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BGer 2C_535/2022 vom 12.07.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
[img]
 
 
2C_535/2022
 
 
Arrêt du 12 juillet 2022
 
 
IIe Cour de droit public
 
Composition
 
Mmes et M. les Juge fédéraux
 
Aubry Girardin, Présidente, Hänni et Beusch.
 
Greffière : Mme Vuadens.
 
 
Participants à la procédure
 
1. A.A.________,
 
2. B.A.________,
 
3. C.A.________,
 
4. D.A.________,
 
tous les quatre représentés par Me François Besse, avocat,
 
recourants,
 
contre
 
Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI,
 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne,
 
intimée.
 
Objet
 
Assistance administrative (CDI CH-FR),
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour VI, du 14 juin 2022 (F-6249/2020).
 
 
 
Erwägung 1
 
1.1. Le 11 mai 2016, la Direction générale des finances publiques française (ci-après: l'autorité requérante ou l'autorité française) a déposé une demande d'assistance administrative en matière fiscale auprès de l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale ou l'AFC) fondée sur l'art. 28 de la Convention du 9 septembre 1966 entre la Suisse et la France en vue d'éliminer les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l'évasion fiscales (ci-après: CDI CH-FR, RS 0.672.934.91). L'autorité requérante indiquait qu'une enquête diligentée en Allemagne par le parquet de Bochum et des visites domiciliaires effectuées dans les succursales allemandes de la banque E.________ AG (ci-après: la Banque) avaient abouti à la saisie de données concernant des contribuables français en lien avec des comptes ouverts auprès de ladite banque. Il était précisé que ces informations avaient été fournies le 3 juillet 2015 sur requête du 20 avril 2015 de l'autorité française à l'administration fiscale allemande en application de la Directive 2011/16/UE du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal. La demande d'assistance administrative concernait les années 2010 à 2014 pour l'impôt sur le revenu et les années 2010 à 2015 pour l'impôt de solidarité sur la fortune et se fondait sur des listes (liste B relative à l'année 2006 et liste C relative à l'année 2008) contenant des numéros de comptes bancaires liés à des personnes inscrites sous un code "domizil " français. Elle visait à obtenir les nom, prénom, date de naissance et l'adresse la plus actuelle disponible des titulaires, ayants droit économiques selon le formulaire A, et de toute autre personne venant aux droits et obligations de ces derniers auprès de la Banque.
1.2. Donnant suite à une demande de production du 10 juin 2016, la Banque a transmis à l'Administration fédérale les informations demandées entre juin 2016 et juillet 2017. Informée par la Banque du risque de non-respect du principe de spécialité par l'autorité requérante, l'Administration fédérale a obtenu des autorités compétentes françaises, dans le cadre d'un échange de lettres du 11 juillet 2017 et par un courrier de l'autorité requérante du même jour, l'assurance que les informations transmises ne seraient communiquées qu'aux personnes et autorités mentionnées à l'art. 28 par. 2 CDI CH-FR et ne seraient utilisées qu'aux fins qui y sont énumérées.
1.3. Le 9 février 2018, l'Administration fédérale a, dans huit décisions finales rendues à l'encontre de certaines personnes concernées, ainsi qu'à la Banque (dont le Tribunal administratif fédéral avait reconnu la qualité pour recourir dans l'arrêt A-4974/2016 du 25 octobre 2016), accordé l'assistance administrative à l'autorité française. Par arrêt du 30 juillet 2018, le Tribunal administratif fédéral a admis le recours formé par la Banque et annulé les décisions finales du 9 février 2018. Cette décision a été annulée, sur recours de l'Administration fédérale, par le Tribunal fédéral, dans un arrêt du 26 juillet 2019 (cause 2C_653/2018 partiellement publiée in ATF 146 II 150), qui a confirmé la validité des décisions finales du 9 février 2018. A la suite de cet arrêt, l'Administration fédérale a repris le traitement des procédures qui avaient été suspendues jusqu'à droit connu sur la position du Tribunal fédéral.
1.4. Le 20 juillet 2020, l'Administration fédérale a transmis l'intégralité des pièces du dossier à A.A.________, B.A.________, C.A.________ et D.A.________. Par décision finale du 5 novembre 2020 notifiée aux quatre personnes précitées, elle a accordé l'assistance administrative à l'autorité requérante.
Par arrêt du 14 juin 2022, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours formé contre cette décision par ses destinataires.
