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BGer 4A_635/2021 vom 05.01.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
[img]
 
 
4A_635/2021
 
 
Arrêt du 5 janvier 2022
 
 
Ire Cour de droit civil
 
Composition
 
Mme la Juge fédérale
 
Kiss, juge présidant.
 
Greffier : M. O. Carruzzo.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
représenté par Me Romain Jordan,
 
recourant,
 
contre
 
B.________ SA,
 
représentée par Me Swan Monbaron,
 
intimée.
 
Objet
 
contrat de travail,
 
recours contre l'arrêt rendu le 6 novembre 2021 par la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève (C/6338/2020-4, CAPH/209/2021).
 
 
1.
Le 16 septembre 2020, B.________ SA, agissant par le truchement de l'avocat C.________, a assigné son employé A.________ devant le Tribunal des prud'hommes genevois en vue d'obtenir le paiement de 17'306 fr. 41, intérêts en sus. Elle reprochait au défendeur d'avoir indûment utilisé la carte de crédit de la société.
Le 17 décembre 2020, le défendeur a soulevé une exception d'incompétence. Il s'est en outre plaint de ce que le mandataire de la demanderesse se trouvait dans une situation de conflit d'intérêts, dès lors que celui-ci était l'associé de l'avocat D.________, lequel était administrateur de la demanderesse, avait signé le contrat de travail du défendeur et siégé aux côtés du défendeur au sein du conseil d'administration de la société. D.________ était en outre l'avocat et le conseiller de E.________, actionnaire de la demanderesse.
Le 13 avril 2021, le tribunal saisi a admis l'existence d'un conflit d'intérêts et invité la demanderesse à choisir un nouvel avocat.
Le 21 avril 2021, Swan Monbaron s'est constitué avocat pour la défense des intérêts de la demanderesse dans le cadre de la présente procédure.
Le 10 mai 2021, le défendeur a prié le tribunal d'interdire à D.________ de représenter la demanderesse en sa qualité d'administrateur et de constater que le nouveau mandataire de la société se trouvait aussi dans une situation de conflit d'intérêts, dès lors que ce dernier était l'avocat de E.________ dans une affaire opposant celui-ci au défendeur et que E.________ faisait par ailleurs partie des témoins dont le défendeur avait requis l'audition. Il a en outre sollicité la suspension de la procédure jusqu'à droit connu dans le cadre de l'affaire précitée.
2.
Après avoir entendu les parties à ce propos lors de l'audience tenue le 10 mai 2021, le Tribunal des prud'hommes genevois a jugé que D.________ pouvait valablement représenter la demanderesse en sa qualité de vice-président et ne se trouvait pas dans une situation de conflit d'intérêts (chiffre 1). Il a en outre décidé que Swan Monbaron pouvait agir au nom de la demanderesse, dès lors qu'il n'avait aucun lien avec le défendeur, le simple fait qu'il représente un tiers contre la partie défenderesse dans le cadre de son activité professionnelle ne suffisant pas à retenir l'existence d'un conflit d'intérêts (chiffre 2). Le tribunal saisi s'est en outre déclaré compétent pour connaître de la demande (chiffre 3) et a refusé de suspendre la procédure (chiffre 4).
Le défendeur ayant indiqué qu'il estimait cette décision erronée, le Tribunal des prud'hommes a rendu une seconde décision par laquelle il a rejeté la demande tendant à la suspension de la procédure en raison de l'existence alléguée d'un conflit d'intérêts visant D.________ et Swan Monbaron.
3.
Saisi d'un recours formé par le défendeur contre ces deux décisions, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève l'a déclaré irrecevable par arrêt du 6 novembre 2021.
Dans l'arrêt attaqué, l'autorité précédente souligne que les décisions attaquées ne sont susceptibles d'un recours immédiat que si elles peuvent causer au recourant un préjudice difficilement réparable au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC. En l'espèce, elle estime que le recourant n'a pas établi que le refus d'interdire à un organe de la société concernée de représenter celle-ci, que la constatation selon laquelle l'avocat de la partie demanderesse ne se trouve pas dans une situation de conflit d'intérêts et que le rejet de la requête tendant à la suspension de la procédure seraient susceptibles de lui causer un tel préjudice. Dans ces conditions, le recours est dès lors irrecevable.
4.
Le 20 décembre 2021, le défendeur (ci-après: le recourant) a formé un recours au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité. Il conclut à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision.
La demanderesse (ci-après: l'intimée) et la cour cantonale n'ont pas été invitées à répondre au recours.
 
