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BGer 9C_531/2021 vom 08.06.2022
 
Tribunal fédéral
 
Tribunale federale
 
Tribunal federal
 
[img]
 
 
9C_531/2021
 
 
Arrêt du 8 juin 2022
 
 
IIe Cour de droit social
 
Composition
 
M. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Bechaalany, Juge suppléante.
 
Greffier : M. Cretton.
 
 
Participants à la procédure
 
Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, rue des Gares 12, 1201 Genève,
 
recourant,
 
contre
 
A.________,
 
représenté par Me Thierry Sticher, avocat,
 
intimé.
 
Objet
 
Assurance-invalidité (évaluation de l'invalidité),
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 1er septembre 2021 (A/404/2019 - ATAS/900/2021).
 
 
Faits :
 
A.
A.________, né en 1964, travaillait comme concierge. En incapacité totale de travail depuis le 31 août 2015 en raison des séquelles d'une chute survenue le 26 février 2014, il a requis des prestations de l'assurance-invalidité le 20 janvier 2016.
Selon les renseignements récoltés par l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'office AI), en particulier un avis de la doctoresse B.________, spécialiste en médecine interne générale, l'assuré présentait des douleurs chroniques résultant d'une chute avec lésion méniscale du genou gauche ayant été opérée à trois reprises par méniscectomies partielles et ayant entraîné une incapacité totale de travail depuis le 31 août 2015; cette atteinte à la santé n'empêchait pas la reprise à mi-temps de l'activité habituelle dès le 1er juin 2016 (rapport du 10 octobre 2016). Selon des avis de médecins de différents Services du Département de chirurgie de l'Hôpital C.________ la persistance de gonalgies et l'apparition d'une gonarthrose avaient justifié la pose d'une prothèse le 13 septembre 2018 (rapports des 17, 28 septembre et 4 octobre 2018). Selon une appréciation de la doctoresse D.________, médecin du Service médical régional de l'office AI (SMR), une amélioration de la fonctionnalité du genou était attendue à la suite de la pose de la prothèse et devait permettre la récupération de la capacité totale de travail dans une activité adaptée depuis le 1er juin 2016 retenue dans les précédents avis du SMR (rapport du 1er décembre 2018).
L'administration a rejeté la demande (décision du 25 avril 2017 [recte: 17 décembre 2018]).
B.
A.________ a déféré cette décision à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève. Il a déposé à l'appui de son recours de nombreux documents médicaux, dont un nouvel avis de la doctoresse B.________. Celle-ci y faisait état d'une détérioration de la situation, probablement due à un débord de la prothèse du genou, à l'origine d'une incapacité totale de travail (certificat du 16 janvier 2019). L'office AI ayant admis l'évolution post-opératoire négative, la juridiction cantonale a ordonné une expertise et confié sa réalisation au docteur E.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur. Faisant état du status après les trois opérations consécutives à la lésion du ménisque, l'expert a retenu une gonarthrose en aggravation, une spondylarthrose lombaire, une décompensation douloureuse de la prothèse du genou, une sinistrose et un état dépressif réactionnel à un sevrage aux opiacés. Il a conclu à une incapacité totale de travail constante dès le 26 février 2014 (rapport du 1er mai 2020). Le docteur E.________ et les parties ont été auditionnés au cours de la procédure (procès-verbaux du 28 juin 2021).
Le tribunal cantonal a admis le recours, annulé la décision litigieuse et accordé à l'assuré une rente entière d'invalidité depuis le 1er août 2016 (arrêt du 1er septembre 2021).
C.
L'office AI forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt, dont il requiert l'annulation, concluant au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour instruction complémentaire et nouvelle décision.
A.________ conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
 
1.
L'office recourant se contente de prendre des conclusions cassatoires, alors que la nature réformatoire d'un recours en matière de droit public (cf. art. 107 al. 2 LTF) exige en principe des conclusions sur le fond du litige. Ce procédé est toutefois admis à titre exceptionnel lorsqu'en cas d'admission du recours, le Tribunal fédéral ne serait pas en mesure de statuer (ATF 137 II 313 consid. 1.3; 134 III 379 consid. 1.3). Or, tel est bien le cas en l'espèce. S'il venait à admettre la nécessité de procéder à des mesures supplémentaires d'instruction, le Tribunal fédéral serait tenu de renvoyer la cause à la juridiction cantonale et ne pourrait donc pas trancher le litige. Les autres conditions étant remplies, le recours formé par l'administration est dès lors recevable.
2.
Le recours en matière de droit public (au sens des art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit (circonscrit par les art. 95 et 96 LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par l'argumentation de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il statue sur la base des faits établis par cette dernière (art. 105 al. 1 LTF). Cependant, il peut rectifier les faits ou les compléter d'office s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant ne peut critiquer les faits que s'ils ont été constatés de façon manifestement inexacte ou contraire au droit et si la correction d'un tel vice peut influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
3.
Compte tenu des conclusions et motifs du recours, est seul litigieux le point de savoir si le tribunal cantonal était en droit de se fonder sur les conclusions du docteur E.________ (rapport et déclarations en audience) pour reconnaître le droit de l'intimé à une rente entière d'invalidité depuis le 1er août 2016.
 
