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BGer 6B_589/2021 vom 08.06.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
[img]
 
 
6B_589/2021
 
 
Arrêt du 8 juin 2022
 
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
Mmes et MM. les Juges fédéraux Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys, van de Graaf, Koch et Hurni.
 
Greffière : Mme Kistler Vianin.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
représenté par Me Ludovic Tirelli, avocat,
 
recourant,
 
contre
 
1. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD,
 
2. B.________,
 
représentée par Me Anissa Hallenbarter, avocate,
 
intimés.
 
Objet
 
Contrainte sexuelle et viol en commun; propagation d'une maladie de l'homme; arbitraire,
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel
 
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud
 
du 15 décembre 2020 (n° 450 PE19.011710-JUA/ACP).
 
 
Faits :
 
A.
Par jugement du 22 juin 2020, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a notamment reconnu A.________ coupable de violation du domaine secret ou du domaine privé au moyen d'un appareil de prise de vues, de contrainte sexuelle en commun, de viol en commun, de tentative de propagation d'une maladie de l'homme et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. Il l'a condamné à une peine privative de liberté de trente mois dont douze mois ferme, le solde de dix-huit mois avec sursis pendant cinq ans, sous déduction de 109 jours de détention provisoire et de trois jours en raison de détention dans des conditions illicites, ainsi qu'à une amende de 100 fr., la peine privative de liberté de substitution étant de un jour. Il a révoqué le sursis accordé à A.________ le 19 février 2019 et ordonné l'exécution de la peine. Il a ordonné son expulsion du territoire suisse pour une durée de sept ans. Sur le plan civil, il a dit que A.________ et C.________ étaient les débiteurs, solidairement entre eux, de B.________ du montant de 10'000 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 15 juin 2019, à titre de réparation du tort moral et a donné acte à cette dernière de ses réserves civiles pour le surplus.
B.
Par jugement du 15 décembre 2020, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté l'appel formé par A.________ et confirmé le jugement attaqué.
En résumé, elle a retenu les faits suivants:
Le 15 juin 2019, vers 00h30, B.________ s'est rendue à une fête d'anniversaire, à U.________, lors de laquelle elle a consommé une quantité indéterminée d'alcool et a rencontré C.________. Au terme de cette fête et alors que A.________ était venu chercher C.________ en voiture, celui-ci a proposé à B.________ de l'accompagner. En l'absence d'autres moyens de transport, celle-ci a accepté, en pensant être ramenée à la gare de U.________.
Les protagonistes ont rejoint l'appartement de A.________. C.________ a proposé de faire "l'amour à trois". C'est ainsi qu'entre 05h00 et 11h30, B.________ a été abusée sexuellement, à réitérées reprises, par C.________ et A.________ qui ont profité de l'état d'alcoolisation de la jeune fille.
Les deux hommes ont alternativement forcé B.________ à entretenir plusieurs relations sexuelles, à subir plusieurs pénétrations vaginales et anales et à leur prodiguer des fellations; durant l'ensemble de ces faits, ils ont échangé leur rôle, d'acteur et de spectateur, à plusieurs reprises, se sont masturbés en regardant les relations sexuelles lors desquelles ils n'étaient pas directement acteurs et ont entretenu l'état d'alcoolisation de B.________ en mettant divers alcools forts à sa disposition. Enfin, ils ont consommé des produits cannabiques avec B.________.
A l'exception d'un épisode où A.________ s'était muni d'un préservatif, toutes les pénétrations précitées ont été effectuées sans protection, tant par C.________ que par A.________, étant précisé que ce dernier était porteur d'une hépatite chronique virale B depuis 2012 (sous traitement). Les deux comparses ont filmé les actes qu'ils imposaient à B.________ au moyen de leurs téléphones portables.
B.________ a finalement réussi à quitter l'appartement vers 11h30 et a rejoint des gendarmes et ses parents qui avaient pu être alertés de ce qui arrivait à leur fille grâce à des messages envoyés par cette dernière à sa cousine et à un ami et qui arrivaient sur les lieux. Les gendarmes se sont rendus à l'appartement et ont interpellé C.________ et A.________, qui ont eu le temps d'effacer de leur téléphone portable respectif les vidéos qu'ils avaient filmées des relations sexuelles imposées à B.________.
C.
Contre ce dernier jugement, A.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'il est libéré des chefs d'accusation de contrainte sexuelle en commun, de viol en commun et de tentative de propagation d'une maladie de l'homme, qu'il est condamné à une peine pécuniaire de vingt jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant trois ans, ainsi qu'à une amende de 50 fr., qu'il lui est alloué une indemnité de 18'134 fr. 50 selon l'art. 429 CPP et une indemnité de 21'800 fr. à raison de sa détention injustifiée. A titre subsidiaire, il requiert l'annulation du jugement attaqué et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire.
Invités à se déterminer sur le recours, le Ministère public et l'intimée ont conclu à son rejet, l'intimée sollicitant en outre l'assistance judiciaire. Également appelée à prendre position sur le recours, la cour cantonale y a renoncé, se référant aux considérants de sa décision. Les déterminations du Ministère public et de l'intimée ont été adressées au recourant qui a déposé une réplique; la réplique a été communiquée aux parties à titre de renseignement.
 