1.5. A l'encontre de cet arrêt, A.A.________, B.A.________, C.A.________ et D.A.________ forment un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Ils concluent à la réforme des décisions finales du 5 novembre 2020 en ce sens que la demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 est rejetée; subsidiairement, à leur annulation et au renvoi des dossiers à l'autorité inférieure pour nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. A titre préalable, ils requièrent l'effet suspensif.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
2.
Selon l'art. 83 let. h LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière d'entraide administrative internationale, à l'exception de l'assistance administrative en matière fiscale. Il découle de l'art. 84a LTF que, dans ce dernier domaine, le recours n'est recevable que lorsqu'une question juridique de principe se pose ou lorsqu'il s'agit, pour d'autres motifs, d'un cas particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF.
2.1. Selon la jurisprudence, la présence d'une question juridique de principe suppose que la décision en cause soit importante pour la pratique; cette condition est en particulier réalisée lorsque les instances inférieures doivent traiter de nombreuses causes analogues ou lorsqu'il est nécessaire de trancher une question juridique qui se pose pour la première fois et qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral (ATF 139 II 404 consid.1. 3; arrêt 2C_289/2015 du 5 avril 2016 consid. 1.2.1 non publié in ATF 142 II 218; arrêt 2C_54/2014 du 2 juin 2014 consid. 1.1, in StE 2014 A 31.4. Nr. 20).
Conformément à l'art. 84 al. 2 LTF, applicable par renvoi de l'art. 84a LTF, un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves. La reconnaissance d'un cas particulièrement important doit être admise avec retenue. Le Tribunal fédéral jouit à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 145 IV 99 consid. 1.2 et les références; 139 II 340 consid. 4). Seule une violation importante et suffisamment crédible des principes fondamentaux de la procédure peut conduire à considérer que la condition de recevabilité posée par l'art. 84 al. 2 LTF est réalisée (ATF 145 IV 99 consid. 1.5; arrêts 2C_147/2022 du 16 février 2022 consid. 4.1; 2C_319/2021 du 30 avril 2021 consid. 5.2).
2.2. Comme le Tribunal fédéral n'a pas pour fonction de trancher des questions abstraites (cf. en matière d'assistance administrative, ATF 142 II 161 consid. 3), la question soulevée doit se poser concrètement dans le cas d'espèce et être déterminante pour l'issue du litige (cf. arrêts 2C_267/2022 du 12 avril 2022 consid. 2.2; 2C_754/2021 du 8 octobre 2021 consid. 4.3 in fine; 2C_554/2021 du 26 juillet 2021 consid. 3.4).
2.3. Il appartient au recourant de démontrer de manière suffisante en quoi les conditions de recevabilité de l'art. 84a LTF sont remplies (art. 42 al. 2 LTF; ATF 145 IV 99 consid. 1.5; 139 II 340 consid. 4; 404 consid. 1.3), à moins que tel ne soit manifestement le cas (cf. ATF 146 II 150 consid. 1.2.1; 139 II 340 consid. 4 et 5; 404 consid. 1.3).
3.
Les recourants font d'abord valoir que la présente cause fait apparaître l'existence d'une violation des principes fondamentaux de la procédure. Ils reprochent au Tribunal administratif fédéral d'avoir retenu que leur droit d'être entendus avait été respecté par l'Administration fédérale, alors que, pour établir les faits dans la décision finale du 20 novembre 2020 qui leur a été notifiée, elle s'était fondée sur des pièces qui ne faisaient pas partie de leur dossier et qu'ils n'avaient pas pu consulter, à savoir, en particulier, une déclaration des autorités fiscales allemandes faite dans le cadre d'une procédure d'assistance administrative parallèle impliquant la Banque, et le mandat de perquisition émis par le parquet de Bochum. La présente cause soulèverait de manière générale la question de savoir si, en cas de demande collective, le droit d'être entendu d'une personne doit s'étendre à des pièces produites dans d'autres procédures parallèles, mais liées à la même demande.
3.1. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif fédéral a constaté que les recourants avaient obtenu de l'Administration fédérale le dossier complet de la cause et que, si certaines pièces ne figuraient pas dans leur dossier (notamment celles qui viennent d'être mentionnées), c'était parce qu'elles ne faisaient pas partie de la procédure les concernant. Le Tribunal administratif fédéral a par ailleurs refusé d'ordonner à l'Administration fédérale qu'elle produise ces pièces, parce qu'elles ne faisaient pas partie de leur dossier et que, dans l'arrêt ATF 146 II 150 (cf. supra consid. 1.3), le Tribunal fédéral avait de toute manière admis le bien-fondé de la demande du 11 mai 2016 sur la base des élément de fait que l'autorité requérante y avait présentés (arrêt attaqué consid. 2.4).
