restrictive de la déductibilité des primes d'assurance-maladie s'inscrit dans le cadre de la LHID. Il s'agit en effet de déductions générales ou anorganiques, non liées à l'acquisition du revenu mais à la détermination de la capacité contributive subjective. Les déductions anorganiques sont accordées en général pour des motifs extra-fiscaux, jusqu'à un montant déterminé, les dépenses pour lesquelles elles sont admises constituant une utilisation du revenu (arrêts 2C_256/2018 du 14 septembre 2020 consid. 8.3, in RDAF 2021 II 293, 2C_162/2010 du 21 juillet 2010 consid. 6.3; BLUMENSTEIN/LOCHER, System des Steuerrechts, Zurich 2016, 7 e éd., p. 289, 318). Les déductions anorganiques ont pour but d'adapter - de manière schématique - la charge d'impôt à la situation personnelle et économique particulière de chaque catégorie de contribuables, conformément au principe de l'imposition selon la capacité contributive de l'art. 127 al. 2 Cst. (arrêt 2C_256/2018 du 14 septembre 2020 consid. 8.3, in RDAF 2021 II 293 et l'arrêt cité). Ces déductions doivent être interprétées restrictivement (ATF 147 II 248 consid. 3.3.1 et les références citées). Par conséquent, elles ne sauraient outrepasser les montants effectivement payés par le contribuable pour ce faire, sous peine de contredire le sens et l'esprit de la LHID et de permettre dans les faits des déductions bien plus importantes que celles exhaustivement énumérées par cette loi (art. 9 al. 4 LHID).
En définitive, la modification projetée de l'art. 32 let. a LIPP vise à déduire un montant forfaitaire correspondant au double de la prime moyenne cantonale de l'assurance-maladie obligatoire des soins, sans égard aux primes effectivement payées par les contribuables pour l'année en cause, comme les recourants l'ont exposé, chiffres à l'appui, dans leur recours. Un tel mécanisme, qui vise en réalité à diminuer le revenu imposable d'un montant forfaitaire largement supérieur aux frais effectifs des primes d'assurance-maladie et cherche, ce faisant, à exercer une pression sur les autorités politiques afin qu'elles entreprennent les démarches nécessaires en vue de la diminution desdites primes, n'est pas conforme à la LHID. C'est dès lors sans violer le droit fédéral que la Cour de justice a considéré que l'art. 32 let. a de l'IN 175 était contraire au droit supérieur pour ce motif.
3.2.4. Reste à examiner si la modification projetée de la LIPP pourrait entrer dans le cadre des déductions sociales réservées par l'art. 9 al. 4 LHID. La teneur de cette disposition laisse une grande marge de manoeuvre au législateur cantonal dans la mise en place des déductions sociales, qui relèvent du droit cantonal autonome. Constituent des déductions sociales celles qui ne tiennent pas compte des dépenses effectives mais du statut social du contribuable et de l'influence que ce statut produit sur la capacité économique individuelle (ATF 131 I 377 consid. 4.2). Il s'agit, en d'autres termes, d'équilibrer la charge fiscale entre divers groupes de contribuables, selon leur capacité économique. Ce sont autant d'ajustements légaux de la charge fiscale qui montrent que le législateur a distingué les catégories de contribuables en fonction de leur capacité économique de façon à établir entre elles - et sous cet angle restreint - une certaine égalité de traitement (ATF 141 II 338).
Or en l'occurrence, la déduction projetée ne vise pas une catégorie de contribuables en particulier, que ce soit sur le plan de leur situation personnelle ou économique. La déduction prévue par l'IN 175 ne revêt ainsi pas les caractéristiques d'une déduction sociale au sens de l'art. 9 al. 4 LHID.
3.2.5. Il résulte de ce qui précède que la Cour de justice n'a pas violé le droit fédéral en considérant que l'art. 32 let. a de l'IN 175 était contraire à la LHID. Il n'est par conséquent pas nécessaire d'examiner si le fait que l'IN 175 ne contient plus de déduction pour les primes d'assurance-accidents alors même qu'elles sont visées à l'art. 9 al. 2 let. g LHID est conforme au droit supérieur.
Par ailleurs, la non-conformité au droit supérieur touche l'IN 175 dans son ensemble, de sorte que la question d'une invalidation partielle ne se pose pas.
4.
Les recourants soutiennent enfin que le Conseil d'État ne pouvait pas laisser la question de la clarté indécise et que la Cour de justice "aurait dû, tout au moins, renvoyer la cause pour respecter le droit d'être entendu des recourants eu égard aux garanties de procédure". Ce grief manque de pertinence et peut être rapidement écarté, dans la mesure où l'initiative en question n'a pas été invalidée en raison de la violation du principe de clarté, mais pour sa non-conformité au droit supérieur. La question de la conformité de l'IN 175 à l'exigence de clarté pouvait ainsi demeurer indécise.
5.
Il s'ensuit que le recours est rejeté, aux frais des recourants, qui succombent (art. 65 et 66 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge des recourants.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, au Conseil d'Etat du canton de Genève et à la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 4 janvier 2022
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Kneubühler
 
La Greffière : Tornay Schaller