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BGer 6B_53/2021 vom 23.05.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
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6B_53/2021
 
 
Arrêt du 23 mai 2022
 
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
Mme et MM. les Juges fédéraux
 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Hurni.
 
Greffière : Mme Kistler Vianin.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
représenté par Me Olivier Carré, avocat,
 
recourant,
 
contre
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD,
 
intimé.
 
Objet
 
Opposition à une ordonnance pénale; refus de restitution de délai (séjour illégal, etc.),
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 18 août 2020
 
(n° 644 AM20.004218-AMLN).
 
 
Faits :
 
 
A.
 
A.a. Par ordonnance pénale du 16 avril 2020, le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne a condamné A.________, né en 1957, ressortissant du Kosovo, à 150 jours de peine privative de liberté pour séjour illégal et activité lucrative sans autorisation.
L'ordonnance a été adressée par pli recommandé par le biais de la Poste suisse. La distribution ayant échoué, un avis de retrait a été déposé le 17 avril 2020 à l'adresse de A.________, avec un délai de garde jusqu'au 24 avril 2020. L'ordonnance n'a pas été retirée dans le délai de garde. Le délai d'opposition de dix jours est arrivé à échéance le 4 mai 2020.
Le pli recommandé ayant été retourné au Ministère public de l'arrondissement de Lausanne avec la mention " non réclamé ", ce dernier a envoyé l'ordonnance pénale à A.________ par pli simple le 30 avril 2020. Le courrier précisait que l'envoi par pli simple ne faisait pas courir un nouveau délai de recours ou d'opposition.
A.b. Par courrier du 5 mai 2020, A.________ a sollicité la restitution du délai d'opposition à l'ordonnance pénale du 16 avril 2020, en faisant valoir qu'en tant que personne " à risque ", il n'avait pas pu sortir de chez lui durant la pandémie Covid-19 pour aller retirer le pli recommandé à la poste. Il a requis que sa lettre du 5 mai 2020 vaille dès lors opposition.
A.c. Par ordonnance du 4 juin 2020, le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne a rejeté la demande de restitution de délai formée par A.________. Il a retenu que, du moment que A.________ affirmait qu'il était resté chez lui durant la crise sanitaire, il était en mesure de réceptionner le pli recommandé des mains du facteur. En outre, il aurait pu établir une procuration en faveur de sa femme ou de son fils qui vivaient à la même adresse afin qu'ils puissent aller retirer le pli recommandé au guichet postal.
B.
Par arrêt du 18 août 2020, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par A.________ contre l'ordonnance du 4 juin 2020, qu'elle a confirmée.
C.
Contre ce dernier arrêt cantonal, A.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et de l'ordonnance du 4 juin 2020 refusant la restitution de délai et au renvoi de la cause aux instances cantonales pour complément d'instruction dans le sens des considérants. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire.
 
1.
Dénonçant une violation de l'art. 94 al. 1 CPP, le recourant fait valoir qu'il a été empêché de respecter le délai d'opposition sans faute de sa part. En effet, en tant que personne " à risque ", il ne pouvait pas sortir de chez lui pendant la crise sanitaire et n'avait donc pas pu aller retirer le pli recommandé à la poste. Ne disposant pas de document d'identité valable, il ne pouvait pas non plus délivrer de procuration à un tiers; contrairement à ce que soutenait la cour cantonale, la carte d'assurance-maladie, qui ne comporte aucune signature, ne saurait, selon lui, valoir comme pièce d'identité.
1.1. Aux termes de l'art. 94 al. 1 CPP, une partie peut demander la restitution du délai si elle a été empêchée de l'observer et qu'elle est de ce fait exposée à un préjudice important et irréparable. Elle doit toutefois rendre vraisemblable que le défaut n'est imputable à aucune faute de sa part.
La restitution de délai suppose que la partie ou son mandataire a été empêché d'agir sans faute dans le délai fixé (ATF 143 I 284 consid. 1.3 p. 287). Selon la jurisprudence, elle ne peut intervenir que lorsqu'un événement, par exemple une maladie ou un accident, met la partie objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par elle-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (arrêts 6B_401/2019 du 1er juillet 2019 consid. 2.3; 6B_365/2016 du 29 juillet 2016 consid. 2.1 et l'arrêt cité). Elle ne doit être accordée qu'en cas d'absence claire de faute (arrêt 6B_125/2011 du 7 juillet 2011 consid. 1). La restitution du délai d'opposition suppose que l'ordonnance pénale ait été valablement notifiée (ATF 142 IV 201 consid. 2.4 p. 205 s.).
1.2. La cour cantonale a constaté que l'ordonnance pénale du 16 avril 2020 avait été correctement notifiée (fictivement) et que le délai d'opposition était arrivé à échéance le 4 mai 2020. Elle n'a pas exclu que le recourant et ses proches aient volontairement choisi de ne pas répondre au facteur lorsque celui-ci s'était présenté. Elle a toutefois laissé ce point indécis, considérant que la question qui se posait était bien plutôt celle de savoir si le recourant était dans l'impossibilité objective et/ou subjective de faire opposition, respectivement de mandater quelqu'un pour aller chercher le pli recommandé pour lui à la poste puisqu'il était " à risque ". En réponse à l'argument du recourant selon lequel il ne disposait pas de document d'identité valable pour " documenter " une procuration en vue du retrait du recommandé par un tiers, elle a relevé que le recourant pouvait " documenter sa procuration au moyen de sa carte d'assurance-maladie, ce qu'il ne prétend pas avoir fait " (arrêt attaqué p. 4 s.).
1.3. En l'espèce, le recourant a été appréhendé par des garde-frontières, à U.________, en février 2020. Le 17 avril 2020, il a reçu dans sa boîte aux lettres un avis l'invitant à venir retirer un acte judiciaire au guichet de la poste. Il devait s'attendre à ce qu'il s'agisse d'une communication officielle et était en conséquence tenu de prendre les mesures à la sauvegarde d'un éventuel délai qui pourrait lui être imparti (arrêt 6B_723/2020 du 2 septembre 2020 consid. 1.1.1; ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 p. 399).
L'indication de la cour cantonale selon laquelle le recourant aurait pu établir une procuration au moyen de sa carte d'assurance-maladie n'apparaît pas pertinente puisqu'une procuration postale doit être établie en ligne, respectivement par téléphone au numéro indiqué sur l'avis de retrait. Quoi qu'il en soit, est seul déterminant en l'espèce le fait que le recourant est demeuré totalement passif malgré l'avis de retrait. Il ne saurait dès lors se prévaloir de sa bonne foi. Au vu de son absence de toute démarche nonobstant sa connaissance de l'avis de retrait, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en concluant qu'il n'avait pas été empêché sans sa faute de former opposition à l'ordonnance pénale en temps utile et en rejetant sa demande de restitution de délai.
2.
Le recours doit en conséquence être rejeté.
Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
 
3.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
 
Lausanne, le 23 mai 2022
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari
 
La Greffière : Kistler Vianin