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BGer 6B_1122/2021 vom 20.06.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
[img]
 
 
6B_1122/2021
 
 
Arrêt du 20 juin 2022
 
 
Cour de droit pénal
 
Composition
 
M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Juge présidant, van de Graaf et Koch.
 
Greffière : Mme Paquier-Boinay.
 
 
Participants à la procédure
 
A.________,
 
recourant,
 
contre
 
1. Ministère public de la République et canton de Genève,
 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
 
2. B.________,
 
3. C.________,
 
représenté par Me Miguel Oural, avocat,
 
intimés.
 
Objet
 
Demande de révision; arbitraire, droit d'être entendu, etc.,
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 20 juillet 2021
 
(P/2322/2015 AARP/235/2021).
 
 
Faits :
 
 
A.
 
A.a. Par arrêt du 26 septembre 2019, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a reconnu A.________ coupable de diffamation et l'a condamné à une peine pécuniaire de 70 jours-amende à 275 fr., avec sursis durant trois ans.
A.b. Les faits à l'origine de cette condamnation s'inscrivent dans le cadre d'un conflit opposant B.________ et D.________, notamment en lien avec la gestion d'un établissement public. Ce conflit, pour lequel A.________ a été le conseil de B.________, C.________ étant celui de D.________, a donné lieu à de multiples procédures pénales et civiles.
En substance, A.________ a allégué que C.________ avait manipulé la justice, voire commis une escroquerie au procès, en contestant tout concubinage entre B.________ et D.________, notamment dans le cadre de différentes procédures ayant opposé ces derniers jusqu'à la vente d'un établissement public en 2008, alors qu'il en connaissait pourtant l'existence, ce qui avait eu pour effet d'empêcher le premier de faire reconnaître sa qualité d'associé au lieu d'employé de la seconde, lui causant un dommage supérieur à 3 millions de francs.
Dans ce contexte, il a en sa qualité d'avocat et de citoyen de Genève, en date du 5 juin 2014, adressé notamment aux membres du Conseil d'État, aux députés du Grand Conseil, aux juges de la Cour des comptes et au Secrétariat général du pouvoir judiciaire un courrier dans lequel il accusait C.________ d'avoir manipulé la justice et d'avoir commis une escroquerie au procès, informations qu'il savait fausses. Par ailleurs, dans des observations déposées le 7 novembre 2014 auprès du Tribunal de première instance, il a à nouveau intentionnellement accusé C.________ d'avoir manipulé la justice et d'être intervenu dans une perspective criminelle, affirmations qu'il savait fausses.
La question de la péremption de la plainte de C.________ du 30 avril 2015 relative à la lettre du 5 juin 2014 a été soulevée par A.________ devant le Tribunal de police, la Chambre pénale d'appel et de révision et le Tribunal fédéral, en alléguant que celui-là avait eu connaissance du courrier litigieux avant le 30 janvier 2015, de sorte que sa plainte était tardive. Cet argument a été examiné et écarté par les différentes instances judiciaires successivement saisies.
La Chambre pénale d'appel et de révision a considéré qu'aucun élément ne permettait de retenir que C.________ avait eu connaissance du contenu de cette lettre avant le 30 janvier 2015, celui-ci ayant expliqué de manière plausible n'avoir été au courant de cet écrit qu'à la fin du mois de janvier 2015, après avoir pris connaissance sur Internet d'un autre courrier, adressé par A.________ au Grand Conseil en date du 2 décembre 2014, qui mentionnait ce premier courrier en annexe.