Erwägung 5
 
5.1. L'arrêt attaqué ne met pas fin à la procédure entre les parties. Étant donné que l'autorité précédente a déclaré irrecevable le recours dirigé contre une décision incidente, il revêt lui aussi le caractère d'une décision incidente (ATF 142 III 653 consid. 1.1). Semblable décision, qui ne porte ni sur la compétence ni sur une demande de récusation (cf. art. 92 LTF), étant précisé que le recourant n'a apparemment formulé aucun grief en lien avec le chiffre 3 du dispositif de la décision par laquelle l'autorité de première instance s'est déclarée compétente pour connaître du litige, tombe sous le coup de l'art. 93 LTF. Elle peut faire l'objet d'un recours immédiat au Tribunal fédéral uniquement si elle peut causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF), l'hypothèse envisagée par l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'entrant pas en ligne de compte.
5.2. En vertu de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, le recours immédiat contre une décision incidente est possible si elle peut causer un préjudice irréparable. Un préjudice de ce genre n'est réalisé que lorsque la partie recourante subit un dommage qu'une décision favorable sur le fond ne fera pas disparaître complètement. Il faut en outre un dommage de nature juridique; un dommage économique ou de pur fait n'est pas considéré comme un préjudice irréparable. Il incombe au recourant de démontrer l'existence d'un tel préjudice lorsque celui-ci n'est pas d'emblée évident (ATF 144 III 475 consid. 1.2; 141 III 80 consid. 1.2; 138 III 46 consid. 1.2; 137 III 522 consid. 1.3).
Lorsque la décision incidente interdit à l'avocat mandaté par une partie de procéder en tant que représentant de celle-ci, elle cause un préjudice irréparable au mandant de l'avocat; il est en effet privé du droit de faire défendre ses intérêts par l'avocat de son choix. L'avocat évincé peut aussi former un recours immédiat (arrêt 4A_313/2020 du 1er octobre 2020 consid. 3 et les références citées).
Une telle règle générale ne saurait prévaloir dans l'hypothèse inverse, soit lorsque la décision incidente rejette l'exception tirée de l'incapacité de postuler et autorise l'avocat d'une partie à poursuivre la représentation. La Cour de céans considère bien plutôt qu'en principe, pour la partie adverse, les inconvénients résultant d'une pareille décision sont purement matériels et dépourvus de caractère juridique, de sorte qu'elle n'est pas susceptible de lui causer un préjudice irréparable (arrêts 4A_313/2020, précité, consid. 3; 4A_589/2018 du 29 mai 2019 consid. 4; 4A_436/2015 du 17 mai 2016 consid. 1.2.2).
5.3. Dans son mémoire de recours, l'intéressé fait valoir qu'il y a lieu de renoncer à l'exigence d'un préjudice irréparable lorsque le recours porte sur le refus de reconnaître l'existence même d'un droit de recourir sur le plan cantonal, équivalant à un déni de justice formel (arrêt 1B_234/2017 du 20 juin 2017 consid. 2). Ce faisant, il perd de vue que la cour cantonale n'a pas nié l'existence même d'un droit de recours. L'autorité précédente a seulement souligné que le recours supposait que l'intéressé démontre l'existence d'un préjudice difficilement réparable, ce qu'il n'avait pas fait à satisfaction de droit. Il n'y a ainsi pas de déni de justice, au sens de l'art. 29 al. 1 Cst., du seul fait que l'autorité cantonale a estimé que le recourant n'avait pas suffisamment démontré que les décisions attaquées étaient susceptibles de lui causer un préjudice difficilement réparable. Il n'y a dès lors pas lieu de renoncer à l'exigence d'un préjudice irréparable.
En l'espèce, l'arrêt attaqué impose au recourant de tolérer que la partie demanderesse puisse être représentée par l'un de ses organes et par l'avocat qu'elle a choisi pour assurer la défense de ses intérêts. Contrairement à ce que soutient le recourant, pareille décision n'est pas susceptible de lui causer un préjudice irréparable. Les explications avancées par l'intéressé aux fins de démontrer le contraire, outre qu'elles reposent en partie sur des faits ne ressortant pas de la décision attaquée, n'apparaissent pas convaincantes. Dans ces conditions, force est d'admettre que le recourant ne démontre pas en quoi la décision finale rendue dans la présente cause, dans l'hypothèse où celle-ci lui serait favorable, ne permettrait pas de faire disparaître entièrement un éventuel préjudice.
Les éléments qui précèdent conduisent au constat d'irrecevabilité manifeste du présent recours, qui peut être prononcé selon la procédure simplifiée de l'art. 108 al. 1 let. a LTF.
6.
Le recourant, qui succombe, prendra à sa charge les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF). Il n'aura en revanche pas à verser de dépens à l'intimée dès lors que celle-ci n'a pas été invitée à déposer une réponse.
 
Par ces motifs, la Juge présidant la Ire Cour de droit civil prononce :
 
1.
 
Le recours est irrecevable.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève.
 
Lausanne, le 5 janvier 2022
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Juge présidant: Kiss
 
Le Greffier : O. Carruzzo