1.
Le recourant critique l'établissement des faits et l'appréciation des preuves, qu'il qualifie de manifestement inexact sur plusieurs points.
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266 et les références citées). Le Tribunal fédéral n'entre ainsi pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 p. 156; 142 III 364 consid. 2.4 p. 368 et les références citées).
1.2. Le recourant met en doute la crédibilité des déclarations de l'intimée, sur lesquelles la cour cantonale s'est fondée pour le condamner. Il fait valoir que la victime a consenti à monter dans la voiture sans demander "où on allait", de sorte qu'il était légitimé à croire avec C.________ qu'elle désirait continuer la soirée en leur compagnie. Il ajoute qu'il ressort des pièces du dossier que l'intimée avait dragué C.________ et flirté avec lui pendant la soirée et qu'elle avait envisagé d'aller à l'hôtel avec lui en vue de faire une "after" avec plusieurs autres participants à la fête. Enfin, il relève que la jeune fille se trouvait dans un état éthylique, de sorte qu'elle ne se souvenait pas de certains éléments, comme par exemple d'être descendue à la cave avec C.________ ou d'avoir prodigué une fellation dans la voiture.
La cour cantonale n'a pas méconnu les éléments mentionnés par le recourant. Elle a constaté que la victime avait consenti à monter dans la voiture des intéressés, mais qu'elle pensait alors qu'ils allaient la ramener à la gare. Elle a également retenu que la jeune fille avait envisagé d'aller à l'hôtel avec C.________ en vue de faire une "after". L'attitude de la jeune fille ne signifie toutefois pas qu'elle était d'accord d'entretenir des relations sexuelles avec le recourant et son acolyte. C'est donc sans arbitraire que la cour cantonale a considéré que ces éléments ne permettaient pas de douter de la crédibilité de la version de la jeune fille. C'est également sans arbitraire qu'elle a considéré que l'état éthylique et l'absorption de drogue ne remettaient pas en cause la crédibilité des accusations de l'intimée, même si celle-ci ne se souvenait pas de certains événements, comme par exemple d'être descendue à la cave ou d'avoir prodigué une fellation dans la voiture. Les griefs du recourant sont donc infondés.
1.3. Le recourant fait valoir que la victime était en possession de son téléphone avant 9h22, moment où elle a appelé au secours son ami D.________. Il fait également observer que l'intimée avait écrit un message WhatsApp à sa mère à 8h13. Il déduit de ces éléments que l'intimée aurait pu appeler à l'aide bien plus tôt si elle l'avait jugé utile, de sorte qu'elle aurait, selon lui, consenti aux relations sexuelles.
Par cette argumentation, le recourant se borne à présenter sa propre appréciation des faits dans une démarche purement appellatoire et, partant, irrecevable. La cour cantonale a retenu que l'intimée avait envoyé des messages écrits et vocaux à son ami D.________ à 9h22 pour lui demander de l'aide. Sur certains d'entre eux, on entend l'intimée dire en portugais "arrête, arrête", puis une voix masculine demander si elle veut encore "niquer". Ces messages vocaux attestent donc bien des abus sexuels dénoncés par l'intimée.
1.4. Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir arbitrairement omis de mentionner que les protagonistes s'étaient arrêtés à V.________ pour acheter des cigarettes, qu'ils s'étaient battus avec des tiers et que l'intimée, qui était sortie de la voiture, avait pris un coup au visage. Le recourant en conclut que l'intimée aurait pu aisément demander de l'aide, ce qui démontre qu'elle a décidé volontairement de rester avec lui.