Par ailleurs, le Tribunal fédéral, dans son arrêt 6B_1254/2019 du 16 mars 2020 consid. 4.5.2, relevant qu'au vu des pièces produites dans le cadre d'un litige de droit du bail on voyait mal comment C.________ aurait pu ignorer le concubinage entre D.________ et B.________, a estimé que cette question pouvait être laissée ouverte puisqu'il n'apparaissait pas que la correction d'un vice pourrait à cet égard influer sur le sort de la cause. Il a noté à ce propos que le litige opposant D.________ à B.________ ne portait pas essentiellement sur leur situation intime, mais sur leur statut respectif dans l'exploitation d'un établissement public, de sorte que même à supposer que C.________ pût avoir eu connaissance du lien de concubinage ayant existé entre D.________ et B.________ antérieurement à la date retenue par la cour cantonale, on ne voit pas en quoi il aurait été arbitraire de retenir que l'intéressé n'avait pas, en soutenant l'existence de rapports de travail - nullement exclus par un lien affectif entre les parties - et en contestant l'existence d'une société simple, cherché à tromper astucieusement la justice; il a ajouté que, partant, il n'était pas insoutenable de retenir que C.________ avait, en procédure, défendu la thèse selon laquelle des rapports de travail avaient existé - et non une société simple -, sans pour autant avoir astucieusement cherché à tromper les autorités judiciaires sur cet aspect.
B.
Par courrier du 26 avril 2021, A.________ a sollicité la révision de l'arrêt du 26 septembre 2019 de la Chambre pénale d'appel et de révision.
A l'appui de sa requête, il a exposé que les réponses données par le Conseil d'État à ses courriers demandant que lui soit communiquée la date précise à laquelle le contenu de sa correspondance du 5 juin 2014 avait été communiqué à C.________ étaient contradictoires, non seulement entre elles mais également avec la version de ce dernier. Il a fait valoir que le refus des autorités politiques de révéler la date de " l'audience de justification " qui se serait tenue à la suite de l'envoi dudit courrier et lors de laquelle C.________ aurait pris connaissance de celui-ci constitue un fait nouveau et sérieux devant amener à la constatation que la plainte du 30 avril 2015 était tardive et que la procédure devait être classée en tant qu'elle concernait ce courrier.
En lien avec ses observations du 7 novembre 2014, il a allégué que le Tribunal fédéral avait été la première autorité judiciaire à retenir que C.________ avait eu connaissance dès 2006 du concubinage entre D.________ et B.________, ce qui remettait en question l'issue de la procédure.
Considérant que les échanges de courriers postérieurs à l'arrêt du Tribunal fédéral n'établissaient aucunement la tenue d'une " audience de justification " et que l'existence d'un échange oral et général entre un Conseiller d'État et C.________, dont on ignore au demeurant à quelle période il a eu lieu, ne constitue pas une preuve que le second connaissait avant le 30 janvier 2015 l'existence et a fortiori le contenu du courrier du 5 juin 2014, la Chambre pénale d'appel et de révision a admis que A.________ n'avait présenté aucun élément nouveau et sérieux et a, par arrêt du 20 juillet 2021, déclaré irrecevable sa demande de révision.
C.
A.________ forme un recours en matière pénale contre l'arrêt de la Chambre pénale d'appel et de révision. Il conclut, principalement, à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau, voire au prononcé de l'acquittement de tous les chefs et au renvoi de la cause à la cour cantonale, avec suite de frais et dépens. A titre subsidiaire, il demande à être autorisé à rapporter par toutes voies de droit la preuve de ses allégués ainsi que la contre-preuve de tout allégué contraire.
 