Erwägung 4
 
4.1. Dans le cadre du "développement continu de l'AI", la LAI, le RAI et la LPGA - notamment - ont été modifiés avec effet au 1er janvier 2022 (RO 2021 705; FF 2017 2535). Compte tenu cependant du principe de droit intertemporel prescrivant l'application des dispositions légales qui étaient en vigueur lorsque les faits juridiquement déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1), le droit applicable reste, en l'occurrence, celui qui était en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021 dès lors que la décision litigieuse a été rendue avant cette date.
4.2. L'arrêt attaqué cite les normes et la jurisprudence nécessaires à la résolution du litige, notamment celles concernant le rôle des médecins en matière d'assurance-invalidité (ATF 132 V 93 consid. 4; 125 V 256 consid. 4), le principe de la libre appréciation des preuves (art. 61 let. c LPGA) et la valeur probante des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1; 125 V 351 consid. 3), plus particulièrement des rapports d'expertises judiciaires (ATF 143 V 269 consid. 6.2.3.2; 135 V 465 consid. 4.4; 125 V 351 consid. 3b/aa), de sorte qu'il suffit d'y renvoyer.
5.
Répondant à des critiques de l'office recourant, la juridiction cantonale a d'abord retenu que le rapport ainsi que les déclarations de l'expert lors de son audition formaient une expertise qui avait une pleine valeur probante. Elle a relevé à cet égard que certaines lacunes du rapport d'expertise relatives à la description des limitations fonctionnelles et à une journée-type de l'intimé avaient été palliées par les déclarations de l'expert et de l'assuré en audience. Elle a encore considéré que s'il n'appartenait certes pas au docteur E.________ de s'exprimer sur l'aspect psychiatrique du cas, son appréciation de la capacité de travail en audience était strictement orthopédique et ne tenait aucun compte des pathologies psychiques. Elle a dès lors inféré de toutes les constatations effectuées par l'expert que, dans la mesure où les affections totalement incapacitantes (dans l'activité habituelle) depuis le 31 août 2015 n'étaient pas encore stabilisées, il convenait de reconnaître le droit de l'assuré à une rente entière dès le 1er août 2016.
 
Erwägung 6
 
6.1. L'office recourant reproche uniquement aux premiers juges d'avoir arbitrairement apprécié le rapport d'expertise, en lui reconnaissant une pleine valeur probante. Il soutient que la description des limitations fonctionnelles et d'une journée-type de l'expertisé sont des éléments essentiels d'un rapport d'expertise dont le simple défaut infirme la valeur probante dès lors qu'il empêche d'évaluer les handicaps dans la vie courante et leurs effets dans l'exercice d'une activité lucrative. Il allègue encore que l'expert a dépassé son champ de compétence en tenant compte de pathologies psychiques dans son appréciation de la capacité de travail. Il conteste par ailleurs que les déclarations du docteur E.________ et de l'assuré soient suffisantes pour corriger les défauts du rapport d'expertise. Il prétend que ces déclarations ne sont pas des précisions mais de nouvelles déterminations et conclusions sur des points essentiels. Il considère que celles-ci ne peuvent être suivies dès lors que la capacité de travail retenue par l'expert en audience (50 % avec diminution de rendement de 50 %) ne semble pas compatible avec les ressources préservées décrites par le SMR (capacité à se déplacer de façon indépendante et en voiture, à se rendre au centre commercial et au jardin, à regarder la télévision et à maintenir des relations avec ses enfants) et que l'appréciation du docteur E.________ tient compte d'un traitement médicamenteux dont le dosage retenu est erroné.
6.2. Cette argumentation est infondée. Le point de savoir si, en soi, le défaut de description des limitations fonctionnelles ou du déroulement d'une journée-type de l'assuré doit conduire à la négation de la valeur probante du rapport d'expertise peut rester ouvert dans la mesure où de tels éléments ont bien été décrits en l'espèce. L'expert et l'assuré ont effectivement apporté des précisions à cet égard lors de leurs auditions, ce que l'office recourant ne conteste pas.
Il en va de même du point de savoir si le docteur E.________ a dépassé son champ de compétence en prenant en considération dans son rapport des troubles psychiques dans l'appréciation de la capacité de travail alors qu'il ne l'a pas fait lors de son audition. L'administration ne motive pas son allégation générale à ce propos.
S'agissant des déclarations complémentaires du docteur E.________ en audience, on peine à discerner dans la motivation du recours les raisons pour lesquelles un complément d'expertise oral - dûment verbalisé - serait interdit ou aurait moins de valeur qu'un complément d'expertise écrit, ainsi que les raisons pour lesquelles un expert ne pourrait pas préciser ses conclusions en fonction des questions qui lui sont directement posées par le juge. Le fait que l'expert est en l'occurrence parvenu lors de son audition à préciser ses conclusions quant à la capacité résiduelle de travail ne constitue par ailleurs pas une incohérence mais démontre qu'il était à même de déterminer précisément la part d'influence des troubles somatiques sur la capacité de travail.
Quant aux points de savoir s'il existe une incompatibilité entre la capacité résiduelle retenue par le docteur E.________ et les ressources dont disposerait l'assuré ou si une éventuelle erreur de l'expert concernant le dosage du traitement médicamenteux a influencé l'évaluation de la capacité de travail, ils ne sont pas pertinents. La juridiction cantonale a constaté qu'en l'absence de stabilisation de l'état de santé de l'intimé, seule l'incapacité de travail dans l'activité habituelle était déterminante, ce que l'office recourant ne conteste pas. Son argumentation relative à la capacité résiduelle de travail dans une activité adaptée n'a pas à être examinée plus avant.
L'office recourant n'a en définitive avancé aucun argument pertinent susceptible de mettre en doute la valeur probante de l'expertise judiciaire complétée par l'audition de son auteur. Son recours doit dès lors être rejeté.
7.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires et les dépens doivent être mis à la charge de l'office recourant (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF).
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
 
1.
 
Le recours est rejeté.
 
2.
 
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.
 
3.
 
Le recourant versera à l'intimé la somme de 2800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
 
4.
 
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
 
Lucerne, le 8 juin 2022
 
Au nom de la IIe Cour de droit social
 
du Tribunal fédéral suisse
 
Le Président : Parrino
 
Le Greffier : Cretton