Par cette argumentation, le recourant présente à nouveau sa propre appréciation des faits de manière purement appellatoire et, donc, irrecevable. La cour cantonale n'a pas méconnu cet événement, qu'elle a exposé en page 21 de son arrêt. On ne saurait toutefois en déduire que l'intimée a accepté d'entretenir des relations sexuelles avec les deux protagonistes pendant plusieurs heures.
1.5. Le recourant fait valoir qu'il n'a pas usé de violence à l'égard de l'intimée, mais qu'il a au contraire tenté de calmer C.________. L'intimée a ainsi déclaré: "
L'argumentation du recourant consiste à nouveau à apprécier les faits de manière purement appellatoire et, donc, irrecevable. La cour cantonale n'a pas méconnu les déclarations de la jeune fille qu'elle a mentionnées en page 32 et a retenu que seul C.________ avait frappé la jeune fille. Cela ne signifie toutefois pas que le recourant n'a pas usé de contrainte et que celle-ci était d'accord d'entretenir des relations sexuelles avec lui (cf. consid. 2). S'agissant du partage de connexion, la cour cantonale a relevé que le recourant avait consenti à faire un partage de connexion à l'intimée uniquement lorsque celle-ci lui aurait dit que sa mère allait appeler la police si elle ne pouvait pas la contacter.
1.6. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir déduit qu'il avait commis des infractions sexuelles du fait qu'il avait effacé les films de ses actes sexuels à l'arrivée de la police. Selon le recourant, il avait simplement peur de se voir condamner pour infractions contre le domaine secret et privé.
La version des faits présentée par le recourant est appellatoire et, donc, irrecevable. La cour cantonale n'a pas versé dans l'arbitraire en admettant qu'en effaçant les films, le recourant et C.________ voulaient détruire tout indice de commission d'infractions sexuelles.
1.7. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir interprété les pleurs de l'intimée à la sortie de l'appartement comme un élément pour fonder la crédibilité des déclarations de l'intimée. Il soutient que ces pleurs n'exprimeraient que la honte ressentie vis-à-vis de sa mère.
A nouveau, le recourant se borne à opposer sa propre appréciation des faits à celle de la cour cantonale dans une démarche appellatoire et, partant, irrecevable. Il n'est pas insoutenable d'interpréter les pleurs de l'intimée comme un élément attestant de la crédibilité de ses accusations. L'interprétation de la cour cantonale n'est donc pas entachée d'arbitraire.
2.
Le recourant conteste sa condamnation pour viols (art. 190 CP) et contraintes sexuelles en commun (art. 189 CP). Dénonçant la violation de son droit d'être entendu, il reproche à la cour cantonale de ne pas avoir motivé sa décision de manière suffisante, se bornant à transposer sur lui les faits reprochés à son acolyte.
2.1. Conformément à l'art. 189 CP, se rend coupable de contrainte sexuelle celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, l'aura contrainte à subir un acte analogue à l'acte sexuel ou un autre acte d'ordre sexuel. Celui qui, dans les mêmes circonstances, contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel se rend coupable de viol au sens de l'art. 190 CP.
Les art. 189 et 190 CP tendent à protéger la libre détermination en matière sexuelle, en réprimant l'usage de la contrainte aux fins d'amener une personne à faire ou à subir, sans son consentement, un acte d'ordre sexuel.