1.
Le recourant se plaint de violations de l'interdiction de l'arbitraire, de son droit d'être entendu ainsi que des art. 410 et 412 CPP.
1.1. Aux termes de l'art. 410 al. 1 let. a CPP, toute personne lésée par un jugement entré en force peut en demander la révision s'il existe des faits ou des moyens de preuve qui étaient inconnus de l'autorité inférieure et qui sont de nature à motiver l'acquittement ou une condamnation sensiblement moins sévère ou plus sévère du condamné.
Les faits ou moyens de preuves invoqués doivent ainsi être nouveaux et sérieux. Les faits ou moyens de preuves sont inconnus lorsque le juge n'en a pas eu connaissance au moment où il s'est prononcé, c'est-à-dire lorsqu'ils ne lui ont pas été soumis sous quelque forme que ce soit (ATF 137 IV 59 consid. 5.1.2 p. 66 s.). Ils sont sérieux lorsqu'ils sont propres à ébranler les constatations de fait sur lesquelles se fonde la condamnation et que l'état de fait ainsi modifié rend possible un jugement sensiblement plus favorable au condamné (ATF 145 IV 197 consid. 1.1 p. 199; 137 IV 59 consid. 5.1.4 p. 68).
Savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception de faits ou de moyens de preuve nouveaux et sérieux est une question de droit. En revanche, savoir si un fait ou un moyen de preuve était effectivement inconnu du juge est une question de fait qui peut être revue pour arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves. Il en va de même de la question de savoir si un fait nouveau ou un moyen de preuve nouveau est propre à modifier l'état de fait retenu puisqu'elle relève de l'appréciation des preuves, étant rappelé qu'une vraisemblance suffit au stade du rescindant. Enfin, c'est de nouveau une question de droit de savoir si la modification de l'état de fait est juridiquement pertinente, c'est-à-dire de nature, en fonction des règles de droit de fond applicables, à entraîner une décision plus favorable au condamné en ce qui concerne la culpabilité, la peine ou les mesures (ATF 130 IV 72 consid. 1 p. 73 et les arrêts cités; arrêt 6B_297/2020 du 10 juillet 2020 consid. 1.1.3).
1.2. Il y a lieu de relever en premier lieu que l'objet du litige est limité à la seule question tranchée par la cour cantonale, c'est-à-dire celle de savoir si la demande de révision formée par le recourant reposait sur des éléments nouveaux et sérieux. L'argumentation du recourant est par conséquent irrecevable dans toute la mesure où elle ne porte pas sur ce point, notamment en tant qu'elle consiste à remettre en cause l'appréciation des preuves effectuée dans l'arrêt du 26 septembre 2019.
1.3. Le recourant se plaint d'un défaut de motivation de l'arrêt attaqué.
1.3.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 29 al. 2 Cst., 3 al. 2 let. c et 107 CPP ainsi que 6 par. 1 CEDH, implique notamment l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3 p. 46; 142 I 135 consid. 2.1 p. 145). Il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 142 II 154 consid. 4.2 p. 157; 139 IV 179 consid. 2.2 p. 183).
1.3.2. Dans la mesure où l'argumentation du recourant a trait à ses observations du 7 novembre 2014, il faut rappeler, comme l'a fait la cour cantonale et comme l'avait relevé le Tribunal fédéral dans son arrêt 6B_1254/2019 du 16 mars 2020, que le moment à partir duquel C.________ a eu connaissance du concubinage entre D.________ et B.________ est sans pertinence (voir consid. A.b i.f. ci-dessus), de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner si le recourant invoque dans ce contexte des faits nouveaux puisque ceux-ci ne seraient de toute manière pas propres à influer sur le sort de la cause.
Reste seule à examiner la question de la date à laquelle C.________ a eu connaissance du contenu du courrier du 5 juin 2014 et, partant de la tardiveté de la plainte, invoquée par le recourant.
A ce propos, il ressort de l'arrêt attaqué que les échanges de courriers postérieurs à l'arrêt du Tribunal fédéral, dont se prévaut le recourant, ne constituent pas un moyen de preuve propre à modifier les constatations faites précédemment; ils n'établissent pas la tenue d'une " audience de justification ". Par ailleurs, l'existence d'un échange oral entre C.________ et un Conseiller d'État, dont on ne sait pas quand il a eu lieu, ne constitue pas une preuve que le premier connaissait l'existence et a fortiori le contenu de ce courrier avant le 30 janvier 2015.
Cette motivation est suffisante pour permettre au recourant de comprendre les raisons pour lesquelles sa requête a été rejetée et attaquer utilement la décision y relative. Partant, l'arrêt attaqué ne viole pas son droit d'être entendu.
1.4. Le recourant se plaint d'une violation de l'interdiction de l'arbitraire.
1.4.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1 p. 155 s.; 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1 p. 92; 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1 p. 92; 145 IV 154 consid. 1.1 p. 156).
1.4.2. Par une motivation passablement prolixe et confuse, le recourant semble vouloir remettre en question l'ensemble des constatations retenues dans les procédures tant civile que pénale, ce qui n'est pas recevable dans le cadre de la présente procédure de révision. Par ailleurs, son argumentation est largement appellatoire dans la mesure où elle consiste essentiellement à opposer sa propre version des faits à celle retenue par la cour cantonale, sans parvenir à montrer en quoi cette dernière serait insoutenable. Force est de constater qu'il n'apporte aucun élément nouveau propre à établir que C.________ aurait eu connaissance du contenu de sa correspondance du 5 juin 2014 avant le 30 janvier 2015.
Dans ces circonstances, c'est sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a admis que les éléments invoqués n'étaient pas nouveaux et sérieux, de sorte que son refus d'entrer en matière sur sa demande de révision ne viole pas les art. 410 et 412 CPP. Mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Vu l'issue de la procédure, le recourant, qui succombe, supportera les frais de justice (art. 64 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 3000 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
 
Lausanne, le 20 juin 2022
 
Au nom de la Cour de droit pénal
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Juge présidant : Denys
 
La Greffière : Paquier-Boinay