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BGer 1C_258/2022 vom 12.05.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
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1C_258/2022
 
 
Arrêt du 12 mai 2022
 
 
Ire Cour de droit public
 
Composition
 
MM. et Mme les Juges fédéraux Kneubühler, Président,
 
Chaix et Jametti.
 
Greffier : M. Kurz.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________, représenté par Me Noémie Weill, avocate,
 
recourant,
 
contre
 
Office fédéral de la justice, Unité Extraditions, Bundesrain 20, 3003 Berne.
 
Objet
 
Extradition au Royaume-Uni,
 
recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral,
 
Cour des plaintes, du 28 avril 2022 (RR.2022.58).
 
 
Faits :
 
A.
Par décision du 17 février 2022, l'Office fédéral de la justice (OFJ) a accordé au Royaume-Uni l'extradition de A.________, lequel est recherché pour association de malfaiteurs en vue de commettre un meurtre et d'autres délits relatifs à un trafic de cocaïne. L'OFJ a par ailleurs rejeté une demande de mise en liberté et a maintenu le séquestre d'une montre saisie lors de l'arrestation, en vue de la couverture des frais.
B.
Par arrêt du 28 avril 2022, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral a rejeté le recours de A.________. Celui-ci contestait être l'utilisateur de l'application cryptée Encrochat impliqué dans les infractions poursuivies et identifié sur la base d'un échange de message en mars 2020. En outre, il ne pouvait être l'auteur des messages échangés le 12 juin 2020 - portant sur l'organisation du meurtre - puisque ceux-ci indiquaient l'heure anglaise alors qu'il était domicilié à Dubaï (avec trois heures de décalage horaire) et avait, durant la période d'envoi de certains messages, subi un examen médical. La Cour des plaintes a considéré qu'il ne s'agissait pas d'un alibi immédiat, et seulement d'un alibi partiel s'apparentant davantage à une argumentation à décharge. Le séquestre de la montre en couverture des frais a été confirmé: le recourant prétendait en être locataire, mais le contrat ne durait que jusqu'au 28 février 2022 et il en était dès cette date, en tant que possesseur, présumé propriétaire.
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour des plaintes, de refuser son extradition et d'ordonner la restitution de la montre séquestrée à la société qui en est propriétaire. Subsidiairement, il demande le renvoi de la cause à l'instance précédente, pour vérification des preuves produites comme alibi.
Il n'a pas été demandé de réponse.
 
1.
Selon l'art. 84 al. 1 LTF, le recours en matière de droit public est recevable à l'encontre d'un arrêt de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, notamment lorsque celui-ci a pour objet une extradition. Il doit toutefois s'agir d'un cas particulièrement important (art. 84 al. 1 in fine LTF). Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger - ou en Suisse (ATF 145 IV 99 consid. 1.3) - viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves (art. 84 al. 2 LTF; ATF 145 IV 99 consid. 1). Ces motifs d'entrée en matière ne sont toutefois pas exhaustifs et le Tribunal fédéral, qui dispose d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 145 IV 99 consid. 1.2), peut aussi être appelé à intervenir lorsqu'il s'agit de trancher une question juridique de principe ou lorsque l'instance précédente s'est écartée de la jurisprudence suivie jusque-là (ATF 136 IV 20 consid. 1.2; 133 IV 215 consid. 1.2; arrêts 1C_486/2020 du 22 septembre 2020 consid. 2; 1C_228/2020 du 12 juin 2020 consid. 2.2).
1.1. Dans le domaine de l'extradition, l'existence d'un cas particulièrement important n'est admise qu'exceptionnellement (ATF 134 IV 156 consid. 1.3.4). En vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il incombe au recourant de démontrer que les conditions d'entrée en matière posées à l'art. 84 LTF sont réunies (ATF 145 IV 99 consid. 1.5).
1.2. Afin de démontrer l'existence d'un cas particulièrement important, le recourant n'évoque pas les conditions et les conséquences de son extradition, mais argumente exclusivement au sujet du maintien du séquestre de la montre saisie lors de son arrestation. Il considère que cette montre avait été louée auprès d'une société du 1er décembre 2021 au 28 février 2022 et qu'il ne disposait plus d'aucun droit sur cet objet à l'échéance du contrat. La question de savoir si un séquestre en couverture des frais est possible dans de telles circonstances n'aurait jamais été tranchée par la jurisprudence.
Le recourant perd de vue que sur ce point, la décision de l'OFJ, de même que l'arrêt attaqué, revêtent un caractère incident puisqu'il s'agit du maintien d'un séquestre provisoire. Le recours, à supposer qu'il porte sur une question de principe, ne serait dès lors recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1 LTF (par renvoi de l'art. 93 al. 2 LTF), soit en présence d'un préjudice irréparable (ATF 133 IV 215 consid. 1.1). En l'occurrence, l'OFJ a précisé qu'une décision serait rendue ultérieurement lorsque le montant des frais sera arrêté et la valeur de l'objet saisi concrètement estimée. L'office devra aussi tenir compte, dans ce cadre, d'éventuelles revendications de tiers. En cas de restitution de l'objet à son légitime propriétaire, le recourant ne subira aucun préjudice. Il n'y a pas non plus d'atteinte actuelle au droit de disposer du recourant puisque celui-ci admet lui-même qu'il n'est pas propriétaire de la montre en question. La condition posée à l'art. 93 al. 1 let. a LTF n'est ainsi manifestement pas réalisée, celle de l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'entrant pas en considération dans un tel cas. Le recours est dès lors irrecevable en tant qu'il concerne le maintien du séquestre.
1.3. Le recourant revient, sur le fond (et sans en faire explicitement un motif d'entrée en matière), sur l'application de l'art. 53 EIMP (alibi). La Cour des plaintes s'en est tenue sur ce point à la jurisprudence constante selon laquelle la notion d'alibi doit être comprise dans son sens littéral, c'est-à-dire comme la preuve que la personne poursuivie ne se trouvait pas sur les lieux de l'infraction au moment de sa commission (ATF 113 Ib 276 consid. 3b). La preuve en question doit être immédiate et univoque (ATF 123 II 279 consid. 2b; 113 Ib 276 consid. 3b-c et les références; cf. aussi ATF 131 II 235 consid. 2.14). Le recourant estime que la notion d'alibi et d'alibi partiel devrait être étendue dans le cadre d'infractions commises par le biais d'une messagerie électronique dont l'utilisateur dispose d'un identifiant individuel. Il s'agirait de tenir compte de l'évolution technologique et de permettre la présentation d'un alibi dans le cadre d'infractions économiques.
Comme cela est relevé ci-dessus, la notion d'alibi doit être entendue dans son sens restrictif traditionnel. Dans la mesure où l'art. 53 EIMP institue un motif de refus de l'extradition que ne prévoit pas la Convention européenne d'extradition (CEExtr, RS 0.353.1) liant la Suisse et l'Etat requérant, une telle disposition doit à tout le moins être appliquée restrictivement (art. 1 CEExtr.; ROBERT ZIMMERMANN, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, 5ème éd., Berne 2019, n° 675), et rien ne justifie de revenir sur la jurisprudence constante dans ce domaine.
2.
Sur le vu de ce qui précède, le recours est irrecevable. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant qui succombe.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours est irrecevable.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr, sont mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, à l'Office fédéral de la justice, Unité Extraditions, et au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes.
 
Lausanne, le 12 mai 2022
 
Au nom de la Ire Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Kneubühler
 
Le Greffier : Kurz