Sur le plan subjectif, la contrainte sexuelle et le viol sont des infractions intentionnelles. L'auteur doit savoir que la victime n'est pas consentante ou en accepter l'éventualité (arrêts 6B_894/2021 du 28 mars 2022 consid. 3.4 destiné à la publication; 6B_774/2014 du 22 mai 2015 consid. 3.3). Déterminer ce qu'une personne a su, envisagé ou accepté relève de l'établissement des faits (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3 p. 4 s.). L'élément subjectif se déduit d'une analyse des circonstances permettant de tirer, sur la base des éléments extérieurs, des déductions sur les dispositions intérieures de l'auteur. S'agissant de la contrainte en matière sexuelle et du viol, l'élément subjectif est réalisé lorsque la victime donne des signes évidents et déchiffrables de son opposition, reconnaissables pour l'auteur, tels des pleurs, des demandes d'être laissée tranquille, le fait de se débattre, de refuser des tentatives d'amadouement ou d'essayer de fuir (arrêts 6B_894/2021 du 28 mars 2022 consid. 3.4 destiné à la publication; 6B_968/2016 du 25 septembre 2017; 6B_774/2014 précité consid. 3.3; 6B_575/2010 du 16 décembre 2010, consid. 1.3.2). La nature et la durée des rapports (par exemple sodomies, rapports sexuels commis à plusieurs et à multiples reprises) joueront également un rôle pour déterminer si l'auteur pouvait accepter l'éventualité que la victime était consentante (arrêt 6B_774/2014 précité consid. 3.3).
Selon l'art. 200 CP, lorsque l'infraction contre l'intégrité sexuelle aura été commise en commun par plusieurs personnes, le juge pourra augmenter la durée de la peine, mais pas au-delà de la moitié en sus du maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il sera, en outre, lié par le maximum légal du genre de peine. La circonstance aggravante est réalisée en cas de viols en série à tout le moins lorsque les divers auteurs se trouvent dans le même logement et attendent leur tour. L'aggravation de peine est motivée par l'idée que l'action en commun renforce psychiquement et physiquement les auteurs et rend plus difficile un retour en arrière réciproque ou un renoncement, ce qui les rend particulièrement dangereux (ATF 125 IV 199 consid. 2b p. 202; arrêt 6B_502/2017 du 16 avril 2018 consid. 1.1.3).
2.2. Les éléments constitutifs objectifs et subjectifs du viol et de la contrainte sexuelle sont réalisés en l'espèce. Selon l'état de fait cantonal, le recourant s'est déshabillé en même temps que son acolyte et était présent pendant que celui-ci frappait la victime, mais ne disait rien. La cour cantonale en a déduit que s'il n'avait pas lui-même frappé la victime, il s'était pleinement associé aux actes de son comparse. Elle a ajouté que sa présence, sa corpulence et ses assauts avaient également contribué à briser la résistance de l'intimée. Sur le plan subjectif, elle a retenu que le recourant avait agi avec conscience et volonté, dès lors qu'il avait entendu les refus de la victime. Au vu de ces éléments, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en condamnant le recourant pour viol et contraintes sexuelles commises en commun. Sa motivation (cf. jugement attaqué p. 36) est suffisante. Les griefs soulevés par le recourant doivent donc être rejetés.
3.
Le recourant conteste sa condamnation pour tentative de propagation d'une maladie de l'homme (art. 231 CP). Il reproche à la cour cantonale d'avoir appliqué l'art. 231 CP dans sa teneur d'avant janvier 2016. Il soutient que le dol direct et la bassesse de caractère, exigés par le nouvel art. 231 CP, ne peuvent pas être retenus en l'espèce.
3.1. L'art. 231 CP, en vigueur depuis le 1er janvier 2016, punit d'une peine privative de liberté d'un an au moins et de cinq ans au plus celui qui, par bassesse de caractère, aura propagé une maladie de l'homme dangereuse et transmissible.