3.2. Savoir si le Tribunal administratif fédéral viole le droit d'être entendu d'une partie en jugeant qu'elle ne peut exiger de consulter un document est une question qui concerne l'appréciation anticipée des preuves, dont le mécanisme est fixé par la jurisprudence établie (par exemple, ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les arrêts cités) et suppose l'appréciation des circonstances d'espèce. Refuser de donner aux recourants l'accès à des documents ne faisant pas partie de la procédure n'est pas de nature à faire apparaître le cas comme particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF. Les recourants ne démontrent du reste pas en quoi la présente cause ferait apparaître une violation importante et suffisamment crédible des principes fondamentaux de la procédure, puisqu'ils se limitent à opposer de manière appellatoire leur propre appréciation à celle des juges précédents. Par ailleurs, et quoi qu'ils en disent, on n'est pas en présence d'une question qui aurait une portée générale en lien avec les demandes collectives et qu'il serait nécessaire de trancher.
4.
Les recourants font ensuite valoir que la présente cause soulève une question juridique de principe, parce que, dès lors que l'état de fait de la présente cause diffère de celui de l'ATF 146 II 150, il est primordial que le Tribunal fédéral éclaircisse dans le cas d'espèce la portée de cet arrêt s'agissant de la problématique de la " fishing expedition " et de la violation du principe de la spécialité par l'autorité requérante.
Dans l'ATF 146 II 150, le Tribunal fédéral a exposé en détail les raisons pour lesquelles la demande d'assistance administrative du 11 mai 2016 ne représentait pas une pêche aux renseignements (ATF 146 II 150 consid. 6) et pour quels motifs il n'y avait pas d'indices concrets que la France avait l'intention de violer le principe de spécialité (ATF 146 II 150 consid. 7). Les recourants ne démontrent nullement que la présente cause soulèverait de nouvelles questions juridiques de principe sur ces points, étant rappelé que, ne leur en déplaise, l'état de fait qui est à la base de l'arrêt attaqué est le même que dans les affaires qui ont donné lieu à cet arrêt.
5.
Les recourants font finalement valoir que la présente cause soulève une question juridique de principe liée à la bonne foi de la France. Le point de savoir si la France s'est engagée ou non de manière générale vis-à-vis de la Suisse à ne pas exploiter des données bancaires volées aurait une grande importance pratique, parce que l'Administration fédérale est amenée à traiter de nombreuses demandes d'assistance administrative françaises, qui sont liées à des données volées.
L'allégation selon laquelle la France adresse à l'Administration fédérale de nombreuses demandes d'assistance administrative liées à des données bancaires volées n'est que pure conjecture, qui ne saurait justifier une entrée en matière (supra 2.2). S'agissant des données à l'origine de la demande concernant les recourants, soit celles qui ont été saisies par le parquet de Bochum, le Tribunal fédréal a du reste déjà constaté qu'elles avaient été obtenues par une procédure légale (cf. notamment arrêts 2C_1017/2021 du 22 décembre 2021 consid. 2.2; 2C_435/2021 du 2 juin 2021 consid. 3.2; 2C_320/2021 du 30 avril 2021 consid. 4.2). En outre, le Tribunal fédéral a déjà clarifié la portée du principe de la bonne foi en lien avec l'utilisation de données bancaires volées (ATF 143 II 224 consid. 6; arrêts 2C_141/2018 du 24 juillet 2020 consid. 6.2.2; 2C_648/2017 du 17 juillet 2018 consid. 3.3, in StE 2018 A 32 Nr. 31, traduit in RDAF 2019 II 499; 2C_1042/2016 du 12 juin 2018 consid. 5.3.1, in StE 2018 A 31.4 Nr. 25, RDAF 2019 II 331). Cette question a donc déjà été tranchée.
6.
Il découle de ce qui précède que le recours ne peut qu'être déclaré irrecevable selon la procédure applicable en vertu des art. 107 al. 3 et 109 al. 1 LTF, étant précisé que, comme l'arrêt attaqué émane du Tribunal administratif fédéral, la voie du recours constitutionnel subsidiaire ne saurait entrer en considération (art. 113 a contrario LTF).
Cette conséquence fait perdre tout objet à la demande d'effet suspensif, à supposer que les recourants aient eu un intérêt à demander son octroi, l'effet suspensif étant déjà prévu à l'art. 103 al. 2 let. d LTF (arrêts 2C_232/2022 du 5 avril 2022 consid. 3; arrêt 2C_53/2021 du 22 janvier 2021 consid. 5).
7.
Succombant, les recourants doivent supporter les frais de justice devant le Tribunal fédéral, à parts égales et solidairement (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours est irrecevable.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux.
 
3.
 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, à l'Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, et au Tribunal administratif fédéral, Cour VI.
 
Lausanne, le 12 juillet 2022
 
Au nom de la IIe Cour de droit public
 
du Tribunal fédéral suisse
 
La Présidente : F. Aubry Girardin
 
La Greffière : S. Vuadens