3.2. Le législateur a modifié l'art. 231 CP lors de la révision de la loi sur les épidémies (cf. FF 2011 291 ss). L'ancien art. 231 CP punissait toute propagation, intentionnelle ou par négligence, d'une maladie de l'homme dangereuse et transmissible. La propagation par bassesse de caractère caractérisait une circonstance aggravante, justifiant une sanction plus sévère. Le but de la révision était d'éviter que des personnes séropositives soient punies en vertu de l'art. 231 CP, même si leur partenaire avait connaissance de leur infection au VIH et consentait à avoir avec elles des rapports sexuels non protégés. On ne voulait en outre pas biffer cette disposition en raison de sa signification dans le cadre des menaces du bioterrorisme (cf. FF 2011 403). Le projet du Conseil fédéral proposait donc d'exclure la punissabilité de celui qui avait transmis la maladie alors qu'il avait informé l'autre personne du risque concret d'infection (FF 2011 460). Finalement, le parlement s'est montré plus restrictif et a modifié l'élément subjectif, le nouvel art. 231 CP punissant uniquement celui qui, par bassesse de caractère, propage une maladie de l'homme dangereuse et transmissible (sur les critiques de cette disposition, cf. TRECHSEL/CONINX, in Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxis-kommentar, 4e éd. 2021, n° 10 ad art. 231 CP; VIRGINE RODIGARI, in Commentaire romand, Code pénal II, 2017, n° 5 ad art. 231 CP).
3.3. Sur le plan subjectif, l'auteur doit ainsi, selon le nouveau droit, agir intentionnellement et par bassesse de caractère.
Il découle de la combinaison de ces deux éléments que le dol directest nécessaire dans tous les cas, c'est-à-dire que la propagation de la maladie infectieuse doit être recherchée comme but de l'acte. L'auteur doit être ainsi conscient de sa maladie et accomplir un acte qui - il le sait - entraîne la possibilité d'une infection dont il cherche à faire la conséquence de son comportement. Le dol éventuel est exclu (NIGGLI/MAEDER, in Basler Kommentar, Strafrecht II, 4e éd. 2019, n° 51 ad art. 231 CP; TRECHSEL/CONINX, op. cit., n° 6 ad art. 231 CP; DONATSCH/THOMMEN/WOHLERS, Strafrecht IV, Delikte gegen die Allgemeinheit, 5e éd., 2017, p. 80; WOHLERS ET AL., Schweizerisches Strafgesetzbuch, Handkommentar, 4e 2020, n° 5 ad art. 231 CP; DEMARMELS/VONWIL, in Annotierer Kommentar StGB, Damian K. Graf (édit.), 2020, n ° 6 ad art. 231 CP; NATHALIE DONGOIS, Quelle répression pénale en cas de transmission du VIH par voie sexuelle?, in RPS 133 (2015) p. 42 ss, spéc. 49; contra : VIRGINE RODIGARI, op. cit., n° 35 ad art. 231 CP, qui semble admettre le dol éventuel).
La notion de bassesse de caractère se trouvait déjà, comme circonstance aggravante, à l'ancien art. 231 ch. 1 al. 2 CP (cf. aussi art. 232 ch. 1 al. 2 CP sur la propagation d'une épizootie). Cette notion doit être interprétée restrictivement, au vu de la sévérité de la peine prévue par le nouvel art. 231 CP (peine minimale d'un an de privation de liberté). Comme la jurisprudence l'avait retenu à propos de l'infraction de dommages à la propriété qui prévoyait à l'époque une circonstance aggravante pour ce motif (cf. art. 145 al. 2 aCP), elle doit viser un comportement particulièrement répréhensible d'un point de vue moral, notamment lorsque l'auteur agit par haine ou esprit de vengeance (à propos de l'art. 145 aCP, cf. ATF 117 IV 437 consid. 2b/aa p. 440; 106 IV 24 consid. 4b p. 25; 104 IV 238 consid. 4 p. 247; à propos de l'art. 231 CP, cf. NIGGLI/MAEDER, op. cit., n° 52 ad art. 231 CP; TRECHSEL/CONINX, op. cit., n° 6 ad art. 231 CP; DONATSCH/THOMMEN/WOHLERS, op. cit., p. 81; WOHLERS, op. cit., n° 6 ad art. 231 CP; cf. à propos de l'ancien art. 231 CP, BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, 3e éd., 2010, n° 18 ad art. 231 CP). La bassesse de caractère devrait aussi être retenue lorsque l'auteur agit pour le plaisir de nuire à la victime.
 
Erwägung 3.4
 
3.4.1. La cour cantonale a considéré que le recourant savait qu'il subsistait un risque de contamination, celui-ci lui ayant été indiqué par son médecin, et en a conclu qu'il avait agi par dol éventuel. Elle a ensuite admis une bassesse de caractère, le recourant ayant déclaré avoir eu plusieurs relations avec ses ex-copines sans se protéger, qu'il ne s'était rien passé et qu'il avait pris confiance en lui (jugement attaqué p. 38).
3.4.2. Le raisonnement de la cour cantonale est critiquable à deux points de vue. Premièrement, selon le nouveau droit, le dol éventuel ne saurait suffire. Le recourant doit chercher à propager la maladie dangereuse et infectieuse (dol direct). En second lieu, les éléments mentionnés par la cour cantonale ne permettent pas de retenir une bassesse de caractère. Le seul fait d'avoir agi à l'égard de ses ex-copines en s'accommodant d'un éventuel résultat dommageable ne dénote pas d'un comportement particulièrement répréhensible, étant admis au demeurant que le risque d'une contamination était faible. Il n'apparaît ainsi pas que le recourant ait agi par haine ou par vengeance. Le recours doit donc être admis, le jugement attaqué doit être annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle examine l'élément subjectif de l'infraction de l'art. 231 CP au regard du nouveau droit.
4.
Le recours doit donc être partiellement admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision.
Pour le surplus, il doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Le recourant a requis l'assistance judiciaire. Il ne supportera pas de frais et peut prétendre à une indemnité de dépens réduite pour ce qui concerne l'admission partielle de son recours (art. 68 al. 1 LTF), ce qui rend sa demande d'assistance judiciaire sans objet dans cette mesure. Le recours était, pour le surplus, dénué de chance de succès, si bien que l'assistance judiciaire doit être refusée (art. 64 al. 1 et 2 LTF). Le recourant supportera des frais réduits en raison de l'issue de la procédure et de sa situation financière (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
La demande d'assistance judiciaire de l'intimée doit être admise, les conditions de l'art. 64 al. 1 LTF étant réunies. En conséquence, l'intimée est dispensée des frais de procédure et Me Anissa Hallenbarter, désignée en qualité d'avocate d'office (art. 64 al. 2 LTF), est indemnisée. Dans les circonstances d'espèce, il peut être renoncé de mettre des dépens à la charge de l'intimée.
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours est partiellement admis, le jugement attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision. Pour le surplus, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
La demande d'assistance judiciaire du recourant est rejetée dans la mesure où elle n'est pas sans objet.
 
3.
 
Une partie des frais judiciaires, arrêtée à 800 fr., est mise à la charge du recourant.
 
4.
 
Le canton de Vaud versera au recourant, en mains de son conseil, la somme de 1'500 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
 
5.
 
La demande d'assistance judiciaire de l'intimée est admise pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
 
6.
 
Me Anissa Hallenbarter est désignée comme avocate d'office de l'intimée et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral.
 
7.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
 
Lausanne, le 8 juin 2022
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari
 
La Greffière : Kistler Vianin